BGer U 25/1999 |
BGer U 25/1999 vom 22.11.2001 |
[AZA 7]
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U 25/99 Mh
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Ière Chambre
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MM. et Mme les juges Lustenberger, Président, Schön, Meyer,
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Leuzinger et Ferrari. Greffière : Mme Berset
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Arrêt du 22 novembre 2001
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dans la cause
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Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents,
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Fluhmattstrasse 1, 6004 Lucerne, recourante,
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contre
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A.________, intimé, représenté par Maître Jean-David Pelot,
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avocat, rue Caroline 7, 1002 Lausanne,
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et
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Tribunal des assurances du canton de Vaud, Lausanne
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A.- a) A.________ a travaillé en qualité d'étancheur
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au service de la société X.________ SA, depuis le 5 juin
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1990. A ce titre, il était assuré contre les accidents
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auprès de la Caisse nationale suisse d'assurance en cas
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d'accidents (CNA). Le 16 juin 1992, il s'est blessé à la
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main gauche avec une scie circulaire en découpant une
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plaque métallique.
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Dans un rapport du 14 octobre 1992, le docteur
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B.________, médecin d'arrondissement de la CNA, a fait état
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d'une sévère mutilation de la main gauche, en indiquant que
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l'index était globalement hypoesthésique et que la mobilité
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du pouce, raccourci d'un demi-centimètre, était restreinte.
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Un an et demi plus tard, il a constaté que l'activité antérieure
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ne pouvait pas être reprise et qu'une occupation
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manuelle légère ne pourrait être exercée qu'avec un rendement
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diminué, en revanche, un travail de contrôle de
|
surveillance était sans autre exigible. L'atteinte à
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l'intégrité pouvait être évaluée à 20 % (rapport du
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27 avril 1994).
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En date du 3 mai 1994, la CNA a informé l'assuré
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qu'elle mettait fin au paiement des soins médicaux et à
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l'indemnité journalière au 30 juin 1994.
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Par décision du 8 juillet 1994, la CNA a alloué à
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A.________ une rente d'invalidité fondée sur un taux de
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33,33 % depuis le 1er juillet 1994, ainsi qu'une indemnité
|
pour atteinte à l'intégrité physique de 20 %. Saisie d'une
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opposition de l'assuré, la CNA l'a rejetée par décision du
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17 février 1995.
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b) Par décision du 7 décembre 1994, et motivation du
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8 décembre 1994, le secrétariat de l'AI a informé l'assuré
|
qu'il lui allouait une rente entière de l'assurance-invalidité
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fondée sur un taux de 100 %, du 16 juin 1993 au
|
30 juin 1994 (seulement), et qu'elle n'allouerait plus de
|
rente par la suite, dès lors que le degré d'invalidité
|
retenu par la CNA depuis le 1er juillet 1994 était de
|
33,33 % et que, s'agissant d'une même atteinte, ce taux
|
liait l'assurance-invalidité.
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B.- A.________ a recouru, par acte daté du 6 janvier
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1995, devant le Tribunal des assurances du canton de Vaud
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contre la décision de l'AI du 7 décembre 1994, en concluant
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à l'octroi d'une rente entière d'invalidité.
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Par mémoire du 3 avril 1995, le prénommé a recouru
|
devant la même autorité contre la décision sur opposition
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de la CNA du 17 février 1995, en concluant à l'octroi d'une
|
rente d'invalidité fondée sur un taux d'invalidité de 80 %
|
et d'une IPAI de 50 %.
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Par décision du 15 août 1995, les juges cantonaux ont
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prononcé la jonction des deux causes.
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En cours d'instruction, une expertise psychiatrique a
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été confiée aux docteurs C.________ et D.________, du
|
Département Universitaire de Psychiatrie Adulte (ciaprès
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: DUPA). Dans leur rapport d'expertise du 15 mars
|
1996, ces praticiens concluent à une incapacité de travail
|
totale due à des troubles psychiques, survenus environ deux
|
semaines après l'accident, qui sont entièrement attribuables
|
à l'accident.
