BGer 5A_525/2010
 
BGer 5A_525/2010 vom 31.08.2010
Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
{T 0/2}
5A_525/2010
Arrêt du 31 août 2010
IIe Cour de droit civil
Composition
Mme et MM. les Juges Hohl, Présidente,
Marazzi et Herrmann.
Greffier: M. Fellay.
Participants à la procédure
1. A.________ SA,
représentée par Me Mike Hornung, avocat,
2. B.________,
représenté par Me Douglas Hornung, avocat,
recourants,
contre
Office des faillites, chemin de la Marbrerie 13, 1227 Carouge GE,
intimé.
Objet
faillite; modification de l'inventaire,
recours contre la décision de la Commission de surveillance des offices des poursuites et des faillites
du canton de Genève du 8 juillet 2010.
Faits:
A.
Dans la faillite de C.________ SA, prononcée le 19 octobre 2004, A.________ SA et B.________ ont produit des créances qui ont été admises à l'état de collocation en 3ème classe à hauteur, respectivement, de 780'835 fr. 25 et de 800'164 fr. 60.
Le 2 mars 2005, l'un des deux créanciers a requis l'Office des faillites de Genève de porter à l'inventaire une prétention en responsabilité contre les anciens administrateurs de la faillie et contre l'organe de révision de celle-ci, D.________ SA. L'office a porté à l'inventaire une prétention litigieuse en responsabilité à hauteur du passif contre les anciens administrateurs et la Société E.________ SA, société qui, selon les données du registre du commerce, avait succédé à D.________ SA comme organe de révision à partir du 2 juillet 2004.
Par circulaire du 13 mars 2006, l'office a proposé à l'ensemble des créanciers de renoncer à agir contre les organes susmentionnés et leur a fixé un délai pour se déterminer à ce sujet et pour demander, le cas échéant, la cession des droits de la masse (art. 260 LP).
Ayant requis et obtenu la cession des droits inventoriés contre lesdits organes par décision du 20 septembre 2006, les deux créanciers susmentionnés ont, le 30 juillet 2007, ouvert action en responsabilité contre les anciens administrateurs et D.________ SA. Cette procédure est toujours pendante.
B.
Le 26 avril 2010, l'un des deux créanciers a sollicité l'office de rectifier l'inventaire et l'acte de cession afin que ceux-ci mentionnent D.________ SA, comme indiqué dans la requête du 2 mars 2005, en lieu et place de E.________ SA. L'office lui a répondu, le 12 mai 2010 que la faillite en cause ayant été clôturée par jugement du 4 juin 2008, l'inventaire ne pouvait plus être modifié, pas plus que la cession dont la teneur n'avait pas été contestée au moment où elle était intervenue.
Jugeant cette décision arbitraire, les deux créanciers ont porté plainte en faisant valoir que l'inventaire contenait une erreur de transcription imputable à l'administration de la faillite et qu'en l'état actuel de la cession, ils n'avaient pas qualité pour agir contre D.________ SA, seule susceptible, à leurs yeux, de pouvoir assumer une condamnation pécuniaire en cas d'admission de leur action.
Dans son rapport, l'office a certes admis son erreur, mais a soutenu que sa compétence, en tant qu'administration de la faillite, s'était éteinte avec la clôture de celle-ci, sous réserve de l'art. 269 LP (biens découverts ultérieurement) dont les conditions n'étaient pas réalisées.
Par décision du 8 juillet 2010, la Commission de surveillance des offices des poursuites et des faillites du canton de Genève a rejeté la plainte dans la mesure de sa recevabilité. Elle a considéré en substance que, même si le comportement de l'office était éventuellement susceptible d'entraîner la responsabilité du canton, la négligence des plaignants, qui avaient intenté action contre un tiers non visé dans la décision de cession et qui ne paraissaient s'être rendu compte de leur « erreur » que le 26 avril 2010, soit près de trois ans après le début de la procédure judiciaire, était incompréhensible et devait leur être imputée.
C.
Le 19 juillet 2010, les deux créanciers ont interjeté un recours en matière civile au Tribunal fédéral. Invoquant la violation de l'art. 269 LP et du principe de la bonne foi, ils concluent à l'annulation de la décision de la commission cantonale et à ce qu'il soit donné une suite favorable à leur plainte.
Le dépôt d'une réponse n'a pas été requis.
Considérant en droit:
1.
1.1 Interjeté dans le délai (art. 100 al. 2 let. a LTF) et la forme (art. 42 LTF) prévus par la loi par des parties qui ont succombé dans leurs conclusions prises devant l'autorité précédente (art. 76 al. 1 LTF) et dirigé contre une décision finale (art. 90 LTF) rendue en matière de poursuite pour dettes et de faillite (art. 72 al. 2 let. a LTF) par une autorité cantonale de surveillance de dernière instance (art. 75 al. 1 LTF), le recours est recevable, indépendamment de la valeur litigieuse (art. 74 al. 2 let. c LTF).
