BGer U 1/2000 |
BGer U 1/2000 vom 04.05.2000 |
«AZA»
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U 1/00 Mh
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IIe Chambre
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composée des Juges fédéraux Lustenberger, Président, Meyer et Ferrari; Addy, Greffier
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Arrêt du 4 mai 2000
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dans la cause
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L.________, recourant, représenté par P.________, avocat,
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contre
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Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents, Fluhmattstrasse 1, Lucerne, intimée,
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et
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Tribunal des assurances du canton de Vaud, Lausanne
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A.- L.________ travaillait comme caissier à la station-service X.________. A ce titre, il était assuré contre le risque d'accident professionnel et non professionnel auprès de la Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents (CNA).
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Le 23 février 1996, L.________ a été victime d'un accident de circulation lors qu'il se rendait en compagnie de ses deux filles à G.________, pour y passer des vacances. Tandis qu'il roulait normalement à une vitesse d'environ 50 km/h, un véhicule arrivant en sens inverse a fait un tête-à-queue sur une plaque de glace et est entré en collision frontale avec son automobile; sous l'effet du choc, celle-ci a fait un demi-tour sur elle-même, avant d'être percutée à l'avant par le véhicule qui la suivait. Bien que son automobile subît un dommage total, ni L.________, ni ses filles qui avaient pris place à l'arrière, ne furent blessés. Après la conclusion d'un arrangement à l'amiable avec les autres personnes impliquées dans l'accident, ils poursuivirent en taxi leur voyage à destination de G.________, où ils passèrent comme prévu une semaine de vacances.
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A son retour de vacances, L.________ a consulté le docteur Z.________, médecin généraliste, pour des cervicalgies et des dorsalgies. Ce dernier lui a prescrit des antalgiques ainsi que des séances de kinésithérapie jusqu'en juillet 1996. Vu la persistance des douleurs, L.________ a ensuite été examiné par le docteur R.________, expert près des tribunaux français, qui a posé le diagnostic de traumatisme cervico-dorsal sans lésion radiologique et a conclu qu'il n'y avait pas d'incapacité de travail (rapport du 29 octobre 1996).
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Initialement pris en charge comme accident-bagatelle
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par la CNA, le cas a fait l'objet d'une rechute annoncée le 9 décembre 1996 suite à l'apparition d'un blocage cervical accompagné, en cas d'efforts prolongés, de secousses musculaires des membres supérieurs. Depuis lors, l'assuré a présenté différentes périodes d'incapacité de travail de durées variables (cf. attestations des docteurs Z.________ et H.________, médecins traitants); du 22 (ou 28) mars au 9 avril 1997, il a par ailleurs effectué un séjour à des fins diagnostiques au service de neurologie du centre hospitalier de Y.________. Vu la complexité du cas, la CNA a confié un mandat d'expertise au docteur F.________, médecin-chef au service de neurologie de l'Institution A.________. Dans un rapport du 12 juin 1997, l'expert a mis en évidence des mouvements involontaires des membres évoquant des tics moteurs simples, en considérant que la relation de causalité naturelle entre ceux-ci et l'accident était peu vraisemblable et que, par ailleurs, la capacité de travail de l'assuré n'était pas diminuée.
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Par décision du 23 juin 1997, la CNA a mis fin à ses prestations avec effet au 28 mars 1997, date à laquelle elle les avait précédemment suspendues dans une lettre du 3 avril 1997 à l'assuré. Celui-ci s'est opposé à cette décision. A cet effet, il a produit des rapports établis les 25 septembre et 18 novembre 1997 par le docteur U.________, neurologue au centre hospitalier de Y.________, dans lesquels ce praticien a posé le diagnostic «de myoclonies spinales à déclenchement post-traumatique». Appelée à donner son appréciation, l'équipe médicale de médecine des accidents de la CNA a nié que les mouvements anormaux de l'assuré fussent d'origine accidentelle, en considérant en outre que, s'agissant des atteintes cervicales, le statu quo sine devait être considéré comme atteint au plus tard lors du prononcé de la décision du 23 juin 1997 mettant fin aux prestations (rapport du 6 février 1998 des docteurs K.________, chirurgien orthopédiste et T.________, neurologue).
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Par décision du 6 mars 1998, la CNA a partiellement
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admis l'opposition dont elle était saisie, en ce sens qu'elle a prolongé la durée de son intervention jusqu'au 23 juin 1997 pour les prestations nécessitées par les cervicalgies de l'assuré.
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B.- L.________ a recouru contre cette décision, en produisant un rapport du 13 juin 1997 du professeur B.________, neurologue auprès des Hôpitaux de O.________, ainsi qu'un article médical consacré à sa pathologie personnelle que ce professeur a co-signé avec le docteur U.________ et qu'il a présenté lors d'un colloque scientifique traitant des mouvements anormaux qui s'est tenu à Paris le 3 décembre 1997.
