BGE 124 V 47
 
7. Arrêt du 22 janvier 1998 dans la cause D. contre Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents et Tribunal des assurances du canton de Vaud
 
Regeste
Art. 97 Abs. 1 und Art. 105 Abs. 1 UVG; Art. 38 VwVG; Art. 27 Ziff. 1 und Art. 28 des Abkommens zwischen der Schweiz und der Republik Türkei über soziale Sicherheit vom 1. Mai 1969: Zustellung einer Verfügung der SUVA an einen in der Türkei wohnhaften Versicherten; Einsprachefrist.
- Das türkisch-schweizerische Abkommen über soziale Sicherheit ermächtigt einen Unfallversicherer nicht, eine an einen in der Türkei wohnhaften Versicherten gerichtete Verfügung per Post zuzustellen. Dessen Einsprache gegen eine per Post versandte Verfügung der SUVA ist deshalb selbst dann zulässig, wenn sie verspätet erfolgt, da die mangelhafte Eröffnung dieses Verwaltungsaktes keinerlei Wirkung gezeitigt hat.
- Um dem erwähnten Abkommen gerecht zu werden, hat der Unfallversicherer in der Rechtsmittelbelehrung festzuhalten, dass der Versicherte seine Einsprache in türkisch verfassen und diese auch bei der Sozialversicherungseinrichtung in Ankara einreichen kann.
 
Sachverhalt
A.- Par décision du 30 janvier 1996, notifiée à l'assuré le 6 février suivant, la Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents (ci-après: CNA) a maintenu le droit de D., né en 1961, de nationalité turque, à une rente d'invalidité de 10%, au-delà du 31 juillet 1991.
Par acte du 2 mars 1996, remis à un bureau de poste en Turquie le 8 mars suivant et parvenu à la CNA le 13 mars, D. a fait opposition à cette décision. Le 26 juin 1996, considérant que l'opposition était tardive, la CNA l'a déclarée irrecevable.
B.- D. a recouru contre la décision sur opposition de la CNA devant le Tribunal des assurances du canton de Vaud.
Considérant lui aussi que l'opposition était tardive, le Président du Tribunal cantonal des assurances a rejeté le recours par jugement du 12 décembre 1996.
C.- D. interjette recours de droit administratif contre ce jugement, dont il demande implicitement l'annulation, en concluant à l'octroi d'une rente d'invalidité fondée sur un taux de 20% au moins.
Il invoque notamment les jours fériés légaux en Turquie à l'époque du ramadan pour expliquer la tardiveté de l'opposition et conclut implicitement à la restitution du délai d'opposition.
La CNA conclut au rejet du recours. L'Office fédéral des assurances sociales ne s'est pas déterminé.
En date des 23 octobre et 11 novembre 1997, le recourant a versé au dossier des documents médicaux relatifs à son état de santé.
Invitée par le juge délégué à se prononcer sur sa pratique en matière de notification de ses décisions aux assurés domiciliés en Turquie, la CNA a déclaré qu'elle a toujours recouru à la voie postale, sous pli recommandé, les accords passés en matière de sécurité sociale entre la Suisse et la Turquie n'imposant pas, selon elle, la notification par voie diplomatique.
 
