28. Extrait de l'arrêt de la IIe Cour civile du 13 décembre 1984 dans la cause Leclerc & Cie en liquidation concordataire contre X. (recours en réforme)
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Regeste
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Nachlassvertrag (einer Bank) mit Vermögensabtretung.
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Sachverhalt
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A.- La Banque Leclerc & Cie a été mise au bénéfice d'un sursis concordataire par décision de la Cour de justice du canton de Genève du 13 juillet 1977, publiée le 20 juillet 1977.
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Le concordat par abandon d'actif proposé par la banque à ses créanciers a été accepté. Il est devenu définitif le 31 mai 1979.
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X. était titulaire d'un compte libellé en dollars américains USA auprès de la banque. Il a été admis à l'état de collocation pour le montant de 93'609,74 US $ , que les liquidateurs ont converti en francs suisses pour la somme de 161'476 francs 80 au taux de change du dollar américain de 1 franc 725, en vigueur le 31 mai 1979.
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X. n'a pas contesté le montant en dollars de sa créance, mais il a soutenu que la date déterminante pour la conversion en francs suisses des créances libellées en monnaie étrangère dans le concordat par abandon d'actif d'une banque est la date de la fermeture des guichets, soit en l'espèce le 6 mai 1977. A cette date, le taux de change était de 2 francs 5215 pour 1 dollar, de sorte que, selon lui, la créance s'élevait à 236'036 francs 95.
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B.- Saisie d'une action de X. tendant à faire porter à l'état de collocation une créance de 236'036 francs 95, la Cour de justice a prononcé, par arrêt du 23 mars 1984, que la créance litigieuse devait être colloquée au taux de change en vigueur le 20 juillet 1977, date de la publication du sursis concordataire, et elle a ordonné la rectification de l'état de collocation dans ce sens.
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C.- Leclerc & Cie en liquidation concordataire recourt en réforme au Tribunal fédéral. Elle demande que la décision de la Cour de justice soit annulée et que la collocation de la créance de X. pour un montant de 161 476 francs 80, correspondant à 93'609,74 US $ au taux de change en vigueur le 31 mai 1979, soit maintenue.
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L'intimé conclut au rejet du recours et à la confirmation de l'arrêt attaqué.
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Extrait des considérants:
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Le Tribunal fédéral a constaté, d'autre part, que la loi ne règle ni la date ni le taux de conversion des créances exprimées en monnaie étrangère. L'autorité chargée de statuer sur la conversion doit donc, à défaut de coutume, faire oeuvre de législateur, en créant une norme de caractère général et abstrait, et en évitant de se laisser guider par des considérations d'équité ou d'opportunité propres au cas à juger (ATF 105 III 95 consid. 2a et les références).
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L'art. 1er al. 3 CC invite le juge à s'inspirer des solutions consacrées par la doctrine et la jurisprudence.
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En matière de faillite, l'exigibilité des dettes du failli est fixée au jour de l'ouverture de la faillite (art. 208 al. 1 LP). C'est à ce jour que la conversion a lieu, par application analogique de l'art. 211 al. 1 LP (cf. JAEGER, n. 1 et 2 ad art. 211 LP).
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a) S'agissant de la procédure du concordat par abandon d'actif, la majorité de la doctrine préconise l'application par analogie des art. 208 et 209 LP (lequel concerne le cours des intérêts).
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Elle assimile la décision d'homologation du concordat au prononcé de faillite: c'est à la date de l'homologation que les créances deviennent exigibles et que la conversion doit avoir lieu (PICCARD, Nachlassvertrag mit Vermögensabtretung, RDS 1916 p. 37; DOKA, Der Nachlassvertrag mit Vermögensabtretung, RDS 1926 p. 162-164; RATHGEB, Le concordat par abandon d'actif, thèse Lausanne 1932, p. 130, qui cite un arrêt du Tribunal d'appel du canton du Tessin, du 23 février 1917; GERSBACH, Der Nachlassvertrag ausser Konkurs nach dem schweizerischen Bundesgesetz über die Banken und Sparkassen und seinen Ausführungserlassen, thèse Zurich 1937, p. 115; PAPA, Die analoge Anwendung der Konkursnormen auf den Nachlassvertrag mit Vermögensabtretung, thèse Berne 1941, p. 101-103; SCHODER, Der Nachlassvertrag mit Vermögensabtretung, RJB 1952 p. 422; LUDWIG, Der Nachlassvertrag mit Vermögensabtretung (Liquidationsvergleich), thèse Berne 1970, p. 91; DALLÈVES, Des effets du concordat sur les contrats du débiteur, La société anonyme suisse, 1982 p. 119; AMONN, Grundriss des Schuldbetreibungs- und Konkursrechts, 3 éd., p. 453, § 55, n. 11; contra: PORTMANN, Die Verzinsung der Kurrentforderungen in aktiv saldierenden Konkurs- und Nachlassverfahren mit Vermögensabtretung, BlSchK 1961 p. 39).
