BGer 1A.219/2004 |
BGer 1A.219/2004 vom 21.09.2005 |
Tribunale federale
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{T 0/2}
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1A.219/2004 / 1P.543/2004 /fzc
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Arrêt du 21 septembre 2005
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Ire Cour de droit public
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Composition
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MM. les Juges Féraud, Président,
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Aeschlimann et Reeb.
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Greffier: M. Jomini.
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Parties
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Hoirs de X.________, soit:
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A.________,
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B.________,
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recourants,
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tous deux représentés par Me Jean-Michel Henny, avocat,
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contre
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Département de la sécurité et de l'environnement
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du canton de Vaud, Service des eaux, sols et assainissement (SESA), rue du Valentin 10, 1014 Lausanne,
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Tribunal administratif du canton de Vaud,
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avenue Eugène-Rambert 15, 1014 Lausanne.
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Objet
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protection de la nature, zones alluviales,
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recours de droit administratif (1A.219/2004) et recours
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de droit public (1P.543/2004) contre l'arrêt du Tribunal administratif du canton de Vaud du 23 août 2004.
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Faits:
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A.
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Les hoirs de X.________, soit A.________ et B.________ (ci-après: les hoirs X.________), sont propriétaires de la parcelle n° xxx du registre foncier, au lieu-dit "E.________" sur le territoire de la commune de Bellerive. Ce bien-fonds est riverain du lac de Morat. Il s'y trouve une maison (maison familiale, résidence d'agrément), à quelques dizaines de mètres de la grève.
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B.
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Le 15 janvier 1962, le Département des travaux publics du canton de Vaud a accordé à X.________ une "autorisation pour usage du domaine public" (n° xxx), lui permettant de "maintenir sur le domaine public, au droit de sa propriété (...), les installations suivantes: 1) 1 passerelle d'embarquement; 2) 1 estacade; 3) 1 escalier (...)". Aux termes de l'art. 2 de cet acte, "cette autorisation est accordée à bien plaire; le bénéficiaire peut être tenu d'enlever et de faire disparaître, sans avoir droit à dédommagement, ni indemnité, les travaux qui font l'objet de cette autorisation".
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En raison d'un ensablement progressif de la rive à cet endroit, X.________ a présenté au département cantonal une demande d'autorisation pour une nouvelle passerelle partant de sa parcelle et empiétant sur le lac sur une vingtaine de mètres. Au total, la passerelle a une longueur d'une trentaine de mètres, pour une largeur de quatre-vingts centimètres. Le 17 février 1976, le département a amendé l'autorisation initiale en permettant la réalisation de la nouvelle passerelle (et en radiant les points 2 et 3, soit ceux concernant l'estacade et l'escalier). Le 22 juin 1983, après le décès de X.________, le département a admis le transfert de l'autorisation à sa veuve C.________.
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Actuellement, cette passerelle traverse l'extrémité nord d'une roselière qui s'est formée au bord du lac de Morat, depuis l'embouchure de la Broye, à quelques centaines de mètres au sud, jusqu'au droit de la parcelle n° xxx. La passerelle émerge de la roselière et surplombe les eaux du lac sur environ huit mètres. A cet endroit, la roselière a approximativement la même surface qu'en 1975.
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La roselière est située dans le périmètre de l'objet n° xxx de l'inventaire cantonal des monuments naturels et des sites. Cette partie de la rive du lac de Morat est par ailleurs comprise dans le périmètre de l'objet n° xxx de l'inventaire fédéral des zones alluviales d'importance nationale ("Embouchure de la Broye"); cet objet a été inscrit à l'inventaire lors d'une révision du 29 octobre 2003, entrée en vigueur le 1er décembre 2003, de l'ordonnance sur la protection des zones alluviales d'importance nationale (ordonnance sur les zones alluviales; RS 451.31, RO 2003 4131).
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C.
