20. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour de droit civil dans la cause F.X. et Y. contre Z. (recours en matière civile)
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4A_394/2009 du 4 décembre 2009
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Regeste
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Vollstreckung eines wegen Formmangels nichtigen Schenkungsversprechens.
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Ein wegen Formmangels nichtiges Schenkungsversprechen, das durch eine Vermögensübertragung erfüllt wurde, ist gemäss Art. 243 Abs. 3 OR als gültige Schenkung von Hand zu Hand zu beurteilen (E. 3.3 und 3.4).
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Sachverhalt
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BGE 136 III 142 (142):
A. Depuis le début des années 1970, l'avocat Z., domicilié à Genève, a été le conseil et l'ami de H.X., qui était domicilié à N. Ce dernier était à la tête d'une fortune estimée à 500'000'000 US$.
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Au cours de l'année 2000, H.X. a épousé, en sixièmes noces, F.X.
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BGE 136 III 142 (143):
Le 7 septembre 2001, H.X. et Z. ont ouvert auprès de A. Bank à Genève un compte en dollars n° xxx dénommé "U.". Selon les documents d'ouverture du compte, chacun d'eux en était titulaire et disposait de la signature individuelle. Selon deux témoins, H.X. destinait ce compte à sa fille. (...) Le compte a été utilisé pour payer différentes factures et a donné lieu à de nombreuses opérations.
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Le 19 juillet 2002, H.X. a donné l'ordre à la société B. Corporation de verser 1'000'000 US$ sur le compte "U." qui a été crédité de ce montant le 23 juillet 2002. Selon Z., H.X. lui a dit qu'il s'agissait d'un don qu'il lui faisait pour marquer tant d'années d'amitié.
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Par courrier du 4 juin 2003, Z. a donné l'ordre à A. Bank de transférer 1'500'000 US$ sur un de ses comptes personnels auprès de la banque C., transfert qui a été effectué. Ce transfert n'est litigieux qu'à concurrence d'un million de dollars, correspondant à la donation alléguée. (...)
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Les rapports entre H.X. et Z. se sont dégradés en mai 2004, le premier reprochant au second de l'avoir mal conseillé dans le cadre de la constitution d'un nouveau trust appelé "... Trust". Par courrier du 8 juin 2004, H.X. a résilié tous les mandats confiés à Z. Par la suite, il lui a demandé, par voie judiciaire, de rendre compte.
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H.X. est décédé le 23 janvier 2005.
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B. Le 11 mai 2006, F.X. et la société Y., en qualité d'exécuteurs testamentaires de la succession H.X., ont déposé devant le Tribunal de première instance de Genève une demande en restitution de 1'000'000 US$ à l'encontre de Z., contestant l'existence d'une donation valable.
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Par jugement du 6 novembre 2008, le Tribunal de première instance a rejeté la demande (...), admettant l'existence d'une donation.
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Par arrêt du 19 juin 2009, la Cour de justice du canton de Genève a confirmé le jugement attaqué (...).
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C. F.X. et la société Y. exercent un recours en matière civile au Tribunal fédéral contre l'arrêt du 19 juin 2009. Invoquant l'arbitraire dans l'appréciation des preuves et l'établissement des faits, ainsi qu'une violation des art. 1, 18, 19, 20, 239 et 242 CO, les recourantes concluent à l'annulation de l'arrêt attaqué et à ce que l'intimé soit condamné à leur verser la somme de 1'000'000 US$ avec intérêts à 5 % dès le 30 mars 2006 (...).
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L'intimé a conclu au rejet du recours (...).
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(extrait)
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BGE 136 III 142 (144): Extrait des considérants:
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Erwägung 3
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Ces griefs se chevauchent partiellement et il paraît plus expédient - le Tribunal fédéral appliquant le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF) - de reprendre l'analyse juridique du cas ab ovo.
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En raison du domicile à N. du donateur (cf. ATF 110 II 156 consid. 2b p. 158), la cause revêt un caractère international et la question du droit applicable doit être examinée d'office par le Tribunal fédéral (ATF 132 III 609 consid. 4 p. 614, ATF 132 III 626 consid. 2 p. 629).
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La question doit être tranchée selon le droit international privé du for (ATF 132 III 661 consid. 2 p. 663). La qualification du rapport juridique litigieux doit être effectuée selon le droit interne du for (ATF 132 III 609 consid. 4 p. 615).
