BGE 105 V 198 |
45. Extrait de l'arrêt du 25 juillet 1979 dans la cause Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents contre Jaggi et Tribunal des assurances du canton de Berne |
Regeste |
Art. 97 Abs. 1 und 98 OG, Art. 5 VwVG. |
- Die Substitution der Begründung durch den Richter darf nicht zu einer Änderung des Gegenstandes der streitigen Verfügung führen. |
Art. 74 Abs. 3, 75 und 99 Abs. 1 KUVG. |
- Überentschädigung und Beteiligung des Versicherten an den Spitalkosten: Natur der der SUVA zustehenden Guthaben. |
- Berechnung der Überversicherung. |
- Beteiligung an den Spitalkosten und Rückerstattung unrechtmässiger Leistungen. |
Sachverhalt |
A.- Olga Jaggi a été grièvement blessée le 15 juillet 1970 lors d'un accident de la circulation, la voiture dont elle était passagère ayant été emboutie par celle d'un tiers. Prés de cinq ans durant, la Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents - auprès de laquelle l'intéressée était assurée - a assumé le traitement et alloué des indemnités de chômage, auxquelles a succédé dès le 19 juin 1975 une rente d'invalidité de 50%; des indemnités complétant le montant de la rente ont été allouées encore pendant une cure de bains, effectuée du 27 octobre au 15 novembre 1975. Pour la période susmentionnée d'octroi des indemnités de chômage, la prénommée a touché par ailleurs: en vertu d'une assurance-occupants du détenteur du véhicule, une indemnité journalière pour perte de gain de 10 fr. durant 730 jours, soit au total 7'300 fr.; de l'assurance-invalidité, une rente entière simple de 720 fr. par mois du 1er janvier au 30 novembre 1973, puis dès le 1er décembre 1973 une demi-rente de 360 fr. par mois, portée à 450 fr. par mois dès le 1er janvier 1975, soit au total 15'780 fr. 90. |
Par décision du 25 octobre 1976, la Caisse nationale a réclamé à Olga Jaggi restitution d'une somme de 3'936 fr. 25, prétendument perçue en trop en raison de surassurance selon l'art. 74 al. 3 LAMA. Pour établir ce montant, l'administration a d'une part constaté que les indemnités de chômage auxquelles l'assurée avait en principe droit s élevaient au total à 75'534 fr. 90. Les prestations déjà versées représentant 71'582 fr. 30, restait dû un solde de 106 fr. 60, après retenue de 3'846 fr. à titre de participation de l'intéressée aux frais d'entretien durant les séjours à l'hôpital (641 jours à 6 fr.). D'autre part, la Caisse nationale a constaté que la perte de gain totale était de 94'572 fr. 95. Or l'addition des indemnités de chômage dues, après déduction de la participation précitée (71'688 fr. 90), des indemnités journalières de l'assurance-occupants (7'300 fr.) et des rentes de l'assurance-invalidité (15'780 fr. 90) donnait un montant de 94'769 fr. 80, d'où une surassurance "brute" de 196 fr. 85. Ajoutant à cette somme la retenue de 3'846 fr., elle aboutissait à une surassurance "nette" de 4'042 fr. 85 puis, déduisant le solde dû par elle de 106 fr. 60, au montant réclamé de 3'936 fr. 25.
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B.- Olga Jaggi, représentée par Me S., a recouru.
