BGer 9C_43/2018 |
BGer 9C_43/2018 vom 19.10.2018 |
9C_43/2018 |
Arrêt du 19 octobre 2018 |
IIe Cour de droit social |
Composition
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Mmes et M. les Juges fédéraux Pfiffner, Présidente, Glanzmann et Parrino.
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Greffier : M. Bleicker.
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Participants à la procédure
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Caisse fédérale de pensions PUBLICA, Eigerstrasse 57, 3007 Berne,
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recourante,
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contre
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A.________,
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représenté par Me Jacques-André Schneider et Me Violaine Landry Orsat, avocats,
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intimé.
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Objet
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Prévoyance professionnelle (rente d'invalidité),
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recours contre le jugement de la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre des assurances sociales, du 23 novembre 2017 (A/1336/2017 ATAS/1055/2017).
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Faits : |
A. A.________, né en 1959, est entré au service de la Confédération suisse le 5 janvier 1981 auprès de l'Administration fédérale des douanes (AFD) à compter du 1 er juillet 2001. A ce titre, il était affilié auprès de la Caisse fédérale de pensions PUBLICA (ci-après: Publica ou l'institution de prévoyance).
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L'AFD a, en se fondant sur l'incapacité totale et durable de travail de l'assuré survenue dès janvier 2014, prononcé la résiliation des rapports de service, avec effet au 31 janvier 2016, et octroyé à A.________ une indemnité équivalant à dix mois de salaire mensuel eu égard à son âge, son ancienneté et à sa profession de monopole (soit 80'483 fr. brut). L'assuré a ensuite été mis au bénéfice d'une rente entière de l'assurance-invalidité dès le 1 er janvier 2015 (décisions du 22 juin et du 8 août 2016 de l'assurance-invalidité).
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Saisie d'une demande de prestations, Publica a informé A.________ qu'il découlait du calcul de surindemnisation établi le 24 août 2016 qu'il n'avait pas droit à une rente d'invalidité du 1 er février au 30 novembre 2016. Dans l'échange de correspondances qui a suivi, l'institution de prévoyance a maintenu que l'indemnité de 80'483 fr., considérée comme un revenu de remplacement de dix mois, devait être prise en compte dans le calcul de surindemnisation. Le 2 décembre 2016, Publica a adressé à l'assuré une attestation de prestations, confirmant qu'une rente d'invalidité d'un montant mensuel de 3'302 fr. lui serait versée dès le 1 er décembre 2016.
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B. Par écriture du 12 avril 2017, A.________ a déposé une demande en paiement contre Publica, en concluant au versement d'un montant de 33'020 fr. avec intérêts à 5 % dès le 1er février 2016. Statuant le 23 novembre 2017, la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre des assurances sociales, a condamné Publica à verser à l'assuré les rentes d'invalidité afférentes à la période du 1er février au 30 novembre 2016, soit un montant de 33'020 fr., avec intérêts moratoire à 2 % l'an dès le 23 novembre 2016.
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C. Publica forme un recours en matière de droit public contre ce jugement dont elle demande la réforme en ce sens que la demande du 12 avril 2017 est rejetée. Le recours est assorti d'une requête d'effet suspensif.
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Le 27 février 2018, l'assuré s'est déterminé sur le recours, concluant à son irrecevabilité, subsidiairement à son rejet, et sur la requête d'effet suspensif. L'Office fédéral des assurances sociales (OFAS) a renoncé à se déterminer.
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Considérant en droit : |
Erwägung 1 |
1.1. Le recours en matière de droit public peut être formé pour violation du droit, tel qu'il est délimité par les art. 95 et 96 LTF. Le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF), n'étant limité ni par les arguments de la partie recourante, ni par la motivation de l'autorité précédente. Le Tribunal fédéral n'examine en principe que les griefs invoqués, compte tenu de l'exigence de motivation prévue à l'art. 42 al. 2 LTF, et ne peut aller au-delà des conclusions des parties (art. 107 al. 1 LTF). Il fonde son raisonnement sur les faits retenus par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF) sauf s'ils ont été établis de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF). La partie recourante qui entend s'écarter des faits constatés doit expliquer de manière circonstanciée en quoi les conditions de l'art. 105 al. 2 LTF sont réalisées, sinon un état de fait divergent ne peut être pris en considération (art. 97 al. 1 LTF).
