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Informationen zum Dokument  BGer 1A.49/2002  Materielle Begründung
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BGer 1A.49/2002 vom 23.04.2003
 
Tribunale federale
 
{T 0/2}
 
1A.49-54/2002 /col
 
Arrêt du 23 avril 2003
 
Ire Cour de droit public
 
Composition
 
MM. les Juges Aemisegger, Président de la Cour
 
et Président du Tribunal fédéral, Nay, Vice-président
 
du Tribunal fédéral, Reeb, Féraud et Catenazzi.
 
Greffier: M. Zimmermann.
 
Parties
 
1A.49/2002
 
Mohammed Sani Abacha, Abuja, Nigéria,
 
Raw Material Development & Trading Company Ltd, Lagos, Nigéria,
 
Technical Management Services Ltd, Kaduna, Nigéria,
 
Allied Network Ltd, Lagos, Nigéria,
 
Sulgrave Holding Inc., Tortola, Iles Vierges Britanniques,
 
Peltora Establishment, Mühlehölz 14, 9490 Vaduz,
 
Olmar Establishment, Mühlehölz 14, 9490 Vaduz,
 
recourants,
 
tous représentés par MMes Bruno de Preux et Pierre de Preux, avocats, rue François Bellot 6, 1206 Genève,
 
1A.50/2002
 
Abba Abacha, Nassarawa Kano, Nigéria,
 
Barven Holding Inc., Tortola, Iles Vierges Britanniques,
 
Blue Rock Properties SA, Tortola, Iles Vierges Britanniques,
 
recourants,
 
tous représentés par MMes Bruno de Preux et Pierre de Preux, avocats, rue François Bellot 6, 1206 Genève,
 
1A.51/2002
 
Tradil Overseas Inc., Panama City, Panama,
 
Hoirie du Général Sani Abacha, soit sa veuve Maryam Abacha et ses fils Mohammed Sani Abacha et Abba Abacha, Nassarawa Kano, Nigéria,
 
Maryam Abacha, Nassarawa Kano, Nigéria,
 
recourants,
 
tous représentés par MMes Bruno de Preux et Pierre de Preux, avocats, rue François Bellot 6, 1206 Genève,
 
1A.52/2002
 
Hoirie de feu Ibrahim Abacha, soit sa mère Maryam Abacha, Nassarawa Kano, Nigéria,
 
Abba Abacha, Nassarawa Kano, Nigéria,
 
recourants,
 
tous deux représentés par MMes Bruno de Preux
 
et Pierre de Preux, avocats, rue François Bellot 6,
 
1206 Genève,
 
1A.53/2002
 
Abubakar Bagudu, Abuja, Nigéria,
 
Madina Trust,
 
Fawnview Ltd, Iles Vierges Britanniques,
 
Eagle Alliance International Inc., Dublin, Eire,
 
agissant par Abubakar Bagudu et Mohammed Sani Abacha,
 
Morgan Procurement, Lagos, Nigéria, agissant par Abubakar Bagudu et Mohammed Sani Abacha,
 
recourants,
 
représentés, s'agissant de Mohammed Sani Abacha,
 
par MMe Bruno de Preux et Pierre de Preux, avocats,
 
rue François Bellot 6, 1206 Genève, et s'agissant des autres recourants, par Me Vincent Jeanneret, avocat, cours de Rive 10, case postale 3054, 1211 Genève 3,
 
1A.54/2002
 
Mecosta Securities Inc.,
 
Fawnview Ltd, Iles Vierges Britanniques,
 
recourantes,
 
toutes deux représentées par Me Vincent Jeanneret, avocat, cours de Rive 10, case postale 3054,
 
1211 Genève 3,
 
contre
 
Office fédéral de la justice, Division des affaires internationales, Section de l'entraide judiciaire internationale, Bundesrain 20, 3003 Berne.
 
Objet
 
entraide judiciaire internationale en matière pénale à la République fédérale du Nigéria
 
recours de droit administratif contre les décisions de l'Office fédéral de la justice du 24 janvier 2002.
 
Faits:
 
A.
 
Le Nigéria est un Etat de l'Afrique de l'Ouest, d'une superficie de 923'773 km2 et peuplé d'environ 126 millions d'habitants. Ancienne colonie britannique, il a accédé à l'indépendance le 1er octobre 1960. En proie à des dissensions internes qui ont atteint leur paroxysme avec la tentative de sécession du Biafra entre 1967 et 1970, le Nigéria a été dirigé par des gouvernements militaires successifs, dont celui du général Olusegun Obasanjo, qui a occupé le pouvoir de 1976 à 1979. Sous son égide, une nouvelle Constitution a été promulguée, l'Etat autrefois unitaire devenant la République fédérale du Nigéria (ci-après: la République fédérale). En 1983, un nouveau coup d'Etat militaire a renversé le pouvoir civil. Le gouvernement a été dirigé par le général Buhari, puis par le général Babangida dès 1985. Le refus de celui-ci d'accepter le résultat pour lui défavorable de l'élection présidentielle du 12 juin 1993 a déclenché une nouvelle agitation qui a conduit le général Sani Abacha à s'emparer du pouvoir le 17 novembre 1993 pour le conserver jusqu'à son décès, le 8 juin 1998. Le 12 juin 1998, le général Abdulsalami Abubakar, chef d'état-major des armées, a pris la tête d'un gouvernement intérimaire, en vue de moraliser la vie publique et d'organiser des élections générales.
 
Le 23 juillet 1998, le gouvernement intérimaire a mis sur pied un groupe d'enquête spécial ("Special Investigation Panel"; ci-après: SIP), placé sous la direction de Peter Gana, conseiller à la sécurité nationale. La mission du SIP était de vérifier si Abacha et ses proches, avaient détourné des fonds publics. Dans l'affirmative, le SIP devait chercher à récupérer ces fonds. En novembre 1998, le SIP a publié un rapport selon lequel Abacha et ses complices (soit notamment Ismaila Gwarzo, ancien conseiller à la sécurité nationale, Anthony Ani, ancien ministre des finances, Abubakar Attiku Bagudu, hommes d'affaires et familier de Sani Abacha, ainsi que Mohammed Abacha, fils de Sani Abacha) auraient distrait à leur profit entre 1994 et 1998 un montant total de 2'263'520'497,03 USD provenant de la Banque centrale du Nigéria. Mohammed Abacha et Bagudu avaient restitué un montant de 625'263'187,19 USD et de 75'306'884,93 GBP.
 
Le 27 février 1999, Olusegun Obasanjo a été élu Président de la République. Son entrée en fonctions a été fixée au 29 mai 1999.
 
Le 26 mai 1999, le gouvernement intérimaire a adopté un décret n° 53 portant sur la confiscation de biens et de fonds détournés au détriment de l'Etat.
 
Le Président Obasanjo a pris ses fonctions le 29 mai 1999. Le 29 octobre 1999, une nouvelle Constitution a été promulguée.
 
B.
 
Le 30 septembre 1999, la République fédérale a annoncé à l'Office fédéral de la police (ci-après: l'Office fédéral) son intention de demander à la Suisse l'entraide judiciaire pour les besoins de l'enquête ouverte à l'encontre des parents et des proches de feu Sani Abacha, accusés d'avoir détourné des fonds importants appartenant à la Banque centrale du Nigéria, par l'émission de chèques bancaires, des ordres de transferts bancaires et des retraits en espèces. Ces prélèvements auraient été effectués sous des prétextes fallacieux. Pour la période allant de 1994 à 1998, le montant total des chèques encaissés aurait atteint 50'465'450 USD et 3'500'000 GBP, celui des transferts bancaires 386'290'169 USD et celui des retraits en espèces 1'131'292'698 USD et 413'150'000 GBP. Une partie de ces fonds auraient été transférés sur des comptes ouverts auprès de banques suisses, soit directement, soit par l'entremise de sociétés. Seraient impliqués dans l'affaire Maryam Abacha, veuve de Sani Abacha, Mohammed Abacha, fils de Sani Abacha, Abdulkadir Abacha, frère de Sani Abacha, Ahmadu Daura et Bagudu, ainsi que Gwarzo. Sous la direction de Kanu Agabi, Procureur général et Ministre de la justice du Nigéria, une enquête avait été ouverte au Nigéria par la "Special Fraud Unit" (ci-après: SFU) contre les personnes indiquées ci-dessus, poursuivies de vol ("theft"), d'abus de confiance ("breach of trust"), de participation à une organisation criminelle ("criminal conspiracy") et de blanchiment d'argent ("money laundering"), actes réprimés par les art. 287, 315 et 97 du Code pénal nigérian, ainsi que par l'art. 29 de la loi sur le blanchiment d'argent ("Money Laundering Act"). Les autorités nigérianes ont indiqué vouloir demander à la Suisse la saisie des comptes et des fonds détournés, en vue de leur restitution ou confiscation au Nigéria.
 
Le 13 octobre 1999, l'Office fédéral, statuant au titre des mesures provisoires selon l'art. 18 de la loi fédérale du 20 mars 1981 sur l'entraide internationale en matière pénale, du 20 mars 1981 (EIMP; RS 351.1), a ordonné la saisie de plusieurs comptes.
 
Le 28 octobre 1999, le Procureur général du canton de Genève, se fondant sur des communications faites en application de la loi fédérale concernant la lutte contre le blanchiment d'argent dans le secteur financier (LBA; RS 955.0) a, dans le même complexe de faits, ordonné l'ouverture d'une information pénale des chefs d'organisation criminelle (art. 260ter CP) et de blanchiment d'argent (art. 305bis CP).
 
