BGer 6B_1347/2016 |
BGer 6B_1347/2016 vom 12.02.2018 |
6B_1347/2016 |
Arrêt du 12 février 2018 |
Cour de droit pénal |
Composition
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MM. et Mme les Juges fédéraux Denys, Président, Jacquemoud-Rossari et Oberholzer.
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Greffier : M. Vallat.
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Participants à la procédure
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X.________, représenté par Me Yvan Jeanneret, avocat,
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recourant,
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contre
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1. Ministère public central du canton de Vaud,
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2. A.________,
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représentée par Me Gilles-Antoine Hofstetter, avocat,
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intimés.
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Objet
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Lésions corporelles graves par négligence; frais de défense,
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recours contre le jugement de la Cour d'appel pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud du 29 août 2016 (372 (PE11.009917-BUF/SOS)).
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Faits : |
A. Le 27 novembre 2007, A.________ a subi une hystérectomie totale avec annexectomie bilatérale à l'hôpital B.________, à C.________. Cette opération a été pratiquée par le médecin-assistant D.________, dans le cadre d'un " teaching " supervisé conjointement par la cheffe de clinique E.________ et le médecin-chef X.________, qui était le médecin attitré de la patiente. Cette dernière n'avait pas été informée de ce " teaching ". Sortie du bloc opératoire à 10h15, A.________ a commencé à se sentir mal vers 16h45. Sa tension artérielle a chuté et la présence de sang a été constatée dans ses urines. La patiente a alors été soumise d'urgence à un CT-scanner abdomino-pelvien, qui a mis en évidence un hémopéritoine et un saignement intra-abdominal actif, avec suspicion d'une lésion urétérale gauche. En état de pré-choc hémorragique, A.________ a immédiatement été transférée à l'hôpital de F.________ où le Dr G.________, assisté du Dr X.________, a procédé à une ligature de l'artère iliaque interne gauche pour assurer l'hémostase, avant d'effectuer une urétéronéocystostomie afin de réimplanter l'uretère gauche sur le dôme vésical. A.________ a pu regagner son domicile le 14 décembre 2007. Les suites opératoires ont toutefois été compliquées par la survenue d'une importante fistule vésico-vaginale, qui a nécessité deux interventions de cure chirurgicale, effectuées par le Dr G.________ les 18 mars et 2 décembre 2008.
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Par jugement du 21 août 2014, le Tribunal correctionnel de l'arrondissement de l'Est vaudois a libéré D.________ et E.________ du chef d'accusation de lésions corporelles graves par négligence, a condamné X.________ pour lésions corporelles graves par négligence à une peine pécuniaire de 20 jours-amende à 500 fr. le jour, avec sursis durant 2 ans, ainsi qu'à 2000 fr. d'amende (peine de substitution de 4 jours de privation de liberté).
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Statuant sur appel de X.________, respectivement de A.________, la Cour d'appel pénale du Tribunal cantonal vaudois a admis le premier et rejeté le second. X.________ a été libéré du chef d'accusation de lésions corporelles graves par négligence et A.________ renvoyée à agir par la voie civile à l'encontre de D.________, E.________ et X.________.
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Par arrêt du 13 mais 2016 (6B_788+902/2015), le Tribunal fédéral a déclaré irrecevable le recours en matière pénale formé par A.________ et admis celui du Ministère public vaudois. Le jugement sur appel du 12 janvier 2015 a été annulé et la cause renvoyée à la cour cantonale pour nouvelle décision au sens des considérants.
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B. Statuant à nouveau le 29 août 2016, la Cour d'appel pénale vaudoise a rejeté les appels de X.________ et A.________ et confirmé le jugement du 21 août 2014 en tant que cette décision condamnait X.________ pour lésions corporelles graves par négligence à 20 jours amende à 500 fr. le jour avec sursis pendant 2 ans et à 2000 fr. d'amende (peine de substitution de 4 jours de privation de liberté).