Considérant en droit:
C'est pourquoi, dans la mesure où D. demande au Tribunal fédéral des assurances une rente d'invalidité plus élevée que celle qui lui a été allouée par l'intimée, ses conclusions sont irrecevables.
Selon l'art. 97 al. 1 LAA, les écrits sont remis à l'assureur ou à son adresse, à un bureau de poste suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire le dernier jour du délai au plus tard; lorsque le délai échoit un samedi, un dimanche ou un jour férié du canton où l'intéressé a son domicile ou son siège, son terme est reporté au premier jour ouvrable qui suit.
b) Le droit suisse, applicable à la détermination des prestations auxquelles le recourant a droit, l'est aussi, en l'absence de dispositions contraires résultant des accords passés en matière de sécurité sociale entre la Turquie et la Suisse, au calcul des délais (art. 20 et ss PA en liaison avec les art. 96 et 97 LAA). Il ne pourrait en aller autrement que si la Turquie était, comme la Suisse, partie à la Convention européenne sur la computation des délais du 16 mai 1972 (RS 0.221.122.3; cf. notamment l'art. 11), ce qui n'est toutefois pas le cas.
c) En l'espèce, la décision litigieuse a été notifiée à l'assuré le 6 février 1996. A la lumière des dispositions légales applicables, la déclaration d'opposition remise à un office postal turc le 8 mars 1996 est intervenue tardivement.
a) La notification d'une décision administrative ou d'un acte judiciaire constitue un acte de puissance publique dont l'exécution incombe aux autorités locales (ATF 105 Ia 311 consid. 3b, ATF 103 III 4 consid. 2). C'est pourquoi, lorsque la signification doit intervenir à l'étranger, il convient de procéder par la voie diplomatique ou consulaire (ATF 103 III 4 consid 2; RDAT 1993 I no 68 p. 175; SJ 1993 p. 72). Il ne sera fait exception à cette règle que si une convention internationale le prévoit expressément (POUDRET, Commentaire de la loi fédérale d'organisation judiciaire, Berne 1990, vol. I, p. 170 sv., n. 6.5 ad art 29). La signification irrégulière d'un acte judiciaire est dépourvue d'effet (ATF 105 Ia 311 consid. 3b).
La notification directe, à l'étranger, par la poste est un acte d'autorité publique sur territoire étranger. Une autorité judiciaire ou un organisme de l'Etat d'envoi ne peut y procéder qu'avec le consentement de l'Etat de destination (ATF 105 Ia 311 consid. 3b in initio, ATF 103 III 4 consid. 2b).
b) Contrairement à ce que semble croire la CNA, la Convention de sécurité sociale entre la Suisse et la République de Turquie du 1er mai 1969 (RS 0.831.109.763.1 ou RO 1971 1772), applicable à l'assurance obligatoire en cas d'accidents en vertu de l'art. 1 ch. 1 let. B/c, n'autorise pas l'assureur-accidents à déroger à l'obligation de notifier par la voie diplomatique les décisions destinées à un assuré domicilié en Turquie et qui n'a pas fait élection de domicile en Suisse (RAMA 1991 no U 131 p. 277 sv.; RUMO-JUNGO, Bundesgesetz über die Unfallversicherung, 2ème éd., Zurich 1995, p. 319 sv., collection Rechtsprechung des Bundesgerichts zum Sozialversicherungsrecht).
L'intimée n'aurait pu procéder à la notification de sa décision du 30 janvier 1996 par voie postale qu'avec le consentement de l'Etat turc. A cet égard, la CNA et les autres assureurs-accidents soumis à la convention turco-suisse ne bénéficient d'aucune dérogation, contrairement à ce qui est le cas pour la Caisse suisse de compensation dans son domaine de compétence (cf. l'art. 7 de l'Arrangement administratif du 14 janvier 1970 concernant les modalités d'application de la Convention de sécurité sociale conclue entre la Suisse et la République de Turquie le 1er mai 1969 [RS 0.831.109.763.11 ou RO 1976 591]). Ainsi, la pratique dont se réclame l'intimée est illégale, car elle viole un principe largement reconnu du droit des gens (RDAT 1993 I no 68 p. 175; SJ 1993 p. 72 et les références; RHINOW/KRÄHENMANN, Schweizerische Verwaltungsrechtsprechung, Ergänzungsband, Bâle 1990, no 84 I k, p. 283 et les arrêts cités; voir aussi LOTHAR FRANK, Die Zustellung im Ausland, in: Die Sozialgerichtsbarkeit 35/1988 p. 142 ss).
4. Par ailleurs, l'indication des voies de droit au pied de la décision du 30 janvier 1996 était incomplète, car elle se bornait à mentionner qu'une opposition écrite devait être adressée à la Direction de la CNA, Division des accidents, à Lucerne. Or, l'intimée aurait dû, pour respecter ses obligations d'organisme de droit public agissant dans l'exercice de ses compétences décisionnelles, également mentionner que l'assuré avait le droit de s'exprimer en turc (art. 27 ch. 1 de la convention turco-suisse) et qu'il pouvait aussi adresser son opposition à l'Institut des assurances sociales à Ankara, conformément à l'art. 28 de la convention, en liaison avec l'art. 1 al. 1 et l'art. 25 al. 1 de l'Arrangement administratif (cf. DUC, La convention turco-suisse en matière d'assurances sociales, in: L'évolution récente du droit privé en Turquie et en Suisse, dans le vol. 6 de la collection Recueil des travaux présentés aux Journées juridiques turco-suisses 1985, Zurich 1987, p. 202).
Il n'est toutefois pas nécessaire de trancher le point de savoir si cette informalité a eu pour conséquence le dépassement du délai d'opposition par le recourant, dès lors que, pour les raisons indiquées au considérant précédent, la décision sur opposition rendue par l'intimée doit être annulée.