Le 20 décembre 1999, le Procureur Agabi et le Conseiller Gana ont adressé à l'Office fédéral, au nom de la République fédérale, une demande d'entraide formelle. Celle-ci reprenait et développait les éléments contenus dans le courrier du 30 septembre 1999. Elle précisait qu'étaient aussi impliqués dans l'affaire Ibrahim et Abba Abacha, tous deux fils de Sani Abacha, Zainab Abacha, fille de Sani Abacha, Bashir Dalhatu, gendre de Sani Abacha, Ali Abacha, frère de Sani Abacha, Ani et les dénommés Yaya Abubakar et Zinna, ainsi que des fonctionnaires et des hommes d'affaires. La demande se référait également à des malversations commises en relation avec des transactions concernant une aciérie et l'achat de vaccins. La demande tendait à la saisie de tous les comptes détenus ou contrôlés par les personnes et sociétés mentionnées dans le courrier du 30 septembre 1999, ainsi que par Bashir Dalhatu, Ani, Ibrahim Abacha, Abba Abacha, Zainab Abacha, Ali Abacha, Daura, Abubakar, Zinna et plusieurs sociétés, et à la remise de toute la documentation relative à ces comptes, dès 1993. A la demande étaient jointes deux notes verbales de l'Ambassade du Nigéria en Suisse, datées du 11 janvier 2000. Selon la note n° 5/00, la réciprocité était garantie. Selon la note n° 6/00, le gouvernement de la République fédérale a assuré que les accusés au Nigéria ne seraient pas soumis à un quelconque traitement portant atteinte à leur intégrité physique, qu'ils seraient déférés devant une cour ordinaire et leurs droits de procédure, notamment ceux découlant du Pacte international du 16 décembre 1966 relatif aux droits civils et politiques (Pacte ONU II; RS 0.103.2), respectés.
 
Le 20 janvier 2000, l'Office fédéral a rendu une décision d'entrée en matière et ordonné le blocage des comptes détenus ou contrôlés par Sani Abacha, Maryam Abacha, Mohammed Abacha, Abdulkadir Abacha, Ibrahim Abacha, Abba Abacha, Ali Abacha, Zainab Abacha, Gwarzo, Dalhatu, Ani, Daura, Bagudu, Abubakar et Zinna, ainsi que par plusieurs sociétés, auprès de divers établissements bancaires. L'Office fédéral a chargé le même Juge d'instruction que celui chargé de la procédure pénale ouverte à Genève de réunir la documentation relative à ces comptes et d'entendre les représentants des établissements bancaires concernés. L'Office fédéral a en outre invité le Juge d'instruction à lui remettre "toute information additionnelle recueillie dans le cadre de sa propre procédure et ayant une utilité potentielle pour répondre à la demande".
 
Le 21 mai 2000, la République fédérale a présenté à l'Office fédéral une demande complémentaire. Se fondant sur des renseignements obtenus dans l'intervalle des autorités luxembourgeoises, les autorités de l'Etat requérant ont signalé que les comptes détenus au Luxembourg avaient été approvisionnés par des virements provenant de comptes non identifiés, ouverts auprès de banques de Zurich et de Genève.
 
Le 20 juillet 2000, l'Office fédéral de la justice (qui a repris dans l'intervalle les tâches dévolues à l'Office fédéral de la police en matière d'entraide, ci-après: l'Office fédéral) a rendu une décision d'entrée en matière et ordonné le blocage des comptes ouverts auprès des établissements bancaires indiqués dans la demande complémentaire. Il a chargé le Juge d'instruction genevois de recueillir la documentation relative à ces comptes et d'entendre les représentants des établissements en question.
 
Les 19 septembre, 8 novembre et 16 novembre 2001, le Juge d'instruction a transmis à l'Office fédéral les documents réunis en exécution de la demande, ainsi que des procès-verbaux d'audition.
 
Après que ses agents se soient déplacés à Genève pour procéder au tri des pièces, l'Office fédéral a rendu, le 24 janvier 2002, cinq décisions de clôture portant sur la transmission de la documentation relative à différents comptes bancaires.
 
La décision n° 1, concernant Mohammed Sani Abacha, se rapporte aux comptes et polices suivants:
 
auprès de la Banque A.________, le compte:
 
1) n°___, dont la société Raw Materials Development and Trading Company Ltd (ci-après: Raw Materials) est la titulaire, Sani Mohammed et Abba Mohammed Sani les ayants droit;
 
auprès de la Banque B.________, les comptes:
 
2) n°___, dont la société Technical Management Services Ltd (ci-après: Technical) est la titulaire, Mohammed Sani et Abba Mohammed Sani les ayants droit;
 
3) n°___, dont la société Allied Network Ltd (ci-après: Allied) est la titulaire, Mohammed Sani et Abba Sani les ayants droit;
 
auprès de la Banque C.________, le compte:
 
4) n°___, dont Sani Mohammed est le titulaire;
 
auprès de la Banque D.________, les comptes:
 
5) n°___, dont la société Sulgrave Holdings Inc. (ci-après: Sulgrave) est la titulaire et Sani Mohammed l'ayant droit;
 
6) n°___, dont Sulgrave est la titulaire;
 
7) n°___, dont Sulgrave est la titulaire;
 
8) n°___, dont la société Fawnview Ltd (ci-après: Fawnview) est la titulaire;
 
auprès de la Banque E.________, le compte:
 
9) n°___, dont Sani Mohamed est le titulaire;
 
auprès de la Banque F.________, le compte:
 
10) n°___, dont la société Mecosta Securities Inc. (ci-après: Mecosta) est la titulaire, Bagudu et Sani Mohammed les ayants droit;
 
auprès de la société G.________, les polices:
 
11) n°___, dont le preneur est la société TNL Trading Est. (ci-après: TNL);
 
12) n°___, dont le preneur était TNL, puis Peltora Establishment (ci-après: Peltora), Mohammed Sani l'ayant droit;
 
13) n°___, dont le preneur était TNL, puis Peltora, et Sani Mohammed l'ayant droit;
 
14) n°___, dont le preneur est la société Olmar Establishment (ci-après: Olmar) et Mohammed Sani l'ayant droit;
 
15) n°___, dont le preneur est Peltora et Mohammed Sani l'ayant droit;
 
16) n°___, dont le preneur est Peltora, et Mohammed Sani l'ayant droit.
 
L'Office fédéral a ordonné en outre la transmission des procès-verbaux relatifs aux auditions de Mohammed Sani Abacha, entendu le 24 mai 2000 à la prison de Lagos où il était incarcéré à cette époque, ainsi que d'employés des banques concernées.
 
La décision n° 2, concernant Abba Abacha, se rapporte aux comptes suivants:
 
auprès de la Banque D.________:
 
17) n°___, dont la société Barven Holding Inc. (ci-après: Barven) est la titulaire;
 
18) n°___, dont Barven est la titulaire;
 
19) n°___, dont Barven est la titulaire;
 
auprès de la Banque C.________:
 
20) n°___, dont le titulaire est Sani Abba Mohammed;
 
auprès de la Banque H.________:
 
21) n°___, ouvert au nom de la société Blue Rock Properties (ci-après: Blue Rock).
 
La décision n° 3, concernant Sani et Maryam Abacha, se rapporte aux comptes suivants:
 
auprès de la Banque J.________:
 
22) n°___, dont la société Tradil Overseas Inc. (ci-après: Tradil) est la titulaire;
 
auprès de la Banque K.________ à Genève:
 
23) n°___, ouvert au nom de Sani et Maryam Abacha.
 
La décision n° 4, concernant Ibrahim Sani Abacha, se rapporte aux comptes suivants:
 
auprès de la Banque D.________ à Zurich:
 
24) n°___, dont Ibrahim Sani et Muhammad Sani Abdu sont les titulaires;
 
auprès de la Banque D.________ à Genève:
 
25) n°___, dont Abba Muhammad Sani et Ibrahim Muhammad Sani sont les titulaires;
 
auprès de la Banque L.________:
 
26) n°___, dont Ibrahim Muhammed Sani et Abba Sani sont les titulaires;
 
27) n°___, dont Sani Abdu Mohammed et Sani Ibrahim sont les titulaires;
 
auprès de la Banque B.________:
 
28) n°___, dont Ibrahim Muhammad et Sani Abba Muhammad sont les titulaires;
 
29) n°___, dont Ibrahim Muhammad et Sani Abdu Muhammad, sont les titulaires.
 
La décision n° 5, concernant Bagudu, se rapporte aux comptes suivants:
 
auprès de la Banque M.________:
 
30) n°___, dont le titulaire est la société Gottardo Trust Company Ltd (ci-après: Gottardo), pour le compte de Medina Trust (ci-après Medina), et Bagudu le fondateur;
 
31) n°___, ouvert au nom de Bagudu;
 
auprès de la Banque N.________:
 
32) n°___, dont la société Eagle Alliance International Ltd (ci-après: Eagle) est la titulaire et Abba Mohammed Sani l'ayant droit ;
 
33) n°___, dont la société Morgan Procurement Corporation (ci-après: Morgan) est la titulaire et Abba Sani Mohammed l'ayant droit;
 
34) n°___, dont Bagudu est le titulaire.
 
La décision n° 5 porte en outre sur la transmission de la documentation relative au compte n° 8, déjà ordonnée selon la décision n° 1, ainsi que sur la remise des procès-verbaux des auditions de Bagudu des 30 septembre et 19 octobre 1999, 26 avril 2000, 1er février, 8 mars, 9 mars, 19 et 20 avril 2001.
 
L'Office fédéral a pris acte du contenu des notes diplomatiques du 11 janvier 2000, considéré que la demande et ses annexes étaient suffisamment précises, la condition de la double incrimination remplie et le principe de la proportionnalité respecté. Il a rappelé en outre le principe de la spécialité.
 
C.
 
Contre ces décisions, six recours de droit administratif ont été formés.
 