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Le 1er mars 1995, le Service des eaux et de la protection de l'environnement (rattaché au Département cantonal des travaux publics, de l'aménagement et des transports) a écrit aux hoirs X.________ pour leur signaler qu'un port public serait prochainement construit sur le territoire de la commune voisine de Vallamand, au lieu-dit "F.________", et que la suppression de tous les amarrages publics en pleine eau serait ensuite exigée dans ce secteur. A propos de la "passerelle d'embarquement" se trouvant dans la roselière créée à l'embouchure de la Broye, ce service exposait qu'en raison des dispositions fédérales en matière de protection de la nature, le maintien d'ouvrages nautiques dans ce périmètre ne pouvait plus être toléré et que ces ouvrages devraient être évacués à brève échéance. Les hoirs X.________ ayant présenté des objections écrites, le service précité a, par lettre du 12 décembre 1995, confirmé sa prise de position.
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D.
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Le 16 janvier 2003, après le décès de sa mère C.________, B.________ a demandé à l'administration cantonale que l'autorisation relative à la passerelle lui soit transférée. A la suite de cette requête, le Département de la sécurité et de l'environnement (DSE), par le Service des eaux, sols et assainissement (SESA), a pris le 25 février 2003 une décision retirant l'autorisation pour usage du domaine public n°xxx et ordonnant la suppression de la passerelle, dans un délai d'un an, aux frais du propriétaire de la parcelle limitrophe n° xxx.
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Les hoirs X.________ ont recouru contre cette décision auprès du Tribunal administratif du canton de Vaud. Par un arrêt rendu le 23 août 2004, ce Tribunal a rejeté le recours et il a confirmé la décision prise par le Département de la sécurité et de l'environnement. En substance, il a considéré que l'autorisation en question avait un caractère précaire, et qu'elle pouvait donc être retirée pour des motifs pertinents d'intérêt public; en l'occurrence, il s'agit de la nécessité, prévue par le droit fédéral, de protéger la roselière, biotope d'importance nationale. Or la présence de la passerelle constituerait une atteinte à l'intégrité de la roselière.
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E.
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Agissant par la voie du recours de droit administratif et par celle du recours de droit public - les deux recours étant présentés dans le même acte -, les hoirs X.________ demandent au Tribunal fédéral de réformer l'arrêt du Tribunal administratif en ce sens que la passerelle litigieuse reste au bénéfice de l'autorisation cantonale n° xxx, ladite passerelle ne devant cependant plus être utilisée que pour l'accès au lac, l'accostage avec des bateaux y étant interdit (conclusions principales du recours de droit administratif), ou sinon d'annuler l'arrêt du Tribunal administratif (conclusions subsidiaires du recours de droit administratif et conclusions principales du recours de droit public). Les recourants se plaignent d'une violation des prescriptions du droit fédéral sur la protection des zones alluviales, d'une constatation inexacte et incomplète des faits pertinents, de plusieurs violations du droit d'être entendu, d'une violation de la garantie de la propriété et d'une application arbitraire de la loi cantonale sur l'utilisation des lacs et cours d'eau dépendant du domaine public.
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Le Département de la sécurité et de l'environnement conclut au rejet des recours. Le Tribunal administratif se détermine dans le même sens.
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L'Office fédéral de l'environnement, des forêts et du paysage a déposé des observations, à propos des moyens du recours de droit administratif. Les recourants ont pu se déterminer à ce sujet.
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F.
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Par ordonnance du 19 octobre 2004, le Président de la Ire Cour de droit public a admis la demande d'effet suspensif présentée par les recourants.
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Le Tribunal fédéral considère en droit:
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1.
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Il y a lieu de joindre le recours de droit administratif 1A.219/2004 et le recours de droit public 1P.543/2004 pour statuer en un seul arrêt.
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2.
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Le Tribunal fédéral examine d'office et librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 130 I 312 consid. 1 p. 317; 130 II 321 consid. 1 p. 324, 388 consid. 1 p. 389 et les arrêts cités).
