BGE 121 II 317 - Jeanneret I | |||
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Bearbeitung, zuletzt am 15.03.2020, durch: Sabiha Akagündüz, A. Tschentscher | |||
50. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour de droit public du 12 juillet 1995 dans les causes Jeanneret et consorts contre Etat de Genève et Commission fédérale d'estimation du 1er arrondissement (recours de droit administratif) | |
Regeste |
Enteignung von Nachbarrechten; Lärmeinwirkungen eines Flughafens; materielle Enteignung - Art. 5 EntG, Art. 679, 684 ZGB, Art. 42 ff. LFG, Art. 42 ff. VIL. |
Übersicht über die Rechtsprechung betreffend die vom Schienen- und Strassenverkehr ausgehenden Immissionen. Voraussetzungen der Unvorhersehbarkeit, der Schwere und der Spezialität des Schadens (E. 5a). Diese Voraussetzungen gelten grundsätzlich auch für Einwirkungen aus dem Flugverkehr (E. 5b). Den Anforderungen von Art. 8 EMRK kann in solchen Verfahren entsprochen werden (E. 5c). |
Voraussetzung der Unvorhersehbarkeit: Sie ist für jene Nachbarn eines nationalen Flughafens erfüllt, die ihre Grundstücke vor Ende des Jahres 1960 erworben haben (E. 6). |
Voraussetzung der Spezialität; Immissionsgrenzwerte der eidgenössischen Umweltschutzgesetzgebung als Kriterium (E. 8c/aa). Obschon für den Lärm von nationalen Flughäfen in der Lärmschutz-Verordnung noch keine Grenzwerte festgelegt worden sind, kann hier die Voraussetzung der Spezialität aufgrund des berechneten mittleren Lärmpegels "Leq" als erfüllt betrachtet werden (E. 8c/bb-cc). |
Bestimmungen der eidgenössischen Luftfahrtgesetzgebung betreffend die Lärmzonen A, B und C (E. 12a). Die Lärmzonenpläne regeln durch Bau- und Umbauverbote teilweise die Nutzung des Bodens; sie sind bei Änderung der Verhältnisse anzupassen (E. 12b). Voraussetzungen, unter denen die vorfrageweise Überprüfung dieser Pläne vorgenommen werden kann (E. 12c). |
Materielle Enteignung durch das Inkrafttreten des Lärmzonenplanes für den Flughafen Genf; massgebender Zeitpunkt zur Beurteilung der Tragweite der Einschränkungen (E. 12d/aa-bb). Da sich die Lärmzonen A und B aufgrund neuer Berechnungen als überdimensioniert erweisen, sind die hier umstrittenen Liegenschaften den Bestimmungen für die Lärmzone C zu unterstellen (E. 12d/cc-dd); die in der eidgenössischen Luftfahrtgesetzgebung für diese Zone vorgesehenen Beschränkungen begründen keine materielle Enteignung (Zusammenfassung, E. 13). | |
Sachverhalt | |
A.- En 1920, l'Office aérien fédéral a octroyé au canton de Genève une concession pour l'exploitation d'un aérodrome au lieu-dit "Cointrin"; la première piste en béton a été construite en 1937. Pendant la seconde guerre mondiale, le trafic aérien commercial international a très fortement diminué. Le 22 juin 1945, l'Assemblée fédérale a adopté l'arrêté fédéral concernant le développement des aérodromes civils (RO 1945 p. 867). Des subventions fédérales allouées sur cette base ont permis au canton de Genève de réaliser des travaux d'extension de la piste et d'aménagement d'installations techniques. En 1948 déjà, les autorités fédérales ont permis l'exécution de la "troisième étape de développement" de l'aéroport de Genève-Cointrin (cf. FF 1948 II 1181 ss, RO 1948 p. 1205). Un nouveau projet d'agrandissement de l'aéroport a été présenté en 1957 (4e étape; cf. Message du Conseil fédéral in FF 1957 II 66) et, en 1959, la piste a été portée à la longueur de 3800 m (elle n'a pas été prolongée depuis lors). Le trafic sur l'aéroport de Genève a évolué de la manière suivante depuis la fin de la seconde guerre mondiale:
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Année Mouvements totaux Passagers
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1946 15'030 71'518
| 3 |
1950 23'898 217'736
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1955 27'154 445'136
| 5 |
1960 56'014 933'956
| 6 |
1965 79'326 1'473'182
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A partir de l'été 1959, les compagnies aériennes ont mis en service des avions à réaction sur leurs lignes desservant l'aéroport de Genève-Cointrin.
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B.- La loi fédérale sur la navigation aérienne (LNA) a été adoptée le 21 décembre 1948; depuis la modification du 18 juin 1993, en vigueur à partir du 1er janvier 1995, cette loi est intitulée "loi fédérale sur l'aviation" (LA; RS 748.0, RO 1994 p. 3010). La loi sur la navigation aérienne a été modifiée le 17 décembre 1971, notamment pour permettre la délimitation de zones de bruit dans les environs des aéroports (cf. art. 42 LNA); cette novelle est entrée en vigueur le 1er janvier 1974 (RO 1973 p. 1738). Dans l'ordonnance sur la navigation aérienne, du 14 novembre 1973 (RS 748.01; ONA), le Conseil fédéral a distingué trois zones de bruit - les zones A, B et C -, en prévoyant pour chacune d'elles une utilisation "admissible", et il a chargé le Département fédéral des transports, des communications et de l'énergie (DFTCE) d'édicter des prescriptions d'exécution. Ce département a dès lors adopté une ordonnance, intitulée actuellement "ordonnance concernant les zones de bruit des aéroports de Bâle-Mulhouse, Genève-Cointrin et Zurich" (RS 748.134.2; en vigueur depuis le 1er janvier 1974). Cette ordonnance prévoit que l'exposition au bruit est exprimée au moyen de "l'indice d'exposition au bruit NNI", et que les zones de bruit sont délimitées de la manière suivante:
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zone B: de 55 NNI à la limite de la zone A,
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zone C: de 45 NNI à la limite de la zone B.
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Les "utilisations admissibles" dans les trois zones, selon l'art. 62 al. 1 ONA révisé le 5 mars 1984 (RO 1984 p. 318), sont les suivantes:
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Zone A
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- Agriculture
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- Entrepôts
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- Constructions et installations militaires
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- Bâtiments aéroportuaires
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Zone B
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- Utilisation selon la zone A
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- Constructions industrielles et artisanales
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- Bâtiments commerciaux et bureaux insonorisés
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- Logements de concierge insonorisés
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Zone C
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- Utilisation selon les zones A et B
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- Bâtiments commerciaux et bureaux
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- Bâtiments d'habitation insonorisés
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- Bâtiments scolaires insonorisés.
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Au surplus, en vertu de l'art. 62 al. 2 ONA, la construction ou l'agrandissement d'hôpitaux et de homes ne sont pas admis dans les zones de bruit. Depuis le 1er janvier 1995, les dispositions sur les zones de bruit figurent aux art. 40 ss de la nouvelle ordonnance, du 23 novembre 1994, sur l'infrastructure aéronautique (OSIA; cf. RO 1994 p. 3028, 3050). L'art. 42 OSIA a, sur ces points, le même contenu que l'ancien art. 62 ONA.
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L'art. 42 al. 3 LA chargeant l'exploitant de l'aéroport d'établir le plan des zones de bruit, le Conseil d'Etat de la République et canton de Genève (ci-après: le Conseil d'Etat) a élaboré un projet sur la base d'un rapport d'étude du 22 juillet 1977 émanant du Laboratoire fédéral d'essai des matériaux et de recherches (abréviation en langue allemande: EMPA), dont la section "acoustique et lutte contre le bruit" avait calculé les indices d'exposition au bruit NNI dans les environs de l'aéroport de Genève. Mis à l'enquête publique à partir du 15 janvier 1979, ce plan a suscité plusieurs oppositions, qui ont été traitées par le Département fédéral des transports, des communications et de l'énergie. Plusieurs recours ont été formés contre les décisions du département et le Conseil fédéral s'est prononcé, le 8 avril 1987, en modifiant légèrement le tracé de la limite extérieure de la zone C; pour le reste, il a considéré que l'évolution des circonstances, depuis l'établissement du plan - notamment l'augmentation du trafic et la mise en service d'avions moins bruyants - ne justifiait pas une modification générale des périmètres des zones A, B et C. A la suite de cette décision, le plan des zones de bruit a été publié le 2 septembre 1987 dans la feuille officielle du canton de Genève et il a acquis force obligatoire (cf. art. 43 al. 4 LA).
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C.- Louis Jeanneret est propriétaire d'une parcelle sur le territoire de la commune de Bellevue, à environ 1,5 km de l'extrémité nord-est de la piste de l'aéroport de Genève. Jeanneret a acquis cette parcelle, sur laquelle se trouvait déjà une villa, le 27 avril 1966. En vertu de la loi cantonale d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire (LALAT), ce terrain est classé dans la 5e zone, qui est une zone résidentielle destinée aux villas (art. 19 al. 3 LALAT). Selon le plan des zones de bruit de l'aéroport, cette parcelle est située dans la zone B.
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Le 18 décembre 1979, Jeanneret s'est adressé au Conseil d'Etat en réclamant une indemnité pour la dépréciation de sa propriété en raison du bruit du trafic aérien. Sa requête ayant été écartée par l'autorité cantonale et par le Département fédéral des transports, des communications et de l'énergie, Jeanneret s'est pourvu devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours de droit administratif. Le Tribunal fédéral a admis son recours par arrêt rendu le 3 octobre 1984 et il a dit qu'il incombait au département fédéral de conférer au canton de Genève le droit d'expropriation et de l'inviter à faire ouvrir, par le Président de la Commission fédérale d'estimation, une procédure d'expropriation destinée uniquement à statuer sur les prétentions à indemnité présentées par le recourant (ch. 2 du dispositif de l'arrêt, publié aux ATF 110 Ib 368 ss, p. 380). Une procédure a ensuite été ouverte devant la Commission fédérale d'estimation du 1er arrondissement (ci-après: la Commission fédérale). Jeanneret a conclu au paiement d'une indemnité globale, pour expropriation formelle des droits de voisinage et pour expropriation matérielle en relation avec les restrictions découlant du plan des zones de bruit. La Commission fédérale a rendu sa décision le 13 avril 1989; elle a rejeté les conclusions de Jeanneret.