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Le Tribunal des assurances du canton de Berne a constaté en bref que l'on ne pouvait, pour déterminer s'il y a surassurance, à la fois déduire la participation de l'assuré aux frais d'entretien du total des indemnités dues et considérer ces indemnités comme versées en leur intégralité; que de plus, même en suivant la Caisse nationale, le montant de 3'846 fr. avait été versé aux hôpitaux et constituait donc pour l'assurée une prestation en nature, dont la restitution n'était pas admise par l'art. 99 al. 1 LAMA. Eliminant ce montant du calcul de la surassurance, il a dès lors fixé à 90 fr. 25 (différence entre la surassurance "brute" de 196 fr. 85 et le solde encore dû de 106 fr. 60) la somme à rembourser par l'assurée. Par jugement du 17 août 1977, il a donc admis le recours dans cette mesure. |
C.- La Caisse nationale interjette recours de droit administratif, en concluant à la réforme du jugement cantonal et au rétablissement dans son intégralité de sa décision du 25 octobre 1976 faisant ressortir un solde de 3'936 fr. 25 en sa faveur. Elle reconnaît le bien-fondé du reproche formulé quant à la manière dont elle a dressé le décompte de la surindemnisation, mais soutient que son calcul est juste quant au résultat. Elle prend pour point de départ de son argumentation le fait que la question de la retenue pour frais d hospitalisation selon l'art. 75 LAMA n'a strictement rien à voir avec celle de la surassurance au sens de l'art. 74 al. 3 LAMA. Elle admet par conséquent que cette participation doit être éliminée du calcul et que le montant de la surassurance est bien de 90 fr. 25, ainsi que l'a prononcé le juge cantonal. Mais elle fait valoir qu'elle possède par ailleurs envers l'assurée une créance de 3'846 fr. représentant la participation aux frais d'hospitalisation. Le total du trop-perçu selon l'art. 74 al. 3 LAMA et de la créance découlant de l'art. 75 LAMA donne le montant de 3'986 fr. 25 réclamé par l'acte administratif en cause.
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Toujours représentée par Me S., l'intimée conclut: principalement à l'irrecevabilité du recours, en faisant valoir que la Caisse nationale prend une conclusion nouvelle, donc irrecevable, dans la mesure où elle demande le rétablissement de sa décision en fonction non pas de l'art. 74 al. 3 mais de l'art. 75 LAMA, soit sur une base totalement autre que celle de la décision et dont le premier juge n'a pu connaître; subsidiairement, au rejet du recours, au fond. Elle formule par ailleurs diverses critiques à l'endroit du jugement attaqué, qu'elle renonce pourtant à soumettre au Tribunal fédéral des assurances en raison du faible montant litigieux.
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Extrait des considérants: |
1. a) Selon la jurisprudence constante, la procédure juridictionnelle administrative ne vise à juger ou à n'apprécier que les rapports juridiques à propos desquels l'autorité administrative compétente s'est prononcée préalablement d'une manière qui la lie et sous la forme d'une décision (ATF 103 V 113). Cette dernière détermine par conséquent l'objet du litige à trancher dans la procédure de recours. A défaut de décision, il n'existe aucun acte litigieux, en sorte qu'un jugement sur le fond ne peut pas être rendu (voir p. ex. RCC 1971 p. 480 et les arrêts cités; F. GYGI, Verwaltungsrechtspflege und Verwaltungsverfahren im Bund, Berne 1974, 2e édition, p. 95). Dans certains cas exceptionnels, toutefois, le procès peut être étendu à une question non visée par la décision administrative. Mais cela n'est possible qu'à la double condition suivante: la nouvelle question à examiner doit être connexe à l'objet primitif du litige, et l'administration doit s'être déterminée sur cette question (ATF 104 V 179). Il arrive enfin que le Tribunal fédéral des assurances procède à une substitution de motifs et confirme une décision juste en son résultat mais erronée quant aux motifs invoqués. C'est ainsi, par exemple, que le juge peut entériner la décision d'une caisse de compensation mettant fin au versement d'une rente de l'assurance-invalidité en substituant au motif, non fondé, tiré de la révision celui, justifié, de la reconsidération d'une décision administrative antérieure manifestement erronée (voir p. ex. ATF 105 V 29). Ou bien, que l'octroi d'une allocation pour impotent pourra être maintenu en application des dispositions de la Loi fédérale sur l'assurance-invalidité, au lieu de celles de la Loi fédérale sur l'assurance-vieillesse et survivants (cf. ATF 96 V 70). Ou bien encore, qu'un refus de prestations pourra être approuvé pour le motif qu'une condition de leur octroi, autre que