BGE 91 III 104
 
20. Arrêt du 21 décembre 1965 dans la cause Humbert.
 
Regeste
Stundung der Banken und Sparkassen. Art. 29 ff. BankG.
2. Zu welchen Massnahmen sind die Kommissäre bei der Bankenstundung berechtigt, um die der Bank zustehenden Verantwortlichkeitsansprüche zu wahren? Unzulässig ist ein "verschleierter Arrest". - Art. 40-42 BankG, 54 VV. (Erw. 2).
3. Dürfen die Kommissäre gegenüber einem Verwalter der Bank, welcher als fiduziarischer Eigentümer Wertpapiere für Rechnung eines seiner Klienten hinterlegt hatte, sich auf Verrechnung (Art. 120 OR), auf ein Retentionsrecht (Art. 895 ZGB) oder auf ein Pfandrecht (Art. 884 ff. ZGB) berufen, das sich aus den allgemeinen Geschäftsbedingungen der Bank oder aus deren Reglement über die Aufbewahrung von Wertschriften ergebe? Welches ist die Befugnis des ordentlichen Richters einer- und der Aufsichtsbehörden anderseits zur Prüfung dieser Fragen? (Erw. 3-6).
 
Sachverhalt
A.- Le 11 mai 1965, la Cour de justice civile du canton de Genève a accordé à la Banque genevoise de commerce et de crédit (en abrégé: la banque), en application de l'art. 29 de la loi fédérale sur les banques et les caisses d'épargne (LB), un sursis d'un an dès le 26 avril 1965. Elle a nommé cinq commissaires chargés notamment d'élucider la question des responsabilités. Les commissaires ont décidé de bloquer "par mesure conservatoire" dès le 31 août 1965 les avoirs de toute nature au nom des anciens ou actuels administrateurs et membres de la direction de la banque.
Le 26 août 1965, l'avocat Jean Humbert, à Genève, président honoraire de la banque depuis 1960 et membre de son conseil d'administration depuis 1938, a demandé que son dossier de titres fût transféré dans un autre établissement bancaire. Le 7 septembre, il sollicita en outre le déblocage d'un autre dossier de titres no D 66778/02, établi à son nom, mais désigné comme "Compte Gérance", en précisant que les titres déposés dans ce dossier appartenaient à une de ses clientes, domiciliée en France.
La banque lui répondit que le blocage était maintenu pour les motifs suivants: "Il apparaît ... que vous êtes débiteur d'un montant supérieur aux sommes que représentent vos comptes et avoirs. La créance de la banque résulte des art. 754 CO et 41 LB, lesquels visent vos actes de gestion, en particulier, votre participation au syndicat qui a souscrit l'augmentation du capital social. Nous devons donc exciper de compensation..."
B.- Me Humbert saisit l'autorité de sursis d'un recours tendant à l'annulation de la décision de blocage du dossier de gérance no 66778/02, établi à son nom. Statuant le 19 novembre 1965, la Première Section de la Cour de justice de Genève débouta le recourant, en l'état, de toutes ses conclusions. Elle considéra que la banque était au bénéfice d'un droit de gage ou de rétention opposable tant au recourant lui-même qu'à sa cliente, propriétaire fiduciant des titres déposés.
C.- Contre cet arrêt, Me Humbert recourt au Tribunal fédéral. Il conclut derechef à l'annulation de la décision de blocage du dossier "Me Jean Humbert gérance" no 66778/02. Il requiert en outre que la propriétaire de ce dossier, soit pour elle son mandataire, soit autorisée à en prendre légitime et entière possession.
 
