BGE 136 III 365
 
54. Extrait de l'arrêt de la IIe Cour de droit civil dans la cause X. contre Y. (recours en matière civile)
 
5A_726/2009 du 30 avril 2010
 
Regeste
Art. 318 Abs. 1 ZGB; Abänderung des Unterhaltsbeitrages für ein aussereheliches Kind; Legitimation des Inhabers der elterlichen Sorge.
 
Sachverhalt
A. X., né en 1970, et Y., née en 1973, ont fait ménage commun de 1994 à mai 2006. Un enfant est issu de leur union: A., née le 26 avril 2006 à Genève. La mère exerce l'autorité parentale et la garde de l'enfant.
Par convention du 30 janvier 2007, le père s'est engagé à verser mensuellement en faveur de sa fille, allocations familiales non comprises, la somme de 2'700 fr. du 1er janvier 2007 jusqu'aux 18 ans révolus de l'enfant et au-delà en cas d'études sérieuses et suivies.
Les parents ont, par convention du 18 juillet 2008 [recte: 2007], réduit le montant de la contribution d'entretien à 1'700 fr. par mois du 1er août 2007 jusqu'aux 18 ans révolus de l'enfant et au-delà en cas d'études sérieuses et suivies. Il était précisé que ladite contribution pourrait être revue si la situation d'une des parties devait se modifier de façon durable et importante.
Cette seconde convention a été approuvée par le Tribunal tutélaire du canton de Genève le 8 août 2007.
B. Le 30 décembre 2008, le père a requis - en dirigeant son action exclusivement contre Y. - la modification de la contribution alimentaire, proposant de verser mensuellement en faveur de sa fille, dès le 1er janvier 2009, une contribution d'entretien de 1'000 fr. jusqu'à l'âge de 5 ans, 1'100 fr. jusqu'à l'âge de 10 ans, 1'200 fr. jusqu'à l'âge de 15 ans et 1'300 fr. jusqu'à la majorité, voire au-delà en cas d'études.
Le Tribunal de première instance de Genève l'a débouté de ses conclusions le 14 mai 2009. Ce jugement a été confirmé le 24 septembre suivant par la Cour de justice du canton de Genève, qui a cependant rectifié la dénomination des parties en ce sens que la défenderesse est l'enfant, A., représentée par sa mère, Y.
C. Par arrêt du 30 avril 2010, le Tribunal fédéral a rejeté, dans la mesure de sa recevabilité, le recours en matière civile interjeté par le père contre l'arrêt de la Cour de justice du 24 septembre 2009.
(résumé)
 
Extrait des considérants:
2. En première instance cantonale, le recourant a dirigé sa "requête en fixation d'une pension alimentaire" contre la mère de l'enfant. Dans son mémoire de réponse, celle-ci a indiqué qu'elle s'en rapportait à justice quant à la légitimation passive, l'enfant étant en réalité le créancier de la contribution d'entretien et donc le titulaire des droits dont le demandeur souhaitait la modification. Le Tribunal de première instance ne s'est pas prononcé sur ce point. Quant à la Cour de justice, elle a, de son propre chef et sans aucune motivation, modifié la dénomination des parties, tant dans le rubrum que dans le corps de l'arrêt, en ce sens que la demande est dirigée contre l'enfant représenté par sa mère. Dans sa réponse au présent recours, l'enfant rappelle, à titre liminaire, que le Tribunal de première instance a été requis de se prononcer sur la question de la légitimation passive, dès lors que la demande a été déposée contre sa mère alors qu'elle-même est créancière de la contribution d'entretien et, partant, titulaire des droits dont le demandeur souhaite la modification.
2.2 Selon l'art. 318 al. 1 CC, les père et mère administrent les biens de l'enfant aussi longtemps qu'ils ont l'autorité parentale. La jurisprudence en a déduit que le détenteur de l'autorité parentale, qui a l'administration et la jouissance des biens de l'enfant mineur en vertu d'un droit propre, peut protéger en son nom les droits patrimoniaux de l'enfant et les faire valoir en justice en agissant personnellement comme partie (ATF 84 II 241 p. 245, relatif à l'ancien art. 290 al. 1 CC, dont la teneur est identique à l'actuel art. 318 al. 1 CC; ATF 90 II 351 consid. 3 p. 355/356). La doctrine partage majoritairement ce point de vue, considérant par exemple que la demande de modification de la contribution à l'entretien de l'enfant fixée par le jugement de divorce peut être dirigée contre le détenteur de l'autorité parentale en tant que "Prozessstandschafter", disposant de la faculté d'être poursuivi en justice pour le droit d'autrui (cf. par exemple BÜHLER/SPÜHLER, Berner Kommentar [3e éd. 1980] et Ergänzungsband, [1980], nos 59 et 279 ad ancien art. 156 CC; HEGNAUER, Berner Kommentar, 3e éd. 1964, n° 63 ad art. 286 CC). Le Tribunal fédéral en a jugé de même dans le contexte d'une procédure de modification du jugement de divorce tendant également à la restitution de contributions d'entretien payées en trop, estimant que celles-ci faisaient partie de la fortune de l'enfant et que la faculté du détenteur de l'autorité parentale de conduire un procès en son propre nom et comme partie à la place de l'enfant obligé concerne la fortune de celui-ci considérée dans son ensemble (arrêt 5C.314/2001 du 20 juin 2002 consid. 7 et 9, non publiés in ATF 128 III 305).
Le principe selon lequel, en vertu de l'art. 318 al. 1 CC, le détenteur de l'autorité parentale a qualité pour exercer en son nom les droits de l'enfant mineur et pour les faire valoir en justice ou dans une poursuite en agissant personnellement comme partie doit finalement valoir pour toutes les questions de nature pécuniaire et, par conséquent aussi, d'une manière générale, pour celles relatives à des contributions d'entretien. Il s'ensuit que la légitimation active ou passive doit être reconnue aussi bien au détenteur de l'autorité parentale qu'à l'enfant mineur (cf. ATF 90 II 351 précité). Tel est également le cas lorsque, comme en l'espèce, le litige porte sur la modification d'une contribution d'entretien fixée par convention approuvée par l'autorité tutélaire pour un enfant né hors mariage. Dès lors, la jurisprudence contraire de l'arrêt 5A_104/2009 du 19 mars 2009 ne saurait être maintenue. La légitimation passive de la mère, contre qui l'action a été dirigée, doit donc être admise. Il convient, par conséquent, de modifier dans ce sens la dénomination des parties telle qu'elle ressort de l'arrêt déféré.