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La CNA a produit un rapport du 8 mai 1996 du docteur
|
E.________, psychiatre, qui conteste la valeur de
|
l'expertise. Dans un rapport complémentaire du 13 novembre
|
1997, le docteur C.________ s'est exprimé notamment sur
|
l'avis du docteur E.________ du 8 mai 1996, tout en
|
maintenant les conclusions résultant du rapport
|
d'expertise.
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Par jugement du 3 mars 1998, la Cour cantonale a
|
considéré que A.________ avait droit à une rente d'invalidité
|
de la CNA fondée sur une incapacité de gain de 100 %
|
et à une IPAI correspondant à une atteinte à l'intégrité de
|
30 %. Elle a jugé que le prénommé avait également droit à
|
une rente entière de l'assurance-invalidité. Elle a en
|
conséquence annulé les deux décisions administratives
|
litigieuses et renvoyé la cause respectivement à la CNA et
|
à l'Office de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud
|
(ci-après : OAI), pour nouvelle décision conformément aux
|
considérants. Les juges cantonaux ont retenu en particulier
|
que l'assuré souffrait de troubles psychiques en relation
|
de causalité naturelle et adéquate avec l'accident entraînant
|
une incapacité totale de travail.
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C.- La CNA interjette recours de droit administratif
|
contre ce jugement, dont elle demande l'annulation, en
|
concluant au rétablissement de sa décision sur opposition
|
du 17 février 1995.
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A.________ conclut au rejet du recours, et sollicite
|
le bénéfice de l'assistance judiciaire gratuite. L'OAI
|
propose l'admission du recours, en alléguant que l'on peut
|
exiger de l'intimé qu'il fasse preuve de bonne volonté et
|
mette à profit ses capacités de travail dans une activité
|
adaptée. L'Office fédéral des assurances sociales ne s'est
|
pas déterminé.
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D.- La Ière Chambre du Tribunal fédéral des assurances
|
a tenu une audience publique ouverte aux parties le 22 novembre
|
2001.
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Considérant en droit :
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1.- Le litige porte sur le taux de la rente d'invalidité
|
et sur le taux de l'atteinte à l'intégrité auxquelles
|
l'intimé peut prétendre de la part de l'assurance-accidents.
|
En revanche, dès lors que l'OAI n'a pas recouru
|
devant la cour de céans, le droit à la rente de l'assurance-invalidité
|
n'est plus litigieux.
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2.- Fondant son appréciation sur l'expertise du
|
15 mars 1996 des médecins du DUPA qu'elle avait ordonnée,
|
la Cour cantonale a retenu que l'accident du 16 juin 1992
|
avait entraîné des suites psychiques pour l'assuré. Dès
|
lors que celles-ci étaient en relation de causalité naturelle
|
et adéquate avec l'accident, l'assuré avait droit,
|
s'agissant de la rente d'invalidité, à une rente complète,
|
son incapacité de travail et de gain étant de 100 %.
|
La recourante conteste pour l'essentiel que sa responsabilité
|
puisse être engagée pour les éventuelles suites
|
psychiques de cet accident.
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3.- a) L'assuré totalement ou partiellement incapable
|
de travailler à la suite d'un accident a droit à une indemnité
|
journalière (art. 16 al. 1 LAA). Par ailleurs, si
|
l'assuré devient invalide à la suite d'un accident, il a
|
droit à une rente d'invalidité (art. 18 al. 1 LAA).
|
Le droit à des prestations découlant d'un accident
|
assuré suppose d'abord, entre l'événement dommageable de
|
caractère accidentel et l'atteinte à la santé, un lien de
|
causalité naturelle. Cette exigence est remplie lorsqu'il y
|
a lieu d'admettre que, sans cet événement accidentel, le
|
dommage ne se serait pas produit du tout, ou qu'il ne
|
serait pas survenu de la même manière. Il n'est pas nécessaire,
|
en revanche, que l'accident soit la cause unique ou
|
immédiate de l'atteinte à la santé; il faut et il suffit
|
que l'événement dommageable, associé éventuellement à
|
d'autres facteurs, ait provoqué l'atteinte à la santé
|
physique ou psychique de l'assuré, c'est-à-dire qu'il se
|
présente comme la condition sine qua non de celle-ci.
