BGer 5P.314/2005
 
BGer 5P.314/2005 vom 03.10.2005
Tribunale federale
{T 0/2}
5P.314/2005 /frs
Arrêt du 3 octobre 2005
IIe Cour civile
Composition
M. et Mmes les Juges Raselli, Président,
Nordmann et Hohl.
Greffier: M. Oulevey.
Parties
X.________, (époux),
recourant,
contre
dame X.________, (épouse),
intimée, représentée par Me Stéphane Zen-Ruffinen, avocat,
Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève, case postale 3108, 1211 Genève 3.
Objet
art. 9 Cst. (mesures protectrices de l'union conjugale),
recours de droit public contre l'arrêt de la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève
du 4 août 2005.
Faits:
A.
X.________, né en 1949, originaire de Genève, et dame X.________, née en 1963, de nationalité colombienne, ont contracté mariage le 24 mars 2000. Aucun enfant n'est issu de leur union. Le mari est père d'une fille, née en 1986; l'épouse a un fils, né en 1985.
Dans la nuit du 9 au 10 avril 2002, le mari, pris de boisson, a commis des violences sur son épouse, puis sur son beau-fils. Cet événement a provoqué de graves tensions entre les conjoints, qui vivent séparés depuis que l'épouse a trouvé un logement, le 15 octobre 2004.
B.
Le 15 octobre 2004, dame X.________ a requis mesures protectrices de l'union conjugale. Par jugement du 24 février 2005, le Tribunal de première instance du canton de Genève a autorisé les époux X.________ à vivre séparés, attribué la jouissance exclusive du domicile conjugal au mari, condamné celui-ci à verser à l'épouse la somme de 743 fr. par mois à titre de contribution d'entretien et compensé les dépens.
Par arrêt du 14 août 2005, la Cour de justice du canton de Genève a déclaré recevable l'appel interjeté par le mari et, notamment, "confirmé" le jugement de première instance, "étant précisé" que les subsides alloués à dame X.________ étaient fixés dès le 15 octobre 2004 à 700 fr. au lieu de 743 fr. par mois.
C.
X.________ interjette un recours de droit public pour arbitraire contre cet arrêt, dont il conclut à l'annulation.
Il requiert en outre d'être mis au bénéfice de l'assistance judiciaire. Par ordonnance présidentielle du 14 septembre 2005, il a été dispensé d'avancer les frais présumés de la procédure, dans l'attente de la décision définitive de la cour de céans sur cette requête.
L'intimée n'a pas été invitée à déposer une réponse.
Le Tribunal fédéral considère en droit:
1.
Le Tribunal fédéral examine d'office et librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 131 II 58 consid. 1 p. 59; 130 II 65 consid. 1 p. 67).
1.1 Les décisions de mesures protectrices de l'union conjugale ne sont pas des décisions finales au sens de l'art. 48 al. 1 OJ et ne peuvent par conséquent pas être entreprises par la voie du recours en réforme (ATF 127 III 474 consid. 2a et b p. 476 ss et les références citées). Le présent recours est donc recevable selon l'art. 84 al. 2 OJ. Déposé en temps utile - compte tenu de la suspension des délais prévue par l'art. 34 al. 1 let. b OJ - contre une décision prise en dernière instance cantonale, il l'est aussi sous l'angle des art. 86 al. 1 et 89 OJ.
1.2 Dans un recours de droit public pour arbitraire, les moyens de fait ou de preuves nouveaux sont irrecevables (ATF 124 I 208 consid. 4b p. 212; 118 III 37 consid. 2a p. 39). Le Tribunal fédéral s'en tient aux constatations de l'autorité cantonale, à moins que le recourant ne démontre qu'elles sont arbitrairement fausses ou lacunaires (ATF 118 Ia 20 consid. 5a p. 26). C'est pourquoi la cour de céans ne prendra notamment pas en considération les allégations du recourant selon lesquelles il n'aurait obtenu aucun diplôme ni acquis aucune formation en Suisse, il aurait toujours exercé de petits emplois, il aurait voulu retourner en Colombie et toucherait actuellement des indemnités mensuelles de 2'500 fr. Elle ne tiendra pas compte, non plus, de l'attestation d'indemnités de chômage annexée à l'acte de recours.
2.
Le recourant soutient que la cour cantonale serait tombée dans l'arbitraire en retenant qu'il peut gagner 4'000 fr. par mois. Il affirme qu'il est dans l'incapacité de verser une contribution de 700 fr. à son épouse. Il fait valoir que les juges auraient dû fixer la pension comme dans un procès en divorce, ce qu'ils auraient arbitrairement refusé de faire.