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Par jugement du 11 juin 1999, le Tribunal des assurances du canton de Vaud a rejeté le recours.
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C.- L.________ interjette recours de droit administratif contre ce jugement, en concluant, sous suite de frais et dépens, principalement - et implicitement - au maintien des prestations d'assurance à charge de la CNA après le 28 mars 1997 (respectivement après le 23 juin 1997 pour celles nécessitées par ses cervicalgies) et, subsidiairement, à la mise en oeuvre d'un complément d'instruction sur le plan médical. Il sollicite en outre le bénéfice de l'assistance judiciaire gratuite.
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La CNA conclut au rejet du recours, tandis que l'Office fédéral des assurances sociales ne s'est pas déterminé.
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Considérant en droit :
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1.- Le droit à des prestations découlant d'un accident assuré suppose d'abord, entre l'événement dommageable de caractère accidentel et l'atteinte à la santé, un lien de causalité naturelle.
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Le jugement entrepris expose correctement les conditions mises par la jurisprudence pour admettre l'existence d'un tel lien de causalité naturelle, si bien qu'il suffit, sur ce point, de renvoyer à ses considérants.
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2.- a) Le recourant soutient que son atteinte à la santé s'inscrit dans une relation de causalité naturelle avec l'accident assuré, motif pris que les troubles dont il souffre sont apparus après la survenance de ce dernier. On ne saurait souscrire à ce point de vue, car cela reviendrait à conférer au principe «post hoc, ergo propter hoc» une valeur probante qu'il n'a pas, comme la Cour de céans a déjà eu l'occasion de le préciser (cf. ATF 119 V 341 sv. consid. 2b/bb; RAMA 1999 no U 341 p. 408 sv. consid. 3b). Selon la jurisprudence, c'est en effet essentiellement à la lumière des renseignements d'ordre médical qu'il convient de trancher la question de la causalité naturelle, en se conformant à la règle du degré de vraisemblance prépondérante appliquée généralement à l'appréciation des preuves dans l'assurance sociale (ATF 119 V 337 consid. 1, 118 V 289 consid. 1b et les références).
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b) Selon le docteur F.________, expert commis par l'intimée, le recourant présente des tics moteurs simples qui «sont très vraisemblablement sans rapport avec (son) traumatisme», vu en particulier le délai de dix mois qui sépare leur apparition de celui-ci (p. 10 de l'expertise). Ces troubles d'ordre neurologique n'entraînent par ailleurs ni incapacité de travail, ni dommage important et durable aux yeux de l'expert (p. 11), qui fonde ses conclusions sur l'étude du dossier médical de l'assuré - y compris les rapports établis par le docteur U.________ sur la base des examens effectués au service de neurologie du centre hospitalier de Y.________ - ainsi que sur les examens clinique et électro-encéphalographique qu'il a lui-même pratiqués ambulatoirement pour les besoins de l'expertise. Le docteur F.________ a en outre pris pleinement en considération, dans son examen, tant l'anamnèse que les plaintes de l'assuré. Aussi bien son rapport remplit-il toutes les exigences auxquelles la jurisprudence soumet la valeur probante d'un tel document (ATF 125 V 352 consid. 3a et la référence), et il n'y a pas lieu de s'écarter de ses conclusions.
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Il y a d'autant moins de raison de ne pas suivre ces dernières qu'elles ont été confirmées par l'équipe médicale de médecine des accidents de la CNA au terme d'une étude approfondie de l'ensemble du dossier. S'appuyant sur la littérature médicale consacrée aux troubles moteurs engendrés par un traumatisme, les docteurs K.________ et T.________ ont en particulier relevé que des myoclonies spinales ne sont que rarement la conséquence d'un traumatisme. De surcroît, l'admission d'un rapport de cause à effet entre un événement accidentel et de tels troubles supposerait, d'une part qu'il existe une étroite connexité temporelle entre ceux-ci et l'accident et, d'autre part, que «d'autres signes d'une atteinte neurologique puissent être objectivés à l'aide de l'imagerie médicale», deux conditions qui font défaut dans le cas du recourant (p. 3 du rapport des docteurs K.________ et T.________). Quant aux troubles cervicaux présentés par ce dernier, les médecins prénommés ont considéré qu'ils ne pouvaient plus être attribués à l'accident après le 23 juin 1997, étant donné leur «décours initial normal parfaitement similaire à celui qu'on escompte après une distorsion simple de colonne cervicale, avec amendement rapide des douleurs nucales en l'espace de quelques semaines» (p. 4 du rapport précité), et vu par ailleurs «la normalité de l'examen clinique de ce segment du rachis» (p. 5 du rapport).