|
Savoir si l'événement assuré et l'atteinte à la santé sont
|
liés par un rapport de causalité naturelle est une question
|
de fait, que l'administration ou, le cas échéant, le juge
|
examine en se fondant essentiellement sur des renseignements
|
d'ordre médical, et qui doit être tranchée en se
|
conformant à la règle du degré de vraisemblance prépondérante,
|
appliquée généralement à l'appréciation des preuves
|
dans l'assurance sociale. Ainsi, lorsque l'existence d'un
|
rapport de cause à effet entre l'accident et le dommage
|
paraît possible, mais qu'elle ne peut pas être qualifiée de
|
probable dans le cas particulier, le droit à des prestations
|
fondées sur l'accident assuré doit être nié (ATF
|
119 V 337 consid. 1, 118 V 289 consid. 1b et les références).
|
b) Le critère déterminant pour apprécier la valeur
|
probante d'un rapport médical est que les points litigieux
|
importants aient fait l'objet d'une étude fouillée, que le
|
rapport se fonde sur des examens complets, qu'il prenne
|
également en considération les plaintes exprimées, qu'il
|
ait été établi en pleine connaissance du dossier (anamnèse),
|
que la description des interférences médicales soit
|
claire et enfin que les conclusions de l'expert soient bien
|
motivées (ATF 122 V 160 consid. 1c et les références). Au
|
demeurant, l'élément déterminant pour la valeur probante
|
n'est ni l'origine du moyen de preuve ni sa désignation
|
comme rapport ou comme expertise, mais bel et bien son
|
contenu (ATF 125 V 352 consid. 3a et les références).
|
c) En l'espèce, on peut sérieusement douter que les
|
conditions permettant de retenir le caractère probant du
|
rapport des médecins du DUPA soient données.
|
Selon le diagnostic de ces médecins, l'intimé présentait
|
un état de stress post-traumatique (F 43.1), un épisode
|
dépressif moyen avec syndrome somatique (F 32.11) et
|
un trouble spécifique de la personnalité (immaturité,
|
F 60.8); enfin, il n'y avait pas de facteurs étrangers à
|
l'accident.
|
Or, le premier de ce diagnostic se fonde pour l'essentiel
|
sur le fait que, selon ses dires, l'assuré a présenté
|
deux semaines après l'accident, de manière hebdomadaire,
|
des cauchemars récidivants où il voyait sa main ensanglantée.
|
Cette affirmation est cependant en contradiction avec
|
les constatations du 16 décembre 1992 des docteurs
|
F.________ et G.________ du département psychosomatique de
|
la Clinique Y.________, selon lesquels l'assuré a déclaré
|
ne pas avoir subi de choc psychique lors de l'accident et
|
n'avoir pas de problèmes de sommeil ni de cauchemars. Dans
|
ces conditions, les critiques du docteur E.________ sur ce
|
premier diagnostic et sur la méthode utilisée à cette fin
|
peuvent contribuer à mettre en doute cet avis médical. Par
|
ailleurs, le diagnostic de dysharmonie évolutive et de
|
personnalité immature ne paraît pas totalement crédible
|
dans la mesure où il est décrit comme découlant de l'accident.
|
Enfin les conclusions des médecins quant à la capacité
|
de travail sont, d'une certaine manière, affaiblies
|
par les déclarations de la doctoresse C.________ quant à
|
ses possibilités d'en juger (cf. le rapport d'expertise
|
complémentaire du 13 novembre 1997, p. 10) ainsi que par
|
les constatations des spécialistes du COPAI du 7 février
|
1994.
|
Il n'y a toutefois pas lieu d'examiner plus avant et
|
en détail ces questions portant sur le diagnostic exact et
|
les conséquences de l'atteinte psychique sur la capacité de
|
travail, dès lors que, comme on le verra ci-dessous, les
|
conditions permettant de retenir un rapport de causalité
|
adéquate ne sont pas réunies.
