BGer 6B_1056/2013 |
BGer 6B_1056/2013 vom 20.08.2014 |
{T 0/2}
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6B_1056/2013
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Arrêt du 20 août 2014 |
Cour de droit pénal |
Composition
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MM. et Mme les Juges fédéraux Denys, Juge présidant, Jacquemoud-Rossari et Rüedi.
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Greffière: Mme Boëton.
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Participants à la procédure
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X.________,
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recourant,
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contre
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Ministère public de la Confédération,
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intimé.
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Objet
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Qualité pour porter plainte; violation de domicile;
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erreur sur les faits; motifs justificatifs (acte licite,
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état de nécessité); arbitraire,
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recours contre le jugement du Tribunal pénal fédéral, Cour des affaires pénales, du 9 septembre 2013.
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Faits: |
A. Statuant sur opposition à l'ordonnance pénale rendue par le Ministère public de la Confédération le 30 novembre 2012, la Cour des affaires pénales du Tribunal pénal fédéral (ci-après: la Cour des affaires pénales) a, par jugement du 9 septembre 2013, reconnu notamment X.________ coupable de violation de domicile (art. 186 CP) et l'a condamné à une peine de 20 heures de travail d'intérêt général, assortie du sursis, le délai d'épreuve étant fixé à 2 ans.
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B. X.________ forme un recours en matière pénale au Tribunal fédéral contre la décision du 9 septembre 2013 et conclut, avec suite de frais et dépens, à son acquittement. Subsidiairement, il conclut au renvoi de la cause à la Cour des affaires pénales pour nouvelle décision au sens des considérants. Il sollicite l'octroi de l'effet suspensif ainsi que l'assistance judiciaire.
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Considérant en droit: |
1. Dans un premier grief, le recourant conteste la qualité pour porter plainte de A.________ sous trois aspects.
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1.1. L'infraction de violation de domicile (art. 186 CP) ne se poursuit que sur plainte. A teneur de l'art. 30 al. 1 CP, toute personne lésée peut porter plainte. Le lésé, au sens de cette disposition, est celui dont le bien juridique est directement atteint par l'infraction. Le droit au domicile tel que protégé par l'art. 186 CP appartient à celui qui a le pouvoir de disposer des lieux, en vertu d'un droit réel ou personnel ou encore d'un rapport de droit public (ATF 128 IV 81 consid. 3a p. 84; 118 IV 167 consid. 1c p. 170). L'extinction du rapport juridique lui conférant la maîtrise effective ne le prive pas de cette protection tant qu'il exerce son pouvoir (ATF 112 IV 31 consid. 3a p. 33; arrêt 6B_806/2009 du 18 mars 2010 consid. 2). Le droit de porter plainte n'appartient pas qu'au titulaire du bien juridique; il peut également trouver son fondement dans l'intérêt d'une personne à sauvegarder le bien juridique en question ( DELNON/RÜDY, in Basler Kommentar Strafrecht II, 3ème éd., 2013, n° 19 ad art. 186 CP). Ainsi, une société ayant exploité un commerce au bénéfice d'un bail de location ou de sous-location pendant deux ans avant que l'immeuble soit vendu aux enchères, a la qualité pour porter plainte pour une violation de domicile commise même après l'adjudication (arrêt 6B_806/2009 du 18 mars 2010 consid. 2.3.2).
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1.2. Se fondant sur la liste du Corps diplomatique, éditée par le Département fédéral des affaires étrangères (ci-après: DFAE) en mars 2013 et produite par le Centre des publications officielles de la Chancellerie fédérale, à teneur de laquelle A.________ occupait le poste de chargé d'affaires
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1.3. Contrairement à ce que prétend le recourant, il ne s'agit pas d'examiner les conditions matérielles de nomination de A.________ en tant que chargé d'affaires
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1.4. A teneur de l'art. 3 ch. 1 let. a CVRD, les fonctions d'une mission diplomatique consistent notamment à représenter l'Etat accréditant auprès de l'Etat accréditaire, étant précisé qu'une ambassade constitue une mission diplomatique au sens de la CVRD ( ANDREAS R. ZIEGLER, Introduction au droit international public, 2 ème éd., 2011, n° 670). L'art. 19 ch. 1 CVRD prévoit la possibilité, pour un chargé d'affaires
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1.5. Au vu de ce qui précède, c'est conformément au droit fédéral et à la CVRD, que le Tribunal pénal fédéral a admis la qualité pour porter plainte du chargé d'affaires
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2. Le recourant invoque une violation de l'art. 186 CP (cf. mémoire de recours ch. II 2.f p. 16 ss).