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En l'absence de convention internationale, il faut donc appliquer, pour le fond, les art. 116 et 117 LDIP (RS 291) et, pour la forme, l'art. 124 LDIP.
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En l'espèce, la cour cantonale a retenu que les parties, représentées par des avocats, avaient, par actes concluants, choisi d'appliquer le droit interne suisse. Comme la question du droit applicable a été expressément soulevée par la cour cantonale et que les avocats des parties continuent de se référer exclusivement au droit suisse, il n'est pas douteux que les parties ont choisi d'appliquer ce droit comme le leur permet l'art. 116 LDIP. En ce qui concerne la forme, ce n'est que si le contrat apparaissait comme nul selon le droit suisse qu'il faudrait se demander s'il n'est pas valable selon le droit N. (art. 124 al. 2 LDIP). Quant à la question de la capacité du donateur, elle ne se poserait que s'il était établi - ce qui n'est pas le cas - que le donateur n'avait pas la capacité selon le droit N. (cf. art. 35 et 36 al. 1 LDIP).
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La donation est un contrat (TERCIER/FAVRE, Les contrats spéciaux, 4 e éd. 2009, n. 1760 p. 260; PIERRE ENGEL, Contrats de droit suisse, BGE 136 III 142 (145):
2 e éd. 2000, p. 110; MARGARETA BADDELEY, in Commentaire romand, Code des obligations, vol. I, 2003, n° 4 ad art. 239 CO). Il suppose donc un accord des parties sur un transfert patrimonial à titre gratuit (art. 1 al. 1 CO). En conséquence, la donation doit être acceptée (ATF 110 II 156 consid. 2d p. 161). L'acceptation peut intervenir par actes concluants (art. 1 al. 2 CO) et, comme la donation ne présente que des avantages pour le donataire, elle peut être tacite (art. 6 CO).
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Ce contrat peut revêtir deux formes: la donation manuelle (art. 242 CO) ou la promesse de donner (art. 243 CO) (arrêt 5C.273/2005 du 14 mars 2006 consid. 5.1).
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Lorsque le donateur s'engage envers le donataire à lui remettre gratuitement un bien et que le donataire accepte, le contrat est parfait. Il donne naissance à une obligation dont le donataire peut exiger l'exécution. Pour protéger le donateur contre des promesses faites à la légère, le législateur exige qu'il s'engage par écrit ou, s'il s'agit de donner un immeuble ou un droit réel immobilier, par acte authentique (art. 243 al. 1 et 2 CO). Seul le donateur doit signer l'acte écrit (ATF 110 II 156 consid. 2d p. 161; ATF 105 II 104 consid. 3b p. 107 s.). On parle alors, selon le titre marginal de l'art. 243 CO, d'une "promesse de donner", expression qui n'est pas entièrement satisfaisante, parce qu'elle fait croire à tort qu'il ne s'agit pas d'un contrat, mais d'un acte unilatéral.
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Il arrive que le donateur exprime sa volonté de faire une libéralité en remettant directement le bien au donataire qui l'accepte. Dans ce cas, la conclusion de la donation a lieu en même temps que son exécution, de sorte que la naissance du contrat coïncide avec son extinction par l'exécution (ATF 105 II 104 consid. 3a p. 107). On parle alors d'une "donation manuelle" selon l'expression figurant à l'art. 242 al. 1 CO. Cette dénomination non plus n'est pas entièrement satisfaisante, parce qu'elle suggère l'idée d'une chose mobilière que le donateur remet au donataire de la main à la main. Or, la "donation manuelle" peut revêtir, s'il s'agit d'une chose mobilière, toutes les formes de transfert de la propriété mobilière (ATF 105 II 104 consid. 3a p. 107). La donation peut aussi porter sur un immeuble ou un droit réel immobilier, auquel cas le transfert s'opère par l'inscription au registre foncier (art. 242 al. 2 CO). Elle peut également porter sur une créance ou un autre droit transmissible ayant une valeur patrimoniale; une "donation manuelle" peut donc également intervenir par une cession de créance (art. 164 et 165 CO; NEDIM PETER VOGT, in Basler BGE 136 III 142 (146):
Kommentar, Obligationenrecht, vol. I, 4 e éd. 2007, n° 8 ad art. 239 CO; ENGEL, op. cit., p. 112) ou par une assignation (ATF 105 II 104 consid. 3c p. 108). Une "donation manuelle" peut donc intervenir par un virement d'un compte bancaire à un autre (VOGT, op. cit., n° 20 art. 239 CO). Ce qui est décisif est que le bien sorte du patrimoine du donateur et entre dans celui du donataire (TERCIER/FAVRE, op. cit., n. 1769 p. 261).
