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Informationen zum Dokument  BGE 129 II 420  Materielle Begründung
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Regeste
Sachverhalt
Extrait des considérants:
1. Le recours de droit administratif est recevable contre une d&e ...
2. Par leurs conclusions principales, les recourants demandent l' ...
3. Les recourants demandent à titre subsidiaire une indemn ...
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7. Les recourants se plaignent par ailleurs de nuisances qui sera ...
8. La Commission fédérale n'a pas, dans le cas part ...
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42. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour de droit public dans la cause A. et B. contre SA L'Energie de l'Ouest-Suisse ainsi que Commission fédérale d'estimation du 3e arrondissement (recours de droit administratif)
 
 
1E.14/2002 du 22 juillet 2003
 
 
Regeste
 
Enteignung, Durchleitungsrecht für eine Hochspannungsleitung, Festsetzung der Entschädigung (Art. 19 und 22 EntG).  
Grundsätze der Festsetzung der Entschädigung bei der Auferlegung einer Dienstbarkeit auf ein Grundstück, die einer Teilenteignung gleichkommt; Berücksichtigung des Schadens, der sich aus dem Entzug oder aus der Verminderung von Vorteilen für das Restgrundstück ergibt (E. 3.1), besonders, wenn der Betrieb der Anlage des Enteigners Immissionen verursacht (E. 4).  
Anspruch der Nachbarn der Hochspannungsleitung auf Achtung des Privat- und Familienlebens gemäss Art. 8 EMRK (E. 5).  
Entschädigung aufgrund des durch die Hochspannungsleitung verursachten Lärms (E. 6).  
Entschädigung aufgrund der elektromagnetischen Felder (E. 7).  
 
Sachverhalt
 
BGE 129 II, 420 (421)A.- Une procédure d'expropriation (procédure sommaire) a été ouverte en 1997 à la requête de la société anonyme L'Energie de l'Ouest-Suisse (ci-après: la société EOS, ou l'expropriante), afin de permettre à cette société d'acquérir certains droits nécessaires au passage des conducteurs d'une nouvelle ligne électrique aérienne (ligne 380/132 kV EOS-CFF Saint-Triphon - Chamoson), en particulier sur la parcelle no 1370 du registre foncier de la commune de Saint-Maurice, propriété des frères A. et B. Ce bien-fonds, classé en zone résidentielle, a une surface de 2'378 m2 et il s'y trouve une maison d'habitation de deux appartements. La procédure a pour objet la constitution d'une servitude de passage pour les conducteurs, sur une longueur de 48 m; la parcelle no 1370 doit également être grevée d'une servitude de restriction au droit d'utilisation du sol (interdiction de construire, restrictions pour les plantations), sur une surface de 1'500 m2 (selon le texte de l'avis personnel). La durée des servitudes est de cinquante ans.
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L'avis personnel a été envoyé à A. et B. (les expropriés) le 20 mai 1997. Ceux-ci se sont opposés à l'expropriation le 18 juin 1997. Le 22 juin 1998, le Département fédéral de l'environnement, des transports, de l'énergie et de la communication (DETEC) a rejeté l'opposition et accordé le droit d'expropriation à la société EOS. Les expropriés ont formé un recours de droit administratif contre cette décision, que le Tribunal fédéral a rejeté par un arrêt rendu le 9 novembre 1999 (cause 1E.14/1998). Auparavant, l'Inspection fédérale des installations à courant fort (IFICF) avait approuvé, le 18 octobre 1993, les plans de la nouvelle ligne 380 kV. A. et B. n'avaient pas contesté, à ce stade, le choix du tracé.
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B.- Dans cet arrêt 1E.14/1998, le Tribunal fédéral s'est prononcé sur la requête des expropriés tendant au déplacement de la ligne électrique parce qu'ils craignaient pour eux-mêmes et les occupants de leur maison les conséquences d'une exposition aux champs électromagnétiques.
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BGE 129 II, 420 (422)Le Tribunal fédéral a examiné ces questions sous l'angle du droit fédéral de la protection de l'environnement et il a rejeté les griefs soulevés. Le dossier de cette affaire contient un rapport de l'Inspection fédérale des installations à courant fort (IFICF) du 16 avril 1999, établi après des mesures des champs électromagnétiques sur la parcelle litigieuse. Ce rapport indique le résultat de calculs du champ magnétique de la nouvelle ligne dans le bâtiment des expropriés: avec une charge de 1018 A (au moment des mesures), la densité de flux magnétique est de 0.986 µT; avec une charge maximale de 2000 A, cette densité serait de 2.592 µT au niveau du sol, de 3.638 µT à 4 m du sol et de 4.063 µT à 8 m du sol. D'après un rapport d'expertise acoustique se trouvant également au dossier, le niveau d'évaluation Lr du bruit provenant de la ligne 380/132 kV dans les locaux habitables du bâtiment des expropriés est de 45 (+/-3) dB(A) de jour (de 7 à 19 heures) et de 46 (+/-3) dB(A) de nuit.
