BGE 115 II 427 |
76. Extrait de l'arrêt de la IIe Cour civile du 21 décembre 1989 dans la cause dame M. contre M. (recours en réforme) |
Regeste |
1. Ehescheidung; Zuweisung einer im Miteigentum der Ehegatten stehenden Liegenschaft; anwendbare Bestimmungen. |
2. Dauer der Leistungspflicht bei einer Rente nach Art. 151 Abs. 1 ZGB. |
Die Rente muss für die Zeit zugesprochen werden, welche die geschiedene Ehefrau für die Wiedereingliederung in das Erwerbsleben voraussichtlich benötigen wird; wo die geschiedene Ehefrau bereits wieder in das Erwerbsleben eingegliedert ist, steht ihr die Rente jedenfalls für so lange zu, als die ihr zugeteilten Kinder einer umfassenden Fürsorge und Pflege bedürfen, d.h. in der Regel bis zum 16. Altersjahr des jüngsten Kindes (Erw. 5). |
Sachverhalt |
A.- Les époux M. se sont mariés en 1973. Ils ont eu deux enfants, nés en 1975 et en 1977. Ils ont acquis, en 1983, un immeuble, dont le financement a été assuré par un prêt bancaire, par un prêt du père du mari ainsi que par remploi de biens réservés de l'épouse constitués par le produit de son travail. Par la suite, de nombreux travaux de rénovation ont été effectués. Les époux sont copropriétaires de l'immeuble, chacun pour une moitié, selon inscription au registre foncier.
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B.- a) Le 10 octobre 1985, dame M. a ouvert action en divorce. Elle concluait notamment au versement d'une pension mensuelle, selon l'art. 152 CC, de 500 francs pendant dix ans ainsi qu'à la liquidation du régime matrimonial en ce sens qu'elle soit déclarée seule propriétaire de l'immeuble conjugal, moyennant versement à son mari d'une somme d'argent au titre de part de liquidation du régime matrimonial.
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M. a conclu au divorce et, notamment, à la liquidation du régime matrimonial, en ce sens que le solde du prix de vente de l'immeuble conjugal, après remboursement de la dette hypothécaire et du prêt accordé par son père, soit réparti à raison de 2/3 en sa faveur et de 1/3 en faveur de son épouse.
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Par jugement du 22 septembre 1988, le tribunal a prononcé le divorce. Il n'a pas alloué de pension à l'épouse. Il a liquidé le régime matrimonial comme suit: l'épouse s'est vu attribuer ses apports et le mari les siens; l'immeuble conjugal a été attribué au mari, qui devait verser une somme d'argent à son épouse à titre de part au bénéfice de l'union conjugale ainsi qu'à titre de restitution de biens réservés.
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b) Dame M. a recouru contre ce jugement à la Chambre des recours du Tribunal cantonal du canton de Vaud. Elle concluait au versement d'une rente, subsidiairement d'une pension, de 500 francs par mois pendant dix ans. Elle demandait en outre, à titre principal, que l'immeuble conjugal fût attribué à elle-même, qui verserait à son mari une somme d'argent représentant la part de celui-ci dans la liquidation du régime matrimonial; subsidiairement, l'immeuble devait être vendu aux enchères publiques, le solde du prix de vente, après remboursement de la dette hypothécaire et du prêt accordé par le père de son mari, étant réparti à raison d'une moitié à chacun des époux; très subsidiairement, ce solde devait être réparti à raison de 2/3 en faveur du mari et de 1/3 en sa faveur. M. a conclu au rejet du recours.
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Par arrêt du 27 avril 1989, la Chambre a partiellement admis le recours; elle a alloué à dame M. une rente, selon l'art. 151 CC, de 500 francs par mois jusqu'au 31 janvier 1995 et confirmé le jugement attaqué pour le surplus.
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C.- Dame M. exerce un recours en réforme au Tribunal fédéral. Elle reprend notamment ses conclusions subsidiaires d'instance cantonale tendant à la vente de l'immeuble conjugal aux enchères publiques et à la répartition du solde à raison d'une moitié à chacun des époux.
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M. exerce un recours en réforme joint. Il conclut notamment à la suppression de la rente allouée à son épouse, subsidiairement à la réduction de sa durée au 31 janvier 1993.
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Extrait des considérants: |
a) En vertu de l'art. 9d al. 3 Tit.fin. CC, si un régime matrimonial est dissous par suite de l'admission d'une demande formée avant l'entrée en vigueur de la loi nouvelle, la liquidation a lieu conformément à la loi ancienne. La recourante ayant ouvert action le 10 octobre 1985, c'est avec raison que l'autorité cantonale a considéré que l'ancien droit était applicable, ce qui exclut, notamment, l'application de l'actuel art. 205 al. 2 CC.