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Une promesse de donner qui ne revêt pas la forme écrite est sans effet juridique (ATF 117 II 382 consid. 2a p. 385). Un ordre bancaire (qui n'exprime pas l'intention de donner) ne peut constituer une promesse valable (ATF 117 II 382 consid. 2b p. 385). Cependant, si une promesse nulle pour vice de forme est ensuite exécutée sous la forme d'un transfert du bien d'un patrimoine à l'autre, il faut, en vertu de la règle spéciale de l'art. 243 al. 3 CO, considérer qu'il s'agit d'une donation manuelle valable (TERCIER/FAVRE, op. cit., n. 1829 p. 269; VOGT, op. cit., n° 6 ad art. 243 CO; BADDELEY, op. cit., n° 50 ad art. 239 CO et n° 21 ad art. 243 CO; ENGEL, op. cit., p. 118).
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3.4 En l'espèce, il ressort des constatations cantonales - qui lient le Tribunal fédéral (art. 105 al. 1 LTF) - que le défunt avait l'intention de transférer un million de dollars à l'intimé sans contre-prestation, pour lui exprimer sa reconnaissance après une trentaine d'années de conseils et d'amitié. Dans ce but, il a fait transférer la somme par une assignation sur le compte dénommé "U.". Dès ce moment, les fonds étaient à disposition de l'intimé, puisque celui-ci disposait d'une signature individuelle sur ce compte; le défunt n'en avait cependant pas totalement perdu la maîtrise, puisqu'il pouvait aussi disposer de ce compte avec une signature individuelle (sur cette question: cf. ATF 52 II 284 consid. 2 p. 289 s.); on peut donc se demander si la donation manuelle était déjà parfaite au moment où les fonds sont arrivés sur ce compte; il n'est cependant pas nécessaire d'approfondir cette question. En effet, par une seconde assignation, l'intimé a fait transférer les fonds sur un compte personnel auprès d'une autre banque. Dès ce moment, les fonds sont clairement sortis du patrimoine du défunt et sont entrés dans celui de l'intimé. En donnant cet ordre, l'intimé a manifesté sa volonté d'accepter la donation. Le transfert de valeur ayant été opéré, il faut raisonner avec la notion de donation manuelle et l'absence de promesse en la forme écrite est sans importance (art. 242 al. 1 et 243 al. 3 CO). Le transfert ayant été opéré avant la mort du donateur, la question examinée à l' ATF 105 II 104 (consid. 3c p. 108 s.) ne se pose pas.
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BGE 136 III 142 (147):
Il n'apparaît donc pas que la cour cantonale ait violé les art. 1, 18, 239 ou 242 CO.
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Il est vrai que la jurisprudence a admis qu'une libéralité en faveur d'une personne de confiance, telle qu'un avocat, pouvait, dans des circonstances particulières, être contraire aux bonnes moeurs, lorsque la personne de confiance a exercé une influence déloyale sur la volonté du donateur ou lorsqu'elle a violé des règles professionnelles élémentaires (ATF 132 III 455 consid. 4 p. 458 ss).
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Il faut tout d'abord observer qu'aucune règle juridique n'interdit de façon absolue à un avocat de recevoir un cadeau de l'un de ses clients. Ensuite, il faut rappeler que le Tribunal fédéral est lié par les faits constatés par la cour cantonale (art. 105 al. 1 LTF). Or, il ne ressort nullement de l'état de fait cantonal que l'intimé aurait sollicité ce don, qu'il aurait exercé une quelconque pression sur le donateur, qu'il aurait, d'une quelconque façon, trahi la confiance placée en lui ou abusé d'une situation de dépendance. Il ressort au contraire des constatations cantonales que le donateur, personne très fortunée, a décidé librement, de sa propre initiative, de faire une libéralité en faveur de son ami et avocat, pour le gratifier après une trentaine d'années de conseils et d'amitié. Même si le montant paraît élevé, une telle libéralité ne peut pas être qualifiée de contraire aux bonnes moeurs. Il n'y a donc pas eu davantage de violation des art. 19 et 20 CO.
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On ne se trouve dans aucun des cas qui permettrait de revenir sur la donation valablement exécutée (cf. art. 247 et 249 CO).
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Le recours doit donc être rejeté.
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