|
4.- a) Pour parer aux incertitudes liées aux nombreux
|
cas d'espèce et au risque d'inégalité de traitement, la
|
jurisprudence a dégagé des critères objectifs qui permettent
|
de juger du caractère adéquat des troubles psychiques
|
consécutifs à un accident. Elle a tout d'abord classé les
|
accidents en trois catégories, en fonction de leur déroulement
|
: les accidents insignifiants ou de peu de gravité,
|
les accidents de gravité moyenne et les accidents graves.
|
En présence d'un accident de gravité moyenne, comme
|
l'ont à juste titre qualifié en l'espèce les premiers
|
juges, il faut prendre en considération un certain nombre
|
de critères, dont les plus importants sont les suivants :
|
- les circonstances concomitantes particulièrement
|
dramatiques ou le caractère particulièrement impressionnant
|
de l'accident;
|
- la gravité ou la nature particulière des lésions
|
physiques, compte tenu notamment du fait qu'elles sont
|
propres, selon l'expérience, à entraîner des troubles
|
psychiques;
|
- la durée anormalement longue du traitement médical;
|
- les douleurs physiques persistantes;
|
- les erreurs dans le traitement médical entraînant
|
une aggravation notable des séquelles de l'accident;
|
- les difficultés apparues en cours de guérison et les
|
complications importantes;
|
- le degré et la durée de l'incapacité de travail due
|
aux lésions physiques.
|
Tous ces critères ne doivent pas être réunis pour que
|
la causalité adéquate soit admise. Un seul d'entre eux peut
|
être suffisant si l'on se trouve à la limite des accidents
|
graves. Inversément, en présence d'un accident se situant à
|
la limite des accidents de peu de gravité, les circonstances
|
à prendre en considération doivent se cumuler ou
|
revêtir une intensité particulière pour que le caractère
|
adéquat de l'accident puisse être admis (Frésard, L'assurance-accidents
|
obligatoire, in : Schweizerisches Bundesverwaltungsrecht
|
(SBVR), no 39 et les références).
|
b) La question de savoir si le deuxième des critères
|
énoncés ci-dessus est à prendre en considération en matière
|
d'accidents de la main ou des mains a reçu des réponses
|
diverses dans la jurisprudence du Tribunal fédéral des
|
assurances. Ainsi dans un arrêt non publié M. du 13 juin
|
1996 (U 233/95), un serrurier avait eu la main droite
|
coincée dans une machine avec comme résultat une amputation
|
totale du pouce, de l'index, du majeur et de l'auriculaire
|
et partielle de l'annulaire. Le tribunal avait admis la
|
causalité adéquate avec les suites psychiques survenues
|
quinze mois plus tard; il avait considéré que cet accident
|
se situait à la limite supérieure des accidents de moyenne
|
gravité et que, notamment, le critère de la nature particulière
|
de la blessure était donné dès lors que la main
|
dominante, déterminante pour cette profession, avait été
|
lésée, que l'accident obligeait à un changement de profession
|
et que les blessures portaient atteinte au fondement
|
de l'existence.
|
L'arrêt non publié K. du 14 novembre 1996 (U 5/94)
|
concernait un scieur dont la main gauche avait été prise
|
dans la chaîne de la machine; l'auriculaire avait été
|
amputé, alors que l'annulaire douloureux ne pouvait plus
|
être utilisé et qu'une atrophie des autres doigts persistait.
|
La causalité adéquate entre cet accident de moyenne
|
gravité et les suites psychiques avait été niée, l'application
|
du critère de la nature particulière de la blessure
|
étant écartée. Les mêmes conclusions ont été retenues dans
|
l'arrêt non publié K. du 17 décembre 1996 (U 185/96). Un
|
aide-serrurier avait subi un accident avec une scie entraînant
|
l'amputation des extrémités de deux doigts à la main
|
droite et de trois doigts à la main gauche.
|
Enfin l'arrêt I. du 23 mars 1999 (RAMA 1999 U 346
|
p. 428) concernait un aide-scieur dont la main gauche avait
|
été atteinte par la machine, lui occasionnant une amputation
|
du petit doigt, de la moitié de l'annulaire et des
|
deux-tiers de l'index. L'accident étant considéré comme de
|
gravité moyenne à la limite supérieure, la causalité adéquate
|
avec les suites psychiques avait été admise. Le
|
critère de la nature particulière de la blessure avait été
|
retenu dès lors que l'atteinte touchait la main d'un
|
ouvrier manuel, organe qui lui permettait l'exercice de sa
|
profession et que la perte pratiquement de cet organe
|
signifiait la perte de l'indépendance économique.