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C.- Dans leur opposition du 18 juin 1997, les expropriés demandaient encore une indemnité pour la constitution des servitudes, compensant la moins-value subie par leur immeuble, en particulier leur bâtiment d'habitation. Ils se référaient notamment aux champs électromagnétiques engendrés par la nouvelle ligne. Le 7 juillet 1998, l'expropriante et les expropriés ont conclu un "contrat de servitude". Aux termes de ce contrat, les expropriés conféraient à l'expropriante, sur une partie de leur parcelle no 1370 (environ 1'250 m2, d'après le plan joint au contrat), "le droit d'établir des lignes aériennes à haute tension ainsi que les droits accessoires de passage pour la surveillance, l'entretien et toutes transformation ou extension que nécessiterait l'exploitation du réseau", le bien-fonds étant grevé "d'une servitude personnelle et cessible de restriction au droit d'utilisation du sol (bâtir, planter, excaver)". Le contrat prévoit qu'en contre-valeur de la servitude, l'expropriante payera aux expropriés une indemnité de 100'000 fr., exigible dès l'inscription au registre foncier. Il contient encore la clause suivante: "L'estimation de la moins-value de la maison occasionnée par le passage de la ligne sera déterminé [sic] par la commission fédérale d'estimation". L'expropriante a été autorisée à requérir directement l'inscription des servitudes au registre foncier; l'indemnité convenue était exigible dès cette inscription. Après cela, la procédure d'estimation a été ouverte par le Président de la Commission fédérale d'estimation du 3e arrondissement (ci-après: la Commission fédérale). Le 6 décembre 2000, les expropriés lui ont soumis leurs prétentions: ils ont demandé l'expropriation totale de leur immeuble et à titre subsidiaire le versement BGE 129 II, 420 (423)d'une indemnité compensant la moins-value causée par les champs électromagnétiques, le bruit et l'atteinte au site.
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La Commission fédérale a entendu les parties le 13 décembre 2000. Les expropriés ont alors requis une nouvelle expertise des nuisances de la ligne électrique, en contestant le "caractère neutre" de l'Inspection fédérale (IFICF). Cette requête a été rejetée. Les expropriés ont formé contre cette décision incidente un recours de droit administratif. Le Tribunal fédéral l'a partiellement admis, en annulant la condamnation des expropriés aux frais de la décision incidente, mais en considérant en revanche que le refus d'ordonner une nouvelle expertise était fondé (arrêt 1E.17/2001 du 10 décembre 2001).
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La Commission fédérale a statué le 27 février 2002 sur les prétentions des expropriés. Elle a condamné l'expropriante à leur verser une "indemnité supplémentaire d'expropriation de 30'000 fr. pour l'indemnisation de la moins-value au bâtiment", indemnité portant intérêts au taux usuel.
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D.- Agissant par la voie du recours de droit administratif, les expropriés ont requis le Tribunal fédéral de prononcer l'expropriation totale de leur immeuble et de charger un expert judiciaire de fixer l'indemnité. A titre subsidiaire, ils ont demandé que "la moins-value pour changement d'affectation du bâtiment" soit compensée par une indemnité fixée par expertise judiciaire. L'expropriante a conclu au rejet du recours.
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Le Tribunal fédéral a admis le recours de droit administratif, annulé la décision de la Commission fédérale et renvoyé l'affaire à cette autorité pour nouvelle décision.
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Extrait des considérants:
 
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BGE 129 II, 420 (424)2.1 Dans la décision attaquée, la Commission fédérale a rejeté la demande d'expropriation totale en considérant qu'elle était en contradiction avec l'accord signé avec l'expropriante le 7 juillet 1998, le principe de la constitution d'une servitude ayant alors été admis par les expropriés. En d'autres termes, les expropriés seraient réputés avoir renoncé à obtenir autre chose qu'une indemnité pour expropriation partielle.
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Dans la procédure de recours de droit administratif, le Tribunal fédéral applique d'office le droit fédéral et, dans le cadre de la contestation, il n'est pas lié par les motifs invoqués par les parties (art. 114 al. 1 OJ). Il peut en outre revoir librement les constatations de fait de la commission fédérale d'estimation (ATF 128 II 231 consid. 2.4.1 p. 236; ATF 119 Ib 447 consid. 1b p. 451).
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Toutefois, en vertu de l'art. 36 let. b LEx (en relation avec l'art. 34 al. 1 let. e LEx), les demandes d'extension de l'expropriation fondées sur l'art. 12 LEx doivent en principe être produites, par écrit et motivées, dans le délai fixé par l'avis personnel pour la production des oppositions et des prétentions. Il s'agit d'un délai de péremption (cf. HEINZ HESS/HEINRICH WEIBEL, Das Enteignungsrecht des Bundes, vol. I, Berne 1986, n. 13-14 ad art. 36 LEx). Les expropriés n'ont pas présenté leur demande d'extension dans le délai d'opposition; ils se sont bornés, dans leur écriture du 18 juin 1997, à exposer qu'après un calcul ultérieur des champs électromagnétiques par des spécialistes mandatés par l'expropriante, ils "pourr[aient] demander au besoin l'extension de l'expropriation en conformité de l'art. 12 LEx". La demande proprement dite d'extension pour une expropriation totale figure dans un acte du 6 décembre 2000, déposé par les expropriés au moment où ils ont eu l'occasion de préciser par écrit leurs prétentions, peu avant une audience de la Commission fédérale. Auparavant, en signant le contrat de servitude du 7 juillet 1998, ils avaient du reste admis se trouver dans un cas d'expropriation BGE 129 II, 420 (425)partielle. Ils ne prétendent pas que les conditions de l'art. 41 LEx, permettant une production tardive des prétentions, seraient satisfaites; ce n'est manifestement pas le cas. Il en résulte que les recourants sont forclos et que la Commission fédérale était fondée à rejeter la demande d'extension; peu importe qu'elle l'ait fait pour d'autres motifs que ceux que l'on vient d'exposer.
