BGE 143 III 10 |
3. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour de droit civil dans la cause X. contre Z. (recours en matière civile) |
4A_234/2016 du 19 décembre 2016 |
Regeste |
Haftung des unentgeltlichen Rechtsbeistands (Art. 61 Abs. 1 OR; Art. 12 lit. b und g BGFA). |
Extrait des considérants: |
Selon la cour cantonale, l'avocat d'office accomplit une tâche étatique et doit dès lors être considéré comme un agent public au sens de l'art. 61 al. 1 CO et de l'art. 3 al. 1 ch. 13 de la loi vaudoise du 16 mai 1961 sur la responsabilité de l'Etat, des communes et de leurs agents (LRECA/VD; RSV 170.11); partant, la responsabilité pour les dommages que l'avocat d'office est susceptible de causer en violation de ses devoirs est régie par les art. 4 ss LRECA/VD, en particulier par l'art. 5 LRECA/VD aux termes duquel l'agent n'est pas personnellement tenu envers le lésé de réparer le dommage.
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3.2 En l'espèce, la question est de savoir si le droit cantonal peut déroger à ce régime et prévoir une responsabilité exclusive de l'Etat en cas de mauvaise exécution du mandat par l'avocat d'office (cf. ATF 127 III 248 consid. 1b p. 251 s.). D'aucuns ont répondu par l'affirmative, estimant que le canton peut notamment renvoyer à la législation cantonale en matière de responsabilité des agents publics envers les administrés. Leur opinion se fonde principalement sur le fait que le Tribunal fédéral a admis un tel renvoi pour le notaire; ces auteurs relèvent en outre que la notion de fonctionnaires et employés publics est interprétée très largement dans la jurisprudence (PIERMARCO ZEN- RUFFINEN, Assistance judiciaire et administrative: les règles minima imposées par l'article 4 de la Constitution fédérale, JdT 1989 I p. 53; PIERRE WESSNER, La responsabilité professionnelle de l'avocat au regard de son devoir général de diligence, Recueil de jurisprudence neuchâteloise [RJN] 1986 p. 15 s.).
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L'avocat d'office, au même titre que l'avocat de choix, exerce une activité d'avocat, à savoir celle de défendre en toute indépendance les intérêts d'un justiciable dans le cadre d'une procédure devant les autorités judiciaires; comme l'avocat choisi, il est mandaté pour sauvegarder les intérêts particuliers d'un justiciable déterminé et pour rien d'autre. Certes, le mandat d'office est donné par la collectivité publique afin de garantir l'égalité des parties dans le procès, ce qui est non seulement dans l'intérêt du bénéficiaire de l'assistance judiciaire, mais aussi dans l'intérêt public; cela ne signifie pas pour autant que l'avocat d'office, souvent proposé par la partie qui entend requérir l'assistance judiciaire, ait par rapport à cette partie un autre rôle que s'il était avocat de choix. On peut d'ailleurs se demander si l'égalité des parties ne commande pas la représentation par un avocat personnellement responsable tant pour la partie au bénéfice de l'assistance judiciaire que pour la partie économiquement en mesure de mandater elle-même un avocat, afin d'éviter le sentiment chez la première d'avoir un défenseur éventuellement moins intéressé à faire preuve de toute la diligence nécessaire. Quoi qu'il en soit, l'avocat commis d'office a un mandat public en faveur d'un tiers, le bénéficiaire de l'assistance judiciaire, mais ne se trouve pas dans un rapport de subordination quelconque face à la collectivité publique qui l'a mandaté, laquelle ne saurait lui donner d'instructions sur la manière d'exercer le mandat confié. Il n'est pas non plus soumis à une surveillance différente de celle à laquelle il serait soumis en tant qu'avocat de choix. Le fait qu'il reçoive, le cas échéant, des honoraires réduits est sans pertinence pour la question à trancher, ces honoraires devant au demeurant être fixés de façon à couvrir tous ses frais généraux, dont font partie les coûts de l'assurance responsabilité civile professionnelle (cf. ATF 137 III 185 consid. 5.4 p. 190).