|
Ainsi que cela ressort de ces arrêts, l'application de
|
ce critère dépend pour une bonne part aussi des circonstances
|
du cas, si bien que l'on ne saurait, de manière
|
générale et définitive, en admettre ou au contraire en
|
exclure l'application dans le cas des accidents de la main.
|
Il n'en demeure pas moins que pour être retenu, ce
|
critère postule d'abord l'existence de lésions physiques
|
graves ou, s'agissant de la nature particulière des lésions
|
physiques, d'atteintes à des organes auxquels l'homme attache
|
normalement une importance subjective particulière
|
(cf. dans ce sens Murer/Kind/Binder : Kriterien zur Beurteilung
|
des adäquaten Kausalzusammenhanges bei erlebnisreaktives
|
(psychogenen) Störungen nach Unfällen, in SZS
|
1993, p. 142). En outre, l'appel à l'expérience a pour but
|
de distinguer la simple relation de causalité naturelle
|
entre ces lésions physiques et les suites psychiques
|
éventuelles de la relation de causalité adéquate, seules
|
les conséquences qualifiées pouvant être retenues à ce
|
titre (sur le but visé par la causalité adéquate, cf ATF
|
123 V 102, consid. 3b).
|
c) En l'occurrence, l'intimé présente, pour l'essentiel,
|
un petit raccourcissement du pouce phalangien d'un
|
demi-centimètre lié à une arthrodèse en légère flexion de
|
l'IP, associés à un index enraidi en extension présentant
|
une sensibilité médiocre, douloureux et donc exclu. Sa main
|
est entière avec un aspect de peau lisse, tendue, dans la
|
zone du pouce et de l'index, ainsi que quelques cicatrices.
|
Bien qu'il n'utilise pas sa main gauche en situation de
|
travail, l'assuré effectue les gestes de la vie courante de
|
manière naturelle, sans aucune retenue et sans crainte de
|
ressentir des douleurs au niveau de la main gauche.
|
Considéré comme de gravité moyenne, l'accident a
|
entraîné des blessures à la main gauche de gravité relative.
|
Certes l'atteinte touche un organe important chez un
|
ouvrier manuel mais la nature de la blessure, au vu de ses
|
conséquences purement physiques, n'est cependant pas telle
|
que, selon l'expérience, ce critère puisse être in casu
|
retenu. Les précédents évoqués ci-dessus ne permettent au
|
demeurant pas d'aboutir à d'autres conclusions.
|
Par ailleurs, le traitement médical n'a pas été particulièrement
|
long, le docteur H.________ de la Clinique
|
Z.________, constatant le 13 octobre 1992 déjà, que
|
l'évolution était favorable en ce qui concerne le pouce
|
gauche. Aucune erreur médicale ne ressort du dossier. En
|
définitive, comme aucune autre circonstance énumérée cidessus
|
(cf. consid. 4a) ne peut être retenue, l'existence
|
d'une relation de causalité adéquate entre l'accident
|
survenu le l6 juin 1992 et les troubles psychiques doit
|
être niée.
|
5.- Le taux d'invalidité résultant des troubles
|
physiques subis par l'assuré à la main gauche, - qui seuls
|
sont en rapport de causalité naturelle et adéquate avec
|
l'accident du 16 juin 1992 - n'est pas remis en cause en
|
tant que tel en procédure fédérale. La comparaison des
|
revenus à laquelle a procédé la recourante n'est en effet
|
pas critiquable si bien que l'on peut s'y référer.
|
6.- La recourante conteste également le taux d'atteinte
|
à l'intégrité retenu par les premiers juges, leur
|
reprochant de s'être écartés sans raison valable de l'estimation
|
du médecin.