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3.1 Contrairement à l'avis des recourants (et de l'expropriante également), l'expropriation n'a pas pour objet des droits résultant des dispositions sur la propriété foncière en matière de rapports de voisinage (cf. art. 5 al. 1 LEx, en relation avec les art. 679 ss CC), soit les droits des propriétaires fonciers voisins des biens-fonds où passe la ligne électrique litigieuse de se défendre contre les immissions, conséquences indirectes que l'exercice de la propriété sur un fonds peut avoir sur les fonds voisins (cf. ATF 129 II 72 consid. 2.3 p. 75; ATF 124 II 543 consid. 3a p. 548). La présente procédure a été ouverte en vue de la constitution, par voie d'expropriation, de servitudes grevant le bien-fonds des expropriés, lesquels sont dès lors directement touchés dans l'exercice de leur droit de propriété.
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3.1.1 Selon la jurisprudence, l'imposition forcée d'une servitude sur un fonds constitue juridiquement une expropriation partielle. Comme les droits réels restreints ne sont pas des objets de commerce, l'indemnité pleine et entière à verser au propriétaire du fonds grevé (art. 16 LEx) correspond à la dépréciation de la parcelle. Il s'agit donc d'appliquer non pas l'art. 19 let. a LEx, en vertu duquel l'indemnité comprend "la pleine valeur vénale du droit exproprié", mais l'art. 19 let. b LEx, qui prévoit que l'indemnité comprend "le montant dont est réduite la valeur vénale de la partie restante". Cette indemnité se calcule donc selon la méthode dite de la différence, laquelle consiste à déduire de la valeur vénale du fonds libre de servitude celle du fonds grevé de la servitude (cf. ATF 122 II 337 consid. 4c p. 343; ATF 114 Ib 321 consid. 3 p. 324; ATF 111 Ib 287 consid. 1 p. 289 et les arrêts cités).
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BGE 129 II, 420 (426)3.1.2 Conformément à l'art. 22 al. 2 LEx, il faut tenir compte du dommage résultant de la perte ou de la diminution d'avantages influant sur la valeur vénale et que la partie restante aurait, selon toute vraisemblance, conservés s'il n'y avait pas eu d'expropriation. D'après la jurisprudence, il peut s'agir d'avantages de fait, ou d'éléments concrets ayant une influence sur la valeur vénale. Un lien de causalité adéquate doit pourtant exister entre l'expropriation elle-même - à distinguer des effets de l'ouvrage de l'expropriant sur les biens-fonds voisins - et une telle perte (ATF 114 Ib 321 consid. 3 p. 324/325; ATF 106 Ib 381 consid. 2b et 3a p. 385 s., et les arrêts cités; HESS/WEIBEL, op. cit., n. 20 ad art. 19 LEx p. 241 et n. 8-9 ad art. 22 LEx p. 339). En cas d'expropriation partielle, la jurisprudence prend notamment en considération la perte d'avantages valorisant ou protégeant l'immeuble touché: protection contre les nuisances provenant du voisinage, garantie d'une vue dégagée sur le paysage, interdiction de construire grevant le fonds voisin en vertu d'une servitude, etc. (perte d'un "écran protecteur"); cette dépréciation doit être indemnisée (cf. ATF 106 Ib 381 consid. 4b p. 389; 104 Ib 79 consid. 1b p. 81; ATF 100 Ib 190 consid. 8 p. 197; ATF 94 I 286 consid. 2-4 p. 292 ss; cf. aussi ATF 110 Ib 43 consid. 2 p. 46; ATF 102 Ib 348 consid. 3b p. 352; 98 Ib 329 consid. 1 p. 331; HESS/WEIBEL, op. cit., n. 23 ad art. 19 LEx, p. 242). En revanche, si le compartiment de terrain exproprié est modeste et qu'il ne remplit aucune fonction particulièrement valorisante ou protectrice pour le reste du bien-fonds, les principes sur l'expropriation des droits de voisinage s'appliquent conformément à l'art. 5 LEx (cf. ATF 110 Ib 43 consid. 2 p. 47; ATF 106 Ib 381 consid. 2a p. 383/384; HESS/WEIBEL, op. cit., n. 23 ad art. 19 LEx, p. 242). Ces droits sont en principe énumérés aux art. 684 ss CC (ATF 128 II 368 consid. 2.1 p. 372).
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3.2.1 La convention précitée est postérieure à la décision du Département fédéral sur l'opposition et elle a été conclue en dehors de l'audience de conciliation. Elle constitue une entente directe (partielle) sur l'indemnité d'expropriation, au sens de l'art. 54 al. 1 LEx. Un tel accord est un contrat de droit administratif censé fixer l'indemnité selon les critères de la loi fédérale sur l'expropriation (cf. ATF 101 Ib 277 consid. 6a p. 286). Ce contrat a en principe les BGE 129 II, 420 (427)mêmes effets qu'une décision du juge de l'expropriation. Dans le cas particulier, comme la convention réservait une décision de la Commission fédérale sur "l'estimation de la moins-value de la maison", les parties n'excluaient pas l'allocation aux expropriés d'une indemnité complémentaire à celle, convenue, de 100'000 fr. Ce complément a été arrêté à 30'000 fr. dans le prononcé attaqué.