Mohammed Sani Abacha, ainsi que Raw Materials, Technical, Allied, Sulgrave, Peltora et Olmar (ci-après: les recourants n°s 1 à 7) s'en prennent à la décision n° 1 et, conjointement, aux décisions des 13 octobre 1999, 20 janvier et 20 juillet 2000 (cause 1A.49/2002; recours n° 1). Abba Abacha, Barven et Blue Rock (ci-après: les recourants n°s 8, 9 et 10) s'en prennent à la décision n° 2 (cause 1A.50/2002; recours n° 2). Tradil, l'hoirie de Sani Abacha (soit Maryam, Mohammed et Abba Abacha) et Maryam Abacha (ci-après: les recourants n°s 11 à 13), s'en prennent à la décision n° 3 (cause 1A.51/2002; recours n° 3). L'hoirie d'Ibrahim Abacha (soit Maryam Abacha) et Abba Abacha (ci-après: les recourants n°s 14 et 8) s'en prennent à la décision n° 4 (cause 1A. 52/2002; recours n° 4). Les recourants demandent principalement l'annulation des décisions qu'ils attaquent. Subsidiairement, ils concluent au renvoi de la cause à l'Office fédéral pour qu'il procède avec eux au tri des pièces saisies. En tout état de cause, ils demandent qu'il soit interdit à l'Etat requérant de faire usage de la documentation litigieuse jusqu'à droit connu. Les recourants se plaignent d'une violation des principes de la bonne foi et de la proportionnalité, ainsi que de la règle de la réciprocité. Ils allèguent qu'une procédure pénale ferait défaut dans l'Etat requérant, que les mesures requises ne seraient pas licites selon le droit nigérian, que les droits fondamentaux, les garanties essentielles de la procédure et la clause de non-discrimination seraient violés au Nigéria. Ils invoquent en outre l'art. 65a EIMP .
 
Bagudu, Medina, Fawnview, Eagle et Morgan (ci-après: les recourants n°s 15 à 19) s'en prennent à la décision n° 5, ainsi qu'à toutes les décisions incidentes antérieures (cause 1A.53/2002; recours n° 5), Mecosta et Fawnview (ci-après: les recourants n°s 20 et 17) à la décision n° 1, ainsi qu'à toutes les décisions incidentes antérieures (cause 1A.54/2002; recours n° 6). A titre préalable, les recourants demandent l'apport des procédures pénales en cours à Genève, à titre principal l'annulation de toutes les décisions qu'ils attaquent. Subsidiairement, ils requièrent que soient transmises uniquement les pièces se rapportant à des faits qui ne seraient pas amnistiés dans l'Etat requérant et qui ne seraient pas en relation avec le paiement de l'aciérie d'Ajaokuta ou l'achat de vaccins. Ils demandent en outre la levée des séquestres et requièrent que l'Office fédéral soit invité à obtenir de l'Etat requérant la restitution de toutes les pièces obtenues dans le cadre des procédures pénales ouvertes à Genève. Les recourants dénoncent le caractère inexact, lacunaire et contradictoire de l'exposé des faits joints à la demande. Ils invoquent les principes de la bonne foi et de la proportionnalité, ainsi que la règle de la réciprocité, et se plaignent d'une violation de l'art. 2 EIMP.
 
D.
 
Le 3 mai 2002, la procédure a été suspendue, des tractations étant en cours entre les recourants et les autorités de l'Etat requérant.
 
Ces pourparlers ayant échoué, la procédure a été reprise le 24 septembre 2002.
 
E.
 
L'Office fédéral conclut au rejet des recours, dans la mesure de leur recevabilité.
 
Dans le cadre d'un second échange d'écritures, les parties ont maintenu leurs conclusions.
 
Le Tribunal fédéral considère en droit:
 
1.
 
Les recours sont dirigés contre cinq décisions connexes rendues pour l'exécution de la même demande d'entraide. Les recours n°s 1 à 4 sont identiques, ainsi que les recours n°5 et 6. Il se justifie de joindre toutes les causes et de statuer par un seul arrêt (cf. ATF 127 V 29 consid. 1 p. 33, 156 consid. 1 p. 157; 123 II 18 consid. 1 p. 20, et les arrêts cités).
 
2.
 
2.1 La Confédération et la République fédérale ne sont pas liées par un traité régissant l'entraide judiciaire en matière pénale. Cette matière est dès lors régie par le droit interne applicable (cf. ATF 113 Ib 257 consid. 2 p. 264; 111 Ib 138 consid. 2 p. 141; 110 Ib 173 consid. 2 p. 176, et les arrêts cités), soit l'EIMP et son ordonnance d'exécution (OEIMP; RS 351.11).
 
2.2 La voie du recours de droit administratif est ouverte contre la décision confirmant la transmission de la documentation bancaire à l'Etat requérant et la saisie de comptes bancaires (cf. art. 25 al. 1 EIMP). Elle est aussi ouverte, simultanément avec le recours dirigé contre la décision de clôture (art. 80d EIMP), contre les décisions incidentes antérieures (art. 80e EIMP).
 
2.3 A qualité pour agir quiconque est personnellement et directement touché par une mesure d'entraide et a un intérêt digne de protection à ce qu'elle soit annulée ou modifiée (art. 80h let. b EIMP).
 
2.3.1 S'agissant de la transmission de la documentation relative aux comptes dont elles sont titulaires, les personnes morales suivantes ont qualité pour agir selon l'art. 80h let. b EIMP, mis en relation avec l'art. 9a let. a OEIMP (cf. ATF 127 II 198 consid 2d p. 205; 126 II 258 consid. 2d/aa p. 260; 125 II 356 consid. 3b/bb p. 362; 123 II 161 consid. 1d/aa p. 164; 122 II 130 consid. 2a p. 132/133): Raw (recourante n° 2) pour le compte n° 1; Technical (recourante n° 3) pour le compte n° 2; Allied (recourante n° 4) pour le compte n° 3; Sulgrave (recourante n° 5) pour les comptes n°s 5, 6 et 7; Peltora (recourante n° 6) pour les polices n°s 12, 13, 15 et 16; Olmar (recourante n° 7) pour la police n° 14; Mecosta (recourante n° 20) pour le compte n° 10; Fawnview (recourante n° 17) pour le compte n° 8; Barven (recourante n° 9) pour les comptes n°s 17, 18 et 19; Blue Rock (recourante n° 10) pour le compte n° 21; Tradil (recourante n° 11) pour le compte n° 22; Medina (recourante n° 16) pour le compte n° 30; Eagle (recourante n° 18) pour le compte n° 32; Morgan (recourante n° 19) pour le compte n° 33.
 
2.3.2 Ont également qualité pour agir les personnes physiques titulaires des comptes visés par les décisions de clôture. Cela concerne Maryam Abacha (recourante n° 13) pour le compte n° 23, ainsi que Bagudu (recourant n° 15) pour les comptes n°s 31 et 34.
 
2.3.3 La jurisprudence reconnaît la qualité pour agir uniquement à la personne (physique ou morale) titulaire du compte dont la documentation doit être remise à l'Etat requérant. L'ayant droit économique du compte n'a en principe pas cette qualité (ATF 122 II 130 consid. 2b p. 132/133). Jusqu'à présent, l'utilisation d'un pseudonyme ou d'un faux nom n'a pas constitué un empêchement à user des voies de droit. Ce point mérite d'être tranché.
 
Certains comptes visés par les décisions attaquées ont été ouverts au nom de trois ressortissants nigérians non identifiés et qui n'ont pas participé à la procédure. Il s'agit des comptes ouverts par les dénommés Sani Mohammed (comptes n°s 4 et 9), Sani Abba Mohammed (compte n° 20), Ibrahim Sani et Muhammad Sani Abdu (compte n° 24), Abba Muhammad Sani et Ibrahim Muhammad Sani (compte n° 25), Ibrahim Muhammed Sani et Abba Sani (compte n° 26), Sani Abdu Mohammed et Sani Ibrahim (compte n° 27), Ibrahim Muhammad et Sani Abba Muhammad (compte n° 28), ainsi que Ibrahim Muhammad et Sani Abdu Muhammad (compte n° 29). Les recourants (spécialement Maryam Abacha comme héritière de son fils Ibrahim, ainsi que Mohammed et Abba Abacha) affirment être titulaires de ces comptes, sans toutefois fournir la moindre explication permettant de vérifier cette assertion. Il est possible que les trois fils de Sani Abacha aient ouvert ces comptes, sur la présentation de pièces d'identité indiquant de faux noms (qui évitaient soigneusement toute référence au nom d'Abacha). Il demeure toutefois à ce propos une incertitude que les recourants n'ont pas levée.
 
Dans la ligne de la jurisprudence qui vient d'être rappelée, il se justifie également de dénier en principe la qualité pour recourir à celui qui se présente comme titulaire d'un compte qu'il aurait ouvert sous un faux nom. La personne qui cache son identité véritable à la banque en produisant de faux documents officiels se place en effet dans la même situation que celui qui, ne voulant pas apparaître, use des services d'un intermédiaire. Il ne convient pas pour le surplus d'accorder une protection juridique étendue selon l'EIMP à celui qui cache son identité véritable à la banque et contourne ainsi les obligations d'identification imposées par la LBA (cf., dans le même contexte de fait, la décision rendue le 30 août 2000 par la Commission fédérale des banques, reproduite in Bulletin de la CFB 41/2000 p. 15 ss; cf. aussi la décision rendue le 25 août 1999 par la Commission de surveillance instituée selon la Convention de diligence des banques, relative au défaut d'identification du titulaire et des ayants droit du compte n° 1). Une exception serait tout au plus envisageable pour celui qui fournit la preuve qu'il est effectivement le titulaire du compte, ainsi qu'une explication sur les motifs pouvant, selon les circonstances, expliquer (voire justifier) l'utilisation d'un faux nom. Or, tel n'est pas le cas en l'espèce.
 