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b) L'art. 195 al. 2 aCC dispose que le mari est propriétaire de ses apports et de tous les autres biens matrimoniaux qui ne sont pas des apports de la femme. Selon la jurisprudence, tout ce qui ne remplit pas les conditions strictes posées par la loi pour l'appartenance à une autre masse appartient plutôt aux acquêts; lorsqu'un immeuble a été acquis pendant le mariage, à titre onéreux, par la femme et inscrit à son nom au registre foncier, il peut en résulter, pendant le mariage, une disjonction entre la qualification matrimoniale de l'immeuble et son statut de droit réel; c'est pourquoi la jurisprudence a rangé dans les apports pendant le mariage un immeuble ainsi acquis; toutefois, à la dissolution de l'union des biens, il est pris en compte pour le partage du bénéfice comme s'il appartenait aux acquêts (ATF 112 II 476 /477 consid. 3b). Dans cet arrêt, le Tribunal fédéral ne s'est toutefois pas prononcé sur l'attribution de l'immeuble, une fois le régime matrimonial liquidé, notamment sur la question de savoir s'il y avait alors lieu de tenir compte du statut réel de l'immeuble.
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e) (...) Dans l'arrêt précité, le Tribunal fédéral a certes réservé la solution de la question qui ne lui était pas posée (p. 476, dernier alinéa). Mais il a rappelé que la qualification d'acquêts dans la liquidation du régime provoquait pendant l'union une disjonction entre cette qualification d'un immeuble et son statut réel; c'est pourquoi, dans l' ATF 97 II 289 ss, il avait rangé - par une extension de la notion - dans les apports pendant le mariage un immeuble acquis à titre onéreux par la femme, qui reste sa propriété ("Danach bleibt zwar die Zuordnung des entsprechenden Vermögenswertes zum Eigentum der Ehefrau bestehen: p. 476 al. 2 et 477 lit. c). Mais déjà dans l'ATF 74 II 147/48, où il s'agissait de la plus-value acquise par un immeuble acheté par la femme, il l'imputait sur la part du bénéfice revenant au propriétaire, à l'acquéreur, en l'occurrence l'épouse qui conservait l'immeuble ["dem Eigentümer", "dem Erwerber (hier die Ehefrau, die diese Liegenschaft behält)"]. Dans un arrêt rendu le 29 novembre 1951 en la cause Waltisperger (RNRF 1954, p. 319 ss), il a confirmé que l'inscription de la femme au registre foncier comme propriétaire fait présumer son droit (art. 937 CC).
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Cette prédominance du statut réel - notamment par la qualification d'apport - hors le calcul du bénéfice de l'union conjugale est la solution classique en doctrine (cf. PIOTET, JT 1987 I 606/607, RNRF 1982, p. 257 ss); seul est critiqué le traitement de l'acquisition onéreuse de la femme dans la liquidation du régime et pour ledit calcul. Au reste, en cas de divorce, chacun des époux reprend son patrimoine personnel, "quel qu'ait été le régime matrimonial" (art. 154 al. 1 aCC; cf. aussi art. 189 al. 1 aCC).
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HAUSHERR (Grundeigentum und Ehescheidung aus zivilrechtlicher Sicht, in RNRF 1984, p. 265 ss) explique d'abord comment, pour une acquisition des fiancés en vue du mariage, mais sans propriété commune, l'acquisition de l'immeuble se fait en accord tant avec les droits réels qu'avec les règles du régime matrimonial (p. 266-268 ch. 3 let. a). Puis il traite la difficulté née de la disjonction des statuts lorsque l'immeuble est acquis pendant le mariage (p. 268-270 ch. 4 let. b), en posant deux principes appliqués au cas où la femme est inscrite au registre foncier. Dans les rapports juridiques avec des tiers, mais aussi entre époux, la propriété de la femme telle qu'elle résulte du registre foncier doit être reconnue, la réglementation réelle n'étant pas remise en cause par le droit des régimes matrimoniaux. Dans la liquidation du régime matrimonial, en revanche, l'immeuble doit être compté dans les acquêts dans la mesure où des plus-values ou des moins-values sont intervenues. La femme n'est donc pas renvoyée seulement à une participation, mais peut, au contraire, se réclamer de l'inscription au registre foncier de la propriété.