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2.1. Commet une violation de domicile au sens de l'art. 186 CP, celui qui, d'une manière illicite et contre la volonté de l'ayant droit, aura pénétré dans une maison, dans une habitation, dans un local fermé faisant partie d'une maison, dans un espace, cour ou jardin clos et attenant à une maison, ou dans un chantier, ou y sera demeuré au mépris de l'injonction de sortir à lui adressée par un ayant droit.
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2.2. L'autorité intimée a considéré que le jardin de l'Ambassade constituait un espace clos au sens de l'art. 186 CP, étant donné qu'il était ceint d'une clôture avec un portail.
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2.3. En tant qu'il prétend que le portail d'entrée était cassé et la clôture en piteux état, le recourant s'écarte de l'état de fait retenu par l'autorité intimée, sans tenter d'en démontrer l'arbitraire. Son argumentation est irrecevable (cf. art. 106 al. 2 LTF). En tout état, la simple présence d'un portail et d'une clôture permettait de comprendre que l'espace était clos au sens de l'art. 186 CP.
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3. Le recourant fait valoir qu'il s'était présenté comme citoyen de l'Etat Z.________ à l'Ambassade de son pays, pensant que cette dernière constituait une partie du territoire national auquel il avait droit d'accéder comme "espace public". Il considère qu'il se trouvait alors sous l'emprise d'une erreur sur les faits au sens de l'art. 13 CP (mémoire de recours ch. II 2.d p. 14 s.).
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3.1. Agit sous l'emprise d'une erreur sur les faits au sens de l'art. 13 al. 1 CP, celui qui n'a pas connaissance ou qui se base sur une appréciation erronée d'un élément constitutif d'une infraction pénale. L'intention de réaliser la disposition pénale en question fait alors défaut. Dans une telle configuration, l'auteur doit être jugé selon son appréciation erronée, si celle-ci lui est favorable. Les erreurs sur les éléments constitutifs d'une infraction qui impliquent des conceptions juridiques entrent dans le champ de l'art. 13 CP et non de l'art. 21 CP (ATF 129 IV 238 consid. 3.1 et 3.2 p. 240 s. en lien avec les art. 19 et 20 aCP). Par opposition, l'erreur sur l'illicéité (art. 21 CP) vise le cas où l'auteur se trompe sur le caractère illicite de son acte. Pour qu'il y ait erreur sur l'illicéité, il faut que l'auteur ait agi alors qu'il se croyait en droit de le faire. Lorsque le doute est permis quant à la légalité d'un comportement, l'auteur doit, dans la règle, s'informer de manière plus précise auprès de l'autorité compétente (ATF 129 IV 6 consid. 4.1 p. 18 et les références citées).
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3.2. Tout en décrivant la configuration des lieux, l'autorité intimée a considéré que rien ne permettait d'inférer de l'aspect de l'Ambassade qu'elle constituerait un périmètre extraterritorial, étant précisé qu'il n'existait pas de poste frontière, de douane ou de contrôle aux abords de celle-ci. De même, aucun panneau de signalisation ou écriteau indiquant que le visiteur pénétrerait sur le territoire d'un autre Etat n'était placé à l'entrée de son enceinte. Elle a donc rejeté le moyen pris d'une erreur sur les faits.
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3.3. Le recourant ne conteste pas les considérations de la décision attaquée. Il soutient néanmoins qu'il existerait une fiction juridique selon laquelle le territoire national serait prolongé par le biais de sa représentation diplomatique à l'étranger, et en déduit qu'il ne peut lui être reproché d'avoir eu l'intention de pénétrer sur le territoire de l'Ambassade en poursuivant des buts différents de cette dernière.
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4. En se prévalant de l'interdiction de la torture ou tout autre traitement ou peine cruels, inhumains ou dégradants (cf. art. 3 CEDH et 10 al. 3 Cst.), le recourant soutient que le comportement reproché était licite au sens de l'art. 14 CP (mémoire de recours ch. II 2.b p. 11 s.).
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4.1. Selon l'art. 14 CP, quiconque agit comme la loi l'ordonne ou l'autorise, se comporte de manière licite, même si l'acte est punissable en vertu du code pénal ou d'une autre loi.