Les recours doivent ainsi être déclarés irrecevables en tant qu'ils concernent les comptes n°s 4, 9, 20, 24, 25, 26, 27, 28 et 29. Les documents y relatifs peuvent être transmis à l'Etat requérant. Maryam Abacha, comme héritière de son fils Ibrahim, n'a pas qualité pour agir pour lui, s'agissant des comptes qu'il aurait ouverts sous un faux nom. Sont également irrecevables, faute de qualité pour agir, le recours n° 1 en tant qu'il est formé par Mohammed Abacha et le recours n° 2 en tant qu'il est formé par Abba Abacha. Le recours n° 4 est entièrement irrecevable. Maryam, Mohammed et Abba Abacha ont qualité pour agir en leur qualité d'hoirs de Sani Abacha, pour ce qui concerne le compte n° 23.
 
2.3.4 TNL, preneur de la police n° 11, n'a pas recouru. Les documents y relatifs peuvent ainsi être transmis à l'Etat requérant. Mohammed Abacha, comme ayant droit, n'a pas qualité pour agir.
 
2.3.5 Le témoin peut s'opposer à la transmission de procès-verbaux relatant ses déclarations, mais uniquement dans la mesure où les renseignements transmis le concernent personnellement ou lorsqu'il se prévaut de son droit de refuser de témoigner (ATF 126 II 258 consid. 2d/bb p. 261; 122 II 130 consid. 2b p. 133; 121 II 459 consid. 2c p. 462; 105 Ib 418 consid. 1 p. 422).
 
Bagudu a qualité pour recourir contre la décision n° 5, en tant que celle-ci porte sur la transmission des procès-verbaux relatant son audition par le Juge d'instruction des 30 septembre, 19 et 20 octobre 1999, 26 avril 2000, 1er février, 8 et 9 mars, 19 et 20 avril 2001.
 
2.4 Les conclusions qui vont au-delà de l'annulation de la décision sont recevables (art. 25 al. 6 EIMP; art. 114 OJ; ATF 122 II 373 consid. 1c p. 375; 118 Ib 269 consid. 2e p. 275; 117 Ib 51 consid. 1b p. 56, et les arrêts cités). Le Tribunal fédéral examine librement si les conditions pour accorder l'entraide sont remplies et dans quelle mesure la coopération internationale doit être prêtée (ATF 123 II 134 consid. 1d p. 136/137; 118 Ib 269 consid. 2e p. 275). Il statue avec une cognition libre sur les griefs soulevés sans être toutefois tenu, comme le serait une autorité de surveillance, de vérifier d'office la conformité de la décision attaquée à l'ensemble des dispositions applicables en la matière (ATF 123 II 134 consid. 1d p. 136/137; 119 Ib 56 consid. 1d p. 59). L'autorité suisse saisie d'une requête d'entraide en matière pénale n'a pas à se prononcer sur la réalité des faits évoqués dans la demande; elle ne peut que déterminer si, tels qu'ils sont présentés, ils constituent une infraction. Cette autorité ne peut s'écarter des faits décrits par l'Etat requérant qu'en cas d'erreurs, lacunes ou contradictions évidentes et immédiatement établies (ATF 126 II 495 consid. 5e/aa p. 501; 118 Ib 111 consid. 5b p. 121/122; 117 Ib 64 consid. 5c p. 88, et les arrêts cités).
 
3.
 
Les recourants n°s 1 à 14 soutiennent qu'aucune procédure pénale ne serait ouverte dans l'Etat requérant. Tel qu'il est formulé, ce grief recoupe celui de violation de la bonne foi soulevé par les recourants n°s 1 à 20, celui tiré de l'amnistie et de la maxime ne bis in idem, soulevé par les recourants n°s 1 à 14, ainsi que celui tiré du caractère inexact, lacunaire et contradictoire de la demande, soulevé par les recourants n°s 15 à 20.
 
3.1 La coopération judiciaire internationale en matière pénale ne peut être accordée, par définition, que pour les besoins d'une procédure pénale (art. 1 al. 3 EIMP; cf. aussi l'art. 1 al. 1 CEEJ). Il faut, en d'autres termes, que l'action pénale soit ouverte dans l'Etat requérant (consid. 7 non publié à l'ATF 126 II 258. N'est pas en discussion ici le cas exceptionnel où l'Office fédéral peut autoriser l'utilisation des renseignements et documents transmis à d'autres fins que l'action pénale selon l'art. 67 EIMP; cf. ATF 128 II 305). Cela n'implique pas nécessairement une inculpation; une enquête préliminaire suffit, pour autant qu'elle puisse aboutir au renvoi d'accusés devant un tribunal compétent pour réprimer les infractions à raison desquelles l'entraide est demandée (ATF 123 II 161 consid. 3a p. 165; 118 Ib 457 consid. 4b p. 460; 116 Ib 452 consid. 3a p. 460/461, et les arrêts cités).
 
3.2 Les recourants prétendent que les investigations du SIP auraient mis un terme aux efforts du gouvernement intérimaire de recouvrer les fonds utilisés sous le régime de Sani Abacha. La procédure conduite par le SFU n'aurait partant plus d'objet.
 
Le SIP avait notamment pour mission d'enquêter au sujet de montants payés par l'Etat pour des contrats qui n'avaient pas encore été exécutés, ou portant sur des prestations au prix trop élevé, ou de montants détournés. Cet organe ad hoc, placé sous l'autorité du conseiller à la sécurité nationale et formé pour partie d'agents de la police nationale, ne relevait ni des autorités judiciaires, ni des autorités administratives (cf. les déclarations faites à la presse internationale le 7 septembre 1998 par le général Abubakar). L'enquête conduite par le SIP ne pouvait ainsi être qualifiée de judiciaire et il n'était pas certain qu'elle eût pu constituer l'étape préliminaire à un renvoi en jugement. En revanche, il n'y a pas de raison de douter que le SFU, comme unité spécialisée de la police nigériane, placée sous la responsabilité directe du Procureur général, soit habilité à soumettre à l'autorité de poursuite pénale des conclusions propres à déclencher l'action pénale au Nigéria. La compétence du Procureur général à ouvrir l'action pénale n'est pas contestable. Au demeurant, comme il n'appartient pas à l'autorité suisse d'examiner la compétence répressive de l'Etat requérant, il ne lui incombe pas davantage de vérifier la compétence procédurale de l'autorité requérante (ATF 114 Ib 254 consid. 5 p. 255, et les arrêts cités), ni de résoudre un éventuel conflit de compétence entre les autorités de l'Etat requérant (arrêt 1A.206/1990 du 12 juin 1991, consid. 2). Le cas de l'abus manifeste, réservé par la jurisprudence (ATF 122 II 134 consid. 7b p. 137; 116 Ib 89 consid. 2c/aa p. 92; 113 Ib 157 consid. 4 p. 164; 105 Ib 294), n'est pas réalisé en l'espèce.
 
3.3 Les recourants prétendent avoir bénéficié du décret n° 53, lequel aurait mis fin définitivement aux poursuites engagées contre eux dans l'Etat requérant.
 
3.3.1 Le gouvernement intérimaire a adopté le décret n° 53 dans les derniers jours de son mandat, pour mettre un terme aux investigations du SIP. Ce texte énumère des biens mobiliers et immobiliers ayant appartenu à Sani Abacha et à Gwarzo, ainsi que des fonds détenus par Sani Abacha, Mohammed Abacha, Abdulkadir Abacha, Gwarzo, Ani, Dalhatu et un dénommé Abdulazeez Arisekola Alao (Annexes I et II au décret). Ces biens et fonds acquis de manière illégale ont été confisqués au profit de l'Etat (art. 1). Les personnes détenant ces biens et fonds étaient invitées à les restituer aux autorités dans un délai de quatorze jours (art. 2), les fonctionnaires du registre foncier et du registre du commerce devant effectuer les mutations nécessaires (art. 3 et 4). Le fait de ne pas se plier ou d'omettre de se plier aux obligations découlant des art. 2, 3 et 4 était passible d'une peine privative de liberté de deux ans (art. 6). Les personnes ayant acquis des biens ou objets visés par le décret et qui les auraient ensuite rétrocédés devaient être indemnisées et mises à l'abri de toute poursuite (art. 5). De même, aucune action civile ("civil proceeding") ne devait être engagée devant les tribunaux à raison d'actes accomplis en relation avec le décret (art. 7).
 
3.3.2 Les recourants visés par le décret ne prétendent pas avoir déféré à l'obligation imposée par l'art. 1 du décret, mis en relation avec ses annexes. De ce point de vue, leur situation diffère de celle de Gilbert Chagoury et Mark Rissar, qui ont passé un accord de restitution avec les autorités de l'Etat requérant, raison pour laquelle ce dernier a précisé à l'Office fédéral, le 1er novembre 1999, que la demande ne les concernait plus. Il n'est pas établi, pour le surplus, que les fonds restitués par Mohammed Abacha et Bagudu au terme des investigations menées par le SIP, couvraient l'entier du dommage allégué par l'Etat requérant. Enfin, le décret garantit l'impunité uniquement sur le plan civil. Il est dès lors douteux que l'art. 7 de ce texte puisse être compris comme excluant toute poursuite pénale contre les personnes qu'il vise.
 
3.3.3 L'ordonnance rendue le 1er octobre 2001 par le Tribunal de première instance de Bruxelles, dont les recourants se prévalent dans leurs répliques, n'y change rien. En effet, le motif pour lequel le juge belge a déclaré irrecevable une mesure de contrainte ordonnée pour les besoins d'une demande d'entraide présentée par le Nigéria a trait essentiellement au fait que les deux Etats concernés ne sont pas liés par un traité d'entraide, ce qui exclut la coopération selon le droit belge. Pour le surplus, le juge belge affirme que le décret n° 53 aurait produit les effets d'une amnistie complète en faveur des consorts Abacha, sans motiver cette assertion.
 