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Même formée de différents éléments, l'indemnité d'expropriation constitue une unité et le Tribunal fédéral doit apprécier si, globalement, elle a été fixée conformément à l'art. 19 LEx (cf. ATF 129 II 72 consid. 2.6 p. 78; ATF 106 Ib 223 consid. 1 p. 226). Il s'ensuit qu'en cas d'entente directe partielle, le juge n'est pas lié par la qualification donnée par les parties à l'indemnité convenue.
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3.2.2 La convention prévoit la détermination, par la Commission fédérale, de "l'estimation de la moins-value de la maison occasionnée par le passage de la ligne". En interprétant cette clause selon le principe de la confiance, applicable lorsque la réelle et commune intention des parties n'est pas établie (cf. ATF 121 III 495 consid. 5b p. 498), on pourrait en déduire que l'indemnité complémentaire devrait compenser la dépréciation de la partie restante. Les expropriés et l'expropriante auraient alors admis un cas d'application des art. 19 let. b et 22 al. 2 LEx en raison de la perte d'un avantage ("écran protecteur"), en laissant le soin à la Commission fédérale d'estimer cette dépréciation. Quoi qu'il en soit, dès lors que seule une transaction partielle a été conclue, c'est au juge de l'expropriation qu'il appartient désormais d'examiner le fondement de l'indemnité. Cela étant, le choix des parties de traiter séparément d'une part la dépréciation du terrain, réglée par convention, et d'autre part celle du bâtiment, à estimer par la Commission fédérale, est discutable car une appréciation globale des conséquences de l'expropriation sur l'immeuble litigieux s'imposait d'emblée.
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4. Les recourants affirment que la dévaluation de leur immeuble est due au bruit provoqué par la nouvelle ligne électrique ainsi qu'aux BGE 129 II, 420 (428)champs électromagnétiques, lesquels mettraient en danger la santé des habitants de la maison. Dans les deux cas, ils prétendent que les valeurs limites prévues par le droit fédéral de la protection de l'environnement - dans l'ordonnance du 15 décembre 1986 sur la protection contre le bruit (OPB; RS 814.41) ou dans l'ordonnance du 23 décembre 1999 sur la protection contre le rayonnement non ionisant (ORNI; RS 814.710) - seraient dépassées, et ils critiquent les rapports, figurant au dossier de la procédure d'opposition, relatifs à l'évaluation de ces nuisances.
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4.2 La conformité de la nouvelle ligne électrique aux prescriptions de la loi fédérale sur la protection de l'environnement a été examinée dans le cadre de la procédure d'opposition, à savoir dans la décision du DETEC du 22 juin 1998 et dans l'arrêt du Tribunal fédéral du 9 novembre 1999 (1E.14/1998). En outre, elle avait déjà été l'objet de la procédure préalable d'approbation des plans, au cours de laquelle une étude de l'impact sur l'environnement avait été effectuée (cf. arrêt 1E.14/1998, consid. 2c). Du reste, dans le système de la loi fédérale sur l'expropriation, c'est au stade de l'opposition et de la production des prétentions (cf. art. 35 LEx) qu'un exproprié peut présenter des demandes fondées sur l'art. 7 al. 3 LEx. Cette disposition astreint l'expropriant à exécuter les ouvrages propres à mettre le public et les fonds voisins à l'abri des dangers et des inconvénients qu'impliquent nécessairement l'exécution et l'exploitation de son entreprise et qui ne doivent pas être tolérés d'après les règles du droit de voisinage (cf. art. 684 ss CC). De ce point de vue, l'appréciation du caractère excessif ou non des immissions de la nouvelle installation (cf. art. 684 al. 2 CC) s'effectue donc déjà dans la procédure d'opposition.
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En l'espèce, il n'est pas nécessaire de se prononcer à nouveau sur ces questions. Les données de fait sur les nuisances de la ligne électrique, telles qu'elles ressortent du dossier de la procédure BGE 129 II, 420 (429)d'opposition - les indications sur les niveaux des immissions de bruit et des champs électromagnétiques -, ne sont pas sérieusement contestées par les recourants (qui critiquent de manière manifestement non concluante certaines méthodes de mesure ou de calcul). Quant aux griefs, d'ordre formel, tirés d'un prétendu manque d'indépendance ou d'impartialité des auteurs des rapports relatifs aux nuisances, c'est dans la procédure d'opposition qu'ils devaient être soulevés et traités. Le Tribunal fédéral s'est du reste prononcé à ce sujet dans son arrêt 1E.14/1998 du 9 novembre 1999, en écartant les critiques des recourants (consid. 3c et 4b de cet arrêt; cf. aussi arrêt 1E.17/2001 du 10 décembre 2001, consid. 3).