2.1 D'après la jurisprudence, l'arbitraire prohibé par l'art. 9 Cst. ne résulte pas du seul fait qu'une autre solution apparaisse concevable, voire préférable; une décision est arbitraire lorsqu'elle est manifestement insoutenable, méconnaît gravement une norme ou un principe juridique clair et incontesté ou heurte de manière choquante le sentiment de la justice et de l'équité. Pour qu'elle soit annulée, il faut encore qu'elle se révèle arbitraire non seulement dans ses motifs, mais aussi dans son résultat. En matière d'appréciation des preuves et d'établissement des faits, il n'y a arbitraire que si l'autorité n'a pas pris en compte, sans raisons sérieuses, un moyen de preuve propre à modifier la décision, si elle s'est manifestement trompée sur le sens et la portée d'un tel moyen, ou encore si elle a tiré des conclusions insoutenables des éléments recueillis (ATF 129 I 8 consid. 2.1 p. 9, 173 consid. 3.1 p. 178; 128 I 273 consid. 2.1 p. 275).
Le recourant qui se plaint d'arbitraire ne peut donc pas se contenter d'opposer son opinion à celle de l'autorité cantonale, mais doit démontrer, par une argumentation précise, que la décision attaquée se fonde sur une application du droit ou une appréciation des preuves manifestement insoutenables (art. 90 al. 1 let. b OJ; ATF 130 I 26 consid. 2.1 p. 31, 258 consid. 1.3 p. 261 s.; 129 I 113 consid. 2.1 p. 120, 185 consid. 1.6 p. 189; 128 I 295 consid. 7a p. 312; 125 I 492 consid. 1b p. 495).
2.2 Pour fixer les contributions d'entretien, le revenu effectif est en principe déterminant. Le débiteur peut toutefois se voir imputer un revenu hypothétique, supérieur à celui qu'il réalise effectivement, dans les cas où il lui serait possible, en faisant les efforts qui peuvent être raisonnablement exigés de lui, d'avoir un revenu correspondant à ce revenu hypothétique (ATF 128 III 4 consid. 4 p. 5 et les références). Dans ces cas, il n'est alors pas arbitraire d'entamer son minimum vital (ATF 123 III 1 consid. 3e p. 7).
3.
La cour cantonale a retenu, en se fondant sur un extrait de compte bancaire, que le recourant avait gagné en moyenne, du 1er juillet au 18 novembre 2004, 4'079 fr. 45 par mois. Elle a dès lors arrêté la capacité de gain du recourant à ce montant, en précisant qu'il s'agissait véritablement d'un minimum, dès lors qu'en 2002, le salaire mensuel moyen pour des activités simples et répétitives dans la région lémanique était de 4'612 fr.
Le recourant ne discute pas cette motivation ni ne démontre, a fortiori, en quoi il serait arbitraire de lui imputer un revenu hypothétique de 4'079 fr. Il se contente d'affirmer qu'il effectue toutes les recherches de travail imposées par la caisse de chômage, mais qu'il ne trouve pas d'emploi. Pour autant qu'il satisfasse aux exigences de motivation que la jurisprudence a déduites de l'art. 90 al. 1 let. b OJ (cf. supra: consid. 2.1), son grief doit dès lors être rejeté. En effet, on ne voit pas en quoi il serait arbitraire d'imputer à un chômeur valide de 56 ans un revenu hypothétique de 500 fr. inférieur au salaire moyen de 2002 pour une activité simple et répétitive.
4.
La cour cantonale a jugé qu'il était prématuré d'appliquer à la présente espèce l'art. 125 CC pour fixer la contribution d'entretien, dès lors que les parties s'étaient séparées récemment et qu'elles ne semblaient pas envisager en l'état de divorcer, même si le mari excluait de reprendre de la vie commune. Le recourant soutient que le refus d'appliquer l'art. 125 CC serait arbitraire parce qu'il serait fermement décidé à demander le divorce au terme du délai de deux ans de l'art. 114 CC. Cependant, la cour cantonale, qui a constaté que le recourant n'a pas la volonté de reprendre la vie commune, n'a en revanche pas retenu qu'il aurait la volonté de demander dès que possible le divorce; la cour de céans ne peut dès lors pas se fonder sur ce dernier fait, qui est nouveau et, partant, irrecevable (cf. supra consid. 2.1). Au demeurant, le recourant ne discute pas la motivation de la cour cantonale en tant qu'elle se fonde sur le caractère récent de la séparation pour exclure la prise en considération des critères prévus à l'art. 125 CC. Son grief est dès lors irrecevable.
5.
En résumé, le recours doit être rejeté pour autant qu'il est recevable. Comme cette issue de la procédure était prévisible d'emblée, la requête d'assistance judiciaire doit être rejetée (art. 152 OJ). Le recourant, qui succombe, supportera donc les frais de justice (art. 156 al. 1 OJ), dont le montant sera fixé en tenant compte de sa situation financière (art. 153a al. 1 OJ). En revanche, il n'y a pas lieu d'allouer des dépens à l'intimée, qui n'a pas été invitée à répondre au recours.
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.
2.
La requête d'assistance judiciaire du recourant est rejetée.
3.
Un émolument judiciaire de 500 fr. est mis à la charge du recourant.
4.
Le présent arrêt est communiqué en copie aux parties et à la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève.
Lausanne, le 3 octobre 2005
Au nom de la IIe Cour civile
du Tribunal fédéral suisse
Le président: Le greffier: