BGE 134 V 340 |
40. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour de droit social dans la cause S. contre Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents (recours en matière de droit public) |
8C_144/2007 du 11 juin 2008 |
Regeste |
Art. 37 Abs. 2 und Art. 39 UVG; Art. 50 UVV; Wagnis; Leistungskürzung. |
Offengelassen, ob das Tauchen in einem hoch gelegenen Bergsee auf eine Tiefe von über 40 Metern hinunter ein absolutes Wagnis darstellt (E. 5.2). Im konkreten Fall ereignete sich der Unfall als Folge einer in einer Tiefe von ungefähr 45 Metern erfolgten Fehlmanipulation; die beiden beteiligten Taucher waren noch nie zusammen getaucht und keiner hatte vor dem Tauchgang die Ausrüstung seines Partners kontrolliert. Es wurde ein relatives Wagnis angenommen (E. 5.3). |
Prüfung eines allfälligen Unterbruchs des Kausalzusammenhanges zwischen Wagnis und Unfall durch den während des Tauchgangs begangenen Fremdfehler (E. 6). |
Sachverhalt |
A. S. a été victime d'un accident de plongée en 2003, au lac X., sur la commune de Y. Le lac est situé à plus de 2'500 mètres d'altitude. L'accident s'est déroulé dans le cadre d'une sortie organisée par deux clubs de plongée de la région et à laquelle participait une trentaine de plongeurs. Sur le site, S. a proposé à E. de plonger avec lui. Ce dernier a accepté, en précisant qu'il avait l'intention de plonger profondément et pour une longue durée, soit plus d'une heure. Les deux hommes ne se connaissaient pas, mais S. savait que E. était expérimenté et qu'il avait l'habitude de plonger à de grandes profondeurs. S. est titulaire du brevet de plongeur trois étoiles (P***) délivré à l'époque par la Fédération suisse de sports subaquatiques (FSSS), par l'intermédiaire de sa commission technique (aujourd'hui: CMAS.CH). E. est pour sa part moniteur de plongée deux étoiles (M**) CMAS.CH/FSSS.
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A 13h30 environ, les deux plongeurs se sont immergés. Aucun d'entre eux n'avait effectué auparavant de contrôle précis du matériel de son partenaire. E. était le plus expérimenté et a naturellement pris la direction du binôme. Selon S., sa lampe de plongée s'est mise à présenter des signes de faiblesse et à clignoter à une profondeur de 50 mètres, raison pour laquelle les deux plongeurs ont pris la décision d'entamer une remontée. E. a précisé, pour sa part, que l'incident était survenu à une profondeur de 40 mètres environ, mais que les deux plongeurs avaient "glissé" involontairement à -50 mètres pendant qu'ils faisaient demi-tour. Les deux plongeurs ont atteint la profondeur maximale de leur plongée(-50.9 mètres) après 15 minutes d'immersion. La visibilité y était réduite.
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Rapidement après le début de la remontée, à une profondeur de 45 mètres environ, le détendeur utilisé par S. s'est mis en débit continu, très vraisemblablement en raison d'un phénomène de givrage. S. a pris en bouche son deuxième détendeur et a averti son compagnon selon la procédure habituelle, à savoir en lui tendant à bout de bras le détendeur qui fuyait. E. lui est passé derrière et, par erreur, n'a pas fermé le robinet d'alimentation de ce détendeur, mais celui du détendeur sur lequel S. respirait. Celui-ci s'est trouvé privé d'air et a avalé un peu d'eau, avant de saisir le second détendeur de E. Pendant cette manoeuvre, après 17 minutes de plongée, il a entamé une remontée incontrôlée, d'une profondeur de 44 mètres jusqu'à la surface, en une minute environ. E. l'a suivi en tentant sans succès de freiner la remontée. Arrivé en surface, S. n'a pas réussi à s'immerger à nouveau pour effectuer des paliers de décompression. E. l'a tracté vers la rive et l'a confié à d'autres plongeurs venus à la rescousse, puis à des personnes restées à terre pour assurer la sécurité. Il a ensuite replongé pour effectuer des paliers de décompression. Avant d'atteindre la rive, S. a perdu connaissance. Il a été placé sous oxygène pur et transporté par hélicoptère à l'Hôpital Z. Les médecins y ont constaté des lésions du cerveau et de la moelle épinière en raison d'une décompression incontrôlée lors de la remontée en surface. S. souffre depuis lors d'une tétraplégie incomplète, en ce sens qu'il ne bouge pratiquement pas les jambes et qu'il est limité dans l'utilisation des membres supérieurs.
