BGer 4A_351/2018 |
BGer 4A_351/2018 vom 24.10.2018 |
4A_351/2018 |
Arrêt du 24 octobre 2018 |
Ire Cour de droit civil |
Composition
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Mmes les juges Kiss, présidente, Klett et May Canellas.
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Greffier : M. Thélin.
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Participants à la procédure
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A.________,
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B.________, association,
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représentées par Me Christian De Preux,
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défenderesses et recourantes,
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contre
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Banque Z.________,
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représentée par Me Christian Fischer,
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demanderesse et intimée.
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Objet
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bonification de chèques « sauf bonne fin »
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recours contre l'arrêt rendu le 2 mai 2018 par la Cour d'appel civile du Tribunal cantonal du canton de Vaud (PT12.002970-171697 273).
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Considérant en fait et en droit : |
1. A.________ et l'association B.________ sont l'une et l'autre clientes de la Banque Z.________. Cette personne physique est un organe de l'association.
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Entre le 4 février et le 30 avril 2010, trente-et-un chèques furent remis à la banque avec mission de les encaisser et de les porter au crédit de comptes ouverts aux noms de A.________ ou de l'association. La banque a crédité les chèques « sauf bonne fin », en se réservant, par là, d'en extourner les montants dans l'éventualité où l'encaissement n'aboutirait pas.
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Les montants ainsi avancés par la banque furent successivement et presque totalement prélevés en espèces, d'ordinaire le jour même de la remise du chèque correspondant.
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Les chèques étaient tirés sur plusieurs établissements bancaires en Italie. Pour divers motifs, aucun de ces papiers-valeurs ne fut honoré. La Banque Z.________ a extourné les montants qu'elle avait crédités, de sorte que les comptes de A.________ et de l'association présentaient désormais d'importants soldes débiteurs. La banque a exigé le remboursement de ces découverts. Elle a ensuite fait notifier des commandements de payer, auxquels les clientes ont formé opposition.
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2. Le 9 janvier 2012, la banque a ouvert action contre ses deux clientes devant la Chambre patrimoniale cantonale du canton de Vaud. A.________ et B.________ devaient être condamnées à payer en capital, respectivement, 758'300 fr.40 et 1'824'756 fr.05, avec suite d'intérêts. Leurs oppositions aux commandements de payer devaient être levées à due concurrence.
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La Chambre patrimoniale s'est prononcée le 6 juillet 2017. Elle a condamné A.________ à payer 758'300 fr.40 avec intérêts au taux de 5% par an dès le 21 juillet 2010. Elle a condamné B.________ à payer 1'832'208 fr.35 avec intérêts au même taux et dès le même jour, sous déduction des montants ci-après, avec intérêts dès les dates correspondantes: 275 fr. dès le 26 juillet 2010; 4'080 fr.45 dès le 30 août 2010; 12 fr.85 dès le 14 octobre 2010; 665 fr.70 dès le 19 novembre 2010; 890 fr.80 dès le 2 février 2011; 325 fr.80 dès le 3 février 2011, et 1'577 fr.65 dès le 21 avril 2011. A concurrence de ces prestations, la Chambre patrimoniale a donné mainlevée définitive des oppositions aux commandements de payer.
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La Cour d'appel civile du Tribunal cantonal a statué le 2 mai 2018 sur l'appel des défenderesses. Elle a rejeté cet appel et confirmé le jugement.
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3. Agissant conjointement par la voie du recours en matière civile, les défenderesses requièrent le Tribunal fédéral de rejeter entièrement l'action.
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La demanderesse n'a pas été invitée à procéder.
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4. Les conditions de recevabilité du recours en matière civile sont satisfaites, notamment à raison de la valeur litigieuse.
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5. Une relation de mandat se forme entre une banque et son client lorsque celui-ci lui remet un chèque tiré sur un autre établissement et qu'elle se charge de l'encaisser. S'il en est convenu ainsi, la banque peut porter aussitôt le montant du chèque au crédit du client, ce qui met celui-ci en mesure d'en disposer, et se réserver d'extourner cette bonification si le chèque, à l'issue des opérations d'encaissement, n'est pas payé par l'établissement tiré. Le cas échéant, cette réserve de la banque est exprimée par la clause « sauf bonne fin » dans l'avis de crédit adressé au client (arrêts 4C.427/2005 du 4 mai 2006, consid. 2.2; 4C.303/2000 du 5 janvier 2001, consid. 2a). En l'occurrence, la demanderesse a procédé de cette manière.
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Les défenderesses contestent qu'un accord fût venu à chef entre elles et leur adverse partie au sujet de la bonification de chèques « sauf bonne fin », et elles contestent, en particulier, que cette partie se fût valablement réservé d'extourner les bonifications consécutives aux remises de chèques.
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Il est remarquable que de manière presque systématique, le montant de chaque chèque a été prélevé en espèces le jour même où le document était remis à la demanderesse. Les clientes sachant ce qu'est un chèque, puisqu'elles usaient de ces papiers-valeurs, il ne pouvait pas leur échapper que la banque leur avançait le montant à encaisser auprès d'un établissement à l'étranger. De bonne foi et compte tenu de l'attention que l'on peut attendre aussi de personnes inexpérimentées en affaires, les clientes devaient envisager le risque hélas classique qu'un chèque ne soit pas payé par l'établissement tiré. Elles n'ont pas pu se représenter que la banque voulût assumer elle-même ce risque; elles devaient au contraire, raisonnablement, percevoir que ce risque leur incombait, et envisager, par suite, que leurs comptes seraient débités si l'encaissement n'aboutissait pas. C'est pourquoi, au regard du principe de la confiance qui régit l'interprétation des manifestations de volonté entre cocontractants (cf. ATF 144 III 93 consid. 5.2.3 p. 98; 135 III 410 consid. 3.2 p. 412), la demanderesse pouvait admettre que ses clientes prélevaient l'argent en sachant et en acceptant qu'elles devraient éventuellement le restituer. Ainsi, dans le procès, les défenderesses contestent vainement la validité, la portée et les effets de la clause « sauf bonne fin » stipulée lors des bonifications.
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Il est sans importance que le personnel de la demanderesse ait agi en violation grossière de directives internes concernant le traitement des chèques car ces directives étaient étrangères à la relation contractuelle des parties. Il n'est pas nécessaire d'examiner si la demanderesse peut utilement invoquer ses conditions générales auxquelles les défenderesses avaient adhéré lors de l'ouverture de leurs comptes. Il n'est pas davantage nécessaire d'examiner si par l'effet d'une reconnaissance tacite des soldes débiteurs de leurs comptes, les défenderesses se sont aussi obligées en vertu de l'art. 117 al. 2 CO relatif à la relation de compte courant.
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6. Le recours se révèle privé de fondement, ce qui conduit à son rejet. A titre de parties qui succombent, ses auteurs doivent acquitter l'émolument à percevoir par le Tribunal fédéral. L'adverse partie n'a pas été invitée à répondre et il ne lui sera donc pas alloué de dépens.
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Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce : |
1. Le recours est rejeté.
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2. Les défenderesses acquitteront un émolument judiciaire de 15'000 francs.
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3. Il n'est pas alloué de dépens.
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4. Le présent arrêt est communiqué aux parties et au Tribunal cantonal du canton de Vaud.
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Lausanne, le 24 octobre 2018
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Au nom de la Ire Cour de droit civil
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du Tribunal fédéral suisse
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La présidente : Kiss
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Le greffier : Thélin
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