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Certes, le docteur U.________, a conclu à l'existence «de myoclonies spinales à déclenchement post-traumatique» (rapport du 18 novembre 1997). Son opinion n'est toutefois pas de nature à remettre en cause les conclusions du docteur F.________ et des médecins de la CNA, pour lesquels les troubles neurologiques présentés par le recourant ne sont, selon toute vraisemblance, pas une conséquence de son accident. Le docteur U.________ ne dit en effet pas en quoi ces médecins seraient dans l'erreur. En particulier, il ne s'exprime pas sur un des motifs principaux qui a amené ceux-ci à exclure l'existence d'un lien de causalité, à savoir le relatif long laps de temps qui s'est écoulé entre la survenance de l'événement accidentel et l'apparition des troubles neurologiques considérés. A cet égard, la constatation du docteur U.________ selon laquelle l'assuré «présente des myoclonies spinales des quatre membres depuis un traumatisme cervical par coup du lapin survenu en février 1996», (rapport du 25 septembre 1997; voir aussi rapport du 18 novembre 1997) ne correspond pas à la réalité, puisque ces troubles ne se sont manifestées que dix mois après l'accident, comme cela ressort d'ailleurs de l'article scientifique que le docteur U.________ a lui-même co-signé avec le professeur B.________.
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Au reste, dans un rapport du 13 juin 1997, ce dernier
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se contente de mentionner que «l'événement pathologique remarquable est un accident de voiture (survenu) en février 1996», sans toutefois mettre celui-ci en relation de causalité naturelle avec les troubles neurologiques constatés par la suite. Loin de parler de myoclonie spinale posttraumatique, il souligne même le caractère hypothétique du diagnostic de myoclonie spinale, en mentionnant six éléments inhabituels, dont notamment le fait qu'«aucun des examens complémentaires, en particulier de l'imagerie, ne permettent de retenir de lésions médullaires (et qu'il) est donc impossible de conclure, et notamment d'exclure l'hypothèse de manifestations somatoformes». Enfin, dans une lettre du 11 décembre 1997 au docteur U.________, que le professeur B.________ a écrite à la suite de la tenue d'un colloque scientifique traitant des mouvements anormaux où il a présenté la pathologie de l'assuré, il est fait mention que si «l'assistance était d'accord sur le diagnostic (de myoclonie spinale), le mécanisme du facteur déclenchant reste mystérieux»; à cet égard, le professeur B.________ évoque le fait «qu'il y a parfois comme simple facteur causal possible des protrusions discales cervicales», en relevant que l'assuré présente effectivement «de banales protrusions discales cervicales en C2-C3 et en C3-C4».
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C'est dire si les troubles neurologiques du recourant ne sauraient, au degré de la vraisemblance prépondérante, être attribués à l'accident de circulation dont il a été victime en février 1996.
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c) Sur le vu de ce qui précède, les premiers juges ont donc à raison confirmé la décision par laquelle l'intimée a mis fin à son intervention à partir du 28 mars 1997, respectivement à partir du 23 juin 1997 en ce qui concerne les prestations nécessitées par les cervicalgies du recourant.
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Le recours est mal fondé.
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3.- a) Le recourant, qui succombe, ne saurait prétendre une indemnité de dépens pour l'instance fédérale
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(art. 159 al. 1 en corrélation avec l'art. 135 OJ).
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b) Par ailleurs, s'agissant d'un litige qui a trait à l'octroi ou au refus de prestations d'assurance, la procédure est gratuite (art. 134 OJ). Dans cette mesure, la requête du recourant tendant à l'octroi de l'assistance judiciaire gratuite est sans objet.
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En revanche, elle est bien fondée dans la mesure où elle vise la prise en charge des honoraires de son avocat (art. 152 al. 2 en liaison avec l'art. 135 OJ) : sur le vu des pièces du dossier, l'état de besoin est en effet établi et les conclusions du recourant n'étaient pas d'emblée vouées à l'échec. Celui-ci est toutefois expressément rendu attentif au fait qu'il sera tenu de rembourser la caisse du tribunal s'il est ultérieurement en mesure de le faire (art. 152 al. 3 OJ).
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Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances
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p r o n o n c e :
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I. Le recours est rejeté.
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II. Il n'est pas perçu de frais de justice.
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III. L'assistance judiciaire est accordée. P.________ est
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désigné en qualité d'avocat d'office du recourant pour
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la procédure fédérale et ses honoraires, fixés à
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2500 fr., seront supportés par la caisse du tribunal.
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IV. Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au
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Tribunal des assurances du canton de Vaud et à
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l'Office fédéral des assurances sociales.
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Lucerne, le 4 mai 2000
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Au nom du
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Tribunal fédéral des assurances
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Le Président de la IIe Chambre :
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Le Greffier :
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