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D.- D'autres propriétaires fonciers ont aussi, successivement, demandé l'ouverture de procédures devant la Commission fédérale, afin qu'il soit statué sur leurs prétentions fondées sur l'expropriation formelle de leurs droits de voisinage et sur l'expropriation matérielle, après l'entrée en vigueur du plan des zones de bruit. Les biens-fonds concernés se trouvent sur le territoire de la commune de Vernier (au sud-ouest de la piste de l'aéroport de Genève, à environ 1 à 2 km de l'extrémité de celle-ci) ou sur celui de la commune de Bellevue (au nord-est de cette piste, également à environ 1 à 2 km de l'extrémité).
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Dans les causes consorts L., W., R., G., et hoirie P., les fonds litigieux ont une surface d'environ 1000 à 2000 m2 et ils sont déjà bâtis (villas familiales). Ils sont classés en 5e zone résidentielle (cf. art. 19 al. 3 LALAT), et au surplus, dans certains cas, en zone de développement (cf. art. 30 ss LALAT). Selon le plan des zones de bruit de l'aéroport, les parcelles des consorts L. et de W. sont comprises dans la zone C; les trois autres terrains se trouvent dans la zone B. Dans ses décisions, rendues entre le 21 septembre 1989 et le 14 juin 1993, la Commission fédérale a rejeté les demandes d'indemnité présentées par les propriétaires.
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Dans la cause hoirie H., le fonds litigieux a une surface de 4000 m2 environ et il s'y trouve plusieurs bâtiments (un chalet construit en 1934 et un garage-atelier construit en 1964, notamment). Ce terrain, compris dans la 5e zone résidentielle, a été classé en 1993 en zone de développement industriel et artisanal. Selon le plan des zones de bruit de l'aéroport, il est située dans la zone A. Dans sa décision, rendue le 2 juin 1992, la Commission fédérale a condamné l'Etat de Genève à verser aux membres de l'hoirie H. une indemnité pour expropriation formelle, pour expropriation matérielle ainsi que pour la réfection de la toiture du chalet, endommagée à diverses reprises à la suite du passage d'avions à basse altitude.
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Dans les causes consorts M., T. et consorts, ainsi que consorts F., il s'agit de terrains non bâtis ou peu bâtis (la propriété des consorts F., d'une surface de 2,5 ha, comporte une maison de maître et quelques annexes). Ils sont également classés en 5e zone résidentielle ou en zone de développement. Selon le plan des zones de bruit de l'aéroport, ces terrains sont situés dans les zones B ou C. Dans ses décisions rendues entre le 16 juin et le 12 novembre 1993, la Commission fédérale a rejeté les prétentions fondées sur l'expropriation formelle, mais elle a condamné l'Etat de Genève à verser aux propriétaires une indemnité pour expropriation matérielle (en relation avec l'inclusion d'une partie de ces terrains dans la zone de bruit B).
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E.- Dans huit des dix causes précitées, les propriétaires concernés (les expropriés) ont formé un recours de droit administratif contre le prononcé de la Commission fédérale (causes Jeanneret, consorts L., W., R., G., hoirie P., consorts M., T. et consorts). L'Etat de Genève (l'expropriant) a également formé un recours de droit administratif contre le prononcé de la Commission fédérale dans la cause hoirie H., dans la cause consorts M., dans la cause T. et consorts, ainsi que dans la cause consorts F. Dans cette dernière cause, les consorts F. ont formé un recours de droit administratif joint.
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Dans leurs recours, les expropriés ont demandé au Tribunal fédéral d'annuler les prononcés de la Commission fédérale et de leur allouer des indemnités pour expropriation formelle des droits de voisinage et pour expropriation matérielle, lorsque les immeubles concernés étaient situés dans la zone de bruit B. Dans ses recours, l'Etat de Genève a fait valoir, en substance, que les prétentions des propriétaires n'étaient pas fondées.
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F.- Un rapport intitulé "Etude sur le bruit 90: Charges acoustiques réelles et perception subjective du bruit d'avion et de la circulation routière par la population résidant dans le voisinage des aéroports internationaux en Suisse" a été rédigé dans le cadre d'un programme du Fonds national suisse de la recherche scientifique. Après avoir eu connaissance d'un résumé de ce rapport, publié avant la version définitive, le Tribunal fédéral s'était fait transmettre les résultats de calculs des immissions de bruit dans les environs de l'aéroport de Genève, effectués à l'occasion de cette recherche par le Laboratoire fédéral d'essai des matériaux et de recherches (EMPA), sur la base du nombre de mouvements d'avions en 1989 et selon les indices d'exposition au bruit "NNI", d'une part, et "Leq" (niveau moyen énergétique), d'autre part.
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G.- Le Tribunal fédéral a joint toutes les causes précitées et a rendu un jugement partiel. Dans la cause Jeanneret, il a admis partiellement le recours, en ce sens qu'il a constaté, sur la base des nouveaux calculs, que l'indice d'exposition au bruit NNI pour la parcelle du recourant était supérieur à 45 NNI et inférieur à 55 NNI; pour le reste, il a rejeté le recours. Dans les autres causes, le Tribunal fédéral a admis partiellement les recours de droit administratif et il a dit que l'instruction devait se poursuivre, pour déterminer le montant des indemnités dues pour l'expropriation formelle des droits de voisinage, dans les cas où le droit à une indemnité a été reconnu dans son principe (causes consorts L., W., R., G.. hoirie H., hoirie P.), ou pour déterminer si et, le cas échéant, dans quelle mesure une telle indemnité était due (causes consorts M., T. et consorts ainsi que consorts F.). Dans toutes ces causes, lorsque les parcelles litigieuses n'avaient pas déjà été classées en 1987 dans la zone de bruit C, le Tribunal fédéral a constaté que l'indice d'exposition au bruit était supérieur à 45 NNI et inférieur à 55 NNI.
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Extrait des considérants: | |
II. Expropriation formelle des droits de voisinage
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a) Aux termes de l'art. 50 LA, pour la construction et l'exploitation d'aérodromes publics ou pour l'aménagement d'installations de navigation aérienne, le département fédéral des transports, des communications et de l'énergie peut, conformément à la législation fédérale sur l'expropriation, exercer le droit d'expropriation ou le conférer à des tiers. En vertu de l'art. 5 LEx, les droits résultant des dispositions sur la propriété foncière en matière de rapports de voisinage peuvent faire l'objet de l'expropriation et être supprimés ou restreints temporairement ou définitivement. Cette norme se réfère notamment à l'art. 684 CC, qui a la teneur suivante:
| 43 |
1 "Le propriétaire est tenu, dans l'exercice de son droit, spécialement dans ses travaux d'exploitation industrielle, de s'abstenir de tout excès au détriment de la propriété du voisin.
| 44 |
2 Sont interdits en particulier les émissions de fumée ou de suie, les émanations incommodantes, les bruits, les trépidations qui ont un effet dommageable et qui excèdent les limites de la tolérance que se doivent les voisins eu égard à l'usage local, à la situation et à la nature des immeubles."
| 45 |
Lorsque les émissions normales et inévitables provenant de l'exploitation d'une entreprise d'intérêt public ont pour effet de paralyser les droits de défense des voisins, au sens de l'art. 684 CC, la situation qui en résulte équivaut, pour le propriétaire touché, à la constitution d'une servitude foncière ayant pour contenu l'obligation de tolérer les émissions excessives (ATF 116 Ib 11 consid. 2b/aa, ATF 111 Ib 15 consid. 8, ATF 110 Ib 368 consid. 2c). L'art. 4 let. a LEx prévoit du reste expressément l'exercice du droit d'expropriation en relation avec l'exploitation d'une entreprise. Une telle procédure peut être introduite même si - comme en l'espèce - pour la construction de l'ouvrage, aucune procédure d'expropriation n'a été ouverte selon les art. 27 ss LEx (dépôt des plans, etc.; cf. ATF 110 Ib 368 consid. 1).
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En adoptant l'art. 5 LEx en 1930, le législateur fédéral a indiqué de façon expresse une possibilité que l'ancienne loi fédérale sur l'expropriation, du 1er mai 1850, offrait de façon implicite. La jurisprudence fédérale avait en effet d'emblée admis que les droits résultant des dispositions sur la propriété foncière en matière de rapports de voisinage pouvaient faire l'objet d'une expropriation, ceci même avant l'entrée en vigueur du code civil suisse en 1912 (cf. notamment ATF 36 I 623 consid. 2, ATF 18 p. 53 consid. 3 et les références à des arrêts plus anciens; cf. ATF 116 Ib 11 consid. 2a p. 16; cf. HEINZ HESS/HEINRICH WEIBEL, Das Enteignungsrecht des Bundes, vol. I, Berne 1986, n. 2 ad art. 5 LEx).