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4.3.1 Dans l'hypothèse où la dépréciation est causée par la perte ou la diminution d'avantages (art. 22 al. 2 LEx), tous les éléments ayant une influence sur la valeur vénale doivent être pris en considération (cf. supra, consid. 3.1.2), y compris les immissions qui sont suffisamment sensibles, sans toutefois être excessives au sens du droit civil ou du droit public (cf. HESS/WEIBEL, op. cit., n. 9 ad art. 22 LEx, p. 340). L'expérience montre que la proximité d'une ligne à haute tension entraîne une baisse des prix du marché foncier, même sans diminution des possibilités de construire prévues par la réglementation d'aménagement du territoire; cela peut dépendre de l'atteinte au paysage, ou encore, selon la jurisprudence, de motifs purement psychologiques, qui sont alors des inconvénients de fait (ATF 102 Ib 348 consid. 3 p. 350). Le survol d'un jardin par des lignes est incontestablement un désavantage, car on peut toujours craindre l'effondrement d'un pylône et la chute d'un conducteur. Le bruit provoqué par la ligne, même s'il n'est pas excessif au sens des normes du droit privé sur les rapports de voisinage (ou de celles du droit public de la protection de l'environnement - cf. infra, consid. 4.3.2), est lui aussi un inconvénient; le propriétaire qui le subit perd un avantage de fait pour sa maison d'habitation. Pour les champs électromagnétiques, la question est plus délicate car il ne s'agit pas d'immissions perceptibles pour les sens. Les expropriés font du reste valoir que ces champs représentent un inconvénient essentiellement parce que, d'après eux, le fait de résider à proximité d'une ligne à haute tension aurait des effets à long terme sur la santé. Il faut donc déterminer, BGE 129 II, 420 (430)dans la situation concrète, si ces champs ont des effets physiques (ou biologiques voire sanitaires) suffisamment évidents pour constituer en eux-mêmes un désavantage, ou si au contraire la crainte de tels effets, non avérés, est simplement une des composantes des inconvénients d'ordre psychologique déjà évoqués.
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D'après la jurisprudence à ce sujet, l'expropriant peut être tenu d'indemniser le propriétaire foncier voisin d'une route nationale, d'une voie de chemin de fer ou d'un aéroport s'il subit, à cause des immissions de bruit de ces installations, un dommage spécial, imprévisible et grave (cf. ATF 129 II 72 consid. 2.1 p. 74 et les arrêts cités). La première de ces conditions cumulatives, celle de la spécialité, est réalisée dès lors que les nuisances sonores ont atteint une intensité excédant le seuil de ce qui est usuel et tolérable; ce seuil correspond aux valeurs limites d'immissions prévues par la législation fédérale sur la protection de l'environnement (ATF 124 II 543 consid. 5a p. 552; ATF 123 II 481 consid. 7c p. 492, 560 consid. 3d/bb p. 568 et les arrêts cités). Cette loi fédérale a pour but, conformément à son art. 1 al. 1, de protéger les hommes (notamment) des atteintes nuisibles et incommodantes. Le bruit est une atteinte visée par la loi (art. 7 al. 1 LPE; RS 814.01). Empêcher les atteintes nuisibles vise à protéger la santé des êtres humains; quant à la lutte contre les atteintes incommodantes, elle tend à préserver le bien-être de la population, qui ne doit pas être gêné de manière sensible (cf. PIERRE TSCHANNEN, Kommentar zum Umweltschutzgesetz [Kommentar USG], art. 1, Zurich 2003, n. 18-19). D'après la loi, les valeurs limites d'immissions sont "applicables à l'évaluation des atteintes nuisibles ou incommodantes" (art. 13 al. 1 LPE); en d'autres termes, un dépassement de ces valeurs signifie, selon l'état de la science et l'expérience, que l'atteinte est nuisible ou incommodante (cf. art. 14 let. b et 15 LPE; ANDRÉ SCHRADE/THEO LORETAN, Kommentar USG, art. 13, Zurich 1998, n. 13; ATF 119 Ib 348 consid. 5b/dd p. 360; cf. également ATF 126 II 399 consid. 4b p. 405). Ces critères du droit de l'environnement servent donc, dans ce domaine, à définir la portée des droits des propriétaires fonciers voisins; c'est là un des points de BGE 129 II, 420 (431)convergence des réglementations de droit public et de droit privé sur la protection contre les immissions excessives (cf. notamment ATF 129 III 161 consid. 2.6 p. 165; ATF 126 III 223 consid. 3c p. 226).
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Les rayonnements ou champs électromagnétiques peuvent, à l'instar du bruit, être considérés comme des immissions "matérielles" au sens de l'art. 684 CC (cf. notamment HEINZ REY, Kommentar zum schweizerischen Privatrecht [Commentaire bâlois], 1998, n. 26 ad art. 684 CC; ARTHUR MEIER-HAYOZ, Commentaire bernois, 1975, n. 178 ad art. 684 CC). Ils tombent également sous le coup de la loi fédérale sur la protection de l'environnement, la définition des atteintes englobant les rayons (art. 7 al. 1 LPE). Les règles des art. 11 ss LPE sur la limitation des nuisances y sont applicables, notamment celles sur les valeurs limites d'immissions (cf. art. 11 al. 1 LPE et art. 14 LPE, cette dernière disposition exprimant selon la jurisprudence des principes généraux s'appliquant également aux rayonnements - ATF 124 II 219 consid. 7a p. 230). Depuis le 1er février 2000, l'ordonnance sur la protection contre le rayonnement non ionisant (ORNI) contient à ce propos des règles précises, qui s'appliquent en particulier aux lignes aériennes de courant alternatif. A priori, en matière d'expropriation de droits de voisinage, il n'y a aucun motif de ne pas appliquer à ces immissions, mutatis mutandis, les règles prévues pour les immissions de bruit.
