BGer 2C_1023/2018
 
BGer 2C_1023/2018 vom 23.11.2018
 
2C_1023/2018
 
Arrêt du 23 novembre 2018
 
IIe Cour de droit public
Composition
MM. les Juges fédéraux Seiler, Président,
Donzallaz et Haag.
Greffier : M. Dubey.
Participants à la procédure
A.________,
recourant,
contre
Service de la population et des migrations du canton du Valais.
Objet
Détention en vue de renvoi,
recours contre l'arrêt du Juge unique de la Cour de droit public du Tribunal cantonal du canton du Valais du 8 novembre 2018 (A2 18 94).
 
Faits :
A. Né le *** 1958, A.________ est ressortissant italien.
Le 6 novembre 2018, il a fait l'objet d'une décision de renvoi, immédiatement exécutoire, de la part du Service de la population et des migrations du canton du Valais fondée sur l'art. 64 LEtr pour défaut de documents de voyage et de titre de séjour valables.
B. Par arrêt du 8 novembre 2018, le Juge unique de la Cour de droit public du Tribunal cantonal du canton du Valais (ci-après: le Juge unique), après avoir auditionné l'intéressé, a approuvé la décision rendue le 6 novembre 2018 par le Service de la population et des migrations du canton du Valais ordonnant la mise en détention immédiate en vue du renvoi, pour trois mois au plus, de A.________.
C. A l'encontre de l'arrêt 8 novembre 2018, A.________ demande au Tribunal fédéral sa libération pour rejoindre Milan en Italie.
Le Service cantonal a transmis son dossier sans observations. Le Tribunal cantonal du canton du Valais a également renoncé à se déterminer.
 