3.4 Selon les recourants, les faits évoqués dans la demande en relation avec l'aciérie d'Ajaokuta ne seraient plus poursuivis dans l'Etat requérant.
 
3.4.1 Le 13 juillet 1979, les autorités de l'Union soviétique de l'époque et la "Nigerian Steel Development Authority" ont conclu un contrat portant sur la construction d'un complexe sidérurgique à Ajaokuta. Le financement de ce projet était assuré par des lettres de change ("bills of exchange") garanties par le gouvernement nigérian. Ces lettres de change ont été honorées, à l'exception de certaines d'entre elles. En 1996, les autorités de la Fédération de Russie qui avait succédé à l'Union soviétique, ont cédé le solde des lettres de change à une société Parnar Shipping Corporation (ci-après: Parnar), laquelle les a revendues à Mecosta, dominée par Mohammed Abacha et Bagudu, pour un prix total de 486'000'000 DEM (soit 26% de la valeur nominale). Le gouvernement nigérian a racheté ces lettres à Mecosta, pour un prix de 972'000'000 DEM (soit le double). Le prix a été acquitté par la Banque centrale du Nigéria sur ordre du Ministre des finances du gouvernement de Sani Abacha. Le 18 mars 1999, la société genevoise Noga Importations et Exportations S.A. (ci-après: Noga) a ouvert action devant la Haute Cour de Londres ("High Court of justice") contre notamment les hoirs de Sani Abacha, Bagudu, Parnar et Mecosta (ci-après: les consorts Abacha), en revendiquant comme sa propriété les fonds provenant des lettres de change cédées par les autorités russes à Parnar. Les prétentions de Noga portaient sur un montant total de 973'009'450,60 DEM. Le 25 juin 1999, le gouvernement nigérian a ouvert parallèlement action devant la même autorité, en exposant avoir été victime d'un détournement de fonds. Il a fixé ses prétentions à 1'250'000'000 DEM. Au titre des mesures provisionnelles, le juge anglais a ordonné des saisies bancaires portant sur 420'000'000 USD. Noga, le gouvernement nigérian et les consorts Abacha ont entamé des pourparlers en vue d'une solution transactionnelle. A cette fin, trois conventions ont été conclues, les 11, 13 et 16 août 1999. La convention du 11 août 1999 a été passée entre Noga (représentée par Nessim Gaon), les consorts Abacha (représentés par Bagudu) et le gouvernement nigérian (représenté par Agabi). Selon cet accord, Mecosta (pour les consorts Abacha) s'est engagée à verser à Noga un montant non précisé; en échange, Noga abandonnait toute prétention à l'égard de Mecosta et du gouvernement nigérian, qui renonçait également à l'action intentée contre les consorts Abacha. La convention du 13 août 1999 a été passée entre le gouvernement nigérian (représenté par Agabi) et les consorts Abacha (représentés par Bagudu). Ceux-ci se sont engagés à verser au gouvernement nigérian un montant de 300'000'000 DEM pour solde de toutes les actions engagées par le gouvernement nigérian à l'encontre des consorts Abacha, en relation ou non avec l'opération d'Ajaokuta. La convention du 16 août 1999 indique qu'elle remplace celle passée le 13 août 1999 entre les mêmes parties. Elle en reprend toutes les clauses à la différence près que le gouvernement nigérian n'a donné quittance que pour les lettres de change émises en relation avec le financement du complexe d'Ajaokuta. La mise en oeuvre de ces accords s'est heurtée à des difficultés: Noga a demandé l'exécution de la convention du 11 août 1999; le gouvernement nigérian s'est prévalu de celle du 16 août 1999, que les consorts Abacha ont considérée comme nulle au regard de celle du 13 août 1999. Dans son jugement du 27 février 2001, le Juge Rix de la Haute Cour de Londres a tenu pour établie l'existence d'un accord entre Noga et les consorts Abacha quant au versement par les seconds d'un montant de 100'000'000 USD à la première (jugement du 27 février 2001, par. 555). L'accord du 11 août 1999 (qui ne mentionne aucun montant) devait être compris comme une déclaration d'intention en vue de conclure une transaction ("agreement to agree"). Partant, il ne liait pas les parties (jugement, par. 583 et 654). En revanche, les consorts Abacha et la République fédérale étaient liés par la convention du 13 août 1999 (jugement, par. 647). Celle-ci avait toutefois été remplacée valablement par celle du 16 août 1999 (jugement, par. 647, 650 et 653). Le Juge Rix a conclu que le litige entre la République fédérale et les défendeurs avait été transigé selon la convention du 16 août 1999 (jugement, par. 652 et 655).
 
3.4.2 Ce jugement, extrêmement détaillé, établit de manière convaincante le caractère effectif et obligatoire de la transaction passée le 16 août 1999. Le versement d'un montant de 300'000'000 DEM a mis un terme définitif à toutes les prétentions soulevées par l'Etat requérant à l'égard de Bagudu et des consorts Abacha en relation avec les lettres de change concernant le complexe sidérurgique d'Ajaokuta. La convention, libellée en anglais, évoque à ce propos un "full and final settlement of the claims made by the Government in this action arising from the Ajaokuta Steel Complex Bills of Exchange". En droit anglo-saxon, le terme "claims" se rapporte aux moyens disponibles pour élever en justice une prétention relative à un droit de toute nature, notamment patrimoniale (cf. Black's Law Dictionary, St Paul, 1991, p. 169, Dahl's Law Dictionary, Buffalo, New York et Paris, 1995, Dictionnaire économique et juridique Navarre, Paris, 1992, p. 347). En passant cette convention avec les consorts Abacha, le gouvernement de l'Etat requérant a expressément renoncé à l'action ouverte devant la "High Court of Justice" de Londres, ainsi qu'à toute autre action similaire dans laquelle il agirait comme demandeur (d'où l'usage du terme "claims") à l'encontre des consorts Abacha. On ne saurait en déduire, comme le font les recourants, que l'Etat requérant aurait abandonné du même coup toute perspective de poursuivre les personnes (qu'il s'agisse des consorts Abacha ou de tiers) soupçonnées d'avoir commis des délits en relation avec la négociation des lettres de change relatives au complexe d'Ajaokuta. Seule la convention du 13 août 1999 donnait aux consorts Abacha une absolution pleine et entière, puisqu'elle se référait aux "claims... or any other action (whether or not related to or arising from the Ajaokuta Steel Complex Bills of Exchange)...". Or, cette convention a été remplacée par celle du 16 août 1999, à propos de laquelle, quoi qu'en disent les recourants n°s 19 à 24, les consorts Abacha ont renoncé à prétendre, devant le juge anglais, qu'elle leur aurait été extorquée (jugement du 27 février 2001, par. 204 et 205).
 
3.4.3 Dans les allégués de fait de leur recours, les recourants n°s 15 à 20 font grand cas des déclarations soi-disant accablantes pour lui que Gana aurait faites devant le Juge Rix. Outre que les recourants ne produisent pas les documents dont ils se prévalent, il convient de relever qu'au terme de l'instruction de la cause, le Juge Rix a apprécié de manière nuancée mais néanmoins positive la force probante du témoignage de Gana (jugement, par. 660 ss, 471, 498), alors qu'il a tenu Bagudu et Mohammed Abacha pour des témoins peu fiables et malhonnêtes ("unreliable and dishonest"; jugement, par. 519 et 536).
 
3.4.4 En conclusion sur ce point, la convention du 16 août 1999 ne fait pas obstacle à des poursuites pénales contre les consorts Abacha (ou des tiers) dans l'Etat requérant, en relation avec les faits concernant l'aciérie d'Ajaokuta. Elle ne s'oppose pas à la transmission des documents bancaires relatifs à cette opération et à la remise des procès-verbaux relatant les déclarations de Bagudu à ce propos.
 
3.5 Les recourants soutiennent que les faits se rapportant à une opération d'acquisition de vaccins ne seraient plus poursuivis dans l'Etat requérant.
 
3.5.1 Selon la demande, Sani Abacha avait nommé son épouse Maryam à la tête d'une institution étatique d'aide à la famille ("Family Support Programme"). Celle-ci avait, en 1995 et 1997, attribué à la société Morgan Procurements Ltd (ci-après: Morgan), un marché portant sur l'acquisition de vaccins pour un montant de 110'000'000 USD, viré sur un compte ouvert à Londres. En fait, les vaccins avaient été acquis pour un montant de 22'000'000 USD et le solde du crédit détourné. Morgan était dominée par les consorts Abacha et Bagudu en était le directeur. La demande indiquait les autres comptes, détenus ou contrôlés par les consorts Abacha, sur lesquels les montants détournés avaient été acheminés.
 
3.5.2 A l'appui de leur grief, les recourants ont produit une note adressée le 6 août 2001 par un collaborateur du Ministère public nigérian à l'inspecteur général adjoint de la police nigériane. L'auteur de ce document a pris position sur un rapport établi par le destinataire au sujet de l'affaire des vaccins. Il a considéré, avec son correspondant, que Morgan avait certes réalisé dans l'opération un profit énorme. La faute en incombait toutefois aux services étatiques qui avaient conclu le contrat en violation des règles applicables aux appels d'offres. Il n'existait pour le surplus pas de preuves que les consorts Abacha aient faussé la procédure. Le collaborateur du Ministère public a partagé la conclusion de son correspondant.
 
Contrairement à ce qu'en disent les recourants, ce document ne signifie pas que les autorités de l'Etat requérant auraient abandonné les poursuites engagées contre les consorts Abacha en relation avec l'opération qui vient d'être décrite. Il exprime tout au plus un avis sur des questions juridiques délicates, relevant du bien-fondé de l'accusation, qu'il n'appartient pas au juge de l'entraide d'examiner de manière détaillée (cf. consid. 2.4 ci-dessus). Le moyen allégué ne fait pas obstacle à ce que les documents bancaires concernant cette opération, ainsi que les procès-verbaux relatant les déclarations de Bagudu à ce propos, soient transmis à l'Etat requérant.
 