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b) L'art. 684 al. 1 CC pose de façon générale les limites apportées à l'exercice de la propriété foncière et il interdit les immissions excessives. Sont des immissions les conséquences indirectes que l'exercice de la propriété sur un fonds peut avoir sur les fonds voisins; il peut s'agir d'effets physiques tels que des bruits (cf. PAUL-HENRI STEINAUER, Les droits réels, tome II, 2e éd. Berne 1994, p. 141/142 et la jurisprudence citée). Par fonds voisins, il faut entendre tous les fonds qui sont affectés par l'immission, même s'ils se trouvent à plusieurs kilomètres de son origine; il suffit que l'immission apparaisse comme une conséquence de l'utilisation ou de l'exploitation de l'immeuble concerné (cf. ATF 120 II 15 consid. 2a, ATF 119 II 411 consid. 4b, ATF 109 II 304 consid. 2; ARTHUR MEIER-HAYOZ, Berner Kommentar, n. 197 ad art. 684 CC). La jurisprudence mentionne, à titre d'exemple, pour les immissions provoquées par un aérodrome, le bruit des avions à l'atterrissage et au décollage, même lorsque ces engins se trouvent au-delà des limites géographiques du fonds où se situe la piste (cf. ATF 120 II 15 consid. 2a p. 17).
| 48 |
Les immissions ne sont prohibées par l'art. 684 CC que si elles sont excessives. Pour distinguer entre les immissions qui doivent être tolérées et celles qui sont excessives, il faut se fonder sur des critères objectifs, en évaluant la situation comme une personne raisonnable et moyennement sensible, et en prenant en considération l'ensemble des circonstances du cas concret pour apprécier les différents intérêts en présence; il faut néanmoins, à cet égard, tenir compte du but de l'art. 684 CC, qui est d'assurer la protection des intérêts des seuls propriétaires concernés et non pas, en principe, de protéger d'autres intérêts (ATF 119 II 411 consid. 4c et les arrêts cités; cf. MEIER-HAYOZ, op.cit., n. 90/91 ad art. 684 CC).
| 49 |
c) Aux termes de l'art. 679 CC, celui qui est atteint ou menacé d'un dommage parce qu'un propriétaire excède son droit, peut actionner ce propriétaire pour qu'il remette les choses en l'état ou prenne des mesures en vue d'écarter le danger, sans préjudice de tous dommages-intérêts. En 1965, le Tribunal fédéral a toutefois admis que le propriétaire qui construisait sur son fonds avait le droit de provoquer des nuisances, même excessives au sens de l'art. 679 CC - parce qu'elles dépassent les limites fixées par les règles ordinaires sur les rapports de voisinage (art. 684 CC) -, à la condition qu'il verse aux voisins lésés une indemnité équitable. Il faut cependant que l'immission paraisse inévitable; tel serait le cas si son interdiction était hors de proportion avec l'intérêt qu'en retireraient les voisins, et si les travaux de construction et les installations de chantier causaient à ceux-ci un dommage considérable (ATF 91 II 100 consid. 2). Cette jurisprudence a été confirmée ensuite dans des arrêts non publiés (cf. arrêt du 16 octobre 1986 reproduit in SJ 1987 p. 145 ss, consid. 2 et les références) puis dans un arrêt rendu en 1988, publié aux ATF 114 II 230. Dans ce dernier arrêt, le Tribunal fédéral mentionne l'analogie existant entre cette solution et l'expropriation proprement dite, en relevant que l'ordre juridique suisse connaît par ailleurs une sorte d'"expropriation de droit privé" dans certaines situations (cf. art. 674 al. 3 CC [empiétement], art. 691 CC [obligation de tolérer des conduites], art. 694 CC [passage nécessaire], art. 710 CC [fontaine nécessaire]).
| 50 |
La solution ainsi consacrée par la jurisprudence, permettant l'indemnisation du propriétaire voisin en cas d'immissions excessives qu'il ne peut pas faire cesser, est au demeurant proche de celles du droit allemand (§ 906 II BGB - cf. MEIER-HAYOZ, op.cit., p. 177, "Rechtsvergleichung" ad art. 684 CC) et du droit italien (art. 844 II CCit - cf. MEIER-HAYOZ, op.cit., p. 180/181).
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d) Le voisin ne peut pas exercer les actions du droit privé prévues à l'art. 679 CC si les immissions proviennent de l'utilisation, conforme à sa destination, d'un ouvrage d'intérêt public pour la réalisation duquel la collectivité disposait du droit d'expropriation, et si la tâche publique ne peut pas être exécutée sans provoquer des immissions dans les environs (immissions inévitables ou ne pouvant être écartées sans frais excessifs). La prétention au versement d'une indemnité d'expropriation se substitue à ces actions et il appartient non plus au juge civil, mais au juge de l'expropriation de statuer sur l'existence du droit à l'indemnité et sur le montant de celle-ci (ATF 119 Ib 334 consid. 3a, 348 consid. 4b, ATF 119 II 411 consid. 3c et les arrêts cités).
| 52 |
Selon la jurisprudence que le Tribunal fédéral a développée à propos des nuisances de bruit provenant du trafic routier et ferroviaire, la collectivité publique - en sa qualité d'expropriant - n'est tenue d'indemniser un voisin que si le dommage qu'il subit est à la fois spécial, imprévisible et grave; c'est à ces seules conditions, cumulatives, que l'immission est excessive (ATF 119 Ib 348 consid. 4b, ATF 118 Ib 205 consid. 8c, ATF 117 Ib 18 consid. 2b, ATF 116 Ib 21 consid. 3a et les arrêts cités). Ces principes ont été énoncés pour la première fois en 1968 (arrêt Werren, ATF 94 I 286); depuis lors, le Tribunal fédéral n'a jamais eu à examiner s'ils s'appliquaient également aux nuisances provoquées par le trafic aérien. Dans un arrêt rendu en 1969 (ATF 95 I 490), les immissions d'autres entreprises ou installations publiques ont été évoquées (consid. 5, p. 493: "chemins de fer, stands de tir, aérodromes, etc."), mais on ne saurait déduire de cette énumération, en obiter dictum, que le Tribunal fédéral aurait considéré que les trois conditions précitées étaient aussi déterminantes à l'égard des nuisances résultant de l'exploitation d'un aéroport (cf. consid. 6, p. 494/495: il n'est en définitive question, dans cet arrêt, que des immissions du trafic sur une route nationale). Dans un arrêt rendu en 1980 (ATF 106 Ib 241), le Tribunal fédéral a statué sur le recours de locataires d'appartements à proximité de l'aéroport de Zurich-Kloten qui demandaient une indemnité en raison des nuisances provoquées par le trafic aérien; il ne s'est cependant pas prononcé sur l'application éventuelle des conditions de la spécialité, de l'imprévisibilité et de la gravité dans ce domaine, car il a considéré que, dans le cas particulier, les locataires ne pouvaient de toute manière pas faire valoir une prétention à une indemnité (ATF 106 Ib 241 consid. 4). La question avait par ailleurs déjà été évoquée, sans être non plus résolue, dans un arrêt non publié du 23 décembre 1970 (référendum financier contre un décret relatif à l'agrandissement de l'aéroport de Zurich, arrêt reproduit in ZBl 74/1973 p. 81, consid. 5). Enfin, dans l'arrêt rendu le 3 octobre 1984 sur le premier recours de Louis Jeanneret, le Tribunal fédéral a indiqué qu'il n'était pas certain que la jurisprudence concernant les émissions provenant du trafic routier et ferroviaire puisse s'appliquer telle quelle, sans adaptation, aux émissions de bruit des aérodromes; il a laissé cette question indécise (ATF 110 Ib 368 consid. 3b). Elle doit être résolue.
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e) La jurisprudence "Werren" n'est pas contraire à l'art. 69 al. 1 LEx, qui dispose que "si l'existence d'un droit faisant l'objet d'une demande d'indemnité est contestée", la procédure devant la commission fédérale d'estimation est suspendue, l'expropriant devant ouvrir action devant le juge ordinaire. En effet, lorsque le voisin d'un ouvrage public demande une indemnité en raison d'immissions excessives, l'existence des droits garantis par l'art. 684 CC n'est en principe pas contestée; la relation de causalité entre l'exploitation de l'ouvrage et les immissions, de même que le caractère inévitable de ces immissions, ne sont généralement pas non plus mis en doute (cf. HESS/WEIBEL, op.cit., n. 5 ad art. 69 LEx; contra: FELIX SCHÖBI, Zur Unterscheidung von formeller und materieller Enteignung am Beispiel von Immissionsstreitigkeiten, in: recht 1985 p. 126 ss).
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Par ailleurs, l'entrée en vigueur, le 1er janvier 1985, de la loi fédérale sur la protection de l'environnement (LPE; RS 814.01) n'a pas supprimé la compétence du juge de l'expropriation pour statuer sur l'octroi d'une indemnité en raison des immissions excessives liées à l'exploitation d'un ouvrage public (ATF 119 Ib 348 consid. 6c/aa). Le Tribunal fédéral est toujours tenu d'appliquer l'art. 5 LEx (art. 113 al. 3 Cst.). En outre, les législations fédérales sur l'expropriation et sur la protection de l'environnement n'ont pas les mêmes buts, même si elles convergent à certains égards (cf. ATF 119 Ib 348 consid. 6c/bb-cc; selon cet arrêt, le juge de l'expropriation peut allouer des prestations en nature qui correspondent aux mesures de protection exigées par le droit de l'environnement); seule l'application des dispositions sur l'expropriation des droits conférés aux voisins par les art. 679 et 684 CC permet aux propriétaires touchés d'obtenir la réparation de leur préjudice, le cas échéant (cf. ATF 120 Ib 76 consid. 5a; cf. arrêt non publié du 30 mai 1979, consid. 7, reproduit in: ZBl 81/1980 p. 354). Les critiques exprimées dans la doctrine, antérieures à l'arrêt publié aux ATF 119 Ib 348 (cf. KARL LUDWIG FAHRLÄNDER, Zur Abgeltung von Immissionen aus dem Betrieb öffentlicher Werke, unter Berücksichtigung des Bundesgesetzes über den Umweltschutz, thèse Berne 1985, p. 50; PAUL RICHLI, Die verwaltungsrechtliche Rechtsprechung des BGer 1984, RJB 122/1986 p. 423; SCHÖBI, op.cit., p. 127), ne donnent pas lieu à une remise en question de la jurisprudence selon laquelle les droits découlant des art. 679 et 684 CC en matière de rapports de voisinage peuvent faire l'objet d'une expropriation.
