BGE 84 III 37
 
12. Arrêt du 7 février 1958 dans la cause Z.
 
Regeste
Pfändung des Lohnes eines Handelsreisenden.
 
Sachverhalt
A.- Dans différentes poursuites dirigées contre X, une retenue de salaire visant "toutes les sommes excédant 1100 fr. par mois sur les gains du débiteur" a été ordonnée le 2 décembre 1957. Selon les constatations de l'Office des poursuites, X touche, en qualité de voyageur de la maison Y SA, un salaire mensuel brut de 1200 fr. en moyenne, constitué exclusivement par des commissions. Il ne reçoit de son employeur ni salaire fixe ni indemnité pour ses frais. L'Office a tenu compte des frais de voyage dans le calcul du minimum vital qu'il a fixé à 1100 fr. au total.
B.- Par décision du 17 janvier 1958, l'Autorité cantonale de surveillance a rejeté la plainte du créancier Z tendante à ce que la prétention de X contre son employeur en remboursement des frais de voyage (art. 13 et 14 LEVC) fût saisie comme créance litigieuse. Elle a considéré que les autorités de poursuite devaient se baser sur le salaire effectif du débiteur et qu'elles n'avaient pas à examiner si le contrat de travail était en contradiction avec des dispositions légales impératives.
C.- Contre cette décision, le créancier Z a recouru au Tribunal fédéral concluant au renvoi de l'affaire aux autorités cantonales de poursuite pour qu'il fût procédé "à la saisie d'une créance litigieuse du débiteur contre son employeur..., créance représentant les frais de déplacement... et de voiture".
 
Considérant en droit:
La saisie d'un salaire litigieux doit être ordonnée lorsque le salaire touché par le débiteur n'est pas établi, soit que des indications suffisantes fassent défaut, soit que le créancier prétende que les renseignements donnés par le débiteur et l'employeur sont inexacts ou que le contrat de travail produit est simulé, etc. (formule obligatoire no 11; RO 50 III 120, 63 III 108, 65 III 68). D'autre part, en cas de retenue sur le salaire d'un montant déterminé ou déterminable dépassant le minimum vital, il faut se baser sur le gain réel du débiteur et non sur l'allégation que celui-ci pourrait et devrait, d'après la loi, recevoir un salaire net supérieur à celui qu'il touche. Toutefois, lorsque cette affirmation n'est pas manifestement dénuée de fondement, les autorités de poursuite ne peuvent pas d'emblée refuser de la prendre en considération. Elles doivent en tenir compte quand le créancier, comme c'est le cas en l'espèce, fait valoir que le contrat de travail viole des dispositions impératives de la loi sur les conditions d'engagement des voyageurs de commerce. L'Office des poursuites est tenu au moins, en pareil cas, de demander à l'employeur si et dans quelle mesure il serait prêt à observer les règles de la loi, si un montant supérieur à celui dont la retenue était envisagée pourrait alors être saisi, et de procéder, le cas échéant, contre la volonté de l'employeur, à la saisie d'une prétention litigieuse, d'office ou à la requête du créancier (RO 75 III 97; cf. également 50 III 121). Contrairement à l'opinion exprimée par l'Office des poursuites dans les observations sur la plainte qu'il a adressées à l'autorité cantonale, on ne peut considérer d'emblée que, si l'employeur payait les frais de voyage, ainsi que les art. 13 et 14 LEVC l'y obligent, les commissions s'en trouveraient diminuées d'autant, en sorte que le gain net resterait en définitive le même. C'est au juge exclusivement qu'il appartient de décider, en cas de saisie et de réalisation de la créance litigieuse en remboursement des frais, si et dans quelle mesure une telle compensation est admissible et si elle l'est en outre rétroactivement.
Par ces motifs, la Chambre des poursuites et des faillites prononce:
Le recours est admis, la décision attaquée est annulée et l'affaire est renvoyée à l'Office des poursuites de Genève pour qu'il procède dans le sens des considérants.