Considérant en droit :
1. En matière de mesures de contrainte, la décision rendue en dernière instance cantonale par le Juge unique peut faire l'objet d'un recours en matière de droit public au Tribunal fédéral. Interjeté en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) et dans les formes requises (art. 42 LTF) par le recourant qui se trouve en détention administrative et remplit partant les conditions de l'art. 89 al. 1 LTF, le présent recours est en principe recevable.
2. Se fondant sur l'art. 76 al. 1 let. b ch. 3 et 4 LEtr, l'arrêt attaqué considère en substance que la mise en détention en vue du renvoi du recourant est justifiée, en raison des contradictions contenues dans ses déclarations, qui dénotent qu'il voudrait retarder au maximum le moment où il devra quitter le pays. Selon l'arrêt attaqué, le recourant a en effet affirmé dans un premier temps qu'il n'avait pas de famille puis, durant l'audience du 8 novembre 2018, qu'il avait un frère et deux soeurs en Italie.
3. 
3.1. La détention administrative porte une atteinte grave à la liberté personnelle et suppose en particulier qu'elle respecte le principe de la légalité (cf. arrêts 2C_40/2013 du 7 mars 2013 consid. 4.2; 2C_1139/2012 du 21 décembre 2012 consid. 3.1). Cela implique que la mise en détention administrative ne soit prononcée que si les motifs prévus dans la loi sont concrètement réalisés (arrêt 2C_478/2012 du 14 juin 2012 consid. 2.1). L'art. 76 al. 1 let. b ch. 3 et 4 LEtr sur lequel se fonde le Juge unique prévoit que, lorsqu'une décision de renvoi a été notifiée, l'autorité compétente peut, afin d'en assurer l'exécution, mettre en détention la personne concernée si des éléments concrets font craindre qu'elle entend se soustraire au renvoi ou à l'expulsion, en particulier parce qu'elle ne se soumet pas à son obligation de collaborer (cf. ch. 3), ou si son comportement permet de conclure qu'elle se refuse à obtempérer aux instructions des autorités (cf. ch. 4). Selon la jurisprudence, ces motifs sont réalisés en particulier lorsque l'étranger tente d'entraver les démarches en vue de l'exécution du renvoi en donnant des indications manifestement inexactes ou contradictoires ou encore s'il laisse clairement apparaître, par ses déclarations ou son comportement, qu'il n'est pas disposé à retourner dans son pays d'origine (cf. ATF 130 II 56 consid. 3.1 p. 58 s.; arrêt 2C_1139/2012 du 21 décembre 2012 consid. 3.2). Il faut qu'il existe des éléments concrets en ce sens (cf. arrêt 2C_1017/2012 du 30 octobre 2012 consid. 4.1.1 et les références citées).
Le seul fait de ne pas quitter le pays dans le délai imparti à cet effet ne saurait suffire, pris individuellement, à admettre un motif de détention (cf. arrêt 2C_142/2013 du 1er mars consid. 4.2 in fine). En outre, pour justifier une détention sur la base de l'art. 76 al. 1 let. b ch. 3 et 4 LEtr, n'importe quelle contradiction dans les propos de l'étranger ne suffit pas. Il faut que les indications contradictoires soient en lien avec le risque que l'intéressé se soustraie à son renvoi et refuse d'obtempérer aux injonctions des autorités. La Cour de céans a déjà indiqué à de multiples reprises au Juge unique valaisan que le fait que le recourant varie sur la composition de sa famille n'était pas propre à fonder une mise en détention administrative (cf. arrêts 2C_142/2013 du 1er mars 2013 consid. 4.4; 2C_420/2011 du 9 juin 2011 consid. 3.2; 2C_963/2010 du 11 janvier 2011 consid. 2.2; 2C_945/2010 du 5 janvier consid. 2.2).
3.2. En l'espèce, l'arrêt attaqué fonde la détention exclusivement sur les propos contradictoires qu'aurait tenus le recourant quant à la composition de sa famille. Le fait que le recourant ait varié dans ses explications à ce sujet ne permet pas, contrairement à ce que retient l'arrêt attaqué, d'en déduire un indice concret qu'il risquerait de ne pas obtempérer aux injonctions des autorités et de partir dans la clandestinité, d'autant moins qu'il s'est déclaré d'accord de retourner dans son pays d'origine immédiatement. Il appartenait au Juge unique de mettre en évidence d'autres éléments tangibles en ce sens, ce qu'il n'a pas fait. Le seul motif retenu dans la décision attaquée est donc manifestement impropre à fonder une détention administrative en application de l'art. 76 al. 1 lit. b ch. 3 et 4 LEtr. La détention du recourant est donc illégale, ce qui justifie de le libérer.
4. Au vu de ce qui précède, le recours doit être admis et l'arrêt attaqué annulé, ce qui entraîne le prononcé de la libération immédiate du recourant.
5. Le canton du Valais, qui succombe, n'a en principe pas à supporter les frais judiciaires (cf. art. 66 al. 1 et 4 LTF). Toutefois, compte tenu des vices de la décision cantonale et du fait que l'attention du Juge unique a déjà été attirée à plusieurs reprises sur les exigences de motivation en matière de détention, il se justifie en l'espèce de mettre les frais à la charge du canton du Valais (cf. art. 66 al. 3 LTF; cf. arrêts 2C_384/2017 du 3 août 2017; 2C_517/2016 du 28 juin 2016 consid. 5; 2C_237/2013 du 27 mars 2013 consid. 6.2). Il n'est pas alloué de dépens (cf. art. 68 al. 1 LTF).
 
 Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1. Le recours est admis et l'arrêt du 8 novembre 2018 est annulé.
2. Le recourant est immédiatement libéré.
3. Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 fr., sont mis à la charge du canton du Valais.
4. Le présent arrêt est communiqué au recourant, au Service de la population et des migrations du canton du Valais, au Juge unique de la Cour de droit public du Tribunal cantonal du canton du Valais ainsi qu'au Secrétariat d'Etat aux migrations.
Lausanne, le 23 novembre 2018
Au nom de la IIe Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse
Le Président : Seiler
Le Greffier : Dubey