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1.2. Dans sa réponse, l'intimé demande au Tribunal fédéral de déclarer le recours irrecevable pour non respect des exigences de motivation définies à l'art. 42 al. 2 LTF (à ce sujet, voir ATF 140 III 86 consid. 2 p. 88 et les références). Force est, en effet, de constater que les motifs du recours sont peu étayés. L'institution de prévoyance recourante expose néanmoins suffisamment les motifs pour lesquels elle considère que l'indemnité perçue par l'intimé devait être prise en compte dans le calcul de surindemnisation. Le recours est dès lors recevable.
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Erwägung 2 |
2.1. Le litige porte sur le droit de A.________ au versement, par Publica, d'une rente d'invalidité de la prévoyance professionnelle pour la période du 1
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2.2. Le jugement entrepris rappelle de manière complète les dispositions légales relatives au droit à des prestations d'invalidité de la prévoyance professionnelle (art. 23 let. a LPP) et à l'avantage injustifié résultant du cumul de prestations (art. 34a LPP et art. 24 OPP 2). Les considérants de l'arrêt attaqué, auxquels il suffit de renvoyer, exposent également que l'art. 19 al. 3 de la loi du 24 mars 2000 sur le personnel de la Confédération (LPers; RS 172.220.1), en lien avec l'art. 78 de l'ordonnance du 3 juillet 2001 sur le personnel de la Confédération (OPers; RS 172.220.111.3), prévoit que l'employeur verse une indemnité à l'employé si ce dernier travaille dans une profession où la demande est faible ou inexistante (let. a), est employé de longue date ou a atteint un âge déterminé (let. b).
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2.3. On ajoutera que le ch. 2 de l'annexe à la LF du 25 septembre 2015 (Assurance-accidents et prévention des accidents), en vigueur depuis le 1
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Erwägung 3 |
3.1. Selon l'anc. art. 24 OPP 2, édicté par le Conseil fédéral en vertu de la délégation de compétence de l'anc. art. 34a al. 1 LPP, en vigueur jusqu'au 31 décembre 2016, l'institution de prévoyance peut réduire les prestations d'invalidité et de survivants dans la mesure où, ajoutées à d'autres revenus à prendre en compte, elles dépassent 90 % du gain annuel dont on peut présumer que l'intéressé est privé (al. 1).
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Sont considérées comme des revenus à prendre en compte les prestations d'un type et d'un but analogues qui sont accordées à l'ayant droit en raison de l'événement dommageable, telles que les rentes ou les prestations en capital prises à leur valeur de rentes provenant d'assurances sociales ou d'institutions de prévoyance suisses et étrangères, à l'exception des allocations pour impotents, des indemnités pour atteinte à l'intégrité et de toutes autres prestations semblables. Est aussi pris en compte le revenu provenant d'une activité lucrative exercée par un assuré invalide ou le revenu de remplacement ainsi que le revenu ou le revenu de remplacement que celui-ci pourrait encore raisonnablement réaliser, à l'exception du revenu supplémentaire réalisé pendant l'exécution d'une mesure de nouvelle réadaptation au sens de l'art. 8a de la loi fédérale du 19 juin 1959 sur l'assurance-invalidité (al. 2).
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3.2. La réglementation ainsi décrite ne vaut toutefois que pour les prestations de la prévoyance professionnelle obligatoire, auxquelles s'applique la LPP. En l'espèce, la recourante est une institution de prévoyance de droit public (art. 2 al. 1 de la loi fédérale du 20 décembre 2006 régissant la Caisse fédérale de pensions [LPUBLICA; RS 172.222.1]) pratiquant la prévoyance obligatoire et plus étendue. Les prestations réglementaires vont donc au-delà des prestations minimales selon la LPP. Au titre de la réglementation visant à empêcher un avantage injustifié pour l'assuré résultant du cumul de prestations, l'art. 77 du règlement de prévoyance du 15 juin 2007 pour les personnes employées et les bénéficiaires de rentes de la Caisse de prévoyance de la Confédération (RPEC; RS 172.220.141.1), dans sa teneur en vigueur au moment où les faits juridiquement déterminants se sont produits, prévoit notamment ce qui suit:
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1 Les prestations pour survivants et d'invalidité de PUBLICA sont réduites dans la mesure où, ajoutées à d'autres revenus à prendre en compte, de même nature et poursuivant le même but, elles dépassent 100 % du gain annuel dont on peut présumer que la personne intéressée est privée.