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L'espèce présente deux particularités. Il y a d'abord lieu à récompense pour l'emploi de biens réservés de la femme (11'950 francs): c'est une question de régime matrimonial, de caractère obligatoire, comme la participation au bénéfice. En outre, l'immeuble a été acquis par les époux en copropriété, par parts égales. Un lien social s'ajoutait à leur union, lien qu'il faut dénouer (HAUSHEER, op.cit., p. 269/270 ch. 5). Les art. 650 et 651 CC sont donc applicables. Dans la mesure où la recourante a pris, dans sa demande en justice du 10 octobre 1985, des conclusions tendant à ce qu'elle soit déclarée seule propriétaire de l'immeuble conjugal, elle a ainsi conclu au partage de la copropriété. Pour avoir considéré que les dispositions sur ce partage n'étaient pas applicables, l'autorité cantonale n'a pas statué sur ces conclusions. Il y a dès lors lieu de lui renvoyer la cause pour qu'elle se prononce à ce sujet. Elle examinera si les conditions prévues par l'art. 650 CC sont réalisées; le cas échéant, elle se prononcera sur le mode de partage, conformément à l'art. 651 CC; au besoin, elle ordonnera la vente de l'immeuble avec répartition subséquente du prix.
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5. A titre subsidiaire, l'intimé critique la durée de la rente qu'il a été astreint à verser à son épouse jusqu'au 31 janvier 1995, à savoir jusqu'à ce que les enfants aient respectivement 20 et 18 ans. Il se réfère à l' ATF 111 II 305 ss et estime qu'il n'y a pas de motif que la rente soit allouée au-delà du 1er janvier 1993, date à laquelle le plus jeune de ses enfants aura 16 ans. Cette limitation se justifie d'autant plus que son épouse n'a que 40 ans, est réinsérée professionnellement et jouit d'une bonne santé; en outre les enfants n'ont plus besoin de sa présence constante.
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Selon la jurisprudence, pour fixer la durée de la rente, le juge doit tenir compte de la durée du mariage, de la gravité de la faute de l'époux débirentier, de l'âge et de l'état de santé de l'époux crédirentier, sa formation, sa situation financière et la situation économique en général, de même que la possibilité pour cet époux de retrouver une activité lucrative totale ou partielle. Mais la rente doit être assurée à tout le moins aussi longtemps que les enfants attribués à la mère ont besoin d'une éducation et de soins étendus - à savoir, généralement, jusqu'à la seizième année du plus jeune des enfants - et pour la durée présumable de la réinsertion professionnelle de l'épouse (ATF 111 II 306 et la jurisprudence citée).
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L'autorité cantonale ne s'est pas prononcée clairement sur les motifs qui l'ont conduite à allouer la rente jusqu'à ce que les enfants aient respectivement 20 et 18 ans. Il semble toutefois ressortir de son arrêt que seuls les âges ont joué un rôle. De ce point de vue, l'arrêt attaqué est certes critiquable. L'autorité cantonale eût dû examiner, au regard de l'ensemble des critères posés par la jurisprudence, la durée prévisible de la réinsertion professionnelle de l'épouse et fixer la durée de la rente en conséquence, cette dernière devant néanmoins être assurée, même si l'épouse est réinsérée professionnellement, aussi longtemps que les enfants qui ont été attribués à la mère ont besoin d'une éducation et de soins étendus, à savoir, généralement, jusqu'à la seizième année du plus jeune des enfants. L'intimé méconnaît donc le sens de la jurisprudence lorsqu'il estime qu'il ne se justifie pas d'allouer la rente au-delà de la date à laquelle le plus jeune de ses enfants aura 16 ans, sans égard à la durée de la réinsertion professionnelle de son épouse.
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En l'espèce, le mariage a duré plus de 15 ans et l'échec de l'union est imputable à la faute prépondérante du mari. L'épouse, âgée de 40 ans, bénéficie d'une formation de nurse. Elle est certes déjà partiellement réinsérée professionnellement et l'on peut attendre d'elle qu'elle augmente le nombre de ses veilles. Sa capacité de gain n'est cependant que de l'ordre de 2'500 francs par mois selon les constatations de l'arrêt déféré. En outre, même si ses enfants n'ont plus besoin de sa présence constante, ils restent à sa charge. L'allocation d'une rente, de 500 francs par mois, jusqu'au 31 janvier 1995 apparaît dès lors nécessaire pour lui permettre de se réinsérer complètement sur le plan professionnel. A cette date, les enfants auront plus de seize ans, de sorte que la question d'une éventuelle allocation de la rente au-delà du 31 janvier 1995 ne se pose pas en l'espèce. Le moyen doit donc être rejeté.
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