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a) Dans l'arrêt Werren (ATF 94 I 286; cf. supra consid. 4d), le Tribunal fédéral a relevé que l'augmentation constante du nombre des véhicules à moteur exigeait l'ouverture de nouvelles voies et l'agrandissement des routes existantes; si les collectivités publiques étaient tenues de réparer tous les dommages qu'entraînent ces ouvrages indispensables, elles seraient dans la plupart des cas hors d'état de les entreprendre (consid. 8a, p. 300). C'est pourquoi aucune indemnité ne doit en principe être allouée, sous réserve du droit à la protection de la bonne foi ou de l'existence d'un dommage spécial, imprévisible et grave (consid. 8b p. 301). Selon cet arrêt, la condition de la spécialité se justifie d'elle-même: si le préjudice est normal, c'est qu'il est conforme à l'usage habituel et doit être toléré (consid. 9a p. 301). Le dommage doit au surplus atteindre une certaine gravité car, tant que le tort causé est bénin, il ne procède pas d'un excès qui engendre le droit à une indemnité (consid. 9c p. 302). En ce qui concerne la troisième condition - l'imprévisibilité -, le Tribunal fédéral s'est référé à une jurisprudence ancienne, selon laquelle le propriétaire d'une maison située à proximité d'une voie ferrée doit s'attendre à supporter plus de bruit que l'habitant d'un quartier tranquille de villas; il n'a aucun droit à une indemnité si l'agrandissement normal et prévisible des installations ferroviaires ou des routes entraîne une augmentation du bruit (consid. 9b p. 302). Dans un arrêt Buob, rendu en 1984 (ATF 110 Ib 43), le Tribunal fédéral a justifié à nouveau l'exigence de l'imprévisibilité du dommage. Il a rappelé que, selon l'art. 684 CC, le fait que les immissions proviennent d'une installation préexistante ne prive en principe pas le voisin des actions de l'art. 679 CC; de ce point de vue cependant, il n'est pas contraire à l'égalité de traitement de prévoir un régime différent pour les voisins d'une route ou d'une voie ferrée, car la collectivité, en construisant un tel ouvrage et en le mettant en service, accomplit une tâche d'intérêt public prévue par la loi. La collectivité a ainsi le privilège de pouvoir apporter des modifications à l'"usage local" ou à la "situation et à la nature des immeubles" voisins (cf. art. 684 al. 2 in fine CC) et elle peut exiger de leurs propriétaires qu'ils tiennent compte de ces modifications, dès qu'elles se réalisent ou à partir du moment où elles sont prévisibles. Le droit de l'expropriation veut en effet que l'exproprié prenne toutes les mesures adéquates pour réduire ou supprimer son préjudice. Il n'est donc pas contraire à la ratio legis de l'art. 684 CC de refuser une indemnité au propriétaire qui a acquis un fonds en étant au courant de la réalisation prochaine d'une route ou d'une voie ferrée dans le voisinage (ATF 110 Ib 43 consid. 4 p. 50; cf. aussi, à ce propos, ATF 117 Ib 15 consid. 2b in fine).
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b) Le bruit provenant du trafic aérien se distingue, à plusieurs égards, de celui provoqué par le trafic terrestre, routier ou ferroviaire.
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Les immissions du trafic terrestre sont perçues de part et d'autre des voies de circulation, sur toute leur longueur (quoique sur une largeur relativement restreinte); en revanche, les effets des nuisances du trafic aérien se concentrent sur les terrains proches des aérodromes. Tant que les avions sont à une certaine altitude, avant l'atterrissage ou après le décollage, leur bruit n'est pas incommodant. Par ailleurs, il est relativement facile de se protéger des nuisances engendrées par le trafic terrestre, en édifiant des parois latérales antibruit le long des voies, ou en concevant les bâtiments de façon à éloigner les locaux à usage sensible au bruit des sources d'immissions; en revanche, de telles mesures de construction ou d'aménagement sont en général sans effet à l'encontre de bruits provenant du ciel. Une autre particularité du bruit des avions peut être évoquée: il est sensiblement différent à l'atterrissage et au décollage (à l'approche, le bruit aérodynamique l'emporte sur le bruit des moteurs), alors qu'en principe, les caractéristiques des immissions du trafic terrestre ne dépendent pas du sens de circulation des véhicules (sauf sur les voies en pente). Enfin, tandis que l'origine des immissions du trafic routier et ferroviaire se situe toujours sur les terrains de la collectivité, les nuisances des avions se produisent aussi lorsqu'ils survolent des fonds privés, après qu'ils se sont éloignés du périmètre de l'aéroport; or, en vertu de l'art. 667 al. 1 CC, le propriétaire a le droit d'être protégé contre les dommages que pourrait causer le survol de son fonds et son intérêt à jouir de l'espace aérien lui permet en principe - sous réserve des restrictions découlant notamment de la législation fédérale sur l'aviation - de se défendre contre les activités de tiers qui seraient préjudiciables à l'utilisation de son fonds (cf. ATF 104 II 86 consid. 1 et les arrêts cités; cf. STEINAUER, op.cit., p. 70).
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En dépit de ces différences, les immissions provenant du trafic, terrestre ou aérien, sont toujours liées à l'exploitation normale d'installations d'intérêt public. Si la jurisprudence a fait, quant à l'application des conditions de l'imprévisibilité, de la gravité et de la spécialité, une distinction entre les nuisances dues au trafic et celles provoquées par des travaux de construction (cf. ATF 117 Ib 15 consid. 2c), il ne se justifie pas de traiter différemment le trafic terrestre, d'une part, et le trafic aérien, d'autre part, car les motifs qui ont conduit le Tribunal fédéral à poser ces trois conditions (cf. supra, consid. 5a) valent également pour le trafic aérien. Aussi ces conditions lui sont-elles applicables.
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Par ailleurs, le fait que les immissions du trafic aérien se produisent dans de vastes secteurs à forte densité de population, aux environs des aéroports internationaux, ne commande pas une autre solution, car le nombre de personnes touchées par les immissions des routes et voies ferrées est aussi important, si l'on prend en considération l'ensemble du réseau national (cf. infra, consid. 8a-b). Enfin, une partie des fonds sur lesquels se produisent les immissions sont également survolés par les avions, mais cet élément est secondaire; le préjudice causé par le bruit n'est pas sensiblement différent, que la source des nuisances se trouve à la verticale du fonds concerné ou qu'elle se situe au-dessus des fonds voisins. Il n'est pas exclu que les risques supplémentaires liés à la situation d'un immeuble sous la trajectoire d'approche ou d'envol entraînent une certaine diminution de la valeur du fonds; cet élément pourrait éventuellement être pris en compte dans l'appréciation de la gravité du dommage. Cela étant, les trois conditions jurisprudentielles ne s'appliquent pas aux dommages sans rapport avec les immissions de bruit, notamment aux préjudices causés aux bâtiments survolés par le passage des avions à basse altitude (destruction de tuiles du toit par l'effet des turbulences ou par la chute de blocs de glace se détachant des fuselages, etc.).
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c) Certains des expropriés recourants invoquent encore l'art. 8 de la Convention européenne des droits de l'homme (CEDH; RS 0.101), en faisant valoir que cette disposition, qui garantit le droit au respect de la vie privée et familiale, ne serait respectée que si des mesures suffisantes de protection contre le bruit et de compensation des préjudices subis par les voisins étaient prises. En l'occurrence, il n'y a pas lieu de déterminer si l'exploitation de l'aéroport constitue, pour ces recourants, une ingérence d'une autorité publique dans l'exercice du droit conventionnel en question. De toute manière, l'existence de grands aéroports internationaux est nécessaire au bien-être économique du pays et l'art. 8 par. 2 CEDH réserve précisément les ingérences fondées sur ce motif. En outre l'application de l'art. 5 LEx est en principe à même d'assurer, dans chaque cas particulier, un "juste équilibre entre les intérêts concurrents de l'individu et de la société dans son ensemble" (cf. arrêt de la Cour européenne des droits de l'homme du 21 février 1990, affaire Powell et Rayner, série A vol. 172, § 41 ss).
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a) Pour statuer sur le caractère prévisible du dommage, et partant de l'exploitation provoquant des immissions excessives, le juge de l'expropriation se fonde sur l'appréciation du "tiers neutre" ou du "citoyen moyen", au moment déterminant (par exemple au moment de l'acquisition de l'immeuble touché); c'est aussi sur cette base que le juge civil examine si les immissions doivent être tolérées par les voisins, selon l'art. 684 CC (cf. ATF 119 II 411 consid. 4c). Il ne s'agit pas, en effet, de se prononcer en fonction des prévisions des autorités voire des spécialistes de l'aviation, ou de l'appréciation des voisins de l'aéroport, généralement plus intéressés à l'évolution du trafic aérien que la moyenne de la population. En l'occurrence, le juge de l'expropriation n'est pas dans la même situation que lorsqu'il est chargé d'apprécier le rôle de phénomènes naturels complexes dans un rapport de causalité, la jurisprudence admettant alors qu'il ne suffit pas de se fonder sur l'avis du profane (cf. ATF 119 Ib 334 consid. 5b et les références).
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b) En énonçant la condition de l'imprévisibilité dans l'arrêt Werren, en 1968 (cf. supra, consid. 5a), dans le domaine des immissions de bruit du trafic routier et ferroviaire, le Tribunal fédéral a - implicitement - tenu compte du fait que l'on rencontrait des véhicules à moteur sur les routes au moins depuis le début du siècle (le développement du trafic ferroviaire étant encore plus ancien) et que, depuis longtemps, nul ne pouvait prétendre ignorer les nuisances de ces genres de trafic terrestre. On ne saurait en dire autant des inconvénients - en particulier des immissions de bruit - résultant du trafic aérien lié à l'exploitation des aéroports.