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2 Si l'AA ou l'AM verse une rente d'invalidité au-delà de l'âge ordinaire de la retraite, la rente de vieillesse de PUBLICA, payable dès cette date, est traitée comme une rente d'invalidité.
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3 Sont considérés comme revenus à prendre en compte selon l'al. 1:
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a. les prestations de l'AVS et de l'AI;
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b. les prestations de l'AM;
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c. les prestations de l'AA;
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d. les prestations d'assurances sociales suisses et étrangères;
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e. les prestations de la prévoyance professionnelle;
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f. les prestations d'assurances privées aux coûts desquelles l'employeur a contribué au moins à hauteur de la moitié;
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g. les revenus d'une activité lucrative exercée par les bénéficiaires de rentes d'invalidité ou le revenu de remplacement, ainsi que le revenu ou le revenu de remplacement que ceux-ci ou celles-ci pourraient encore raisonnablement réaliser, à l'exception du revenu supplémentaire réalisé pendant l'exécution d'une mesure de nouvelle réadaptation au sens de l'art. 8a LAI.
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3bis Est également considérée comme revenu à prendre en compte selon l'al. 1 la part de l'avoir d'épargne spécial selon l'art. 43, al. 2, ou selon l'art. 55, al. 1, let. b, ou 2, perçue sous forme d'indemnité unique en capital, qui correspond aux cotisations d'épargne supplémentaires versées par l'employeur selon l'art. 36a, al. 2, let. abis, et à la bonification unique selon l'art. 36a, al. 2, let. ater.
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(...)
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5 Les prestations d'assurances privées pour lesquelles la personne assurée a assumé elle-même le paiement des primes, les allocations pour impotents, les indemnités, la réparation du tort moral et les prestations similaires ne sont pas considérées comme revenus à prendre en compte.
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(...)
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Erwägung 4 |
4.1. En se fondant par analogie sur la jurisprudence rendue en application des art. 336a et 337c al. 3 CO, la juridiction cantonale a considéré que l'indemnité fondée sur l'art. 19 al. 3 LPers n'avait tout d'abord pas le caractère d'un salaire ou d'un revenu de remplacement. Cette indemnité ne visait en particulier pas la réparation d'un dommage, respectivement la compensation d'une perte de gain. Partant, elle ne relevait pas d'une prestation d'un type et d'un but analogues à la rente d'invalidité au sens de l'anc. art. 24 OPP 2.
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D'autres éléments concourraient également à nier le caractère de revenu de remplacement. En particulier, la juridiction cantonale a rappelé que le Conseil fédéral avait renoncé à l'imputation des prestations d'invalidité sur l'indemnité fondée sur l'art. 19 al. 3 LPers dès le 1 er juillet 2013 (anc. art. 78 al. 3 let. b OPers). Or, s'il entendait conférer à cette indemnité le caractère d'un revenu de remplacement, il aurait dû selon les premiers juges, en application des principes de coordination, pérenniser la règle auparavant contenue aux anc. art. 19 al. 7 LPers et 78 al. 3 let. b OPers, qui excluait l'allocation de cette indemnité aux bénéficiaires de rentes d'invalidité atteignant un certain montant.
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4.2. Invoquant une violation du droit fédéral, la recourante soutient que l'indemnité de départ versée par l'employeur doit être considérée comme un élément de salaire à prendre en compte dans le calcul de surindemnisation. Le Tribunal administratif fédéral aurait en particulier jugé à plusieurs reprises que l'indemnité fondée sur l'art. 19 al. 3 LPers devait être considérée comme un salaire. Il ne saurait par ailleurs être question de lisser l'indemnité de départ sur la durée restante prévisible des rapports de travail, ce d'autant moins que rien ne permettait d'affirmer que l'intimé aurait continué à travailler pour l'AFD jusqu'à sa retraite.