Considérant en droit:
Les mesures en question ne sauraient toutefois dépasser l'exercice des facultés que le droit civil confère aux organes de la banque à laquelle le sursis a été accordé. Il s'agira par exemple d'invoquer la compensation, d'exercer un droit de gage ou de rétention. Le commissaire pourrait aussi, le cas échéant, requérir des mesures conservatoires, notamment un séquestre (TH. HOLENSTEIN, Das Bankensanierungsrecht..., Festgabe für den schweizerischen Juristentag 1944 in St. Gallen, p. 41 ss., 49). En revanche, il ne saurait se substituer au juge et décider de son propre chef de bloquer, à titre provisoire, tous les avoirs des administrateurs actuels ou anciens. Seule l'autorité compétente (art. 23 ch. 1 LP) a le droit d'ordonner le séquestre des biens du débiteur, dans les conditions fixées par la loi (art. 271 ss. LP). Et le juge lui-même ne saurait autoriser un séquestre déguisé en vue de garantir une créance éventuelle en dommagesintérêts qui n'aurait aucun rapport avec les biens séquestrés (RO 41 I 204 consid. 2, 78 II 92, 85 II 196 consid. 2, 86 II 295 consid. 2).
Selon la jurisprudence, la convention de fiducie oblige le fiduciaire à conformer son activité, dans l'exercice du droit qui lui est transféré, au but assigné par le fiduciant. Elle produit, entre les parties qui la concluent, les effets du mandat ou d'un contrat similaire et détermine dans quelle mesure le fiduciaire est lié à des instructions ou agit de manière indépendante. A l'égard des tiers, le fiduciaire a la faculté de disposer de la chose dont il est propriétaire (RO 71 II 99, 78 II 451 consid. 3, 85 II 99 ss.). Il peut dès lors aliéner cette chose, voire la grever d'un droit réel ou personnel, sous réserve des dommages-intérêts qu'il devrait payer au fiduciant s'il viole ses obligations envers celui-ci.
En l'espèce, on peut se dispenser d'examiner les moyens que le recourant prétend tirer de ses rapports avec sa cliente. De même, il n'est pas nécessaire de se prononcer sur les droits qui résùlteraient de l'art. 401 CO. Les actions découlant de cette disposition légale n'appartiendraient en effet qu'à la fiduciante. Seules les relations du recourant, propriétaire fiduciaire, avec la banque, dépositaire des titres, doivent être considérées.
4. Il ne semble pas que la banque, respectivement les commissaires, soient fondés à invoquer, en l'espèce, un droit de rétention au sens des art. 895 ss. CC. D'une part, il n'y a pas de rapport de connexité entre la créance éventuelle de la banque en dommages-intérêts contre le recourant pris comme administrateur et le dépôt de titres que celui-ci a effectué pour le compte d'une cliente. D'autre part, le recourant n'est pas un commerçant au sens de l'art. 895 al. 2 CC (cf. RO 48 II 5/6).
6. La décision attaquée constate que les conditions générales de la banque et son règlement relatif au dépôt de papiersvaleurs lui réservent expressément, pour garantir ses prétentions de toute nature, un droit de gage sur toutes les valeurs "reposant à un titre quelconque au nom du client". Elle ajoute qu'en sa qualité d'administrateur, le recourant connaissait et approuvait ces dispositions conventionnelles. Propriétaire fiduciaire, il avait le droit de déposer les titres, et partant de se soumettre aux conditions générales de l'établissement. On ne saurait donc nier d'emblée l'existence du droit de gage sur les titres litigieux parce que la banque n'aurait pas été de bonne foi (cf. art. 884 al. 2 CC et RO 83 II 133). Du reste, le point de savoir si le tiers doit être de bonne foi pour acquérir un droit de gage sur un objet qui lui est remis en nantissement par le propriétaire fiduciaire est controversé (cf. OFTINGER, Das Fahrnispfand, Systematischer Teil, n. 251 p. 73).
Le recourant ne conteste pas l'existence des conditions générales et du règlement de la banque. Il estime toutefois que ces dispositions conventionnelles ne sont pas applicables en l'espèce. Il prétend qu'il ne les a pas acceptées; elles lui auraient même échappé lors de la création du dossier de titres litigieux; de toute façon, vu leur sévérité, de pareilles clauses ne seraient opposables qu'à un déposant qui les aurait acceptées expressément, en les contresignant.
Les objections du recourant se rapportent à l'existence du droit de gage dans le cas particulier. Elles doivent être soumises au juge ordinaire, par la voie d'une action en revendication ou en restitution des titres déposés. A moins que la situation ne soit tout à fait claire et que le droit de gage invoqué n'apparaisse sans discussion comme inexistant - ce qui n'est pas le cas dans l'espèce - les autorités de surveillance saisies d'un recours contre la décision du commissaire au sursis bancaire ne sauraient trancher elles-mêmes un litige qui relève du droit matériel (cf. par analogie, concernant l'administration de la faillite appelée à prendre une décision sur les revendications formées par des tiers, conformément à l'art. 242 LP: RO 87 III 19/20).
Il s'ensuit que la décision cantonale confirmant le refus opposé au recourant par les commissaires n'est pas illégale au sens de l'art. 30 al. 3 LB, et partant qu'elle doit être maintenue
Par ces motifs, la Chambre des poursuites et des faillites:
Rejette le recours.