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L'art. 8 par. 1 CEDH garantit le droit de toute personne au respect de sa vie privée et familiale. Il impose à l'Etat d'adopter des mesures raisonnables et adéquates pour protéger ce droit, notamment quand les nuisances d'une installation polluante ou bruyante diminuent aux alentours la qualité de la vie privée (cf. arrêts de la Cour européenne des droits de l'homme dans l'affaire Powell et Rayner du 21 février 1990, Série A, vol. 172, par. 41, dans l'affaire López Ostra contre Espagne du 9 décembre 1994, Série A, vol. 303-C, par. 51, et dans l'affaire Guerra et autres contre Italie du 19 février 1998, Recueil CourEDH 1998-I p. 210, par. 58). Cela étant, l'art. 8 par. 2 CEDH permet une "ingérence d'une autorité publique dans l'exercice" du droit garanti à l'art. 8 par. 1 CEDH si cette ingérence "constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité BGE 129 II, 420 (432)nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays", notamment. Les mesures prises pour l'approvisionnement du pays en électricité entrent manifestement dans ce cadre. Il faut dès lors, selon la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme, "avoir égard au juste équilibre à ménager entre les intérêts concurrents de l'individu et de la société dans son ensemble" (cf. arrêts Powell et Rayner, López Ostra précités, ibid.). Cette appréciation ou cette pesée des intérêts est intervenue, pour la construction de la ligne électrique litigieuse, à l'occasion de l'approbation des plans et de l'examen des oppositions. Si les droits des propriétaires voisins de l'installation sont compromis, ils peuvent prétendre à une indemnité d'expropriation (pour l'expropriation partielle de leur immeuble ou l'expropriation de droits de voisinage). Le droit fédéral permet ainsi, dans un cas tel que celui des recourants, de tenir compte des exigences de l'art. 8 CEDH (cf. ATF 121 II 317 consid. 5c p. 333; cf. également ATF 126 II 300 consid. 5c p. 315).
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Les valeurs limites d'exposition au bruit de l'industrie et des arts et métiers, selon l'annexe 6 de l'OPB, s'appliquent au bruit produit par les installations de production d'énergie (en allemand: "Energieanlagen") exploitées régulièrement durant une période prolongée (annexe 6 OPB, ch. 1 al. 2), donc au bruit provoqué par la ligne à haute tension litigieuse (cf. arrêt 1E.14/1998 du 9 novembre 1999, consid. 4a). En admettant que le bien-fonds en cause se trouve dans une zone à laquelle le degré de sensibilité au bruit II a été attribué (cf. arrêt 1E.14/1998 du 9 novembre 1999, consid. 4a), les valeurs limites d'immissions déterminantes (niveau Lr) sont de 60 dB(A) le jour et de 50 dB(A) la nuit. Il résulte du rapport d'expertise acoustique que le bruit provoqué par la ligne à haute tension ne dépasse pas ces valeurs sur la parcelle des recourants.
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Dans l'hypothèse d'une perte d'"écran protecteur" entraînant la dépréciation de la partie restante de l'immeuble, les bourdonnements et sifflements qu'évoque la décision attaquée peuvent être considérés comme un inconvénient de fait ou une gêne, peu sensible, que l'immeuble n'aurait pas subi, ou pas de manière aussi perceptible, sans l'expropriation (cf. ATF 109 Ib 298 consid 4a p. 301, où il est aussi question, à propos d'une installation analogue, de nuisances sonores sous forme de crépitements).
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BGE 129 II, 420 (433)S'il faut, au contraire, appliquer les critères de la seule expropriation de droits de voisinage, l'octroi d'une indemnité destinée à compenser le préjudice subi par le propriétaire voisin serait exclu parce que la condition de la spécialité n'est pas satisfaite.
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Les champs magnétiques sont provoqués par le déplacement de charges électriques. Contrairement au champ électrique, le champ magnétique n'apparaît que lorsqu'un appareil électrique est allumé et que le courant passe. Son intensité se mesure en ampères par mètre (A/m); toutefois, dans la recherche et les applications techniques, on utilise généralement une autre grandeur, liée à l'intensité: la densité de flux magnétique (appelée aussi induction magnétique), qui s'exprime en teslas ou plus communément en microteslas (µT). Plus l'intensité du courant est forte, plus le champ magnétique est élevé. Comme dans le cas du champ électrique, le champ magnétique est d'autant plus intense qu'on est proche de la source et il diminue rapidement lorsque la distance augmente. Les matériaux usuels tels que les matériaux de construction ne constituent pas un blindage efficace contre les champs magnétiques.
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Une onde électromagnétique est l'association d'un champ électrique et d'un champ magnétique qui varient dans le temps et se propagent dans l'espace. Un courant alternatif crée un champ variable dans le temps; il change de sens à intervalles réguliers. Dans la plupart des pays européens, pour l'électricité du réseau, ce changement BGE 129 II, 420 (434)de sens s'opère avec une fréquence de 50 Hertz (Hz), soit 50 cycles par seconde; de même, le champ magnétique engendré par ce courant oscille à raison de 50 cycles par seconde. Les champs électromagnétiques variables dans le temps produits par les appareils électriques et les conduites qui les alimentent sont un exemple de champs de fréquence extrêmement basse (champs FEB, ou en anglais: ELF, Extremely Low Frequency - on entend par là les fréquences inférieures à 300 Hz).