celle invoquée par l'administration, n'est pas réalisée (non-écoulement de la période d'attente de la seconde variante de l'art. 29 al. 1 LAI, alors que les organes de l'assurance-invalidité ont fondé à tort leur décision sur l'insuffisance de l'invalidité, en matière de rente de l'assurance-invalidité, par exemple). Dans toutes ces éventualités, les motifs substitués par le juge à ceux de l'administration ne modifieront pas, ou guère, l'objet de la décision litigieuse: reconsidération d'une décision sans nul doute erronée et revision de rente sont des institutions très voisines; l'allocation pour impotent de l'assurance-invalidité et celle au sens de la Loi fédérale sur l'assurance-vieillesse et survivants relèvent, quant à la notion, de la même institution juridique (ATF 96 V 70); le refus d'une prestation pour le motif qu'une condition plutôt qu'une autre, mise à son octroi, n'est pas remplie ne change à l'évidence pas la nature du droit en cause. |
b) Il faut donc vérifier en l'occurrence si les conclusions de la Caisse nationale tendent à faire examiner par le Tribunal fédéral des assurances une question non tranchée par la décision du 25 octobre 1976, éventuellement si l'on se trouve dans la situation exceptionnelle autorisant la Cour de céans à se saisir d'un problème étranger à l'acte administratif déféré au juge ou encore à procéder à une substitution de motifs. Or l'acte du 25 octobre 1976 réclamait à l'assurée restitution d'une somme de 3'936 fr. 25 prétendument perçue en trop en raison de surassurance selon l'art. 74 al. 3 LAMA, compte tenu cependant d'une participation de l'assurée aux frais d hospitalisation de 3'846 fr. L'acte administratif entrepris se fondait donc aussi bien sur l'art. 74 al. 3 LAMA que sur l'art. 75 LAMA, implicitement a tout le moins en ce qui concerne ce second titre.
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Les conclusions prises en instance fédérale ne portent ainsi pas sur une question étrangère à la décision administrative en cause, et le recours de droit administratif est par conséquent recevable.
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L'art. 75 LAMA dispose notamment que, pour couvrir les frais de séjour de l'assuré dans un établissement hospitalier, la Caisse nationale peut retenir au maximum les trois quarts de l'indemnité de chômage, ou la moitié si l'assuré a charge de famille.
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L'art. 74 al. 3 et l'art. 75 LAMA procèdent de la même idée fondamentale, à savoir que l'indemnité de chômage ne doit pas être une source de gain pour l'assuré. Ils sont tous deux l'émanation, pour une part du moins, du principe de l'interdiction de la surindemnisation. Mais la Loi fédérale sur l'assurance en cas de maladie et d'accidents n'exprime pas ce principe en tant que tel; si elle connaît diverses normes qui en sont certes la manifestation et tendent à la réaliser, chacune de ces normes vise une situation donnée et prévoit des moyens propres à cette situation. |
C'est ainsi que l'art. 74 al. 3 LAMA, qui règle le concours avec des prestations d'autres assureurs, permet à la Caisse nationale de réduire les indemnités de chômage, dans la mesure où le total des prestations dépasserait le gain dont l'assuré se trouve privé. Alors que l'art. 75 LAMA, qui règle le concours avec l'entretien fourni en nature durant des séjours hospitaliers, donne à la Caisse nationale une forme de créance compensatoire, censée correspondre pour l'essentiel et sous certaines réserves à l'économie des frais d'entretien qui incomberaient sinon à l'assuré à son domicile (voir dans ce sens: MAURER, Recht und Praxis der Schweizerischen obligatorischen Unfallversicherung, Berne 1963, 2e édition, p. 210; des arrêts anciens, mais qui n'ont jamais été mis en doute par la suite, se réfèrent à l'intention du législateur et mettent l'accent non pas sur l'économie faite par le patient mais sur les frais accrus supportés par l'assurance lors d'hospitalisations, ce qui rend les deux dispositions susmentionnées encore plus étrangères l'une à l'autre: ATFA 1928, p. 3, 1929, p. 28, 1930, p. 8, 1938, p. 136 consid. 2). On est ainsi en présence de deux titres distincts de par leur nature: l'un consiste en une réduction des prestations en espèces dues, l'autre en une créance en compensation de prestations accordées en nature. Ces deux titres sont différents aussi de par leur champ d'application: le premier implique l'intervention d'un autre assureur; le second découle de l'hospitalisation, indépendamment du fait qu'un tiers intervienne ou non.
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Ces distinctions sont importantes pour statuer sur le fond du présent litige.