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aa) Dans ses messages relatifs à l'arrêté fédéral concernant le développement des aérodromes civils et au projet de loi sur la navigation aérienne, qui ont été publiés peu avant la fin de la seconde guerre mondiale, le Conseil fédéral avait déjà prévu le développement du trafic aérien commercial - pour le transport des personnes et des marchandises - entre la Suisse et les capitales européennes ainsi qu'en direction des autres continents, et il s'était préoccupé en temps utile d'assurer la réalisation des infrastructures nécessaires (cf. notamment FF 1945 I 149ss, 330 ss); dans ces textes, il n'est cependant à aucun endroit fait mention des nuisances du trafic aérien pour les voisins des aéroports. Les immissions de bruit n'ont pas non plus été évoquées dans les messages du Conseil fédéral de 1948 et de 1957 concernant l'agrandissement de l'aéroport de Genève-Cointrin (cf. FF 1948 II 1181, 1957 II 66), aucun des investissements prévus alors ne se rapportant directement à la lutte contre le bruit (dans le second de ces messages, il est pourtant indiqué que les futurs avions à réaction DC-8 seraient "extrêmement" bruyants sur l'aire de trafic - FF 1957 II 75). Par ailleurs, dans son texte primitif du 21 décembre 1948, la loi fédérale sur la navigation aérienne (RO 1950 p. 491) - actuellement: loi sur l'aviation - prévoyait la création de zones de sécurité autour des aérodromes publics et elle permettait au Conseil fédéral d'arrêter des prescriptions pour empêcher la création d'obstacles au vol et pour supprimer de tels obstacles (art. 41 ss); cette loi ne comprenait en revanche aucune disposition sur la protection des tiers contre le bruit du trafic aérien et elle n'avait en particulier pas encore institué les zones de bruit. Il a fallu attendre la novelle du 17 décembre 1971 pour que la loi soit révisée sur ce point (cf. ATF 110 Ib 368 consid. 2a-b; cf. infra, consid. 12a). Avant l'entrée en vigueur de ces nouvelles dispositions, le 1er janvier 1974, le Tribunal fédéral n'avait eu à se prononcer qu'une seule fois sur ces questions: une procédure d'expropriation ayant été ouverte en vue de l'installation d'une antenne sur le terrain d'un propriétaire voisin de l'aéroport de Zurich-Kloten (cf. art. 50 LA), il a été jugé que ce propriétaire pouvait, dans la même procédure, faire valoir des prétentions à indemnité pour des immissions de bruit provenant du trafic aérien (arrêt non publié du 3 juin 1953, cité in ATF 110 Ib 368 consid. 2a).
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Le 28 septembre 1962, le Conseil fédéral a proposé à l'Assemblée fédérale de modifier certaines dispositions de la loi sur la navigation aérienne, en premier lieu pour régler la question des atterrissages hors des aérodromes; il a aussi proposé d'introduire dans la loi le principe selon lequel la lutte contre le bruit des avions rentrait, au même titre que les impératifs de la sécurité aérienne, dans les tâches générales des autorités chargées de la surveillance de l'aéronautique (cf. Message, FF 1962 II 713, 722). Les Chambres fédérales ont dès lors modifié les art. 12 et 15 LNA ("prescriptions de police") pour consacrer ce principe (novelle du 14 juin 1963, RO 1964 p. 317). Dans son message, le Conseil fédéral s'était référé aux travaux d'une commission fédérale d'experts en matière de lutte contre le bruit, constituée en 1957, et en particulier au rapport de la sous-commission chargée de se prononcer au sujet du bruit de la navigation aérienne, adopté le 1er juillet 1960 (l'ensemble des travaux de cette commission fédérale d'experts a fait l'objet d'un rapport de synthèse du 14 décembre 1962, intitulé "La lutte contre le bruit en Suisse" et publié par le Département fédéral de justice et police en 1963 - ci-après: rapport de 1963). Dans son rapport partiel, la sous-commission a noté l'apparition de plus en plus fréquente de conflits d'intérêts entre les besoins légitimes de l'aviation (économiques, militaires, touristiques, sociaux, etc.) et ceux des personnes subissant le bruit des avions, notamment parce que les nouveaux avions étaient toujours plus bruyants, que leur nombre s'accroissait constamment et que leur utilisation était de plus en plus intense (cf. rapport de 1963, p. 123). A cette époque, on espérait que la mise en service d'appareils à réaction n'augmenterait pas le niveau de bruit, par rapport à celui des avions équipés de moteurs à piston; la commission d'experts a cependant relevé d'emblée que ces espoirs pourraient bien être déçus (rapport de 1963, p. 130), l'intensité acoustique des avions à réaction étant en soi considérablement plus grande que celle des avions à hélices et le bruit causé lors de l'atterrissage étant ressenti bien plus fortement, en raison des hautes fréquences (cf. rapport de 1963, p. 134/135). La commission fédérale d'experts avait proposé de délimiter des zones inhabitées ou des zones industrielles dans les environs immédiats des aéroports et de modifier la loi fédérale afin qu'il existe une base légale sur ce point (cf. rapport de 1963, p. 129/130). Cette proposition a été reprise quelques années plus tard par le Conseil fédéral, dans le projet de modification des art. 42 ss LNA présenté à l'Assemblée fédérale en 1971, en vue de l'adoption des zones de bruit (Message in FF 1971 I 287, 295 ss; cf. ATF 110 Ib 368 consid. 2b).
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Les nuisances provoquées par le trafic aérien aux environs de l'aéroport de Zurich-Kloten ont conduit, en 1956, les communes riveraines à se constituer en association, dans le but d'obtenir des mesures de protection contre le bruit (cf. ROBERT HENRI CHANSON, Schutz vor Lärm der Grossflughäfen Genf und Zürich nach schweizerischem Recht, thèse Zurich 1980, p. 10). Dès avril 1960, faisant oeuvre de pionnier dans ce domaine sur le plan international, le Conseil d'Etat du canton de Zurich a adopté des prescriptions d'exploitation visant à réduire le bruit du trafic aérien (cf. CHANSON, op.cit., p. 11; WERNER GULDIMANN, Lärmbekämpfung als Aufgabe des Luftrechts, in: Berner Festgabe zum Schweizerischen Juristentag 1979, p. 495). A Genève, une commission consultative pour ces questions a été nommée en 1966 et les habitants riverains des deux aéroports de Zurich et de Genève ont constitué des associations de défense de leurs intérêts en 1967 et 1969, respectivement. Puis, le 27 septembre 1970, la loi cantonale zurichoise sur le bruit du trafic aérien ("Fluglärmgesetz") a été adoptée en votation populaire (cf. CHANSON, op.cit., p. 12-13). Dans le canton de Genève, une loi du 21 avril 1972, concernant la délivrance d'autorisations de construire dans les zones riveraines de l'aéroport (cf. Recueil des lois cantonales 1972 p. 157), a permis au département cantonal des travaux publics de "surseoir à la délivrance de toute autorisation de construire dans la région affectée par les nuisances de l'aéroport jusqu'à l'entrée en vigueur du plan des zones de bruit" (art. 1er de la loi).
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bb) Comme cela a été exposé (supra, consid. 5), l'indemnisation des voisins est soumise en principe à des conditions identiques, que les immissions soient provoquées par le trafic terrestre ou aérien. Toutefois, une réserve s'impose quant à l'application dans le temps de la condition de l'imprévisibilité. On ne saurait raisonnablement exiger des particuliers qu'ils eussent d'emblée prévu le développement du trafic aérien et l'augmentation des nuisances, dès la construction des aéroports internationaux du pays, voire au moment de la réalisation des premières étapes d'agrandissement de ces installations. En effet, dans les années qui ont suivi la reprise des activités aéronautiques commerciales à l'issue de la seconde guerre mondiale, les autorités elles-mêmes n'avaient pas prévu que le bruit provenant du trafic aérien serait tel que des mesures de protection devraient être prises dans les environs des aéroports.
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Il s'agit donc de déterminer, à partir de la fin de l'année 1945, la période à l'expiration de laquelle on pouvait, selon toute vraisemblance, attendre de chacun - et non seulement des personnes habitant dans le voisinage d'un aéroport - qu'il connaisse l'importance des nuisances provoquées par le trafic aérien. Il appartient au Tribunal fédéral de fixer la durée de ce laps de temps et d'établir sur ce point une règle. Le juge, faisant en quelque sorte acte de législateur (cf. art. 1er al. 2 CC), doit en décider en prenant en considération aussi bien la garantie de la propriété privée (art. 22ter Cst.) que la nécessité de ne pas entraver la collectivité de manière disproportionnée dans l'exercice de ses tâches d'utilité publique (en l'occurrence: cf. art. 37ter Cst.; cf. ATF 94 I 286 consid. 8a, cité supra, consid. 5a). Au regard de l'ensemble des circonstances, il se justifie de fixer à quinze ans cette durée, dès la fin de l'année 1945. En conséquence, il n'y a pas lieu de tenir compte de la condition de l'imprévisibilité, dans ce domaine, quand le dommage est survenu avant le 1er janvier 1961.
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c) En l'occurrence, la condition de l'imprévisibilité est donc opposable aux expropriés ayant acquis leur fonds à partir du 1er janvier 1961; pour ceux qui l'ont acquis avant cette date, il faut examiner uniquement si les autres conditions à l'octroi d'une indemnité sont réunies. Cela étant, dans les cas où les expropriés ont hérité un immeuble après le 1er janvier 1961 - ou lorsque le transfert s'est fait en vertu d'un avancement d'hoirie -, la date d'achat par le de cujus est déterminante (ATF 119 Ib 348 consid. 5a, ATF 111 Ib 233 consid. 2a).
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aa) Les dates déterminantes dans les causes des consorts L. (1959), W. (1957), R. (1953), G. (1940), hoirie H. (1933), hoirie P. (1955), consorts M. (au plus tard 1915), T. et consorts (avant 1957) et consorts F. (1946) sont antérieures au 1er janvier 1961; la condition de l'imprévisibilité n'est donc en principe pas opposable à ces expropriés et il reste à examiner si les conditions de la spécialité et de la gravité sont remplies. Il se justifie toutefois de relever que, dans certaines de ces causes, les expropriés - ou leurs prédécesseurs - ont construit des bâtiments ou agrandi des locaux existants après le 1er janvier 1961 (il en va ainsi, notamment, dans les causes G. et hoirie H.). Il n'y a toutefois pas lieu de se prononcer sur les conséquences de la réalisation de ces travaux, à une époque où les propriétaires connaissaient les immissions provoquées par l'exploitation de l'aéroport, pour l'appréciation du dommage éventuel; cette question peut rester indécise à ce stade.
