18. Arrêt de la IIe cour de droit public du 1er juin 1979 en la cause Hochstrasser c. Tribunal administratif du canton de Genève (recours de droit administratif)
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Regeste
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Entzug des Führerausweises. Vorsichtspflicht des Fahrzeugführers vor Fussgängerstreifen.
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2. Fall eines Autofahrers, der auf einem Fussgängerstreifen ein Kind angefahren hat. Grobes Verschulden mit Rücksicht auf das grobe Verschulden eines andern Autofahrers verneint, dessen ungewöhnliches Manöver irreführend wirken konnte und dessen Fahrzeug die Sicht zwischen Fussgängern und Fahrzeugen verdeckte.
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Sachverhalt
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BGE 105 Ib 118 (119):
Le 24 mai 1978, vers 14 h, dame Pierrette Hochstrasser, qui, au volant de son automobile, circulait sur la route d'Hermance en direction Vésenaz, a renversé, dans le village de Collonge-Bellerive, un enfant qui traversait la chaussée de droite à gauche sur un passage de sécurité.
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A raison de ces faits, le Département de justice et police du canton de Genève lui a, par décision du 19 juin 1978, retiré son permis de conduire pour une durée de 5 mois en application de l'art. 16 al. 3 lettre a LCR.
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Sur recours de la conductrice, le Tribunal administratif du canton de Genève a confirmé la mesure de retrait dans son principe, mais il en a ramené la durée à trois mois. Il a retenu en fait que la visibilité de l'automobiliste avait été gênée par la présence de la voiture du père de l'accidenté. "En effet", poursuit-il, "le père de l'enfant a déposé celui-ci 10 mètres avant le passage de sécurité, puis il a roulé très lentement à côté de l'enfant qui cheminait sur le trottoir jusqu'au passage de sécurité. L'enfant a alors traversé la route rapidement la main en avant devant la voiture de son père". Il a considéré que "le fait de manquer à l'attention exigée par la loi à proximité d'un passage pour piétons constitue une faute grave". S'il a toutefois réduit la durée du retrait, c'est pour BGE 105 Ib 118 (120):
tenir compte des circonstances, notamment de la disposition des lieux et de la manoeuvre insolite de l'autre automobiliste.
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Considérant en droit:
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L'application de l'art. 16 al. 2 ou al. 3 lettre a LCR est subordonnée à la double condition que le conducteur ait enfreint des règles de la circulation et que, ce faisant, il ait compromis la sécurité de la route. Ainsi que l'a relevé le Tribunal fédéral dans un arrêt non publié du 6 mai 1977, en la cause S., cette disposition présente un certain parallélisme avec l'art. 90 ch. 1 et 2 LCR. Inclus dans les dispositions pénales de la loi, celui-ci prescrit à son ch. 1 que "celui qui aura violé les règles de la circulation fixées par la présente loi ou par les prescriptions émanant du Conseil fédéral sera puni des arrêts ou de l'amende". Selon l'art. 90 ch. 2 LCR, celui qui, par une violation grave d'une règle de la circulation, aura crée un sérieux danger pour la sécurité d'autrui ou en aura pris le risque sera puni de l'emprisonnement ou de l'amende. Pour que l'art. 90 ch. 2 LCR soit applicable, il faut, outre la sérieuse mise en danger de la sécurité d'autrui, que le conducteur ait commis une faute ou une négligence graves (ATF 99 IV 280). Cette disposition met ainsi l'accent sur le comportement du conducteur, soit sur l'appréciation de la situation du point de vue subjectif. L'art. 16 al. 3 lettre a LCR se fonde en revanche davantage sur la mise en danger objective du trafic (ATF 102 Ib 197). Toutefois, en faisant dépendre la mesure administrative de la commission d'une infraction aux règles de la circulation routière, l'art. 16 al. 2 ou al. 3 lettre a LCR indique clairement que le conducteur doit avoir commis une faute (art. 31 et 32 OAC; cf. arrêt S. précité). L'autorité administrative ne peut donc prononcer un avertissement ou retirer le permis de conduire en se fondant sur la disposition précitée que si celui qui a viole les règles de la circulation a agi intentionnellement ou par négligence (ibid.) De même que seul sous le BGE 105 Ib 118 (121):
coup de l'art. 90 ch. 2 LCR le conducteur qui a gravement violé une règle de la circulation, autrement dit qui a commis une faute grave, de même le permis de conduire ne devra être retiré en application de l'art. 16 al. 3 lettre a LCR que si la faute commise par le conducteur revêt ce même caractère de gravité. Dans le cas contraire et quand bien même il y aurait eu objectivement mise en danger sérieuse (concrète ou abstraite accrue: ATF 103 Ib 39), un retrait de permis pourra se fonder, tout au plus sur l'art. 16 al. 2 LCR. Cette solution se justifie d'autant plus qu'en cas de récidive, la durée du nouveau retrait est au minimum de 6 mois lorsque celui-ci a un caractère obligatoire au sens de l'art. 16 al. 3 LCR. On comprendrait mal cette aggravation de la mesure si les hypothèses visées par l'art. 16 al. 3 LCR n'impliquaient pas une faute grave de la part du conducteur.