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b) Pour écarter la prétention de la Caisse nationale à la restitution d'un montant de 3'846 fr. à titre de participation de l'assurée aux frais d'entretien durant les séjours à l'hôpital, le juge cantonal a noté que, dans le calcul de la surassurance, on ne pouvait à la fois déduire la participation de l'assuré aux frais d'entretien du total des indemnités dues et considérer ces indemnités comme versées en leur totalité. Cet avis est entièrement fondé, en ce sens que la participation aux frais d'entretien selon l'art. 75 LAMA n'a rien à voir avec la surassurance selon l'art. 74 al. 3 LAMA, ainsi que la Caisse nationale a fini par l'admettre en instance fédérale. La question de cette participation de l'assurée doit être éliminée du calcul de la surassurance. |
Mais il sied de préciser que l'art. 74 al. 3 LAMA se borne à exclure une surindemnisation de la perte de salaire encourue. L'indemnisation de cette perte doit être considérée pour elle-même, soit séparément de l'autre catégorie de risques que représente le traitement. Ce principe du compte séparé, qui découle du système légal, a été reconnu et confirmé par la jurisprudence (voir ATF 102 V 91). Si la Caisse nationale possède une créance découlant du traitement assumé, cette créance ne modifie donc ni le montant de la perte de gain ni celui des indemnités dues à ce titre. Cela signifie en d'autres termes que, lorsqu'elle fait valoir dans un décompte une créance au titre de la participation aux frais d'entretien, la Caisse nationale ne réduit pas les indemnités dues à titre de perte de gain; elle ne fait qu'opérer une compensation expressément prévue par l'art. 75 LAMA, qui l'autorise à retenir ("zurückbehalten") le montant de cette créance sur les indemnités de chômage à verser. Une telle retenue est sans influence sur le calcul de la surassurance.
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Autre est la question du montant de la perte de gain dans les cas où l'employeur effectue sur le salaire une retenue pour frais d'hospitalisation (arrêt Camerotto du 19 octobre 1973 non publié sur ce point; voir aussi ATFA 1958, p. 173, concernant l'assurance militaire). Cette question est étrangère au problème ici traité.
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c) Le Tribunal des assurances du canton de Berne a considéré par ailleurs que le montant de 3836 fr. avait été versé aux hôpitaux et constituait donc pour l'assurée une prestation en nature, dont la restitution n'était pas admise par l'art. 99 al. 1 LAMA. Cet avis ne résiste pas à l'examen.
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Il est vrai que le traitement est fourni en nature, comme il est exact aussi que la participation prévue à l'art. 75 LAMA est directement liée à ce traitement. Mais cette participation ne représente pas une restitution - partielle - de la prestation en nature, à laquelle l'assuré a et garde pleinement droit; il n'y a donc pas répétition, à ce titre, d'un indu quelconque. La participation aux frais d'entretien durant les séjours hospitaliers procède d'une règle particulière, qui tend à éviter une surindemnisation: l'entretien étant inclus dans la prestation en nature accordée à juste titre, l'assuré tirerait avantage du versement durant son hospitalisation de l'intégralité des indemnités de chômage qui lui reviennent et qui sont elles aussi destinées notamment à couvrir ses frais d'entretien. La loi donne ainsi à la Caisse nationale envers l'assuré une créance en espèces, en compensation plus ou moins approximative et forfaitaire de la valeur de l'entretien dont l'intéressé bénéficie en nature. |
La participation de l'assuré aux frais d'entretien est normalement perçue par retenue sur les indemnités de chômage courantes. Il est hors de doute que, vu les périodes de décompte, elle peut l'être aussi avec des indemnités de chômage subséquentes par voie de compensation. Mais il arrive qu'un décompte final de ces indemnités ne puisse intervenir qu'après coup, tout particulièrement à l'occasion d'un calcul de surassurance selon l'art. 74 al. 3 LAMA, alors que l'assuré n'a plus droit à indemnités de chômage. Et il peut alors se produire que - comme en l'espèce - la perception ne soit possible ni par retenue ni par compensation. Bien que l'art. 75 LAMA ne le prévoie pas, il faut admettre que, en pareil cas, la Caisse nationale possède pour le découvert une créance directe contre l'assuré.
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La décision de la Caisse nationale est ainsi fondée, en définitive. Mais il serait souhaitable que l'administration rende des décisions claires, en cette matière.
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Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce:
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