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bb) En revanche, le dommage était prévisible dans la cause Jeanneret, le terrain litigieux ayant été acquis plus de cinq ans après le 1er janvier 1961. Ce propriétaire ne saurait se prévaloir d'avoir ignoré l'existence de l'aéroport et les effets de l'exploitation de celui-ci. D'ailleurs, dans une lettre du 15 septembre 1967 au conseiller d'Etat chargé du département cantonal du commerce, de l'industrie et des travaux, Jeanneret invoquait les nuisances du trafic aérien, en demandant que des mesures soient prises, mais il précisait aussi que lorsqu'il avait acheté sa villa, il croyait "sincèrement" pouvoir s'habituer au bruit des avions. Dès lors, les immissions étant non seulement prévisibles mais connues à la date de l'acquisition, sa prétention à une indemnité est mal fondée. Le recours de droit administratif formé par Jeanneret (E.40/1989), en tant qu'il conclut à l'annulation de la décision attaquée et au paiement d'une indemnité pour expropriation formelle des droits de voisinage, doit être rejeté. Il n'y a donc plus lieu d'examiner si, dans cette cause, les conditions de la gravité et de la spécialité étaient en revanche remplies.
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8. Selon la jurisprudence, la condition de la spécialité est remplie lorsque les immissions atteignent une intensité qui excède la limite de ce qui est usuel et tolérable. Il faut distinguer cette condition de celle de la gravité, qui se rapporte, elle, à l'importance du dommage provoqué par les immissions; suivant les caractéristiques de l'immeuble, des immissions d'une intensité constante peuvent en effet entraîner un dommage plus ou moins important (ATF 119 Ib 348 consid. 5b, ATF 117 Ib 15 consid. 2b et les arrêts cités).
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a) La Commission fédérale a considéré que la condition de la spécialité n'était remplie dans aucune des causes, à l'exception de la cause hoirie H. Selon les décisions attaquées, la région dans laquelle se trouvent les parcelles litigieuses est "particulièrement habitée", des quartiers entiers étant réservés au logement, et tous les voisins de l'aéroport subissent des nuisances "dans l'ensemble à tout le moins équivalentes" à celles que subissent les expropriés. La parcelle de l'hoirie H., en revanche, "constitue un cas qui n'est pas loin d'être unique" car, étant située à proximité directe de la piste et dans l'axe d'envol, elle est survolée à basse altitude par les avions et les bâtiments en ont été endommagés à plusieurs reprises (turbulences provoquant un déplacement des tuiles du toit).
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Les expropriés recourants soutiennent que le nombre de voisins touchés n'est pas déterminant à cet égard et ils font valoir que la condition de la spécialité est remplie dans tous les cas. Quant à l'expropriant, il ne critique pas sur ce point les décisions de la Commission fédérale.
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b) Le critère retenu par la Commission fédérale pour nier la spécialité de l'atteinte n'est pas pertinent. Même si le nombre des personnes habitant à proximité de l'aéroport est important, il n'en demeure pas moins qu'il ne représente qu'une petite proportion de l'ensemble des habitants du canton de Genève pouvant bénéficier de ces installations sans en subir les nuisances (la population totale des communes de Vernier et de Bellevue équivaut à moins du dixième de la population de l'agglomération genevoise). Cet aéroport est, au surplus, une infrastructure destinée non seulement aux utilisateurs habitant le canton de Genève, mais aussi à ceux du reste du pays, lequel ne dispose que de trois aéroports internationaux; en conséquence, la proportion de voisins touchés par les nuisances, par rapport au nombre des utilisateurs, est encore plus faible. Au reste, pour l'ensemble du réseau des routes nationales, le nombre de fonds riverains exposés, à cause des immissions de bruit, à un dommage spécial est peut-être supérieur en proportion; dans ces conditions, le rapport entre le nombre d'utilisateurs et le nombre de voisins touchés n'est pas décisif (cf. supra, consid. 5b).
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c) aa) Dans sa jurisprudence relative au trafic routier, le Tribunal fédéral s'est d'abord fondé, quant aux méthodes de mesure des immissions et quant aux seuils déterminants pour admettre leur spécialité, sur des rapports et propositions de commissions spéciales instituées par les autorités fédérales - notamment sur le "rapport de 1963" (cf. supra, consid. 6b/aa) - ou sur des rapports d'experts qu'il avait lui-même désignés (cf. ATF ATF 119 Ib 348 consid. 5b/aa, ATF 110 Ib 340). Après l'entrée en vigueur de la loi fédérale sur la protection de l'environnement, le 1er janvier 1985, le Tribunal fédéral s'est fondé, à ce propos, sur les valeurs limites d'immissions édictées par le Conseil fédéral pour l'évaluation des atteintes nuisibles ou incommodantes (cf. art. 13 al. 1, art. 15 LPE); en principe, lorsque ces valeurs limites sont dépassées, les immissions gênent les personnes touchées de manière sensible dans leur bien-être physique, psychique et social (cf. ATF 119 Ib 348 consid. 5b/bb). Pour le bruit du trafic routier, les valeurs limites d'immissions ont été arrêtées en 1986, à l'occasion de l'adoption de l'ordonnance sur la protection contre le bruit (OPB; RS 814.41). Ces valeurs sont déterminées sous forme du niveau d'évaluation "Lr" (art. 38 al. 1 OPB et annexe 3 OPB); à proximité d'une route sur laquelle ne circulent que des véhicules à moteur, ce niveau d'évaluation Lr se calcule en fonction du "niveau moyen Leq,m, pondéré A, engendré par les véhicules à moteur, et de la correction de niveau K1" (annexe 3 OPB, ch. 3.31). Les valeurs de seuil sont plus ou moins élevées, selon le degré de sensibilité de la zone dans laquelle se trouve l'immeuble touché (art. 43 OPB). Ainsi, dans une zone où aucune entreprise gênante n'est autorisée - zones d'habitation ou réservées à des constructions publiques, notamment - le degré de sensibilité II est applicable et les valeurs limites d'immissions sont, pour le bruit du trafic routier, de 60 dB(A) le jour et de 50 dB(A) la nuit (art. 43 al. 1 let. b OPB en relation avec l'annexe 3 OPB, ch. 2); en revanche, dans les zones où sont admises des entreprises moyennement gênantes, le degré de sensibilité III est applicable et ces valeurs limites d'immissions sont de 65 dB(A) le jour et de 55 dB(A) la nuit. Prenant acte de l'évolution dans ce domaine, le Tribunal fédéral a prescrit l'utilisation de la méthode du "niveau moyen énergétique Leq" pour mesurer l'intensité du bruit et il a considéré que la condition de la spécialité serait, en règle générale, remplie dans les cas où le calcul du niveau d'évaluation "Lr" révélerait un dépassement des valeurs limites d'immissions fixées dans l'annexe 3 OPB (cf. ATF 119 Ib 348 consid. 5b/ee).
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bb) Le Conseil fédéral n'a, en l'état, pas fixé de valeurs limites d'exposition au bruit des aéroports nationaux. Il l'a fait pour les aéroports régionaux et les champs d'aviation (annexe 5 OPB), sous forme du niveau d'évaluation "Lr" (soit la "somme du niveau Leq, pondéré A, et de la correction de niveau K" ["Lr = Leq + K"]); les valeurs limites d'immissions, lorsque les degrés de sensibilité II ou III sont applicables, sont respectivement de 60 dB(A) et 65 dB(A) (cf. annexe 5 OPB, ch. 2.21 et 3.31). De façon générale du reste, l'ordonnance sur la protection contre le bruit prévoit que les immissions sont en principe déterminées sous la forme du niveau d'évaluation "Lr" (art. 38 al. 1 OPB), soit en fonction du niveau moyen "Leq", avec éventuellement un facteur de correction "K" pouvant dépendre du volume du trafic ou du nombre de mouvements.
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Les travaux préparatoires en vue de l'adoption d'une nouvelle annexe de l'ordonnance sur la protection contre le bruit consacrée au bruit des aéroports nationaux sont toutefois en cours (cf. Message du Conseil fédéral concernant la dernière modification de la loi sur la navigation aérienne, FF 1991 I 609). Dans ses observations adressées au Tribunal fédéral (au sujet des causes hoirie P., consorts M. ainsi que T. et consorts), le Département fédéral des transports, des communications et de l'énergie a indiqué qu'une commission d'experts avait été nommée à cet effet; il résulte de documents produits par ce département - en particulier d'une lettre du 5 juin 1991 de l'Office fédéral de l'environnement, des forêts et du paysage - que cette commission envisage de proposer, dans ce domaine aussi, de se fonder sur le calcul du niveau moyen "Leq" (et non pas, par exemple, sur l'indice NNI; cf. infra, consid. 13).
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La section "acoustique et lutte contre le bruit" du Laboratoire fédéral d'essai des matériaux et de recherches (EMPA) a calculé, en "Leq", les immissions de bruit dans les environs de l'aéroport de Genève sur la base de la statistique des mouvements en 1989, en tenant compte des atterrissages et des décollages de six heures du matin à dix heures du soir; des courbes des niveaux de bruit ont été dessinées, en fonction de la topographie des lieux ("Linien gleicher Mittelungspegel Leq 16 h"; équidistance des courbes: 5 dB(A), entre 35 et 70 dB(A)). Dans sa lettre-rapport du 6 avril 1995 au Tribunal fédéral, le chef de cette section de l'EMPA a relevé que l'intensité des immissions était restée à peu près constante depuis 1989; certes, on a noté une certaine augmentation du trafic aérien, mais, dans le même temps, des avions plus silencieux ont été mis en service. Le Tribunal fédéral n'a aucun motif de s'écarter de ces calculs et constatations, qui émanent d'un organisme officiel hautement qualifié et spécialisé.
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cc) Sur la carte précitée, tous les biens-fonds litigieux se trouvent dans la bande délimitée par les courbes 65 dB(A) et 70 dB(A); le niveau moyen "Leq" des immissions est donc, dans tous les cas, supérieur à 65 dB(A) durant la journée. Pour déterminer le niveau d'évaluation "Lr" conformément à l'art. 38 al. 1 OPB, il faut éventuellement corriger quelque peu le résultat calculé en "Leq"; on ne voit cependant pas pourquoi un facteur de correction "K" important devrait être appliqué en l'espèce, compte tenu du volume du trafic. A ceci s'ajoute le fait que des mouvements d'avion se produisent encore - à une cadence plus réduite certes - en dehors de la période diurne de seize heures prise en considération pour les calculs; les statistiques d'exploitation montrent en effet que des avions atterrissent ou décollent entre 22 h et 23 h, ainsi qu'un peu avant 6 h. En outre, il n'est pas exclu que les effets de l'augmentation du trafic, depuis 1989, ne soient pas entièrement compensés par les progrès techniques rendant les nouveaux avions plus silencieux.
