BGer 1P.601/2003 |
BGer 1P.601/2003 vom 26.11.2003 |
Tribunale federale
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{T 0/2}
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1P.601/2003 /col
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Arrêt du 26 novembre 2003
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Ire Cour de droit public
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Composition
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MM. les Juges Aemisegger, Président de la Cour et Président du Tribunal fédéral, Aeschlimann et Reeb.
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Greffier: M. Kurz.
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Parties
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A.________,
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recourant,
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contre
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Chancellerie d'Etat de la République et canton
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de Genève, Service des votations et élections,
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case postale 460, 1211 Genève 24,
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Médiateur suppléant en matière d'information du public et d'accès aux documents, Secrétariat, p.a. Chancellerie d'Etat, Direction des affaires juridiques, case postale 3964, 1211 Genève 3,
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Tribunal administratif de la République et canton
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de Genève, rue du Mont-Blanc 18, case postale 1956,
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1211 Genève 1.
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Objet
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consultation et copie de documents auprès de l'administration cantonale,
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recours de droit public contre l'arrêt du Tribunal administratif de la République et canton de Genève du 26 août 2003.
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Faits:
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A.
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Le 11 novembre 2002, A.________, avocat genevois, a été autorisé à consulter les comptes des partis socialiste et libéral auprès du Service genevois des votations et élections (SVE). La levée de copies a en revanche été refusée. Le médiateur institué par la loi genevoise sur l'information du public et l'accès aux documents (LIPAD) a été saisi et a, le 12 mars 2003, invité le SVE à rendre une décision susceptible de recours.
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Le 24 mars 2003, le SVE s'est déclaré incompétent pour statuer sur la requête de levée de copies, dès lors que les comptes des partis étaient destinés à l'Inspection cantonale des finances (IFC). Le refus de copier les documents a toutefois été confirmé sur le fond: selon l'art. 29A al. 5 de la loi genevoise sur l'exercice des droits politiques (LEDP), les comptes déposés par les partis politiques pouvaient être consultés par toute personne exerçant ses droits politiques dans le canton; autoriser la levée de copies permettrait une diffusion à l'ensemble du public, ce qui viderait de son sens la réserve posée par la loi. En outre, la consultation n'avait de sens que dans la perspective d'une votation, et non après la clôture du scrutin. La LIPAD ne garantissait pas l'information sur l'activité des partis politiques, même si les documents étaient déposés en main d'un organe de l'Etat. Le SVE indiquait que sa décision pouvait faire l'objet d'un recours au Tribunal administratif genevois dans les six jours.
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B.
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A.________ a recouru par acte du 22 avril 2003, en estimant que le délai de recours était de trente jours, conformément à la loi genevoise sur la procédure administrative (LPA), à laquelle renvoie l'art. 37 LIPAD.
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Par arrêt du 26 août 2003, le Tribunal administratif a rejeté le recours. S'agissant d'une décision d'application de la LIPAD, le délai de recours de six jours n'était pas applicable; les conclusions en constatation étaient irrecevables. Le SVE s'était déclaré incompétent, mais avait également statué sur le fond. Pour sa part, l'Administration des finances, interpellée par le Tribunal administratif, avait refusé de prendre position sur le fond, de sorte qu'il se justifiait de statuer "par économie de procédure". La LIPAD ne s'appliquait pas aux activités des personnes privées indépendantes, et notamment pas aux partis politiques; les comptes de ceux-ci n'étaient pas des documents au sens de cette loi car ils ne portaient pas sur l'accomplissement d'une tâche publique. L'art. 29A al. 5 LEDP restreignait le droit d'accès aux citoyens, et l'obtention de copies permettrait une diffusion des informations à des personnes qui ne sont pas titulaires des droits politiques dans le canton, ce que la loi tenait précisément à éviter.
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C.
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A.________ forme un recours de droit public contre ce dernier arrêt, dont il requiert l'annulation. Il invoque la liberté d'information et l'interdiction de l'arbitraire.
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Le Tribunal administratif persiste dans les termes et conclusions de son arrêt. Le médiateur a renoncé à se déterminer. La Chancellerie d'Etat conclut au rejet du recours dans la mesure où il est recevable; elle demande d'écarter du dossier les pièces produites par le recourant pour la première fois devant le Tribunal fédéral.
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Le Tribunal fédéral considère en droit:
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1.
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Le recours est interjeté dans le délai et les formes utiles contre un arrêt final rendu en dernière instance cantonale. Le recourant, auquel l'autorité a dénié le droit de lever des copies de documents remis en consultation, a qualité (art. 88 OJ) pour se plaindre à ce sujet tant d'une violation de la liberté d'information que d'une application arbitraire des dispositions du droit cantonal conférant un droit à la consultation, respectivement à la levée de copies de documents.
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1.1 La décision de première instance est un refus d'entrer en matière, les considérations sur le fond n'ayant été émises qu'à titre subsidiaire. Toutefois, le Tribunal administratif a statué sur le fond, "par économie de procédure"; il a par ailleurs considéré que le délai de recours de six jours n'était pas applicable, car la décision attaquée était fondée sur la LIPAD, tout en niant l'application de cette loi. Ces points ne sont pas remis en cause à ce stade, seule étant litigieuse la solution adoptée sur le fond par le Tribunal administratif. La Chancellerie ne saurait dès lors tirer argument du fait que le SVE n'était, selon elle, pas compétent pour autoriser la consultation des documents.
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1.2 La Chancellerie d'Etat demande d'écarter du dossier les pièces non produites par le recourant en instance cantonale. Elle fait référence à un "rapport explicatif du 31 janvier 2000", qui serait en réalité le commentaire de la Commission d'experts à l'appui de l'avant-projet de la LIPAD, ne tenant pas compte des nombreuses modifications apportées par la suite au projet. Ce document ne fait effectivement pas partie des pièces déposées par le recourant devant le Tribunal administratif. Il n'y a toutefois pas besoin de rechercher s'il s'agit d'un véritable moyen de preuve à l'appui d'une nouvelle allégation, ou d'un document officiel et accessible destiné à appuyer l'interprétation du recourant. Comme cela est relevé ci-dessous, le sort du recours peut être résolu indépendamment de la LIPAD, de sorte que le document produit apparaît de toute façon sans pertinence.
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2.
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Intitulé "transparence", l'art. 29A LEDP a la teneur suivante:
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1 Tout parti politique, association ou groupe qui dépose des listes de candidats pour des élections fédérales, cantonales ou municipales soumet chaque année ses comptes annuels à l'inspection cantonale des finances, avec la liste de ses donateurs.
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...
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5 Les comptes déposés et les listes des donateurs sont consultables par toute personne exerçant ses droits politiques dans le canton.
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2.1 Pour le Tribunal administratif, la consultation prévue par cette disposition doit permettre aux citoyens d'exercer leurs droits politiques en connaissant notamment le soutien financier dont disposent leurs élus ou les formations politiques. Le droit d'accès ne serait pas ouvert au public en général, et la levée de copies des comptes permettrait une diffusion des informations à des personnes non titulaires des droits politiques.
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2.2 Le recourant invoque tant la liberté d'information que l'interdiction de l'arbitraire. C'est ce second grief qui doit être examiné en premier lieu. Le recourant argumente principalement sous l'angle de la LIPAD, en affirmant que les partis politiques seraient des institutions - ou, à tout le moins, des organismes privés - au sens de l'art. 2 de cette loi, que leurs comptes constitueraient des documents puisqu'ils sont soumis au contrôle de l'Etat, et que cette loi, postérieure à la LEPD, ne permettrait pas de restreindre le droit d'emporter des documents. Le recourant se plaint également d'arbitraire dans l'application de l'art. 29A LEPD. Il estime que si, à l'instar du registre foncier, la consultation n'est ouverte qu'à un cercle déterminé de personnes, il ne serait pas admissible de refuser la levée de copies par crainte de la diffusion des renseignements à des tiers non autorisés. En l'occurrence, l'autorité avait autorisé la prise de notes, ce qui permettait de recopier intégralement les documents, de sorte que le risque de divulgation ne serait pas écarté.