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La plupart des auteurs se bornent à affirmer le principe et à invoquer l'analogie entre la faillite et le concordat par abandon d'actif, qui entraîne, lui aussi, une liquidation générale du patrimoine du débiteur. Plus explicite, GERSBACH considère comme déterminant le moment où se forme la masse destinée à la liquidation: c'est l'ouverture de la faillite dans la procédure de faillite; c'est la publication de l'homologation du concordat dans la procédure du concordat par abandon d'actif, car, pendant la durée du sursis concordataire, le débiteur conserve, en principe, son pouvoir de disposition et peut continuer ses affaires sous la surveillance du commissaire (art. 298 al. 1 première phrase LP). Selon PAPA, l'homologation d'un concordat ordinaire n'entraîne pas l'exigibilité des dettes du débiteur: son exécution a lieu séparément à l'égard de chaque créancier et tient compte des différences dans l'échéance de chaque créance. En revanche, dans le concordat par abandon d'actif, comme dans la faillite, tous les créanciers participent ensemble au produit de la réalisation de la masse. Le principe de l'égalité de traitement commande que toutes les créances deviennent exigibles en même temps: un créancier dont la créance est exigible ne doit pas être privilégié par rapport à un autre créancier dont la créance ne l'est pas encore, et cela en dérogation à la règle de droit privé qui fait dépendre l'époque de l'exécution du terme stipulé ou de la nature de l'affaire (art. 75 CO). L'application de l'art. 208 LP au concordat par abandon d'actif doit dès lors être considérée comme tacitement voulue par le législateur. C'est au moment de la formation de la masse, à savoir au moment de l'homologation, que les créances deviennent exigibles. Pour DALLÈVES, le sursis concordataire n'a que des effets limités: s'il paralyse les procédures d'exécution, il ne change en revanche pas la situation de droit matériel; le sursis n'entraîne pas l'exigibilité des créances et n'empêche pas non plus qu'elles viennent à échéance.
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b) La loi et la jurisprudence lient à l'octroi du sursis concordataire différents effets juridiques. Les poursuites contre le débiteur, la prescription ou la péremption sont suspendues (art. 297 al. 1 LP); le débiteur peut continuer ses affaires sous la surveillance du commissaire, mais son pouvoir de disposer des actifs est restreint (art. 298 al. 1 LP); la publication du sursis concordataire tient lieu de l'ouverture de la faillite dans le cadre des règles concernant la compensation (art. 213 et 214 LP applicables en vertu de l'art. 316m LP); de même, l'action révocatoire prévue aux art. 286 et 287 LP s'étend à tous les actes accomplis dans les six mois qui ont précédé l'octroi du sursis concordataire (art. 316s al. 1 LP); c'est la date de l'octroi du sursis qui est décisive, en tant que dies ad quem, pour le calcul des six mois pendant lesquels une créance de salaire jouit du privilège de première classe, et c'est cette date qui remplace, en cas de concordat, celle de l'ouverture de la faillite dont parle l'art. 219 LP (ATF 97 I 318 consid. 2 et les références); dans la procédure de concordat pour les banques et les caisses d'épargne, le sursis concordataire arrête le cours des intérêts des créances non garanties par gage, à moins que le concordat n'en dispose autrement (art. 21 al. 2 OCB, par analogie avec l'art. 209 LP); les dettes contractées pendant le sursis concordataire, avec l'assentiment du commissaire, constituent des dettes de la masse, même dans une faillite subséquente (art. 316c LP et 25 al. 2 OCB); en revanche, les dettes contractées sans l'assentiment du commissaire et jusqu'à l'homologation définitive du concordat s'ajoutent aux dettes nées avant la publication du sursis concordataire (art. 316c al. 1 LP et 25 al. 1 OCB).
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4. La Cour de justice ne méconnaît pas l'opinion de la doctrine dominante. Mais elle fait état des art. 21 al. 2 et 3, 25 al. 1 et 32 OCB, selon lesquels la date de la publication du sursis concordataire est déterminante pour fixer les créances qui entrent en ligne de compte, le sort des intérêts ainsi que les possibilités de compensation. En matière de compensation, relève-t-elle, il est expressément précisé que la publication du sursis concordataire tient lieu de l'ouverture de la faillite. La cour cantonale en déduit par analogie que c'est la date de la publication du sursis concordataire qui détermine le jour de la conversion en monnaie suisse des créances libellées en monnaie étrangère; cette solution, dit-elle, est conforme à la logique en matière de concordat bancaire, car la fermeture des guichets d'une banque constitue une date extrêmement importante, les déposants ne pouvant, en principe, plus disposer de leurs avoirs.
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a) Dès que l'insolvabilité du débiteur est connue, il y a risque de manoeuvres permettant de faire usage abusivement de la faculté de compenser et on peut craindre que des actes ne soient accomplis en vue de procurer à un créancier un avantage au détriment des autres: ainsi s'explique que la date déterminante pour faire valoir le droit à la compensation ou pour le calcul des délais de l'action révocatoire soit celle de l'octroi du sursis concordataire; il s'agit d'assurer l'égalité des créanciers en prévenant les abus (cf. ATF 107 III 28). On ne saurait élever cette règle spécifique au rang de norme générale régissant également l'exigibilité des créances comprises dans le concordat et la conversion de celles qui sont exprimées en monnaie étrangère.