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C. Par acte du 2 décembre 2016, X.________ forme un recours en matière pénale au Tribunal fédéral. Il conclut, avec suite des frais et dépens, principalement à sa réforme en ce sens qu'il soit acquitté, une indemnité de procédure de 27'800 fr. lui étant accordée, à charge de l'Etat de Vaud, pour la procédure cantonale. A titre subsidiaire, il demande l'annulation de la décision querellée, en tant qu'elle confirme sa condamnation pour lésions corporelles graves par négligence et le condamne aux frais, la cause étant renvoyée à la cour cantonale pour qu'elle statue dans le sens des considérants.
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Considérant en droit : |
1. L'autorité de l'arrêt de renvoi, que prévoyaient expressément l'art. 66 al. 1 aOJ et l'art. 277ter al. 2 aPPF, est un principe juridique qui demeure applicable sous la LTF (ATF 135 III 334 consid. 2.1 p. 335). L'autorité à laquelle la cause est renvoyée par le Tribunal fédéral est tenue de fonder sa nouvelle décision sur les considérants de droit de l'arrêt du Tribunal fédéral. Elle est ainsi liée par ce qui a déjà été définitivement tranché par le Tribunal fédéral et par les constatations de fait qui n'ont pas été attaquées devant lui ou l'ont été sans succès (ATF 143 IV 214 consid. 5.2.1 p. 220; 131 III 91 consid. 5.2 p. 94). La motivation de l'arrêt de renvoi fixe ainsi tant le cadre du nouvel état de fait que celui de la nouvelle motivation juridique (ATF 135 III 334 consid. 2 p. 335).
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1.1. Dans son arrêt du 13 mai 2016, le Tribunal fédéral a tenu pour constant que les lésions subies par A.________ étaient graves et qu'il existait un lien de causalité naturelle entre l'opération litigieuse et les lésions. Il n'était pas controversé non plus qu'aucune violation des règles de l'art médical n'avait été établie quant au processus opératoire, ce qui avait conduit à l'acquittement des médecins D.________ et E.________. Toutefois, un autre manquement avait été reproché à X.________, soit que celui-ci avait violé son devoir d'information sur deux points: le médecin n'avait pas suffisamment informé sa patiente sur les risques de l'opération, d'une part, et, d'autre part, sur le fait qu'elle ne serait pas opérée par lui-même (consid. 3). Le Tribunal fédéral a jugé que la cour cantonale n'avait pas violé le droit fédéral en retenant que, eût-elle été dûment informée des risques, la partie plaignante se serait décidée en faveur de l'intervention chirurgicale litigieuse (consid. 4.1 in fine). En revanche, la cour cantonale avait procédé à une appréciation arbitraire des preuves et violé le droit fédéral en retenant un consentement hypothétique quant à la personne du chirurgien opérateur (consid. 4.2.2 in fine).
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1.2. Statuant ensuite du renvoi, la cour cantonale a jugé que, la condamnation étant prononcée pour une atteinte dont il était retenu qu'elle avait été portée sans consentement, l'arrêt du Tribunal fédéral ne laissait pas la place à un examen de la question de la causalité adéquate soulevée par l'appelant, selon lequel il fallait encore déterminer l'existence d'un rapport de causalité entre le manquement qui lui était reproché (le défaut d'information quant à la personne qui opérerait) et la lésion (jugement entrepris, consid. 3 p. 6).
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1.3. Le recourant soutient que ce raisonnement violerait le principe de l'autorité de l'arrêt de renvoi. Reprenant, au fond, l'argumentation développée en appel, il souligne qu'il est définitivement acquis qu'il existe un lien de causalité entre les lésions subies par l'intimée et l'opération litigieuse, qu'aucune violation des règles de l'art médical n'a été établie quant à la manière dont l'intervention a été conduite par les médecins-opérateurs, qu'il a lui-même violé son devoir d'information à propos des risques de l'opération mais que ce manquement était couvert par le consentement hypothétique de la patiente et, enfin, qu'il a violé son devoir d'information en ne renseignant pas la partie plaignante sur le fait qu'elle ne serait pas opérée par lui-même mais par deux autres médecins dans le cadre d'un teaching, le consentement hypothétique de la patiente ne palliant pas cette carence. Selon lui, il n'en resterait pas moins à examiner l'existence d'un lien de causalité entre le manquement relatif à l'information sur le choix de l'opérateur et les lésions subies, cette question ne se confondant pas avec celle, déjà tranchée, de la causalité existant entre l'opération et les lésions. Le recourant en conclut que le jugement entrepris violerait le principe de l'autorité de l'arrêt de renvoi. La cour cantonale aurait omis d'établir un fait pertinent en ne se prononçant pas sur l'existence d'un lien de causalité naturelle et elle aurait aussi commis un déni de justice en ne se prononçant pas sur ce grief déjà soulevé devant elle.