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La Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents (CNA) a pris en charge le traitement médical et alloué des indemnités journalières. Par décision du 11 décembre 2003, elle a toutefois réduit de 50 % ses prestations en espèces, au motif que l'accident résultait d'une entreprise téméraire. Selon elle, les risques qu'avait pris l'assuré en plongeant à une profondeur de plus de 40 mètres étaient trop élevés pour être entièrement couverts par l'assurance-accidents. Elle a maintenu ce point de vue par décision sur opposition du 7 juillet 2004.
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B. S. a recouru devant le Tribunal des assurances du canton de Vaud. Celui-ci a confié à M., membre du Bureau de prévention des accidents de plongée (BAP), le soin de réaliser une expertise en vue de déterminer le déroulement exact de l'accident, ses causes et le niveau de risque pris par les deux plongeurs. L'expert a établi un rapport le 28 février 2006 et un rapport complémentaire le 15 novembre suivant. Parmi les causes de l'accident, il a mentionné que E. avait fermé par erreur le robinet d'alimentation du détendeur sur lequel respirait S., provoquant une réaction de panique de ce dernier et une remontée beaucoup trop rapide en surface. Il était par ailleurs difficile de préciser si un même incident aurait eu des conséquences semblables lors d'une plongée à une profondeur maximale de 40 mètres.
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Par jugement du 19 février 2007, le Tribunal des assurances du canton de Vaud a rejeté le recours.
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C. S. interjette un recours en matière de droit public contre ce jugement, dont il demande l'annulation. Il conclut, principalement, à ce que l'intimée soit condamnée à lui allouer des prestations en espèces non réduites, et subsidiairement, au renvoi de la cause à la juridiction cantonale pour complément d'instruction et nouveau jugement, sous suite de dépens. L'intimée conclut au rejet du recours, alors que l'Office fédéral de la santé publique a renoncé à se déterminer.
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En cours de procédure, le recourant a produit un jugement rendu le 4 juin 2007 par le Tribunal des districts de V. et W. Ce jugement condamne E. à 40 heures de travail d'intérêt général, avec sursis pendant deux ans, pour lésions corporelles graves par négligence (art. 125 al. 2 CP). Sur le plan civil, il reconnaît E. responsable du préjudice subi par S., mais constate toutefois une faute concomitante du lésé, justifiant de réduire d'un quart l'indemnité mise à la charge du responsable principal. La fixation du montant exact des dommages-intérêts a été renvoyée au for civil. Ce jugement a fait l'objet d'un appel de E. et d'un appel joint du ministère public.
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Le 20 décembre 2007, le Tribunal fédéral a invité le recourant à produire une expertise établie le 28 avril 2005 à la demande du Juge d'instruction pénale de U. par C., brigadier au Service de la navigation de la gendarmerie de T., et à laquelle le mémoire de recours ainsi que le jugement pénal du 4 juin 2007 se référaient largement. L'intimée a renoncé à se déterminer sur ces nouvelles pièces.