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Erwägung 5 |
5.1. Bien que l'arrêt entrepris ne comporte pas de motivation très explicite, les premiers juges ont examiné tout d'abord le principe de la concordance des droits ("Kongruenzgrundsatz"), qui trouvait son expression à l'art. 24 al. 2 OPP 2 jusqu'au 31 décembre 2016 (actuellement à l'art. 34a al. 1 LPP) et auquel il y a lieu de reconnaître une portée générale dans l'assurance sociale (ATF 142 V 75 consid. 6.3.1 p. 83; 135 V 33 consid. 5.1 p. 36; voir ég. ATF 124 V 279 consid. 2a p. 281).
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5.2. Selon ce principe, seules sont susceptibles de conduire à une surindemnisation les prestations d'un type et d'un but analogue accordées à l'ayant droit en raison de l'événement dommageable. En d'autres termes, il faut qu'il existe non seulement une concordance au niveau de l'événement dommageable, mais aussi une concordance fonctionnelle (ou matérielle) (ATF 135 V 29 consid. 4.1 p. 30 et les références). La concordance fonctionnelle est en l'occurrence remise en cause. Selon la jurisprudence, une telle concordance est réalisée lorsque les prestations ont, d'un point de vue économique, une nature et une fonction correspondantes (cf. ATF 134 III 489 consid. 4.5.1 p. 494 et les références).
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5.3. Contrairement à ce que soutient la juridiction cantonale, on ne saurait tout d'abord appliquer en l'espèce, "par analogie", la jurisprudence selon laquelle l'indemnité fondée sur l'art. 337c al. 3 CO n'a pas le caractère d'un salaire (voir ATF 123 V 5; ch. 2083 des directives de l'OFAS sur le salaire déterminant dans l'AVS, AI et APG [DSD]; cf. arrêt 4A_310/2008 du 25 septembre 2008 consid. 4).
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5.3.1. L'indemnité de l'art. 337c al. 3 CO revêt en effet une double finalité, à la fois réparatrice et punitive, s'apparentant à une peine conventionnelle (ATF 135 III 405 consid. 3.1 p. 407). Sauf cas exceptionnel, elle doit être versée pour tout licenciement immédiat dénué de justes motifs (ATF 133 III 657 consid. 3.2 p. 660 et les arrêts cités; arrêt 4A_161/2016 du 13 décembre 2016 consid. 3.1). Autrement dit, cette indemnité - qui est de même nature et vise les mêmes buts que celle prévue à l'art. 336a CO en cas de licenciement abusif (ATF 123 III 391 consid. 3a p. 391 et la référence) - doit compenser l'atteinte à la personnalité du travailleur causée par le caractère injustifié du licenciement immédiat (ATF 123 V 5 consid. 2a p. 7 et la référence; HANS-ULRICH STAUFFER, Berufliche Vorsorge, 2
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5.3.2. En cas de cessation des rapports de travail, l'indemnité fondée sur les art. 19 al. 3 LPers et 78 OPers est, quant à elle, versée par l'employeur lorsque les chances de l'employé de trouver un nouvel emploi sur le marché de l'emploi sont réduites en raison de la spécialisation de son occupation, de la longueur de ses rapports de service ou de son âge (Message du 14 décembre 1998 concernant la loi sur le personnel de la Confédération [LPers], FF 1999 1421 ss, 1442; voir aussi PETER HÄNNI, Personalrecht des Bundes, in Schweizerisches Bundesverwaltungsrecht [SBVR], Organisationsrecht, 3e éd. 2017, p. 46 n° 127). Cette indemnité n'a par conséquent, à l'inverse de celle prévue aux art. 336a ou 337c al. 3 CO, aucun caractère préventif ou punitif (ATAF 2016/11 consid. 12.8 p. 167; 2015/48 consid. 6.4 p. 700; HARRY NÖTZLI, in: Handkommentar zum Bundespersonalgesetz [BPG], 2013, p. 345 ad art. 19 LPers n° 10;
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5.4. Les premiers juges ont néanmoins retenu à juste titre que l'indemnité fondée sur l'art. 19 al. 3 LPers, de par sa nature et son but, n'est pas destinée à couvrir les mêmes éventualités que celles visées par la prévoyance professionnelle, à savoir l'invalidité, le décès ou la vieillesse.
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5.4.1. L'indemnité fondée sur l'art. 19 al. 3 LPers ne fonde, à l'instar de l'indemnité de l'art. 337c al. 3 CO (ATF 135 III 405 consid. 3.1 p. 407), aucune prétention à des dommages-intérêts, liés par exemple à une baisse de revenu lors d'une période de chômage subséquente à la cessation des rapports de travail. En cas d'incapacité de travailler pour cause de maladie ou d'accident, l'art. 56 al. 1 et 2 OPers, édicté par le Conseil fédéral en application de l'art. 29 al. 1 LPers, prévoit en particulier que l'employeur verse à l'employé son salaire pendant deux ans (100 % la première année, puis 90 %), sauf circonstances exceptionnelles justifiant la poursuite du versement pendant douze mois supplémentaires au maximum (art. 56 al. 3 OPers). Le droit au salaire se mesure ainsi en fonction du temps écoulé durant l'incapacité de travail, l'employé disposant d'un crédit en temps et non pas en argent. En dehors des prévisibilités de l'art. 56 al. 1 à 3 OPers, l'employé perd tout droit au salaire, que le contrat de travail subsiste ou non (art. 56 al. 5 OPers).
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L'indemnité fondée sur l'art. 19 al. 3 LPers, lorsqu'elle fait suite comme en l'espèce à une incapacité de travail durable de deux ans ou plus, ne compense par conséquent pas un manque à gagner. Cette caractéristique est d'ailleurs renforcée par le fait que seules les personnes qui sont engagées par un des employeurs définis à l'art. 3 LPers dans l'année qui suit la résiliation de leur contrat de travail doivent restituer tout ou partie de l'indemnité (art. 78 al. 4 OPers dans sa version en vigueur jusqu'au 31 décembre 2016). Autrement dit, la personne qui aura immédiatement retrouvé un emploi en dehors du cercle des employeurs définis à l'art. 3 LPers pourra conserver le montant de l'indemnité, même si elle perçoit une meilleure rémunération dans sa nouvelle activité.
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5.4.2. L'indemnité fondée sur l'art. 19 al. 3 LPers est ensuite une indemnité de départ ("Abgangsentschädigung"; intervention de la Conseillère fédérale Widmer-Schlumpf, BO 2012 E 202), soit en l'occurrence une prestation en capital versée par l'employeur au moment de la cessation des rapports de travail. Contrairement à ce que semble penser l'institution de prévoyance recourante, cette qualification générique ne suffit pas à retenir que cette indemnité vise un but de prévoyance. Autrefois, les indemnités de départ étaient généralement octroyées en vertu de l'art. 339b CO, principalement aux salariés d'un certain âge et en raison de longs rapports de travail, en vue de combler, à titre subsidiaire, des lacunes en matière de prévoyance professionnelle, survivants et invalidité (ATF 123 V 241 consid. 2c/aa p. 243; voir ég. ATF 131 II 593 consid. 3.1 p. 600; 105 II 280 consid. 3 p. 282). Depuis l'entrée en vigueur, le 1er janvier 1985, de la prévoyance professionnelle obligatoire (LPP), les art. 339b-d CO ont progressivement perdu leur importance (REBEKKA HOLENSTEIN PFENNINGER, Die Auswirkungen der steuerrechtlichen Privilegierung von Kapitalleistungen aus Vorsorge auf die verfassungsrechtliche Zielsetzung der beruflichen Vorsorge, in Schweizer Schriften zum Handels- und Wirtschaftsrecht, 2015 p. 163). Aux traditionnelles indemnités de départ de l'art. 339b CO se sont ainsi ajoutées des prestations, diverses et variées, dont l'affectation est peu claire (voir Circulaire n° 1 sur les indemnités de départ et les versements de capitaux de l'employeur du 3 octobre 2002, éditée par l'Administration fédérale des contributions, in Archives 71 [2002-2003] p. 541 ch. 1). Il s'avère dès lors souvent délicat de déterminer si une indemnité de départ revêt ou non un lien fonctionnel avec la prévoyance professionnelle.