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Même en l'absence de tout champ électrique extérieur, le corps humain est le siège de micro-courants dus aux réactions chimiques qui correspondent aux fonctions normales de l'organisme. Les champs électriques de basse fréquence agissent sur l'organisme humain comme sur tout autre matériau constitué de particules chargées. En présence de matériaux conducteurs, les champs électriques agissent sur la distribution des charges électriques présentes à leur surface; ils provoquent la circulation des courants du corps jusqu'à la terre. Les champs magnétiques de basse fréquence font également apparaître à l'intérieur du corps des courants électriques induits dont l'intensité dépend de l'intensité du champ magnétique extérieur. S'ils atteignent une intensité suffisante, ces courants peuvent stimuler les nerfs et les muscles ou affecter divers processus biologiques (les informations ci-dessus sont tirées d'un document publié par l'Organisation mondiale de la santé [OMS/WHO], intitulé "A propos des champs électromagnétiques", document élaboré dans le cadre de son Projet international pour l'étude des champs électromagnétiques [projet international CEM, International EMF Project] - cf. page internet http://www.who.int/peh-emf/about/WhatisEMF/fr/index.html ).
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7.2 Au-delà d'une certaine intensité, les champs électromagnétiques sont susceptibles de déclencher certains effets biologiques. Un effet biologique peut être, ou ne pas être, nocif; en d'autres termes, il peut ou non causer une altération décelable de la santé des personnes exposées et de leur descendance. Un organisme scientifique indépendant, l'ICNIRP (Commission internationale pour la protection contre les rayonnements non ionisants), a été chargé dès 1992 d'étudier les risques potentiels liés aux différents types de rayonnements non ionisants (on entend par là tous les rayonnements et champs du spectre électromagnétique qui n'ont normalement pas assez d'énergie pour provoquer l'ionisation de la matière). Cette Commission a succédé à un groupe émanant d'associations internationales, l'IRPA/INIRC, qui avait entrepris à partir de 1974 BGE 129 II, 420 (435)d'élaborer des documents sur les critères d'hygiène relatifs à ces rayonnements, en collaboration avec la Division d'hygiène de l'environnement de l'OMS. L'IRPA/INIRC avait publié, en 1988 et 1990, des guides sur l'exposition aux champs électromagnétiques hautes fréquences et de fréquence 50/60 Hz. Ces guides ont été remplacés par la publication de l'ICNIRP intitulée "Guide pour l'établissement de limites d'exposition aux champs électriques, magnétiques et électromagnétiques - Champs alternatifs (de fréquence variable dans le temps, jusqu'à 300 GHz)", élaborée en 1998 (pour être diffusée d'abord en anglais) et depuis peu disponible en traduction française (in Cahier de notes documentaires - Hygiène et sécurité du travail, Institut National de Recherche et de Sécurité, Paris 2001; ci-après: le Guide [cf. aussi page internet http://www.icnirp.org/downloads.htm]). Ce Guide a été rédigé à la suite d'une revue qualifiée d'exhaustive de la littérature scientifique publiée; seuls les effets avérés ont été retenus comme fondements pour les valeurs limites d'exposition proposées. Les effets cancérogènes à long terme n'ont pas été considérés comme avérés. Le Guide n'est fondé que sur des effets immédiats sur la santé, tels que la stimulation des muscles ou des nerfs périphériques, les chocs et brûlures provoqués par le contact avec des objets conducteurs, ou encore l'élévation de température des tissus sous l'effet de l'absorption d'énergie liée à l'exposition aux champs électromagnétiques (Guide, p. 21/22). Il précise que l'exposition du corps humain aux champs électriques ou magnétiques basses fréquences n'entraîne généralement qu'une absorption d'énergie négligeable et aucune élévation de température mesurable (ibid., p. 22); l'induction de courants dans les tissus constitue le principal mécanisme d'interaction (ibid., p. 23). Le Guide indique qu'il existe de nombreuses revues bibliographiques des études épidémiologiques portant sur les risques de cancer liés à l'exposition à des champs à la fréquence du réseau (champ ELF), notamment dans les zones d'habitation; l'ICNIRP estime que les résultats de la recherche épidémiologique sur l'exposition aux champs électromagnétiques et le cancer, et en particulier la leucémie de l'enfant, ne sont pas assez assurés, en l'absence du soutien de la recherche expérimentale, pour servir de base scientifique à l'établissement de guides pour la limitation de l'exposition (ibid., p. 23, 25).
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Le Guide de l'ICNIRP fait la distinction entre la limitation de l'exposition professionnelle et la limitation (plus sévère) de l'exposition de la population générale. Il prévoit des restrictions de base et des niveaux de référence. Les restrictions d'exposition de base sont fondées BGE 129 II, 420 (436)sur les effets avérés sur la santé. Quant aux niveaux d'exposition de référence, ils sont fournis à des fins de comparaison avec les valeurs mesurées des grandeurs physiques; le respect de tous les niveaux de référence assure normalement la conformité aux restrictions de base. Toutefois, si les valeurs mesurées sont supérieures aux niveaux de référence, il ne s'ensuit pas nécessairement qu'il y ait dépassement des restrictions de base; une analyse détaillée serait alors nécessaire (Guide, p. 34-35). Le Guide comporte donc un tableau des niveaux de référence pour l'exposition de la population générale à des champs électriques et magnétiques alternatifs (p. 37).