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Certes, dès l'octroi du sursis, le créancier ne peut plus disposer librement de ses avoirs; il ne peut pas procéder contre le débiteur; le cours des intérêts s'arrête, en principe. Mais il s'agit uniquement de conserver en l'état le patrimoine du débiteur jusqu'à la décision de l'autorité concordataire. Cela n'a pas pour effet de rendre exigible au moment du sursis une créance qui ne l'est pas. Ce serait d'ailleurs dépourvu d'effets pratiques, puisque, précisément, le créancier n'a pas la possibilité de procéder contre son débiteur. Il serait erroné aussi de voir dans l'exigibilité de la créance et la conversion en monnaie suisse au moment de l'octroi du sursis une mesure de compensation en faveur du créancier, privé de la faculté de faire valoir sa créance. Une pareille mesure ne pourrait avoir qu'un caractère aléatoire. En effet, le taux de conversion n'est pas nécessairement, comme en l'espèce, plus favorable au créancier à la date de l'octroi du sursis qu'à celle de l'homologation du concordat. S'agissant, d'autre part, de créer une règle de portée générale, il n'est guère concevable d'adopter une disposition qui ne serait pas la même pour toutes les procédures, en permettant, par exemple, de faire rétroagir au moment de l'octroi du sursis une conversion effectuée lors de l'homologation, si cela devait se révéler plus favorable au créancier.
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b) L'opinion de la doctrine dominante est fondée sur une appréciation plus exacte des effets généraux respectifs du sursis et de l'homologation du concordat par abandon d'actif.
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Le sursis représente une phase préparatoire. Il n'a pas d'autres effets de droit matériel que les restrictions dans le pouvoir de disposer des créanciers et du débiteur et les mesures que, selon l'art. 2 OCB, l'autorité de concordat prend, d'accord avec le commissaire, pour assurer l'égalité des créanciers. Son issue est incertaine. Il peut être révoqué, par exemple parce que le débiteur est en mesure de payer intégralement ses créanciers. Il peut comporter un simple sursis dans le remboursement intégral des créances, c'est-à-dire en différer l'échéance (concordat-sursis); il peut impliquer une renonciation à une partie des créances, sans que l'échéance de celles-ci soit modifiée (concordat-dividendes); il peut aboutir à l'abandon de l'actif aux créanciers pour qu'ils en opèrent eux-mêmes la réalisation et se répartissent le produit de celle-ci, la banque débitrice étant tenue quitte du solde (concordat par abandon d'actif) (cf. l'art. 21 al. 1 OCB); enfin, en cas de refus d'homologation, le concordat débouche généralement sur la faillite (art. 309 LP). Si le sursis entraînait la conversion en francs suisses des créances libellées en monnaie étrangère, à un moment où la suite de la procédure n'est pas connue, cette conversion aurait un caractère aléatoire: en effet, en cas de concordat-sursis et de concordat-dividendes, il n'y a pas lieu à conversion et, en cas de faillite, la conversion doit être faite, on l'a vu, au jour du jugement de faillite. Une telle situation, qui n'est pas satisfaisante, n'est pas commandée par le principe de l'égalité des créanciers: au rebours de ce que pense l'intimé, il n'est pas contraire à ce principe que les créances exprimées en monnaie suisse soient prises en considération au jour de l'octroi du sursis ou, éventuellement, de la fermeture des guichets, puisque leur valeur n'est pas soumise à modification entre le sursis et l'homologation.
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Dans le concordat par abandon d'actif, comme dans la faillite, le problème de la conversion en monnaie suisse des créances libellées en monnaie étrangère se pose uniquement au moment de la formation de la masse. Dans la faillite, c'est le moment de l'ouverture (art. 197 al. 1 LP), soit celui du jugement (art. 175 al. 1 LP). Dans le concordat par abandon d'actif, c'est l'homologation, "décision qui jusqu'à un certain point" peut "être assimilée à un prononcé de faillite" (ATF 52 III 98), en ce sens que le débiteur est dessaisi de ses biens en faveur des créanciers (art. 316d al. 1 LP) et que commence la procédure de liquidation. Les créanciers participent ensemble et proportionnellement au produit de la réalisation de la masse: c'est alors qu'il importe, afin d'assurer l'égalité entre eux, que toutes les créances deviennent exigibles et soient exprimées dans la même unité de grandeur, soit la monnaie suisse, à l'état de collocation et au tableau de distribution.
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Vu ce qui précède, il convient d'établir, par voie jurisprudentielle, la règle selon laquelle, dans le concordat par abandon d'actif, la conversion en monnaie suisse des créances libellées en monnaie étrangère se fait au jour où l'homologation du concordat est devenue définitive. C'est d'ailleurs en vertu d'un raisonnement analogue que le Tribunal fédéral a récemment dit que le moment décisif pour déterminer l'extension de la garantie immobilière selon l'art. 806 al. 1 CC est celui où le concordat est homologué (ATF 108 III 90 /91 consid. 5).
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Par ces motifs, le Tribunal fédéral:
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Admet le recours, annule l'arrêt attaqué et rejette l'action en modification de l'état de collocation.
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