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5.5. En l'occurrence, l'intimé a perçu l'indemnité de 80'483 fr. de la même manière que ses salaires et, à l'inverse d'une prestation affectée irrévocablement à la prévoyance professionnelle, il a pu en disposer librement. L'indemnité n'a ensuite pas été calculée sur la base d'une capitalisation de prestations futures en matière de prévoyance, en particulier pour atténuer les effets d'une perte de prévoyance future. Certes, les modalités du calcul, qui font référence notamment à l'âge avancé et aux années d'ancienneté (art. 19 al. 3 let. b LPers et art. 78 al. 1 let. b et c OPers), constituent typiquement des indices en faveur du versement d'une prestation de prévoyance. Elles ne suffisent toutefois pas à établir, à elles seules, que la prestation devait servir objectivement à assurer de façon adéquate au destinataire le maintien de son niveau de vie habituel lors de la réalisation d'un cas de prévoyance (cf. arrêt H 308/93 du 27 avril 1994 consid. 5b, in VSI 1994 p. 271 ss, 274). Or, dans le cas présent, l'indemnité en cause est une prestation purement patrimoniale versée par l'employeur pour des considérations sociales, soit lorsque les chances de l'employé de trouver un nouvel emploi sur le marché de l'emploi sont réduites (consid. 5.3.2 supra). Elle vise donc à compenser le risque créé par l'abandon par le législateur fédéral de la garantie de la place de travail pour certaines catégories d'employés, sans lien aucun avec la diminution actuelle ou future du niveau de vie du travailleur ou de ses proches liée à la vieillesse, l'invalidité ou le décès. Au contraire, le Conseil fédéral avait expressément prévu qu'aucune indemnité n'était versée aux personnes qui percevaient une rente d'invalidité ou une rente de vieillesse de la Caisse fédérale de pensions (anc. art. 78 al. 3 let. b OPers, en vigueur jusqu'au 1er juillet 2013). L'indemnité de départ ici en cause ne vise par conséquent pas, même de manière subsidiaire, à couvrir économiquement une des éventualités qui relèvent de la prévoyance professionnelle. Partant, faute de concordance fonctionnelle, il ne saurait être question de prendre cette prestation en compte dans le calcul de surindemnisation (art. 77 al. 5 RPEC).
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6. On ajoutera qu'à compter du 1 er janvier 2017 (RO 2016 4507, 4514), le Conseil fédéral a prévu qu'aucune indemnité fondée sur l'art. 19 al. 3 LPers n'est versée aux personnes dont le contrat de travail est résilié au terme des délais fixés à l'art. 31a al. 1 OPers ("Résiliation des rapports de travail en cas d'incapacité de travailler pour cause de maladie ou d'accident") pour cause d'aptitude ou de capacité insuffisante (art. 78 al. 3 let. b OPers). Le législateur délégué a en effet considéré qu'il n'existait plus aucune considération sociale impérieuse au versement d'une telle indemnité lorsque la personne concernée perçoit déjà une rente d'invalidité de la prévoyance professionnelle (cf. Office fédéral du personnel, Modification du droit du personnel du 2 décembre 2016, p. 2).
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7. Mal fondé, le recours doit être rejeté. Le présent arrêt rend sans objet la requête d'effet suspensif présentée par l'institution de prévoyance recourante.
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8. Vu l'issue du litige, les frais judiciaires sont mis à la charge de Publica qui succombe (art. 65 et 66 al. 1 LTF).
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Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce : |
1. Le recours est rejeté.
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2. Les frais judiciaires, arrêtés à 800 fr., sont mis à la charge de la recourante.
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3. La recourante versera à l'intimé la somme de 2'400 fr. à titre de dépens pour la procédure devant le Tribunal fédéral.
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4. Le présent arrêt est communiqué aux parties, à la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre des assurances sociales, et à l'Office fédéral des assurances sociales.
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Lucerne, le 19 octobre 2018
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Au nom de la IIe Cour de droit social
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du Tribunal fédéral suisse
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La Présidente : Pfiffner
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Le Greffier : Bleicker
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