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La contestation porte sur le retrait, par le département cantonal, d'une "autorisation pour usage du domaine public" - en l'occurrence la partie du lac de Morat où est implantée la passerelle litigieuse - fondée sur le droit cantonal. Selon l'art. 83 al. 2 du règlement d'application de la loi du 5 septembre 1944 sur l'utilisation des lacs et cours d'eau dépendant du domaine public (RLLC; RSV 731.01.1), le département peut autoriser des "installations temporaires ou peu importantes, entre autres (...) les petites constructions nautiques". En l'espèce, l'autorisation a été expressément accordée à bien plaire et le département cantonal a décidé de la retirer, le 25 février 2003, en invoquant principalement des motifs de protection de la roselière. Dans l'arrêt attaqué, le Tribunal administratif a considéré que cette mesure pouvait se fonder directement sur le droit fédéral, soit plus particulièrement l'art. 6 de la loi fédérale sur la protection de la nature et du paysage (LPN; RS 451) ainsi que les dispositions de l'ordonnance sur les zones alluviales; aussi a-t-il renoncé à examiner la portée des prescriptions cantonales sur la protection des monuments naturels et des sites. En tant que cet arrêt est fondé sur ces dispositions de la législation fédérale, il peut être attaqué par la voie du recours de droit administratif (art. 97 al. 1 OJ en relation avec l'art. 5 PA; ATF 121 II 161 consid. 2b/bb p. 163). Le recours de droit public ayant un caractère subsidiaire (art. 84 al. 2 OJ), sa recevabilité sera examinée après que les griefs du recours de droit administratif auront été traités (cf. infra, consid. 4).
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Les hoirs X.________, destinataires de la décision du Département cantonal du 25 février 2003 qui leur impose de démolir la passerelle partant de leur propriété, ont un intérêt digne de protection à l'annulation de l'arrêt attaqué; ils ont donc qualité pour recourir au sens de l'art. 103 let. a OJ. S'agissant des griefs de violation du droit fédéral (art. 104 let. a OJ) et de constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (art. 104 let. b OJ), toutes les conditions de recevabilité du recours de droit administratif sont remplies (art. 97 ss OJ). Il y a donc lieu d'entrer en matière.
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3.
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Les recourants prétendent que si les autorités compétentes prenaient les mesures adéquates pour rétablir la dynamique naturelle du régime des eaux et la conservation des particularités géomorphologiques du site, comme le prévoit l'art. 4 al. 1 de l'ordonnance sur les zones alluviales, la surface de la roselière de l'embouchure de la Broye serait réduite et la passerelle litigieuse se retrouverait hors du périmètre. Ils se plaignent donc, à cet égard, d'une mauvaise application du droit fédéral. Ils critiquent par ailleurs les constatations de fait de l'arrêt attaqué à propos de la roselière. Selon eux, leur passerelle se trouverait à la limite extrême de cette roselière, si tant est qu'elle soit incluse dans l'objet à l'inventaire fédéral.
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3.1 Le recours de droit administratif étant dirigé contre une décision prise par une autorité judiciaire, le Tribunal fédéral est lié par les faits constatés, sauf s'ils sont manifestement inexacts ou incomplets ou s'ils ont été établis au mépris de règles essentielles de procédure (art. 105 al. 2 OJ).
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Dans l'arrêt attaqué, le Tribunal administratif expose que le périmètre englobant la roselière traversée par la passerelle litigieuse a été inclus dans les objets protégés en application de l'ordonnance sur les zones alluviales; cela signifie que cette roselière constitue un biotope d'importance nationale. L'objet n° xxx de l'inventaire fédéral des zones alluviales d'importance nationale ("Embouchure de la Broye") est figuré, dans l'annexe 2 à l'ordonnance sur les zones alluviales (cf. art. 2 de ladite ordonnance) sur une carte à l'échelle 1:25'000, qui indique deux sous-périmètres, de part et d'autre de l'embouchure de la Broye. Même si, à cette échelle, la limite exacte des sous-périmètres n'est pas facile à localiser, il n'est pas manifestement erroné de retenir, comme l'a fait le Tribunal administratif, que la passerelle se trouve à l'intérieur de cette zone alluviale.