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Quoi qu'il en soit, les biens-fonds litigieux sur lesquels des maisons d'habitation ont été édifiées se trouvent dans des quartiers à caractère résidentiel et la réglementation en vigueur, au moment de la construction, prévoyait une telle utilisation (cf. en particulier le régime de la 5e zone résidentielle du droit cantonal). Dans de telles zones, le degré de sensibilité II doit en principe être appliqué (art. 43 al. 1 let. b OPB) et les valeurs limites d'immissions sont généralement fixées à 60 dB(A) le jour, qu'il s'agisse du bruit du trafic routier (annexe 3 OPB), du bruit des chemins de fer (annexe 4 OPB) ou du bruit de l'industrie et des arts et métiers (annexe 6 OPB), notamment. Comme, dans ces villas (soit les bâtiments des consorts L., de W., de R., de dame G., de l'hoirie H. et de l'hoirie P.), le niveau moyen "Leq" est supérieur à 65 dB(A) - et que, comme cela vient d'être exposé, le niveau d'évaluation "Lr" ne devrait pas être sensiblement inférieur -, les immissions de bruit sont excessives, au sens de l'art. 684 CC. La condition de la spécialité est donc manifestement remplie en ce qui concerne ces biens-fonds et il n'est pas nécessaire, pour le présent jugement, de mesurer avec précision l'intensité du bruit dans chacun des bâtiments litigieux.
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Par ailleurs, il n'est pas exclu que la condition de la spécialité soit aussi remplie pour les fonds non bâtis; cette question peut cependant demeurer indécise, comme celle de la gravité (cf. supra consid. 7 in fine). Il n'y a en effet pas lieu, à ce stade et avant les mesures d'instruction qui seront encore ordonnées, de déterminer leur degré de sensibilité au bruit et le seuil à partir duquel l'intensité des immissions est excessive.
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a) En ce qui concerne les zones de bruit, les restrictions de la propriété foncière ont leur fondement à l'art. 42 LA. Selon cette disposition, le Conseil fédéral peut prescrire, par voie d'ordonnance, que des bâtiments ne peuvent plus être utilisés ou élevés dans un rayon déterminé autour d'aérodromes publics que si leur genre de construction et leur destination sont compatibles avec les inconvénients causés par le bruit des aéronefs (art. 42 al. 1 let. b LA); des plans de zone, établis par l'exploitant de l'aéroport, doivent fixer l'étendue territoriale et la nature des restrictions apportées à la propriété (art. 42 al. 3 LA). Ces règles, qui poursuivent en premier lieu un but d'hygiène sociale - améliorer les conditions d'habitation dans le périmètre des aéroports -, ont été introduites dans la loi fédérale lors de la réforme de 1971, la novelle étant entrée en vigueur en 1974 (cf. Message du Conseil fédéral, FF 1971 I 287, 295; cf. ATF 110 Ib 368 consid. 2b). Sur la base de cette clause de délégation, le Conseil fédéral a adopté les art. 61 ss ONA (qui correspondent aux actuels art. 40 ss OSIA), et il a chargé le Département fédéral des transports, des communications et de l'énergie d'édicter des prescriptions sur la manière de déterminer l'exposition au bruit - en tenant compte du développement prévisible des constructions et de l'exploitation de l'aéroport - et de fixer les valeurs limites du bruit pour délimiter les zones (art. 61 al. 2 et 3 ONA). Ce département fédéral a dès lors adopté l'ordonnance concernant les zones de bruit des aéroports de Bâle-Mulhouse, Genève-Cointrin et Zurich (ci-après: O DFTCE; cf. supra, faits, let. B.). Il a choisi d'exprimer l'exposition au bruit selon une mesure employée à l'origine au Royaume-Uni, soit au moyen de l'indice "NNI" ("Noise and Number Index" ou "indice numérique de bruit"). Cet indice intègre deux facteurs: le taux moyen de bruit - ou plutôt "la valeur moyenne des maxima de niveau de bruit en PNdB" (unité du niveau de bruit perçu) - et le nombre des mouvements d'aéronefs ayant un niveau de bruit perçu supérieur à 80 PNdB, pendant une année, de 6 à 22 heures (cf. art. 1er à 4 O DFTCE). C'est en fonction de cet indice que les valeurs de seuil permettant de délimiter les trois zones A, B et C ont été fixées (art. 7 O DFTCE).
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Pour sa part, le Conseil fédéral a néanmoins énoncé certains principes quant à la délimitation des zones. Ainsi, en vertu de l'art. 43 OSIA - dont la teneur correspond à celle de l'ancien art. 63 ONA -, dans l'intérêt d'un aménagement local adéquat, les limites des différentes zones suivent des lignes de terrain appropriées (routes, cours d'eau, lisières de forêt, limites de champs); il y a toutefois lieu de ne pas s'écarter sensiblement des courbes de valeur de bruit telles qu'elles ont été calculées. Le Conseil fédéral a aussi défini les utilisations "admissibles" ou "autorisées" dans chacune des zones de bruit A, B et C (art. 41 al. 1 et 42 al. 1 et 2 OSIA, art. 61 al. 1 et 62 al. 1 et 2 ONA; cf. supra, faits, let. B.), et il a prévu que, dans les zones de bruit, les autorités compétentes en vertu du droit cantonal ne peuvent établir de nouvelles zones à bâtir réservées à la construction de bâtiments d'habitation (art. 42 al. 3 OSIA, art. 62 al. 3 ONA). Cela étant, aux termes de l'art. 42 al. 5 OSIA - disposition correspondant à l'ancien art. 62 al. 5 ONA - tout bâtiment qui est situé dans une zone de bruit et qui a été construit avant la mise à l'enquête du plan de zone peut continuer à être utilisé de la même manière. Le Conseil fédéral a donc renoncé à la possibilité d'empêcher - comme le lui permettait l'art. 42 al. 1 let. b LA - l'utilisation des constructions dont la destination était devenue, en principe, incompatible avec les normes du plan (cf. ATF 110 Ib 368 consid. 2b p. 375).
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Dans sa décision prise le 8 avril 1987 sur les recours formés contre l'adoption du plan des zones de bruit (cf. supra, faits, let. B.), le Conseil fédéral s'est prononcé sur la clause de délégation législative de l'art. 61 al. 2 et 3 ONA et il a admis sa validité. En l'occurrence, ni les expropriés, ni l'expropriant ne remettent en cause les normes sur lesquelles la délimitation des zones de bruit est fondée, ni du reste les dispositions de l'ordonnance relatives aux utilisations admises dans ces zones. Le Tribunal fédéral n'a aucun motif d'examiner d'office la constitutionnalité de ces règles générales et abstraites.
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b) Les plans des zones de bruit prévus par la législation fédérale sur l'aviation ne sont pas, en soi, des plans d'affectation fondés sur les art. 14 ss de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire (LAT; RS 700). Ces plans règlent néanmoins, partiellement, le mode d'utilisation du sol (cf. art. 14 al. 1 LAT), dans un but particulier. Toutefois, contrairement aux plans d'affectation des communes ou des cantons, les plans des zones de bruit se bornent à imposer ou concrétiser des interdictions de construire et de transformer, assorties de certaines exceptions; tout ce qui n'est pas expressément permis par les dispositions spéciales du droit fédéral est interdit (en effet, selon le texte de l'art. 42 al. 1 let. b LA, les prescriptions relatives aux zones de bruit ont uniquement pour objet de proscrire l'utilisation ou l'édification de certains bâtiments). Quand bien même le texte de l'ordonnance du Conseil fédéral parle d'"utilisation admissible" (titre de l'art. 62 ONA) ou d'"utilisation autorisée" (titre de l'art. 42 OSIA; dans le texte allemand: "zulässige Nutzung") dans les zones de bruit, ces plans ne définissent pas de façon positive le statut du sol. Cela étant, pour que leur édification ou transformation soit autorisée, les bâtiments admissibles à titre exceptionnel selon le droit aérien doivent être conformes au plan d'affectation communal ou cantonal et aux autres normes du droit cantonal de l'aménagement du territoire; ce sont ces dernières règles qui définissent l'utilisation effectivement admissible du sol, compte tenu des exigences du droit fédéral, en particulier du droit aérien (cf. Hermann Roduner, Grundeigentumsbeschränkungen zugunsten von Flughäfen, thèse Zurich 1984, p. 80). Les dispositions du droit public fédéral prévoient du reste l'adoption de plans ou de mesures analogues aux zones de bruit dans d'autres domaines, notamment pour la protection des eaux souterraines (cf. art. 19 ss de la loi fédérale sur la protection des eaux - LEaux, RS 814.20; cf. ATF 121 II 39 consid. 2b/aa, ATF 120 Ib 287 consid. 3c/bb).
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Quand la loi fédérale sur l'aménagement du territoire est applicable, son art. 21 al. 2 dispose que les plans font l'objet des adaptations nécessaires lorsque les circonstances se sont sensiblement modifiées. Ce principe a une portée générale: une mesure de planification qui impose des restrictions aux particuliers et qui, à la suite de l'évolution des circonstances, n'est plus justifiée par un intérêt public prépondérant, n'est en principe pas compatible avec la garantie de la propriété (art. 22ter al. 1 Cst.) et elle doit normalement être revue (ATF 120 Ia 227 consid. 2c). Depuis l'entrée en vigueur de l'ordonnance sur l'infrastructure aéronautique (OSIA), les règles fédérales spéciales prévoient du reste expressément que, si la situation change considérablement, en particulier à la suite de modifications apportées à l'exploitation d'un aéroport ou grâce aux progrès techniques, le Département des transports, des communications et de l'énergie ordonne d'établir à nouveau les zones de bruit et fixe les délais d'exécution (art. 40 al. 4 OSIA).