1.2 Saisi d'un recours en matière civile, le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut s'en écarter que si ces faits ont été établis de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF), et si la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF). En outre, il applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF) et n'est lié ni par les motifs invoqués par les parties ni par l'argumentation juridique retenue par l'autorité cantonale (cf. ATF 130 III 297 consid. 3.1); il peut donc admettre le recours pour d'autres motifs que ceux invoqués par le recourant, comme il peut le rejeter en opérant une substitution de motifs (ATF 130 III 136 consid. 1.4 in fine). Toutefois, compte tenu de l'obligation de motiver qui incombe au recourant en vertu de l'art. 42 al. 2 LTF, qui correspond à celle de l'art. 55 al. 1 let. c OJ (ATF 133 IV 286 consid. 1.4), il n'examine pas toutes les questions juridiques qui peuvent se poser, mais seulement celles qui sont soulevées devant lui (ATF 133 III 545 consid. 2.2).
2.
L'art. 269 al. 1 LP prévoit que lorsque, la faillite clôturée, l'on découvre des biens qui ont échappé à la liquidation, l'office en prend possession, les réalise et en distribue le produit sans autre formalité entre les créanciers perdants, suivant leur rang. Selon la jurisprudence, cette procédure de réalisation et de répartition après clôture de la faillite (Nachkonkurs) ne s'applique pas aux biens dont l'existence et l'appartenance à la masse étaient connues de l'administration de la faillite et des créanciers avant la clôture de la faillite et que la masse s'est abstenue de faire valoir (ATF 116 III 96 consid. 2a et les arrêts cités).
En l'espèce, l'office n'a pas inventorié une prétention de la masse contre D.________ SA, comme demandé, mais contre E.________ SA. Le fait que l'organe de révision avait été D.________ SA jusqu'au 2 juillet 2004, puis E.________ SA dès cette date était notoire puisque résultant du registre du commerce, publication accessible à tout un chacun (cf. arrêt 5A_62/2009 du 2 juillet 2009 consid. 2.1). Ni l'office ni les recourants n'ont donc pu l'ignorer et il n'a pas pu échapper à ces derniers, à réception de la circulaire aux créanciers du 13 mars 2006 et de la décision de cession du 20 septembre 2006 qui toutes deux mentionnaient E.________ SA, que la prétention inventoriée et cédée ne correspondait pas à celle qui avait été formulée le 2 mars 2005. La prétention contre D.________ SA était donc connue des intéressés avant la clôture de la faillite et si la masse s'est abstenue de la faire valoir malgré des indices suffisants de son existence, il faut présumer qu'elle y a sciemment renoncé (cf. ATF 116 III 96 consid. 2a). Il s'ensuit que, conformément à cette jurisprudence, l'art. 269 LP n'était pas applicable.
Par conséquent, c'est en vain que les recourants invoquent la violation de cette disposition.
3.
A réception des décisions de l'office prises sur la base de l'art. 260 LP, soit de la circulaire aux créanciers du 13 mars 2006 et de l'acte de cession du 20 septembre 2006, les recourants auraient pu aussitôt requérir l'office de faire la rectification nécessaire et saisir l'autorité cantonale de surveillance d'une plainte dans le délai péremptoire de dix jours prévu par l'art. 17 al. 2 LP. Dites décisions sont devenues définitives faute d'avoir fait l'objet d'une telle contestation en temps utile et l'erreur qui les affectait n'était pas de nature à les frapper de nullité absolue au sens de l'art. 22 LP, nullité qui n'est d'ailleurs plus invocable si la poursuite est close et le produit de la vente réalisé (Jaeger/Walder/Kull/Kottmann, Bundesgesetz über Schuldbetreibung und Konkurs, 4e éd., n. 11 ad art. 22 LP; Pauline Erard, Commentaire romand de la LP, n. 16 ad art. 22 LP).
Ayant été en mesure de faire corriger l'erreur en question en temps utile, les recourants sont en outre censés avoir renoncé à s'en prévaloir (cf. arrêt 7B.158/2005 du 11 novembre 2005 consid. 4). C'est donc à bon droit que la décision attaquée retient qu'en ne réagissant que le 26 avril 2010, soit près de trois ans après le début de la procédure judiciaire [deux ans après la clôture de la faillite], les recourants ont fait preuve d'une négligence incompréhensible qui doit leur être imputée. L'attitude consistant à laisser se continuer une procédure - de faillite en l'occurrence - entachée d'une irrégularité pour ne se prévaloir de celle-ci qu'après coup seulement est en effet contraire aux règles de la bonne foi et ne mérite aucune protection (cf. arrêt 7B.158/2005 déjà cité; ATF 119 II 386 consid. 1a).
Le grief de violation du principe de la bonne foi est donc infondé.
4.
Il résulte de ce qui précède que le recours doit être rejeté, aux frais de ses auteurs (art. 66 al. 1 LTF).
Il n'y a pas lieu d'allouer des dépens.
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
1.
Le recours est rejeté.
2.
Les frais judiciaires, arrêtés globalement à 3'000 fr., sont mis à la charge des recourants.
3.
Le présent arrêt est communiqué aux participants à la procédure et à la Commission de surveillance des offices des poursuites et des faillites du canton de Genève.
Lausanne, le 31 août 2010
Au nom de la IIe Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse
La Présidente: Le Greffier:
Hohl Fellay