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2.3 Il y a arbitraire, prohibé par l'art. 9 Cst., lorsque la décision attaquée viole gravement une règle ou un principe juridique clair et indiscuté ou lorsqu'elle contredit d'une manière choquante le sentiment de la justice ou de l'équité. Le Tribunal fédéral ne s'écarte de la solution retenue par l'autorité cantonale de dernière instance que si elle est insoutenable ou en contradiction évidente avec la situation de fait, si elle a été adoptée sans motif objectif ou en violation d'un droit certain. Par ailleurs, il ne suffit pas que les motifs de la décision attaquée soient insoutenables, encore faut-il que celle-ci soit arbitraire dans son résultat (ATF 129 I 9 consid. 2.1 p. 9; 128 I 273 consid. 2.1 p. 275 et la jurisprudence citée).
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2.4 Certes, l'art. 29A al. 5 LEDP ne permet pas expressément la levée de copies des documents dont la consultation est autorisée. Toutefois, selon la jurisprudence relative au droit d'être entendu, lorsqu'il existe un droit à la consultation de documents, ce droit implique la possibilité de faire des photocopies, dans la mesure où il n'en résulte pas un travail excessif pour l'autorité, pour autant qu'aucun intérêt prépondérant ne s'y oppose, et sous réserve d'un abus de droit de l'intéressé (ATF 116 Ia 325 consid. 3a p. 326ss; 117 Ia 424 consid. 28b p. 429). Le droit d'obtenir des copies apparaît ainsi comme le corollaire du droit d'accès au dossier, et il ne peut être refusé que pour des motifs pertinents.
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Force est de constater qu'en l'espèce, les raisons invoquées par la cour cantonale n'apparaissent pas suffisantes. En effet, le droit d'accès comporte en lui-même un risque de divulgation des renseignements, en particulier lorsque le justiciable est également autorisé à prendre des notes. Il lui est en effet loisible de copier intégralement à la main les documents consultés, et d'en établir une version dactylographiée dont rien ne peut empêcher par la suite une large diffusion. Dans ces conditions, l'obtention de photocopies sur place constitue une simple facilité, et on ne voit pas pour quelle raison celle-ci a été refusée au recourant. La qualité de citoyen genevois est certes une condition d'accès aux documents, mais celle-ci ne saurait justifier une restriction à leur utilisation. De toute façon, le refus opposé au recourant n'est manifestement pas apte à atteindre le but apparemment recherché. Il apparaît par conséquent arbitraire.
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3.
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Le recours de droit public doit par conséquent être admis pour ce motif, sans qu'il y ait lieu d'examiner les autres griefs soulevés (application de la LIPAD, et portée de la liberté d'information). Le recourant a procédé personnellement et n'a pas droit à des dépens. Conformément à l'art. 156 al. 2 OJ, il n'est pas perçu d'émolument judiciaire.
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Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
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1.
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Le recours est admis et l'arrêt attaqué est annulé.
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2.
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Il n'est pas perçu d'émolument judiciaire, ni alloué de dépens.
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3.
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Le présent arrêt est communiqué en copie au recourant, à la Chancellerie d'Etat, au Médiateur suppléant en matière d'information du public et d'accès aux documents et au Tribunal administratif de la République et canton de Genève.
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Lausanne, le 26 novembre 2003
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Au nom de la Ire Cour de droit public
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du Tribunal fédéral suisse
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Le président: Le greffier:
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