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3.2 Aux termes de l'art. 6 al. 1 LPN, l'inscription d'un objet d'importance nationale dans un inventaire fédéral indique que l'objet mérite spécialement d'être conservé intact ou en tout cas d'être ménagé le plus possible, y compris au moyen de mesures de reconstitution ou de remplacement adéquates. Pour les biotopes dignes de protection - notamment les rives, les roselières et les marais (art. 18 al. 1bis LPN) - qui sont d'importance nationale, la loi prévoit l'adoption par le Conseil fédéral d'ordonnances qui déterminent la situation de ces biotopes et précisent les buts visés par la protection (art. 18a al. 1 LPN). Telle est la portée de l'ordonnance sur les zones alluviales (lieux bordant des cours d'eau et des lacs). L'art. 4 de cette ordonnance (titre: "But visé par la protection") rappelle l'obligation légale de conserver intacts les objets portés à l'inventaire fédéral des zones alluviales d'importance nationale, en précisant qu'il s'agit notamment de viser à la conservation et au développement de la flore et de la faune indigènes typiques des zones alluviales et des éléments écologiques indispensables à leur existence (art. 4 al. 1 let. a de ladite ordonnance). Font également partie des buts la conservation et, pour autant que ce soit judicieux et faisable, le rétablissement de la dynamique naturelle du régime des eaux et du charriage (art. 4 al. 1 let. b), de même la conservation des particularités géomorphologiques des objets (art. 4 al. 1 let. c).
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Le régime prévu par le droit cantonal vaudois pour les "petites constructions nautiques" sur les lacs, qui peuvent comme en l'espèce faire l'objet d'une autorisation précaire ou "à bien plaire" (cf. supra, consid. 2), permet en principe à l'autorité compétente de retirer en tout temps l'autorisation et d'ordonner le rétablissement de l'état naturel. Selon le Tribunal administratif toutefois, l'autorité ne dispose pas d'une entière liberté ni d'un pouvoir discrétionnaire: le retrait de l'autorisation doit être motivé par des considérations pertinentes d'intérêt public (l'arrêt cite à ce propos Pierre Moor, Droit administratif, vol. II, 2e éd., Berne 2002 p. 78; cf. par ailleurs, dans le même sens, Yves Bonnard, Marchepied et passages publics au bord des lacs vaudois, thèse Lausanne 1990, p. 158, qui soutient qu'une telle autorisation à bien plaire est "en tout temps révocable pour de justes motifs"). Cette pesée des intérêts n'est pas incompatible avec les règles des art. 6 et 18 ss LPN, qui n'exigent pas par principe la suppression des installations existantes dans une roselière lacustre qualifiée de biotope d'importance nationale (dans les marais et sites marécageux, un régime spécial s'applique aux installations existantes postérieures au 1er juin 1983 mais il n'y a pas lieu d'examiner cette réglementation plus en détail ici - cf. art. 78 al. 5 Cst., art. 23a ss et art. 25b LPN).
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3.3 Pour atteindre le résultat visé à l'art. 6 al. 1 LPN - qui prévoit qu'un objet d'importance nationale mérite spécialement d'être conservé intact ou en tout cas d'être ménagé le plus possible -, l'art. 18a al. 2 LPN charge les cantons de régler la protection et l'entretien des biotopes d'importance nationale. L'art. 5 de l'ordonnance sur les zones alluviales fixe un cadre pour les mesures de protection et d'entretien ordonnées par les cantons. Ceux-ci doivent en particulier veiller à ce que les exploitations existantes, notamment la navigation et les activités de loisirs, soient en accord avec le but visé par la protection (art. 5 al. 2 let. c de ladite ordonnance).