3.6 Les recourants se prévalent de décisions rendues par les autorités judiciaires de l'Etat requérant.
 
3.6.1 En août et en septembre 2001, Bagudu et plusieurs sociétés, d'une part, ainsi que Mohammed Abacha et plusieurs sociétés, d'autre part, ont ouvert action notamment contre le gouvernement nigérian et le Procureur général devant la Haute Cour fédérale pour le district d'Abuja ("Federal High Court of Nigeria in the Abuja Judicial Division"). Les demandeurs ont notamment conclu qu'il soit interdit aux autorités de l'Etat requérant de persister dans la demande d'entraide adressée à la Suisse. Les 13 septembre et 8 octobre 2001, statuant à titre provisionnel, la Haute Cour a ordonné la suspension de la procédure d'entraide jusqu'à droit jugé. Elle a pris une décision similaire le 13 novembre 2001 et le 23 janvier 2002. Le 25 janvier 2002, elle a autorisé les demandeurs à notifier aux autorités étrangères (dont l'Office fédéral) l'ordonnance du 13 novembre 2001. Le 11 octobre 2002, la Haute Cour a averti le gouvernement nigérian qu'à défaut de se conformer à l'ordonnance du 13 novembre 2001, ses représentants s'exposaient aux sanctions prévues pour offense à la Cour. Le 3 janvier 2003, les demandeurs ont déposé devant la Haute Cour une déclaration sous serment en vue de faire constater que les autorités nigérianes persistaient à ne pas se plier à l'ordonnance du 13 novembre 2001.
 
3.6.2 Ces documents démontrent que les consorts Abacha ont entrepris des démarches judiciaires pour contester, devant les tribunaux nigérians, la conformité de la procédure d'entraide, au regard des dispositions constitutionnelles et légales applicables dans l'Etat requérant. Il est à noter toutefois, contrairement à ce que semblent prétendre les recourants, que les autorités saisies (en particulier la "Federal High Court" d'Abuja) n'ont pas encore statué au fond. Les décisions mentionnées par les recourants présentent un caractère incident et provisoire. Sans doute l'ordonnance du 13 novembre 2001 enjoint-elle aux autorités de l'Etat requérant de suspendre toutes démarches en relation avec la demande d'entraide adressée à la Suisse. Cette décision n'a cependant pas pour effet de paralyser le cours de l'exécution de la demande en Suisse. On ne saurait sérieusement prétendre qu'une décision rendue par un juge étranger (statuant de surcroît à titre provisionnel, c'est-à-dire sans examen approfondi du mérite des arguments soulevés au fond) puisse être opposable à l'Office fédéral ou à l'autorité d'exécution et de recours. Si les recourants devaient obtenir gain de cause et, dans l'hypothèse la plus favorable pour eux, faire annuler toute la procédure d'entraide dans l'Etat requérant, ils seraient libres de faire valoir un tel argument devant l'autorité de jugement devant laquelle ils seraient renvoyés, le cas échéant. Au demeurant, il n'appartient pas au juge de l'entraide d'arbitrer un conflit de compétence entre les autorités de l'Etat requérant (consid. 3.2 ci-dessus).
 
4.
 
Selon les recourants, une déclaration valable de réciprocité ferait défaut.
 
4.1 En règle générale, il n'est donné suite à une demande étrangère que si l'Etat requérant assure la réciprocité (art. 8 al. 1, première phrase, EIMP). L'Office fédéral requiert une garantie de réciprocité si les circonstances l'exigent (art. 8 al. 1, deuxième phrase, EIMP). Il dispose à cet égard d'un large pouvoir d'appréciation (ATF 110 Ib 173 consid. 3a p. 176). Dans la plupart des cas où, comme en l'espèce, aucun traité ne régit les relations entre la Suisse et l'Etat requérant, une déclaration de réciprocité a été exigée (pour un aperçu de la pratique suivie dans ce domaine, cf. Robert Zimmermann, La coopération judiciaire internationale en matière pénale, Berne 1999, par. 345 n. 144). Selon le principe de la confiance qui imprègne les relations entre Etats, les autorités suisses n'ont pas à vérifier la conformité de la déclaration de réciprocité aux règles de forme du droit étranger, ni la compétence de l'autorité dont émane cette déclaration de réciprocité, sous réserve du cas d'abus manifeste (ATF 110 Ib 173 consid. 3a p. 177; arrêts 1A.217/2002 du 18 novembre 2002, consid. 3.2; 1A.104/1993 du 18 août 1993 consid. 2b et 1A.195/1991 du 19 mars 1992 consid. 1b). L'Office fédéral renonce en outre à l'exigence de la réciprocité notamment lorsque l'exécution de la demande paraît de toute manière s'imposer à raison de la nature de l'acte commis ou de la nécessité de lutter contre certaines formes d'infractions (art. 8 al. 2 let. a EIMP). Cette exception concerne en particulier la répression de la criminalité organisée et les délits économiques (ATF 115 Ib 517 consid. 4b p. 525; 110 Ib 173 consid. 3a p. 176), le blanchissage d'argent (arrêt 1A.142/1990 du 25 septembre 1990 consid. 3b) et la corruption (arrêt 1A.135/1991 du 3 décembre 1991 consid. 2c).
 
4.2 En l'occurrence, l'Etat requérant a produit spontanément une déclaration de réciprocité jointe à la demande d'entraide. Ce document, simple et clair, ne prête à aucune discussion quant à l'engagement pris par l'Etat requérant. Il n'y a également rien à redire au fait que l'assurance de la réciprocité soit exprimée sous la forme, usuelle, d'une note diplomatique (arrêt 1A.135/1991, précité, consid. 2c/bb). Au regard de l'art. 8 al. 2 let. a EIMP et de la jurisprudence qui vient d'être rappelée, l'Office fédéral aurait même pu, sans encourir aucun reproche à cet égard, renoncer purement et simplement à exiger une déclaration de réciprocité de l'Etat requérant si celui-ci ne l'avait pas présentée de lui-même.
 
5.
 
Les recourants n°s 1 à 14 soutiennent que les mesures de contrainte requises ne seraient pas licites en droit nigérian.
 
5.1 Lorsque la demande porte sur des fouilles, des perquisitions, ainsi que la saisie et la remise d'objets, doit être jointe une attestation établissant leur licéité dans l'Etat requérant (art. 76 let. c EIMP). Cette précaution se justifie par le souci d'éviter que l'Etat requérant puisse obtenir de la Suisse des mesures de contrainte qu'il ne pourrait imposer sur son propre territoire (ATF 123 II 161 consid. 3b p. 166; 118 Ib 457 consid. 5 p. 460/461). Une telle attestation n'est exigée que s'il existe un doute sur la licéité de la mesure dans l'Etat requérant (ATF 123 II 161 consid. 3b p. 166).
 
5.2 L'Etat requérant a joint spontanément à la demande une déclaration sous serment ("affidavit") faite par le Ministre de la justice et procureur général, selon laquelle le Président de la République est compétent, au regard de la législation sur le blanchiment d'argent et sur les banques, pour ordonner la saisie de comptes bancaires ayant servi à la commission de faits de blanchiment. Les recourants soutiennent toutefois que la loi bancaire en question aurait été abrogée le 29 mai 1999. Ils se fondent à cet égard sur un avis de droit établi par le Juge Mamman Nasir. Celui-ci conclut que le décret sur lequel se fondent les autorités de l'Etat requérant aurait été abrogé par le décret n° 63 édicté en 1999. Il cite ce texte sans toutefois en produire de copie en annexe à son avis, empêchant ainsi la vérification de l'élément décisif de ce document. A cela s'ajoute que le Juge Nasir est lié au clan Abacha. Il a dirigé le comité pour la réélection de Sani Abacha. A ce titre, selon le rapport du SIP, il avait reçu de Gwarzo un véhicule automobile payé par des fonds détournés et dont la confiscation a été ordonnée. Cette circonstance jette un doute sur l'impartialité de l'expert mis en oeuvre par les recourants.
 
6.
 
Les recourants invoquent l'art. 2 EIMP en alléguant qu'ils seraient exposés à de mauvais traitements s'ils étaient détenus au Nigéria (art. 2 let. d EIMP) et au risque de violation de leurs droits pocéduraux garantis par l'art. 14 du Pacte ONU II (art. 2 let. a EIMP). Les recourants n°s 1 à 14 se prévalent en outre de l'art. 2 let. b EIMP, à teneur duquel la demande est irrecevable s'il y a lieu d'admettre que la procédure dans l'Etat requérant tend à poursuivre une personne en raison de ses opinions politiques, de son appartenance à un groupe social déterminé, de sa race, de sa confession ou de sa nationalité. Seules les personnes physiques sont habilitées à soulever ces griefs, à l'exclusion des personnes morales (ATF 126 II 258 consid. 2d/aa p. 260; 125 II 356 consid. 3b/bb p. 362; 115 Ib 68 consid. 6 p. 86/87).
 