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4.2. Le recourant ne saurait tirer argument de l'interdiction constitutionnelle et conventionnelle de la torture et des traitements inhumains et dégradants (art. 10 al. 3 Cst. et 3 CEDH) pour justifier son comportement, dès lors qu'une telle interdiction ne constitue pas une base légale permettant de pénétrer dans l'enceinte d'un bâtiment administratif fermé, sans l'accord de l'ayant droit. Il ne le prétend d'ailleurs pas.
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4.3. Au vu de ce qui précède, les griefs tirés de l'arbitraire dans l'établissement des faits en lien avec la possibilité d'utiliser de manière accrue la voie publique, d'une part (cf. mémoire de recours ch. II 1.c p. 8 s.), et avec la situation humanitaire dans l'Etat Z.________ d'autre part (cf. mémoire de recours ch. II 1.b p. 7 s.), ne seront pas examinés, dès lors que ces éléments ne seraient pas susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF; ATF 134 IV 36 consid. 1.4.1 p. 39).
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5. Le recourant invoque l'état de nécessité au sens des art. 17 et 18 CP (cf. mémoire de recours ch. II 2.c p. 13 s.).
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5.1. L'art. 17 CP (état de nécessité licite) et l'art. 18 CP (état de nécessité excusable) supposent que l'auteur ait commis un acte punissable pour préserver un bien juridique lui appartenant ou appartenant à un tiers d'un danger imminent et impossible à détourner autrement. L'impossibilité que le danger puisse être détourné autrement implique une subsidiarité absolue (arrêts 6B_176/2010 du 31 mai 2010 consid. 2.1; 6S.529/2006 du 8 février 2007 consid. 4). En d'autres termes, celui qui dispose de moyens licites pour préserver le bien juridique menacé ne peut pas se prévaloir de l'état de nécessité (cf. Dupuis et Al., Code pénal, Petit commentaire, 2012, n° 8 ad art. 17 CP et n° 3 ad art. 18 CP).
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5.2. En substance, l'autorité intimée a écarté l'état de nécessité en rappelant que le recourant pouvait atteindre le but recherché en manifestant sur la voie publique.
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5.3. Le recourant n'expose pas quel danger imminent il comptait détourner par son comportement, ni dans quelle mesure la pénétration dans l'enceinte de l'Ambassade était nécessaire à le détourner. Il est douteux que son grief soit recevable (art. 42 al. 2 LTF).
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6. Le recourant prétend que l'autorité intimée aurait violé les art. 8 al. 1 et 356 al. 1 CPP en refusant d'appliquer le principe in dubio pro durioreen sa faveur. Il invoque l'art. 52 CP et en déduit que, dans la mesure où sa culpabilité et les conséquences de son acte sont peu importantes, l'affaire aurait dû être classée (cf. mémoire de recours ch. II 2.e p. 15 s.).
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6.1. L'art. 52 CP prévoit que l'autorité compétente renonce à poursuivre l'auteur, à le renvoyer devant le juge ou à lui infliger une peine si sa culpabilité et les conséquences de son acte sont peu importantes, ces conditions étant cumulatives. L'importance de la culpabilité et celle du résultat dans le cas particulier doivent être évaluées par comparaison avec celle de la culpabilité et celle du résultat dans les cas typiques de faits punissables revêtant la même qualification (ATF 135 IV 130 consid. 5.3.3 p. 135 s.). La culpabilité de l'auteur se détermine selon les règles générales de l'art. 47 CP, mais aussi selon d'autres critères, comme le principe de célérité ou d'autres motifs d'atténuation de la peine indépendants de la faute (ATF 135 IV 130 consid. 5.4 p. 137).
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6.2. Le recourant méconnaît le sens du principe
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7. Le recours doit être rejeté dans la mesure où il est recevable. Il était d'emblée dénué de chances de succès. L'assistance judiciaire doit être refusée (art. 64 al. 1 LTF). Le recourant supporte les frais de la cause, qui seront fixés en tenant compte de sa situation économique, qui n'apparaît pas favorable (art. 65 al. 2 et 66 al. 1 LTF). La cause étant tranchée, la requête d'effet suspensif devient sans objet.
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Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: |
1. Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.
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2. La requête d'assistance judiciaire est rejetée.
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3. Les frais judiciaires, arrêtés à 1'600 fr., sont mis à la charge du recourant.
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4. Le présent arrêt est communiqué aux parties et au Tribunal pénal fédéral, Cour des affaires pénales.
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Lausanne, le 20 août 2014
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Au nom de la Cour de droit pénal
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du Tribunal fédéral suisse
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Le Juge présidant: Denys
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La Greffière: Boëton
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