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1.4. Le recourant perd de vue, dans ses développements, tout d'abord que sa condamnation ne repose pas exclusivement sur le reproche de n'avoir pas informé l'intimée de la personne qui l'opérerait. Dans son jugement du 21 août 2014, le Tribunal correctionnel de l'arrondissement de l'Est vaudois a retenu que le recourant " a non seulement provoqué les lésions en question, en se passant du consentement éclairé de sa cliente, mais il a également organisé l'intervention et participé activement à cette dernière en qualité de " teacher ", guidant D.________ et E.________ de ses conseils techniques ". Les premiers juges en ont conclu que le recourant devait, à tout le moins, être considéré comme auteur médiat de l'infraction (jugement du 21 août 2014 consid. 4h p. 66 s.). Dans son mémoire d'appel du 16 septembre 2014 (dossier cantonal, pièce 115), le recourant n'a pas remis en cause cette conclusion en droit, respectivement les faits sur lesquels elle se fonde. Bien au contraire, contestant n'avoir pas informé correctement l'intimée quant à la personne qui procéderait à l'intervention, le recourant a réaffirmé avec force avoir endossé le rôle d'opérateur aux côtés du médecin-assistant et de la cheffe de clinique, celle-ci supervisant avec lui, celui-là. Toute l'argumentation développée par le recourant en appel portant sur l'existence de faits justificatifs (consentement du patient réel ou hypothétique), les éléments mêmes de l'infraction de lésions corporelles graves par négligence n'ont pas été réexaminés plus avant en appel. Il s'ensuit que ces points, qui n'ont, de surcroît, pas été rediscutés devant le Tribunal fédéral sont définitivement acquis.
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Cela étant rappelé, le recourant perd également de vue, dans son argumentation, que le consentement éclairé du patient ne constitue pas un élément objectif de l'art. 125 CP, mais un fait justificatif supprimant l'illicéité de l'acte qui a atteint l'intégrité corporelle. Comme l'a retenu à juste titre la cour cantonale, il n'y avait, dès lors, pas lieu de rechercher l'existence d'un lien de causalité entre le manquement au devoir d'information reproché au recourant (soit l'absence de fait justificatif) et les lésions. Il suffisait, le comportement du recourant étant causal dans le bloc opératoire, de constater qu'il n'était pas justifié par le consentement éclairé de la victime. Il s'ensuit que la cour cantonale n'a pas méconnu la portée de l'arrêt de renvoi, ni omis de constater des faits pertinents ou commis un déni de justice en ne se prononçant pas sur cette question spécifique de causalité naturelle. La décision entreprise ne méconnaît pas non plus les conditions légales d'application de l'art. 125 CP, ce qui rend, par ailleurs, sans objet les conclusions en indemnisation déduites par le recourant de l'art. 429 CPP.
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2. Le recourant succombe. Il supporte les frais de la procédure (art. 65 al. 2 et 66 al. 1 LTF).
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Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce : |
1. Le recours est rejeté.
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2. Les frais judiciaires, arrêtés à 3000 fr., sont mis à la charge du recourant.
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3. Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour d'appel pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud.
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Lausanne, le 12 février 2018
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Au nom de la Cour de droit pénal
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du Tribunal fédéral suisse
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Le Président : Denys
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Le Greffier : Vallat
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