|
a) Aux termes de l'art. 25 al. 1 LAA, l'indemnité pour
|
atteinte à l'intégrité est fixée en fonction de la gravité
|
de l'atteinte, qui s'apprécie d'après les constatations
|
médicales. C'est dire que chez tous les assurés présentant
|
le même status médical, l'atteinte à l'intégrité est la
|
même; elle est évaluée de manière abstraite, égale pour
|
tous, de sorte qu'il n'est pas nécessaire de tenir compte
|
des inconvénients spécifiques qu'elle entraîne pour l'assuré
|
concerné (ATF 115 V 147 consid. 1, 113 V 221 consid. 4b
|
et les références).
|
L'annexe 3 à l'OLAA comporte un barème des atteintes à
|
l'intégrité en pour cent du montant maximum du gain assuré.
|
Ce barème - reconnu conforme à la loi - ne constitue pas
|
une énumération exhaustive (ATF 124 V 32 consid. 1b et les
|
références). Il représente une «règle générale» (ch. 1
|
al. 1 de l'annexe). Pour les atteintes qui sont spéciales
|
ou qui ne figurent pas dans la liste, il y a lieu d'appliquer
|
le barème par analogie, en tenant compte de la gravité
|
de l'atteinte (ch. 1 al. 2 de l'annexe). A cette fin, la
|
Division médicale de la CNA a établi plusieurs tables
|
d'indemnisation des atteintes à l'intégrité selon la LAA
|
(Informations de la Division médicale no 57 à 59). Sans
|
lier le juge, ces tables sont néanmoins compatibles avec
|
l'annexe 3 OLAA (ATF 124 V 211 consid. 4a/cc) et permettent
|
de procéder à une appréciation plus nuancée, lorsque l'atteinte
|
d'un organe n'est que partielle.
|
Selon le barème figurant à l'annexe 3 OLAA, l'atteinte
|
à l'intégrité, calculée en pour-cent, s'élève à 20 % en cas
|
de perte totale du pouce. La table d'indemnisation no 3
|
des Informations de la division médicale de la CNA no 57,
|
relative à la perte d'une partie du pouce et d'une partie
|
de l'index, prévoit une atteinte à l'indemnité de 20 %
|
(figure 18).
|
b) En l'espèce, les atteintes subies par l'assuré,
|
soit un raccourcissement du pouce d'un demi-centimètre et
|
une vascularisation capillaire ralentie dans le pouce et
|
l'index - les deux organes présentant une diminution de
|
sensibilité et, le pouce, une raideur en extension -
|
correspondent à la situation représentée par la figure 18
|
de la table no 3. Il n'y a pas de raison de s'écarter du
|
pourcentage qui y est indiqué, dès lors que le médecin
|
d'arrondissement a apprécié correctement les atteintes et
|
proposé un taux de 20 %, conforme au barème.
|
Sur ce point également, le jugement sera annulé.
|
7.- Vu la nature du litige, la procédure est gratuite
|
(art. 134 OJ). Par ailleurs, les conditions de l'assistance
|
judiciaire gratuite sont réunies. Le requérant est cependant
|
rendu attentif au fait qu'il devra rembourser la
|
caisse du tribunal s'il devient ultérieurement en mesure de
|
la faire (art. 152 al. 3 OJ).
|
Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances
|
p r o n o n c e :
|
I. Le recours est admis. Les chiffres Ia, Ib et Ic du
|
dispositif du jugement du 3 mars 1998 du Tribunal des
|
assurances du canton de Vaud, ainsi que le chiffre III
|
dans la mesure où il concerne la recourante, sont
|
annulés.
|
II. Il n'est pas perçu de frais de justice.
|
III. L'assistance judiciaire est accordée à l'intimé. Les
|
honoraires de Maître Jean-David Pelot sont fixés à
|
2500 fr. pour la procédure fédérale et seront supportés
|
par la caisse du tribunal.
|
IV. Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au
|
Tribunal des assurances du canton de Vaud, à la Caisse
|
cantonale vaudoise de compensation, à l'Office de
|
l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud et à
|
l'Office fédéral des assurances sociales.
|
Lucerne, le 22 novembre 2001
|
Au nom du
|
Tribunal fédéral des assurances
|
Le Président de la Ière Chambre :
|
La Greffière :
|