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Dans le cas particulier, il ne ressort pas de l'arrêt attaqué qu'à la suite de l'inscription de l'embouchure de la Broye à l'inventaire fédéral (objet n° xxx) le 1er décembre 2003, l'autorité cantonale compétente aurait défini pour le périmètre concerné, en fonction des caractéristiques de la roselière, les mesures de protection et d'entretien adéquates, par exemple sous la forme d'un plan d'affectation ou d'un autre instrument du droit cantonal (cf. par exemple arrêt 1A.14/1999 du 7 mars 2000 in RDAF 2000 I 261). La décision du département cantonal du 25 février 2003 (antérieure au demeurant à l'inscription de l'objet n° xxx à l'inventaire fédéral) ne décrit pas davantage la roselière à l'endroit litigieux et elle n'indique pas, à l'intérieur de la zone alluviale, les secteurs méritant une protection renforcée, justifiant la suppression à bref délai d'installations existantes. Quant à l'arrêt du Tribunal administratif, il mentionne les objectifs du droit fédéral puis rappelle "la vision locale et l'avis exprimé par son assesseur spécialisé à l'issue de cette dernière" - avis dont le contenu ne figure du reste pas au dossier -, mais il ne donne pas d'indications concrètes sur la nature de l'atteinte qui résulte du maintien, à cet endroit, d'une passerelle construite il y a une trentaine d'années. Dans ses observations sur le recours de droit administratif, l'Office fédéral de l'environnement, des forêts et du paysage mentionne notamment un "effet de coupure dans l'ensemble du système alluvial" et une "source de dérangement pour les oiseaux nicheurs". Or ces éléments n'ont pas été décrits ni discutés dans l'arrêt attaqué. Il y a simplement été question d'une atteinte "minime" à l'intégrité de la roselière, censée justifier la suppression de la passerelle, mais les modalités d'utilisation de cet ouvrage n'ont pas non plus été exposées (nombre de personnes l'utilisant, fréquence des passages, conséquences pour le biotope d'une présence humaine occasionnelle etc.). En d'autres termes, le Tribunal administratif a en quelque sorte considéré que, quels que fussent l'usage, l'importance et les effets de la passerelle sur le milieu naturel, il y avait un intérêt prépondérant à la démonter dès lors qu'elle se trouvait dans un biotope d'importance nationale. Le Tribunal administratif a ajouté, "par surabondance", que l'autorité cantonale entendait supprimer les amarrages dans les roselières après la création d'un port public à proximité, mais cet argument n'est pas concluant dès lors que la passerelle litigieuse ne sert pas de lieu d'amarrage et que les recourants n'entendent pas l'utiliser à cet effet.
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Pour apprécier la nécessité de supprimer une installation existante, même lorsque le droit cantonal ne soumet pas à des conditions strictes la révocation d'une autorisation délivrée "à bien plaire", il faut connaître, au moins de manière sommaire, les caractéristiques du biotope et les risques liés au maintien de cette installation. Or il apparaît que les constatations de fait de l'arrêt attaqué, où l'on ne trouve ni description de la roselière ni explications claires sur l'utilisation de la passerelle, sont manifestement incomplètes. Le Tribunal fédéral n'est pas à même de juger si la conservation du biotope d'importance nationale exige une mesure telle que celle ordonnée par le département cantonal. Il se justifie donc d'admettre le recours de droit administratif (art. 104 let. b OJ en relation avec l'art. 105 al. 2 OJ), d'annuler l'arrêt attaqué et de renvoyer l'affaire pour nouvelle décision au Tribunal administratif (art. 114 al. 2 OJ).
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4.
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L'annulation de l'arrêt attaqué, en raison de l'admission du recours de droit administratif, rend sans objet le recours de droit public.
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5.
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L'arrêt doit être rendu sans frais (art. 156 al. 2 OJ).
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Les recourants, qui obtiennent gain de cause dans la procédure de recours de droit administratif et qui ont mandaté un avocat, ont droit à des dépens, mis à la charge de l'Etat de Vaud (art. 159 al. 1 et 2 OJ).
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Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
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1.
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Les causes 1A.219/2004 et 1P.543/2004 sont jointes.
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2.
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Le recours de droit administratif est admis, l'arrêt rendu le 23 août 2004 par le Tribunal administratif du canton de Vaud est annulé et l'affaire est renvoyée à ce Tribunal pour nouvelle décision au sens des considérants.
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3.
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Le recours de droit public est sans objet.
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4.
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Il n'est pas perçu d'émolument judiciaire.
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5.
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Une indemnité de 2'000 fr., à payer aux recourants à titre de dépens, est mise à la charge de l'Etat de Vaud.
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6.
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Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire des recourants, au Département de la sécurité et de l'environnement et au Tribunal administratif du canton de Vaud ainsi qu'à l'Office fédéral de l'environnement, des forêts et du paysage.
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Lausanne, le 21 septembre 2005
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Au nom de la Ire Cour de droit public
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du Tribunal fédéral suisse
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Le président: Le greffier:
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