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Extrait des considérants: |
Erwägung 3 |
Constitue une négligence grave la violation des règles élémentaires de prudence que toute personne raisonnable eût observées dans la même situation et les mêmes circonstances, pour éviter les conséquences dommageables prévisibles dans le cours ordinaire des choses (ATF 118 V 305 consid. 2a p. 306; FRÉSARD/MOSER-SZELESS, L'assurance-accidents obligatoire, in Schweizerisches Bundesverwaltungsrecht [SBVR], Soziale Sicherheit, 2e éd., Bâle 2006, n. 303 p. 933).
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Erwägung 3.2 |
3.2.2 La jurisprudence qualifie d'entreprises téméraires absolues celles qui, indépendamment de l'instruction, de la préparation, de l'équipement et des aptitudes de l'assuré, comportent des risques particulièrement importants, même si elles sont pratiquées dans les conditions les moins défavorables. Il en va de même des activités risquées dont la pratique ne répond à aucun intérêt digne de protection (SVR 2007 UV n° 4 p. 10, consid. 2.1, U 122/06). Tel est le cas, par exemple, de la participation à une course automobile de côte ou en circuit (ATF 113 V 222; ATF 112 V 44), à une compétition de motocross (RAMA 1991 n° U 127 p. 221, U 5/90), à un combat de boxe ou de boxe thaï (ATFA 1962 p. 280; RAMA 2005 n° U 552 p. 306, U 336/04), ou encore, faute de tout intérêt digne de protection, de l'action de briser un verre en le serrant dans sa main (SVR 2007 UV n° 4 p. 10, consid. 2.1, U 122/06).
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Erwägung 4 |
Avant d'envisager l'application de cette disposition, il convient toutefois de déterminer si la plongée entreprise par l'assuré n'était pas déjà en soi un acte téméraire absolu ou relatif. Une éventuelle négligence commise par l'assuré en cours de plongée est sans pertinence pour trancher cette question.
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Erwägung 5 |
L'expert F., pour sa part, a exposé que l'omission d'effectuer des paliers de décompression est plus dangereuse en altitude qu'en plaine. La différence de pression fond-surface est plus grande en montagne qu'au niveau de la mer, ce qui nécessite des paliers de décompression plus importants pour un même profil de plongée (durée et profondeur). De ce point de vue, une profondeur de plongée de 51 mètres, pour un lac situé à 2'540 mètres d'altitude, équivaut à une plongée à -68 mètres en mer.
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5.2 Compte tenu de ces précisions, il n'est pas exclu de qualifier d'entreprise téméraire absolue la plongée effectuée par le recourant. Les risques qu'un incident survienne sous l'eau (givrage d'un détendeur, en particulier) ou qu'un plongeur réagisse de manière inadéquate en raison d'un phénomène d'ivresse des profondeurs sont plus importants lors d'une plongée profonde. Surtout, un accident de décompression est beaucoup plus probable en cas de remontée abrupte à la suite d'un incident lors d'une plongée profonde, dans un lac d'altitude, que lors d'une plongée dans des conditions plus ordinaires. Il convient toutefois de laisser la question ouverte, d'autant qu'il n'est pas clairement établi si les deux plongeurs ont "glissé" involontairement de -40 mètres jusqu'à près de -51 mètres, comme l'a déclaré E., ou s'ils ont délibérément atteint la profondeur maximale de 50.9 mètres. Quoi qu'il en soit, en effet, le recourant n'a pas pris toutes les mesures nécessaires pour limiter raisonnablement les risques auxquels il s'exposait, ce qui justifie une réduction des prestations en raison d'une entreprise téméraire relative, comme exposé ci-après (consid. 5.3).
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Il ressort de ces observations que les préparatifs de S. et E. avant l'immersion n'étaient pas suffisants, compte tenu du type de plongée qu'ils entendaient effectuer, pour ramener les risques qu'ils prenaient à un niveau raisonnable. En particulier, ils ont omis de suivre une procédure de contrôle réciproque du matériel utilisé.