6.1 L'art. 2 EIMP a pour but d'éviter que la Suisse prête son concours, par le biais de l'entraide judiciaire ou de l'extradition, à des procédures qui ne garantiraient pas à la personne poursuivie un standard de protection minimal correspondant à celui offert par le droit des Etats démocratiques, défini en particulier par la CEDH ou le Pacte ONU II, ou qui heurteraient des normes reconnues comme appartenant à l'ordre public international (ATF 126 II 324 consid. 4a p. 326; 125 II 356 consid. 8a p. 364; 123 II 161 consid. 6a p. 166/167, 511 consid. 5a p. 517, 595 consid. 5c p. 608; 122 II 140 consid. 5a p. 142). La Suisse elle-même contreviendrait à ses obligations internationales en extradant une personne à un Etat où il existe des motifs sérieux de penser qu'un risque de traitement contraire à la CEDH ou au Pacte ONU II menace l'intéressé (ATF 126 II 258 consid. 2d/aa p. 260; 125 II 356 consid. 8a p. 364; 123 II 161 consid. 6a p. 167, 511 consid. 5a p. 517; 121 II 296 consid. 3b p. 298/299). Comme cela résulte du libellé de l'art. 2 EIMP, cette règle s'applique à toutes les formes de coopération internationale, y compris l'entraide (ATF 125 II 356 consid. 8a p. 364; 123 II 595 consid. 5c p. 608). L'examen des conditions posées par l'art. 2 EIMP implique un jugement de valeur sur les affaires internes de l'Etat requérant, en particulier sur son régime politique, sur ses institutions, sur sa conception des droits fondamentaux et leur respect effectif, et sur l'indépendance et l'impartialité du pouvoir judiciaire (ATF 126 II 324 consid. 4a p. 326; 125 II 356 consid. 8a p. 364; 123 II 161 consid. 6b p. 167, 511 consid. 5b p. 517; 122 II 373 consid. 2a p. 376/377, et les arrêts cités). Le juge de la coopération doit faire preuve à cet égard d'une prudence particulière. Il ne suffit pas que la personne accusée dans le procès pénal ouvert dans l'Etat requérant se prétende menacée du fait d'une situation politico-juridique spéciale; il lui appartient de rendre vraisemblable l'existence d'un risque sérieux et objectif d'une grave violation des droits de l'homme dans l'Etat requérant, susceptible de la toucher de manière concrète (ATF 125 II 356 consid. 8a p. 364; 123 II 161 consid. 6b p. 167, 511 consid. 5b p. 517; 122 II 373 consid. 2a p. 377, et les arrêts cités). Peut se prévaloir de l'art. 2 EIMP la personne dont est demandée l'extradition (ATF 123 II 511) ou le transfèrement (ATF 123 II 175). Lorsque l'Etat requérant demande l'entraide judiciaire et notamment la remise de documents bancaires, peut invoquer l'art. 2 EIMP l'accusé se trouvant sur le territoire de l'Etat requérant (ATF 125 II 356 consid. 8b p. 365; 123 II 161) et qui peut démontrer être concrètement exposé au risque de mauvais traitements ou de violation de ses droits de procédure (ATF 126 II 324 consid. 4e p. 328). En revanche, n'est pas recevable à se plaindre de la violation de l'art. 2 EIMP celui qui se trouve à l'étranger ou qui réside sur le territoire de l'Etat requérant sans y courir aucun danger (ATF 126 II 324 consid. 4e p. 328; 125 II 356 consid. 8b p. 365).
 
6.2 Bagudu ne se trouve pas au Nigéria et rien ne laisse présager qu'il veuille y retourner, du moins en l'état actuel des choses. Il ne prétend pas, de surcroît, faire l'objet d'une demande d'extradition de la part des autorités nigérianes. Cela exclut qu'il puisse soulever le grief tiré de l'art. 2 EIMP (ATF 125 II 356 consid. 8b p. 365). Mohammed Abacha, dans un premier temps détenu à la prison de Kirikiri pour un autre motif que les faits à l'origine de la demande, a, dans l'intervalle, été remis en liberté. Il a été assigné à résidence, sous une surveillance étroite. Ni lui, ni Maryam Abacha, ni Abba Abacha n'ont été, en l'état de la procédure ouverte dans l'Etat requérant, inculpés, accusés ou mis en détention préventive. Aucun d'entre eux n'expose courir un risque concret d'atteinte à la vie ou à l'intégrité physique de la part des autorités nigérianes. Ils ne se plaignent pas davantage d'être l'objet d'une procédure pénale ne respectant pas les exigences minimales du Pacte ONU II. Ces éléments pourraient justifier de leur dénier, en l'état, le droit d'invoquer l'art. 2 EIMP. Cela étant, il est possible que les développements de l'enquête puissent conduire à l'ouverture d'une procédure formelle à l'encontre de Maryam Abacha, de Mohammed Abacha ou d'Abba Abacha - c'est au demeurant précisément le but de l'entraide demandée - et que l'un ou l'autre d'entre eux soit arrêté et placé en détention. Cette perspective justifie, compte tenu des circonstances spéciales de l'affaire, d'admettre que ces trois recourants sont recevables à se prévaloir de l'art. 2 EIMP (cf. les arrêts 1A.90/2000 du 19 juin 2000, consid. 4a, 1A.212/2000 du 19 septembre 2000, consid. 3a/cc et 5b, 1A.122/2001 et 1A.124/2001 du 28 mars 2002).
 
6.3 La personne visée par la demande et qui soulève le grief de violation de l'art. 2 let. b EIMP ne peut se borner à dénoncer une situation politico-juridique particulière; il lui appartient de rendre vraisemblable l'existence d'un risque sérieux et objectif d'un traitement discriminatoire prohibé (ATF 123 II 161 consid. 6b p. 167, 511 consid. 5b p. 517; 122 II 373 consid. 2a p. 377, et les arrêts cités).
 
En l'espèce, les recourants se limitent à dire que la procédure ouverte dans l'Etat requérant s'inscrirait dans le cadre d'un règlement de comptes, visant à éliminer de la scène politique les tenants de l'ancien régime. Hormis cette affirmation générale - qui ne suffit pas pour admettre que l'on se trouverait dans un cas d'application de l'art. 2 let. b EIMP (cf. ATF 115 Ib 68 consid. 5a p. 85; 109 Ib 317 consid. 16c p. 338/339) - les recourants n'apportent aucun élément concret laissant à supposer qu'ils seraient poursuivis pour des motifs cachés, ayant trait à leurs opinions politiques, à leur appartenance à un groupe social déterminé, à leur race, leur confession ou leur nationalité.
 
6.4 Les recourants dénoncent la situation des droits de l'homme au Nigéria. Ils se prévalent dans ce contexte notamment des art. 7, 9, 10 et 14 du Pacte ONU II, entré en vigueur pour le Nigéria le 29 octobre 1993.
 
6.4.1 La République fédérale est une fédération de trente-six Etats, auxquels il faut ajouter le territoire de la capitale fédérale, Abuja (art. 2 par. 2 Cst./NG). Les pouvoirs sont séparés. Le pouvoir législatif est exercé par un Parlement composé du Sénat et de la Chambre des représentants (art. 4 et 47 à 89 Cst./NG). Le pouvoir exécutif est confié au Président (art. 5 par. 1 Cst./NG), le pouvoir judiciaire aux tribunaux (art. 6 par. 1 Cst./NG). La dignité humaine est garantie (art. 17 par. 2 let. a et 34 par. 1 Cst./NG). La torture et les traitements inhumains ou dégradants sont interdits (art. 34 par. 1 let. a Cst./NG). Nul ne peut être privé de sa liberté personnelle, sous réserve de l'exécution d'une peine prononcée par un tribunal (art. 35 par. 1 let. a Cst./NG) ou de la détention préventive (art. 35 par. 1 let. c Cst./NG). La personne arrêtée ou détenue a le droit de se taire (art. 35 par. 2 Cst./NG), de se voir notifier dans les vingt-quatre heures, dans une langue qu'elle comprend, la communication écrite des motifs de son arrestation (art. 35 par. 3 Cst./NG) et d'être jugée à bref délai (art. 35 par. 4 Cst./NG). La présomption d'innocence est garantie (art. 36 par. 5 Cst./NG). L'accusé a le droit d'être informé des charges retenues contre lui, de disposer des moyens de préparer sa défense; de se défendre lui-même ou de désigner un défenseur de son choix; de poser des questions aux témoins; de disposer gratuitement d'un interprète s'il ne comprend pas la langue de l'audience (art. 36 par. 6 Cst./NG). La sphère privée est protégée, ainsi que le secret du domicile et de la correspondance (art. 37 Cst./NG). Sont également garanties la liberté de pensée, de conscience et de religion (art. 38 Cst./NG), la liberté d'expression et d'opinion (art. 39 Cst./NG), la liberté d'association (art. 40 Cst./NG) et la liberté d'établissement (art. 41 Cst./NG). Le pouvoir judiciaire fédéral comprend la Cour suprême, la Haute Cour et la Cour d'appel. Dans chaque Etat et dans le territoire fédéral d'Abuja, il y a une Haute Cour, une Cour d'appel de l'application de la "charia" (loi islamique) et une Cour d'appel coutumière (art. 6 par. 5 Cst./NG). Les tribunaux sont indépendants, impartiaux et intègres (art. 17 par. 2 let. e Cst./NG). Ils statuent équitablement et dans un délai raisonnable (art. 36 par. 1 et 4 Cst./NG). Le Président de la République désigne les membres des cours fédérales, sur proposition du Conseil judiciaire national ("National Judicial Council"; celui-ci recueille préalablement l'avis d'une commission ad hoc ["Federal Judicial Service Commission"]; la composition et la compétence de ces organes sont réglées à l'Annexe III à la Constitution); le Sénat doit ensuite confirmer la désignation du Président de ces Cours (cf. art. 231 par. 1, 238 par. 1, 250 par. 1, 256 par. 1, 261 par. 1 et 266 par. 1 Cst./NG). Un système analogue est prévu à l'échelon des Etats, les juges étant désignés par le Gouverneur, sur proposition du Conseil judiciaire national (cf. art. 270 ss Cst./NG). L'Annexe V à la Constitution contient un code de conduite à l'attention de tous les agents publics, y compris les juges.
 