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7.3 Le Conseil fédéral a adopté le 23 décembre 1999 l'ordonnance sur la protection contre le rayonnement non ionisant (ORNI; RS 814.710), laquelle est entrée en vigueur le 1er février 2000. Cette ordonnance contient une annexe 2, fixant des "Valeurs limites d'immissions pour la valeur efficace de grandeurs de champs" (ch. 1.1 de l'annexe 2 ORNI; en allemand: "Immissionsgrenzwerte für Feldgrössen"). Cette liste de valeurs limites d'immissions, en fonction de la fréquence, correspond à celle du Guide précité (niveaux de référence pour l'exposition de la population générale). Ces valeurs - à distinguer des valeurs limites de l'installation, qui ont une autre signification (art. 2 al. 6 ORNI; cf. notamment ATF 126 II 399 consid. 3b p. 403) - doivent être respectées partout où des gens peuvent séjourner (art. 13 al. 1 ORNI). Le rapport explicatif sur l'ORNI, publié en 1999 par l'Office fédéral de l'environnement, des forêts et du paysage, indique du reste que le droit fédéral reprend les valeurs préconisées par l'ICNIRP, le Conseil fédéral ayant décidé de ne pas élaborer des normes nationales propres dans ce domaine (p. 5-6 du rapport explicatif).
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La légalité des valeurs limites d'immissions fixées par cette ordonnance a déjà été admise par le Tribunal fédéral (ATF 126 II 399 consid. 4b p. 405; cf. également arrêt 1A.62/2001 du 24 octobre 2001, consid. 3a non publié à l'ATF ATF 128 I 59). Cela signifie que, selon l'état de la science et l'expérience, ces valeurs représentent le seuil en-deçà duquel le rayonnement ne peut pas être qualifié de nuisible ou incommodant (cf. supra, consid. 4.3.2). Il n'y a aucun motif de réexaminer cette question dans le présent arrêt, les recourants n'invoquant du reste pas de nouveaux éléments à ce sujet. Avant l'adoption de l'ORNI, la jurisprudence se référait déjà aux travaux des organisations internationales, reconnues par la communauté scientifique et l'Organisation Mondiale de la Santé, qui ont élaboré les critères retenus pour la fixation des valeurs limites d'immissions BGE 129 II, 420 (437)(IRPA/INIRC, puis ICNIRP; cf. ATF 124 II 219 consid. 7b p. 230; ATF 117 Ib 28 consid. 4b p. 32; arrêt 1E.14/1998 du 9 novembre 1999, consid. 5b, et les références).
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- intensité du champ électrique: 5000 V/m
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- intensité du champ magnétique: 80 A/m
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- densité du flux magnétique: 100 µT.
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Il ressort du dossier que ces valeurs sont largement respectées dans le bâtiment des expropriés et à proximité directe de celui-ci: moins de 1000 V/m pour l'intensité du champ électrique, et de l'ordre de 4 µT pour la densité du flux magnétique (comme cela a déjà été exposé [supra, consid. 7.1], il est inutile de déterminer au surplus l'intensité du champ magnétique en A/m).
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Il se justifie de déduire du respect des valeurs limites d'immissions, en matière de champs électromagnétiques, les mêmes conséquences qu'en matière de bruit, selon qu'il y a perte d'un avantage particulier ou simple expropriation des droits de voisinage (cf. supra, consid. 6).
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8. La Commission fédérale n'a pas, dans le cas particulier, appliqué la méthode de la différence, qui s'impose quelle que soit l'hypothèse retenue pour l'indemnisation (cf. supra, consid. 3.1.1). Elle n'a pas déterminé la valeur vénale de l'immeuble avant la constitution des servitudes; le dossier ne fait pas état d'investigations à ce sujet (notamment quant aux prix payés dans la région pour des terrains analogues - cf. art. 72 LEx et 48 de l'ordonnance concernant les commissions fédérales d'estimation [RS 711.1]). Elle n'a pas examiné si l'expropriation entraînait une dévaluation de la partie restante de l'immeuble, au sens de l'art. 22 al. 2 LEx - ce qui semble a priori être le cas, vu l'importance de l'emprise sur la parcelle litigieuse et la faible distance séparant les logements des conducteurs de la ligne. Elle n'a pas davantage évalué concrètement l'influence, sur la valeur de l'immeuble, du bruit, des champs électromagnétiques et des autres désagréments éventuels liés à la proximité d'une telle installation. En arrêtant le montant de l'indemnité (complémentaire) ex aequo et bono, la Commission fédérale a renoncé à appliquer les normes du droit fédéral régissant l'estimation et la fixation de l'indemnité d'expropriation, soit principalement l'art. 19 let. b LEx. Elle a ainsi violé le droit fédéral, tout en constatant de BGE 129 II, 420 (438)manière incomplète les faits pertinents. Cela justifie l'admission du recours de droit administratif et l'annulation de la décision attaquée (cf. art. 104 let. a et b OJ). Il convient donc de renvoyer l'affaire à la Commission fédérale pour instruction complémentaire et nouvelle décision (art. 114 al. 2 OJ).
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