BGE 141 III 185
 
26. Extrait de l'arrêt de la IIe Cour de droit civil dans la cause A.A. contre Banque B. (recours en matière civile)
 
5A_58/2015 du 28 avril 2015
 
Regeste
Art. 80 Abs. 1 und Art. 291 Abs. 1 SchKG; Vollstreckung eines Anfechtungsurteils.
 
Sachverhalt
A.
A.a Le 10 janvier 2006, C.A. a vendu à son épouse, A.A., la parcelle n° 296 de la commune de U. et lui a transféré la cédule hypothécaire n° ID y, constituée sur ce même immeuble.
Le 21 janvier 2008, ensuite d'une poursuite exercée contre C.A., la Banque B. s'est vu délivrer un acte de défaut de biens définitif après saisie d'un montant de 33'342'063 fr. 78. Statuant le 24 février 2011 sur l'action révocatoire ouverte par la Banque B. contre A.A., la Cour civile du Tribunal cantonal du canton de Vaud a prononcé:
    "I. Le transfert de la parcelle n° 296 de la commune de U. par C.A. à la défenderesse A.A., selon acte notarié du 10 janvier 2006, est révoqué.
    II. La cession et le transfert par C.A. à la défenderesse de la propriété de la cédule hypothécaire au porteur de 1'000'000 fr. (un million de francs), premier rang, intérêt maximum 10 %, ID y, créée le 23 décembre 2005 et grevant la parcelle n° 296 de U., sont révoqués.
    III. Faute pour la défenderesse de remettre à l'Office des poursuites procédant aux saisies requises par la demanderesse Banque B. sur la base du présent jugement, la cédule hypothécaire au porteur de 1'000'000 fr. (un million de francs), premier rang, intérêt maximum 10 %, ID y, créée le 23 décembre 2005 et grevant la parcelle n° 296 de la commune de U., libre de tous engagements, la défenderesse devra payer auprès dudit Office, pour être saisie au préjudice de C.A., en lieu et place de la prédite cédule, la somme de 1'000'000 fr. (un million de francs)".
L'appel formé par A.A. contre ce jugement a été rejeté par la Cour d'appel civile du Tribunal cantonal du canton de Vaud par arrêt du 29 août 2011. Le Tribunal fédéral a rejeté, le 13 mars 2012, le recours interjeté contre cette décision (arrêt 5A_28/2012 du 13 mars 2012).
A.b Par décision du 15 novembre 2013, le Président du Tribunal d'arrondissement de La Côte a rejeté la plainte formée par la Banque B. contre le refus de l'office de procéder à la saisie complémentaire de la cédule hypothécaire. Il a constaté que celle-ci avait été incorporée dans le patrimoine de D. AG, qui l'avait acquise de bonne foi. Cette décision est exécutoire, faute de recours, depuis le 3 décembre 2013.
B. Le 6 février 2014, se fondant sur le jugement révocatoire, la Banque B. a fait notifier à A.A. un commandement de payer la somme de 1'000'000 fr. avec intérêts à 5 % l'an dès le 13 janvier 2014. Le 21 mai 2014, le Juge de paix du district de Nyon a levé définitivement l'opposition de la poursuivie, à concurrence de 1'000'000 fr., plus intérêts à 5 % dès le 6 février 2014. Le 16 décembre suivant, la Cour des poursuites et faillites du Tribunal cantonal vaudois a rejeté le recours formé par la poursuivie.
C. Le Tribunal fédéral a rejeté le recours interjeté par A.A contre cette décision.
 
Extrait des considérants :
4.1 Le jugement révocatoire a pour effet de rendre aux biens atteints par l'acte révocable du débiteur leur destination primitive, c'est-à-dire de les mettre en état de servir au désintéressement des créanciers, en les faisant retomber sous le droit d'exécution de ceux-ci (ATF 136 III 341 consid. 3 p. 343 et les références; ATF 135 III 265 consid. 3 p. 268). La restitution des biens litigieux doit avoir principalement lieu en nature (ATF 135 III 513 consid. 9.1 p. 530). Le jugement révocatoire n'a pas d'incidence sur la validité du transfert de propriété de ces biens (ATF 136 III 341 consid. 3 p. 343). Il constate que le créancier a le droit de les faire saisir et réaliser à son profit, comme s'ils appartenaient encore au débiteur (ATF 47 III 89 consid. 1 p. 92), sans poursuite préalable (ATF 43 III 212 spéc. p. 214 s.; PIERRE-ROBERT GILLIÉRON, Poursuite pour dettes, faillite et concordat, 5e éd. 2012, n. 2968 p. 580).
4.2 Subsidiairement, si la restitution en nature est impossible, parce que les biens ne se trouvent plus dans le patrimoine du bénéficiaire, elle doit avoir lieu par équivalent, sous la forme de dommages-intérêts au sens des art. 97 ss CO, dont le montant correspond à la contre-valeur des biens à la date où l'impossibilité est survenue (ATF 136 III 341 consid. 4.1 p. 344; ATF 135 III 513 consid. 9.3 p. 531 et consid. 9.6 p. 535; 30 II 559 consid. 5 et 6 p. 563; dans la procédure de saisie, cf. arrêts 5A_748/2013 du 25 novembre 2014 consid. 5.1; 5A_28/2012 du 13 mars 2012 consid. 5; 5C.219/2006 du 16 avril 2007 consid. 4.2). A cet égard, le jugement révocatoire est de nature condamnatoire (HENRI-ROBERT SCHÜPBACH, Droit et action révocatoires, 1997, nos 43 s. ad art. 291 LP). Il confère au créancier (demandeur dans l'action révocatoire) une créance en paiement d'une somme d'argent à l'encontre du tiers (défendeur dans l'action révocatoire). Si le tiers n'exécute pas son obligation, le créancier peut faire procéder à l'exécution forcée de la créance par la voie de la poursuite pour dettes (art. 38 al. 1 LP; THOMAS BAUER, in Basler Kommentar, Bundesgesetz über Schuldbetreibung und Konkurs, vol. II, 2e éd. 2010, n° 15 ad art. 291 LP; SCHÜPBACH, op. cit., n° 228 ad art. 291 LP; HANS PETER BERZ, Der paulianische Rückerstattungsanspruch, 1960, p. 146 note 34). En tant qu'il condamne le tiers à verser des dommages-intérêts au créancier, le jugement révocatoire constitue un titre de mainlevée définitive (art. 80 al. 1 LP; BAUER, op. cit., n° 15 ad art. 291 LP).