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c) Un plan d'affectation - qu'il soit fondé sur les art. 14 ss LAT ou sur d'autres dispositions spéciales - est un instrument dont la nature juridique est particulière: il ne s'agit ni d'une règle générale et abstraite, ni d'une décision administrative (sur les controverses doctrinales à ce propos: cf. PIERRE MOOR, Droit administratif, vol. II, Berne 1991, p. 289 ss). Selon la jurisprudence - qui assimile à cet égard le plan à une décision -, le contrôle incident ou préjudiciel du plan d'affectation dans la procédure relative à un acte d'application est en principe exclu (ATF 120 Ia 227 consid. 2c, ATF 116 Ia 207 consid. 3b et les arrêts cités). Un tel contrôle est pourtant admis, à titre exceptionnel, lorsque les circonstances ou les dispositions légales se sont modifiées, depuis l'adoption du plan, dans une mesure telle que l'intérêt public au maintien des restrictions imposées aux propriétaires concernés pourrait avoir disparu; cette précision jurisprudentielle correspond à l'obligation de réexamen des plans prévue notamment à l'art. 21 al. 2 LAT (ATF 120 Ia 227 consid. 2c, ATF 106 Ia 383 consid. 3c; arrêt du 26 octobre 1983 reproduit in ZBl 87/1986 p. 501, consid. 2).
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d) Dans le présent jugement, il s'agit d'examiner si les restrictions découlant du plan des zones de bruit entré en vigueur le 2 septembre 1987 (cf. art. 43 al. 4 LA) sont constitutives d'expropriation matérielle, à savoir si elles interdisent ou restreignent l'usage actuel des biens-fonds litigieux ou leur usage futur prévisible d'une manière particulièrement grave, de sorte que les lésés se trouveraient privés d'un attribut essentiel de leur droit de propriété; selon la jurisprudence, une atteinte de moindre importance peut aussi constituer une expropriation matérielle si elle frappe un ou plusieurs propriétaires de manière telle que, s'ils n'étaient pas indemnisés, ils devraient supporter un sacrifice par trop considérable en faveur de la collectivité, incompatible avec le principe de l'égalité de traitement (ATF 119 Ib 124 consid. 2b et les arrêts cités).
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aa) En l'occurrence, il suffit de se prononcer sur la portée des restrictions imposées par la législation fédérale sur l'aviation (car, comme cela sera exposé - cf. infra, consid. 13 -, elles ne sont de toute manière pas constitutives d'expropriation matérielle). Il n'y a en particulier pas lieu d'examiner les effets des mesures cantonales d'aménagement du territoire - résultant du plan général d'affectation du canton ou découlant, le cas échéant, du classement dans une zone de développement -, voire des règles fédérales dans ce domaine (cf. notamment art. 35 al. 3 et 36 al. 3 LAT; cf. ATF 119 Ib 124 consid. 3c). Il ne se justifie pas davantage, dans les présentes procédures, d'examiner si d'autres règles du droit fédéral tendant à la protection des hommes contre les atteintes nuisibles et incommodantes (cf. notamment art. 22 et 24 LPE) emportent aussi des restrictions quant aux possibilités de construire dans le voisinage de l'aéroport de Genève. A ce propos, il importe peu que, depuis le 1er janvier 1995, l'art. 42 al. 5 LA réserve expressément les prescriptions de la législation fédérale sur la protection de l'environnement relatives au bruit. Au reste, les prétentions des expropriés n'ont été formulées qu'en rapport avec les conséquences de l'adoption du plan des zones de bruit, et la Commission fédérale n'aurait pas été compétente pour statuer si les demandes d'indemnité avaient eu un autre fondement (ATF 115 Ib 411 consid. 3).
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bb) En principe, le moment déterminant pour apprécier, du point de vue de l'expropriation matérielle, la portée de la restriction est la date de son entrée en vigueur (ATF 119 Ib 229 consid. 3a et les arrêts cités); l'art. 44 al. 2 LA rappelle du reste ce principe. Lorsqu'avant le jugement définitif, une restriction constitutive d'expropriation matérielle est remplacée par une restriction qui doit être supportée sans indemnité, ou quand la première restriction est simplement levée, le juge doit tenir compte de cette nouvelle situation juridique, car l'obligation d'indemniser n'a alors, en principe, plus de fondement, à défaut de dommage pour le propriétaire; il ne se justifie de faire une exception que lorsque la période entre la première restriction et le changement ultérieur de régime juridique était particulièrement longue, de telle sorte que, sans la restriction, le propriétaire aurait pu faire dans l'intervalle une meilleure utilisation de son fonds (ATF 105 Ia 330 consid. 4b; cf. arrêt non publié du 25 novembre 1981, reproduit in ZBl 83/1982 p. 87, consid. 4a et les arrêts cités; cf. ALFRED KUTTLER, "Welcher Zeitpunkt ist für die Beurteilung der Frage, ob eine materielle Enteignung vorliegt, massgebend", ZBl 76/1975 p. 503 ss). Dès lors, dans l'hypothèse où le plan des zones de bruit aurait été révisé, avant le présent jugement, dans le sens d'une réduction de la surface des zones A et B et, partant, avec pour effet de ne plus soumettre certains des propriétaires touchés aux restrictions applicables dans ces dernières zones, l'autorité judiciaire compétente aurait dû en tenir compte dans sa décision sur les prétentions en expropriation matérielle. Il est cependant constant que les autorités fédérales et cantonales n'ont pas engagé une telle procédure de révision.
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cc) Cela étant, le nouveau calcul des courbes NNI ("Linien gleicher NNI-Werte [06-22 Uhr]"), effectué par l'EMPA sur la base des mouvements d'avions sur l'aéroport de Genève en 1989 et en fonction des critères de l'ordonnance de 1973 (O DFTCE), démontre que les zones de bruit A et B du plan de 1987 sont aujourd'hui manifestement surdimensionnées; actuellement - dans son rapport du 6 avril 1995, le Dr Hofmann estime que ces calculs sont toujours pertinents en dépit de la légère augmentation du trafic (cf. supra, consid. 8c/bb) -, le périmètre dont l'indice d'exposition au bruit est supérieur à 55 NNI comprend la piste elle-même et des terrains situés au maximum à quelques centaines de mètres de celle-ci. Il n'y a pas lieu de s'écarter de ces calculs et constatations, pour les raisons déjà évoquées (cf. supra, consid. 8c/bb). En vertu du droit fédéral, le seul objet d'un plan des zones de bruit est en définitive d'indiquer sur le terrain le tracé des courbes 45 NNI, 55 NNI et 65 NNI telles qu'elles ont été calculées conformément aux dispositions des art. 1er à 6 O DFTCE; dans ce domaine, l'autorité de planification ne doit pas, même pour des motifs d'aménagement du territoire ou pour d'autres motifs d'intérêt public, s'écarter sensiblement de ces courbes de niveau de bruit (cf. art. 43 OSIA, art. 63 ONA; cf. RODUNER, op.cit., p. 98). Il faut donc constater qu'avec l'évolution des circonstances, notamment grâce aux progrès techniques dans la conception des avions à réaction ainsi qu'aux nouveaux procédés et prescriptions concernant les trajectoires d'approche et d'envol, l'exposition au bruit de plusieurs immeubles classés, selon le plan de 1987, dans les zones de bruit A (65 NNI et plus) ou B (entre 55 et 65 NNI), est actuellement inférieure à 55 NNI. Or, dans ces conditions, ces immeubles devraient être soumis aux restrictions applicables dans la zone C, voire être soustraites à toute restriction fondée sur la législation fédérale sur l'aviation. Le Tribunal fédéral doit nécessairement en déduire que l'intérêt public au classement dans la zone A ou dans la zone B a disparu, car aucun autre élément n'entre en considération pour apprécier de ce point de vue, au regard de l'art. 22ter al. 1 Cst., la validité des restrictions imposées dans ces deux zones (par les art. 42 al. 1 OSIA ou 62 al. 1 ONA). La jurisprudence admet, dans de telles conditions, le contrôle préjudiciel ou incident du plan (cf. supra, consid. 12c).
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dd) Selon la carte des courbes NNI établie par l'EMPA, toutes les parcelles des expropriés - y compris la parcelle de l'hoirie H., dans la zone A selon le plan de 1987, et les parcelles des consorts L., de W., de T. et consorts (no 1735) et des consorts F. (partie sud), déjà classées dans la zone C - se trouvent dans la bande de terrain comprise entre les courbes 45 NNI et 55 NNI, qui représentent les valeurs de seuil inférieure et supérieure de la zone de bruit C. Les fonds les plus proches de la courbe 55 NNI en sont toutefois suffisamment éloignés, de telle sorte qu'on ne saurait retenir qu'un classement dans la zone de bruit B pourrait néanmoins se justifier en vertu de l'art. 43 OSIA (cf. supra, consid. 12a). Dans ses dernières observations, du 15 mai 1995, l'expropriant a du reste admis que "l'empreinte au sol des courbes NNI (...) a diminué de façon très sensible, de telle sorte que des surfaces importantes de terrains qui se trouvent en zone NNI B selon la réglementation actuelle, se trouveraient placées en zone NNI C s'il fallait refaire aujourd'hui le plan des zones de bruit selon les mêmes critères".
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Il faut donner acte aux expropriés, dans le présent jugement, de ces constatations relatives à l'indice d'exposition au bruit déterminant pour leurs parcelles; elles sont en effet de nature à entraîner une modification du régime juridique applicable selon le plan des zones de bruit de 1987. Dans cette mesure, les recours de droit administratif des expropriés dont les fonds étaient classés dans la zone de bruit B doivent être partiellement admis. Ces constatations s'imposent au demeurant à toutes les autorités, notamment dans les procédures éventuelles tendant à l'octroi d'autorisations de construire; la Commission fédérale aurait du reste, elle aussi, dû tenir compte des résultats des nouveaux calculs des courbes NNI (si elle en avait eu connaissance), qui sont fondés sur les caractéristiques du trafic aérien au moment où elle a rendu ses premières décisions.
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