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Par ailleurs, le rôle de l'avocat d'office se différencie fondamentalement de celui du notaire. Ce dernier accomplit des actes de puissance publique, par exemple lorsqu'il établit un acte authentique. Il est alors un officier public dont les relations avec ses clients relèvent du droit public. Certes, le notaire exerce également d'autres activités, par exemple de conseil, qui ressortissent au droit privé. Distinguer les unes des autres peut toutefois se révéler difficile; ainsi, l'instrumentation d'un acte authentique est souvent liée à une activité de conseil juridique fournie aux parties à l'acte. Un régime de responsabilité uniforme du notaire peut alors être souhaitable. C'est pourquoi le Tribunal fédéral a admis que les cantons étaient habilités, en vertu de l'art. 6 CC, à régler la responsabilité des notaires pour l'ensemble de leurs activités, tant celles relevant du droit public que celles relevant du droit privé (cf. ATF 126 III 370 consid. 7 p. 372 ss). A la différence du notaire qui est en premier lieu un officier public, l'avocat, le plus souvent, agit principalement dans le cadre de mandats privés. Et lorsqu'il est commis d'office, il ne devient pas un officier public; certes, il a une qualité officielle (obrigkeitliche Bestellung, cf. art. 395 CO) et remplit une tâche d'intérêt public, mais il n'est pas une personne investie d'attributions de droit public (hoheitliche Amtsverrichtung).
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En conséquence, il faut admettre que sous le droit antérieur à l'entrée en vigueur de la loi fédérale du 23 juin 2000 sur la libre circulation des avocats (LLCA; RS 935.61) les cantons ne pouvaient pas exclure la responsabilité civile de l'avocat d'office. Autre est la question, non pertinente en l'espèce, de la compétence pour introduire, par le biais du droit cantonal, une responsabilité du canton en sus de celle de l'avocat d'office découlant du droit privé fédéral.
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3.2.2 La LLCA n'a rien changé à cet égard. Cette loi fixe les principes applicables à l'exercice de la profession d'avocat (art. 1 LLCA) par une réglementation exhaustive des règles professionnelles de l'avocat en Suisse (Message du 28 avril 1999 concernant la loi fédérale sur la libre circulation des avocats, FF 1999 5368 ch. 233.2; BOHNET/OTHENIN-GIRARD/SCHWEIZER, in Commentaire romand, Loi sur les avocats, 2010, n° 52 ad art. 1 LLCA). La seule réserve en faveur des cantons est la possibilité de fixer, dans le cadre de la LLCA, les exigences pour l'obtention du brevet d'avocat et le droit d'autoriser les titulaires des brevets d'avocat qu'ils délivrent à représenter les parties devant leurs propres autorités judiciaires (art. 3 LLCA). Pour être inscrit au barreau, condition nécessaire pour pratiquer la représentation en justice, l'avocat doit être en mesure de pratiquer en toute indépendance et il ne peut être employé que par des personnes elles-mêmes inscrites dans un registre cantonal des avocats (art. 4 et art. 8 al. 1 let. d LLCA). A teneur de l'art. 12 let. b LLCA, l'avocat inscrit au barreau exerce son activité professionnelle non seulement en toute indépendance et en son nom personnel, mais également sous sa propre responsabilité; ces exigences s'appliquent sans restriction aux causes dans lesquelles l'avocat a été commis d'office (cf. art. 12 let. g LLCA). Le caractère exhaustif de l'art. 12 LLCA s'oppose ainsi à toute réglementation cantonale excluant la responsabilité de l'avocat d'office pour les dommages dus à un défaut de diligence lors de l'exécution du mandat d'office. Au demeurant, une réglementation différente de la responsabilité de l'avocat d'office selon les cantons n'est guère conciliable avec l'unification de la réglementation professionnelle de l'avocat voulue par la LLCA.
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