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Erwägung 6 |
6.1 Le recourant soutient que son partenaire de plongée a commis plusieurs erreurs grossières qui ont interrompu tout lien de causalité entre l'entreprise téméraire qui lui est reprochée et l'accident. Ainsi, E. n'a pas fermé le robinet d'alimentation d'air du détendeur qui fusait, mais celui du détendeur sur lequel respirait S. Cette méprise résulte elle-même du fait que E. n'a pas suivi le tuyau du détendeur qui fusait en formant autour une boucle avec les doigts, de manière à fermer à coup sûr le bon robinet d'alimentation en air. Les experts M. et F. ont exposé qu'il s'agissait de la procédure adéquate en cas d'incident tel qu'un détendeur givré. Enfin, E. n'a rien fait pour gérer le gilet de son partenaire en difficulté et le purger, de manière à éviter une remontée incontrôlée. Sans ces erreurs, l'accident ne se serait pas produit, de sorte qu'il eût même été préférable pour le recourant qu'il plongeât seul.
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L'expert F. a souligné que l'équipement de plongée utilisé par S. présentait une configuration de type "spéléologie", dans laquelle beaucoup de tuyaux sont présents sur un espace relativement restreint (trois tuyaux par détendeur, soit six au total, alors que l'équipement plus classique utilisé par E. n'en comportait que deux par détendeur, soit quatre au total [déclarations de E. à la police cantonale, le 7 septembre 2003]). Il a constaté, par ailleurs, que la position et la disposition de la robinetterie et des détendeurs de S. pouvaient prêter à confusion: la spirale jaune entourant le tuyau moyenne pression de l'un des détendeurs n'avait pas la même longueur que ce tuyau, dont une extrémité était noire (comme celle de l'autre détendeur); le gilet pouvait en outre perturber la poursuite du bon tuyau. Ces particularités ont pu contribuer, avec d'autres facteurs tels qu'une visibilité restreinte en profondeur, les effets de la narcose à l'azote (ivresse des profondeurs), à l'erreur commise par E. Toujours d'après l'expert F., une identification plus claire, mais surtout une explication détaillée lors du contrôle du matériel en surface, auraient peut-être permis d'éviter la confusion lors de la fermeture d'une vanne.
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Il ressort de ces observations que la fermeture, par erreur, de l'alimentation en air du détendeur sur lequel respirait S., ne constitue pas une circonstance à ce point extraordinaire et imprévisible qu'elle exclurait tout lien de causalité adéquate entre l'entreprise téméraire et l'accident. Par ailleurs, savoir si le recourant aurait pu surmonter sans dommage le givrage d'un détendeur s'il s'était trouvé seul n'est pas déterminant. En l'occurrence, le recourant n'a pas plongé seul, mais avec un partenaire. Ce dernier a tenté de fermer le robinet d'alimentation en air du détendeur qui fuyait. Les experts ont exposé que cette manoeuvre était en principe adéquate, mais comportait certains risques d'erreur, d'autant que l'ivresse des profondeurs pouvait réduire la capacité de concentration des plongeurs. Un contrôle réciproque avant la plongée, de manière à ce que chacun ait bien en tête la configuration du matériel de son partenaire, voire un bref rappel des procédures d'urgence, sont de nature à réduire la probabilité d'une telle erreur, surtout si les deux plongeurs n'ont pas l'habitude de collaborer l'un avec l'autre, comme en l'espèce. Dans cette mesure, la méprise de E. a certes constitué un facteur déterminant dans la survenance de l'accident, mais n'était pas sans rapport avec l'entreprise téméraire relative reprochée au recourant.
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Quant à l'omission de purger le gilet du plongeur en difficulté, il est douteux qu'elle puisse être reprochée à E. Rien au dossier n'indique qu'une telle manoeuvre était encore possible, après que S. avait entamé sa brusque remontée. Ce défaut d'assistance ne serait pas, de toute façon, de nature à interrompre le rapport de causalité adéquate litigieux.
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