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Tel serait incontestablement le cas si la recourante avait dépassé le véhicule du père de la victime alors que celui-ci se trouvait de toute évidence arrêté devant un passage de sécurité pour laisser passer des piétons. Dans le cas particulier, on se trouve toutefois devant une hypothèse différente. Le père de la victime ne s'est pas borné à marquer un temps d'arrêt à la hauteur du passage de sécurité pour laisser passer des piétons qui s'y étaient engagés ou qui étaient sur le point de le faire. Il s'est au contraire garé à l'extrême droite de la chaussée à une dizaine de mètres de ce passage pour déposer son fils, puis il a roulé très lentement à côté de celui-ci, qui cheminait sur le trottoir, jusqu'au passage de sécurité et il s'est alors arrêté à la hauteur de ce passage. En se comportant de la sorte, il a lui-même commis une faute grave. En effet, sa voiture constituait un obstacle à la visibilité réciproque des piétons et des véhicules. Par ailleurs, sa manoeuvre insolite a pu induire la recourante en erreur, en lui faisant croire que son intention était en réalité de se garer. On ne saurait donc reprocher à cette dernière d'avoir dépassé un véhicule qui, de toute évidence, se trouvait à l'arrêt pour laisser passer des piétons sur le passage de sécurité.
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La recourante a constamment affirmé, tant en procédure de recours de droit administratif que déjà devant le Tribunal administratif, qu'elle avait, à BGE 105 Ib 118 (122):
l'approche du passage de sécurité, réduit sa vitesse à 30 km/h et que l'enfant s'était engagé en courant sur le passage de sécurité sans qu'elle ait pu l'apercevoir. Sur le premier point, l'arrêt déféré est entièrement muet. Sur le second, il se borne à retenir que l'enfant s'est engagé "rapidement" sur le passage de sécurité. Ces affirmations de la recourante n'ont toutefois été contredites à aucun moment et il ne se trouve au dossier aucun élément qui permettrait de les infirmer. Elles paraissent au contraire corroborées, en ce qui concerne la vitesse, par la faible longueur des traces de freinage imprimées par son véhicule (5 m 60, ce qui, sur chaussée sèche et avec un véhicule en état normal, correspond à une vitesse quelque peu inférieure à 30 km/h) et, en ce qui concerne le comportement de l'enfant, par les déclarations de ce dernier: celui-ci a en effet expressément admis qu'il courait et aucune autre déclaration - notamment pas de la part de son père, qui ne s'est pas prononcé sur ce point précis - n'est venue infirmer cette version des faits.
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Dans ces conditions, la recourante ne saurait en tout cas pas se voir reprocher une faute grave. L'arrêt déféré doit donc être annulé et l'affaire renvoyée au Tribunal administratif pour nouvelle décision. Il appartiendra à cette autorité de compléter tout d'abord l'état de fait sur les points ci-dessus évoqués et d'examiner sur cette base si les conditions d'une mesure administrative sont remplies en l'espèce, mesure qui, comme il résulte de ce qui précède, ne pourrait alors se fonder que sur l'art. 16 al. 2 LCR.
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