6.4.2 Le Département d'Etat américain a publié, le 4 mars 2002, un rapport relatif à la situation des droits de l'homme au Nigéria en 2001. Malgré les efforts du gouvernement, des problèmes sérieux demeurent dans le domaine des droits de l'homme. L'armée et la police ont procédé à des exécutions extrajudiciaires. Les forces de l'ordre battent régulièrement les manifestants et les détenus. Elles continuent de procéder à des arrestations et à des détentions arbitraires, en violation des garanties offertes par la Constitution. S'il n'y a pas de détenus politiques, la prolongation excessive de la détention préventive pose un problème aigu: les trois quarts des 45'000 prisonniers dénombrés sont en attente de leur jugement. La dureté des conditions de détention, aggravée par la surpopulation carcérale, le défaut de nourriture et de médicaments, a provoqué la mort de nombreux prisonniers. Dans la prison de Kirikiri de Lagos où Mohammed Abacha a été détenu, un prisonnier mourait chaque jour en 1999. Le pouvoir judiciaire, corrompu et inefficace, sous-équipé et sous-payé, n'est pas en mesure d'assurer aux accusés un procès équitable et rapide. Les rapports établis pour 2002 par Amnesty International et Human Rights Watch confirment ce sombre tableau.
 
6.4.3 Sans doute conscientes des difficultés pouvant surgir sous cet aspect, les autorités de l'Etat requérant ont spontanément joint à la demande une note diplomatique (n° 6/00) selon laquelle le gouvernement de la République fédérale a garanti que toutes les personnes accusées dans cette affaire ne seraient pas soumises à un traitement portant atteinte à leur intégrité physique, que leur cause serait déférée devant une juridiction ordinaire et leurs droits de procédure respectés, en particulier ceux garantis par le Pacte ONU II. L'Office fédéral tient cette garantie pour suffisante, ce que contestent les recourants.
 
Compte tenu des conditions très précaires de détention prévalant dans l'Etat requérant et du contexte de l'affaire, il se justifie de faire application de l'art. 80p EIMP et de subordonner l'octroi de l'entraide à des conditions précises. L'Office fédéral a cru pouvoir se dispenser d'une telle procédure, sur le vu de la note diplomatique n° 6/00. Celle-ci est cependant libellée d'une manière assez générale. Il convient d'en faire préciser la portée par l'Etat requérant qui sera invité, par le truchement de l'Office fédéral, à fournir les garanties suivantes, conformément à l'art. 80p al. 1 EIMP, pour le cas où Mohammed Abacha, Abba Abacha ou Maryam Abacha devraient être arrêtés ou renvoyés en jugement pour les faits évoqués dans la demande d'entraide du 20 décembre 1999 et de ses compléments:
 
a) les détenus ne seront soumis à aucun traitement portant atteinte à leur intégrité physique et psychique (art. 7, 10 et 17 Pacte ONU II);
 
b) aucun tribunal d'exception ne pourra être saisi des actes délictueux qui leur sont imputés;
 
c) les prévenus disposeront du temps et des facilités nécessaires pour préparer leur défense (art. 14 par. 3 let. b Pacte ONU II) et du droit de se faire assister et de communiquer avec le défenseur de leur choix (art. 14 par. 3 let. b Pacte ONU II);
 
d) ils auront le droit d'être jugés publiquement, dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial (art. 14 par. 3 let. c Pacte ONU II);
 
e) la présomption d'innocence sera respectée (art. 14 par. 2 Pacte ONU II);
 
f) la représentation diplomatique de la Suisse pourra en tout temps s'enquérir de l'état d'avancement de la procédure pénale, assister aux débats lors du jugement au fond et obtenir un exemplaire de la décision mettant fin au procès; elle pourra rendre visite, en tout temps et sans surveillance, aux accusés; ceux-ci pourront s'adresser à elle en tout temps, que ce soit au stade de l'instruction ou lors de l'exécution d'une peine privative de liberté qui serait infligée.
 
Après le prononcé du présent arrêt, l'Office fédéral communiquera ces conditions à l'Etat requérant, selon les modalités adéquates, en lui impartissant un délai approprié pour déclarer s'il les accepte ou les refuse (art. 80p al. 2 EIMP). L'Office fédéral décidera ensuite si la réponse de l'Etat requérant constitue un engagement suffisant au regard de ces conditions (art. 80p al. 3 EIMP). Cette décision sera attaquable séparément (art. 80p al. 4 EIMP).
 
7.
 
Les recourants se plaignent d'une violation du principe de la proportionnalité.
 
7.1 Ne sont admissibles, au regard de l'art. 64 EIMP, que les mesures de contrainte conformes au principe de la proportionnalité. L'entraide ne peut être accordée que dans la mesure nécessaire à la découverte de la vérité recherchée par les autorités pénales de l'Etat requérant. La question de savoir si les renseignements demandés sont nécessaires ou simplement utiles à la procédure pénale instruite dans l'Etat requérant est en principe laissée à l'appréciation des autorités de poursuite. L'Etat requis ne disposant généralement pas des moyens lui permettant de se prononcer sur l'opportunité de l'administration des preuves déterminées au cours de l'instruction menée à l'étranger, il ne saurait sur ce point substituer sa propre appréciation à celle du magistrat chargé de l'instruction. La coopération internationale ne peut être refusée que si les actes requis sont sans rapport avec l'infraction poursuivie et manifestement impropres à faire progresser l'enquête, de sorte que la demande apparaît comme le prétexte à une recherche indéterminée de moyens de preuve (ATF 122 II 367 consid. 2c p. 371; 121 II 241 consid. 3a p. 242/243; 120 Ib 251 consid. 5c p. 255). Le principe de la proportionnalité empêche aussi l'autorité suisse d'aller au-delà des requêtes qui lui sont adressées et d'accorder à l'Etat requérant plus qu'il n'a demandé (ATF 121 II 241 consid. 3a p. 243; 118 Ib 111 consid. 6 p. 125; 117 Ib 64 consid. 5c p. 68, et les arrêts cités). Au besoin, il lui appartient d'interpréter la demande selon le sens que l'on peut raisonnablement lui donner; rien ne s'oppose à une interprétation large de la requête s'il est établi que toutes les conditions à l'octroi de l'entraide sont remplies; ce mode de procéder évite aussi une éventuelle demande complémentaire (ATF 121 II 241 consid. 3a p. 243). Il incombe à la personne touchée de démontrer, de manière claire et précise, en quoi les documents et informations à transmettre excéderaient le cadre de la demande ou ne présenteraient aucun intérêt pour la procédure étrangère (ATF 126 II 258 consid. 9b/aa p. 260; 122 II 367 consid. 2c p. 371/372). Lorsque la demande vise à éclaircir le cheminement de fonds d'origine délictueuse, il convient d'informer l'Etat requérant de toutes les transactions opérées au nom des sociétés et des comptes impliqués dans l'affaire (ATF 121 II 241 consid. 3c p. 244).
 
7.2 Dès l'instant où, selon eux, les faits concernant l'aciérie d'Ajaokuta et les achats de vaccins ne seraient pas poursuivis au Nigéria, les recourants n°s 15 à 20 concluent à ce que ne soit transmise aucune pièce relative à ces faits. La prémisse de ce raisonnement est erronée (cf. consid. 3.4 et 3.5 ci-dessus), ce qui prive le grief de sa substance.
 
7.3 Dans un premier moyen, les recourants n°s 1 à 14 allèguent n'avoir pu participer au tri des pièces à transmettre.
 
7.3.1 La participation du détenteur au tri des pièces dont l'autorité d'exécution envisage la transmission à l'Etat requérant découle en premier lieu de son droit d'être entendu (ATF 126 II 258 consid. 9b/aa p. 262). Elle est aussi nécessaire pour assurer le respect du principe de la proportionnalité, qui interdit la remise en vrac des documents et informations recueillis. Pour effectuer le tri indispensable, l'autorité d'exécution doit s'appuyer sur le détenteur. Celui-ci, en vertu du principe de la bonne foi régissant les rapports mutuels de l'Etat et des particuliers (art. 5 al. 3 Cst.), est tenu de coopérer avec l'autorité d'exécution afin de prévenir le risque de violation du principe de la proportionnalité (ATF 127 II 151 consid. 4c/aa p. 155/156; 126 II 258 consid. 9b/aa p. 262). Puisqu'il connaît mieux que personne le contenu des documents saisis, il lui incombe d'indiquer à l'autorité d'exécution les pièces qu'il n'y aurait pas lieu de transmettre selon lui, ainsi que les motifs précis qui commanderaient d'agir de la sorte (ATF 126 II 258 consid. 9c p. 264). Il ne suffit pas d'affirmer péremptoirement qu'une pièce est sans rapport avec l'affaire; une telle assertion doit être étayée avec soin (ATF 126 II 258 consid. 9c p. 264). L'obligation de coopérer avec l'autorité d'exécution s'impose au détenteur dès le stade de l'exécution de la demande. Est incompatible avec le principe de la bonne foi le procédé consistant à abandonner le tri des pièces à l'autorité d'exécution, sans lui prêter aucun concours, pour lui reprocher après coup d'avoir méconnu le principe de la proportionnalité (ATF 126 II 258 consid. 9b/aa p. 262). Le droit d'être entendu se dédouble en un devoir de coopération, dont l'inobservation est punie par le fait que le détenteur ne peut plus soulever devant l'autorité de recours les arguments qu'il a négligé de soumettre à l'autorité d'exécution (ATF 126 II 258 consid. 9b p. 262-264).
 
7.3.2 L'un des traits particuliers de l'affaire est que l'Office fédéral a statué lui-même sur l'octroi de l'entraide, comme le permet l'art. 79a EIMP, tout en déléguant à l'autorité cantonale la mission de rassembler les pièces à saisir. Partant, c'est l'Office fédéral (et non le Juge d'instruction) qui doit être tenu comme l'autorité d'exécution chargée de procéder au tri des pièces à remettre, selon ce qui vient d'être dit.
 
7.3.3 En juillet 2001, les recourants se sont mis en rapport avec l'Office fédéral, pour lui demander de pouvoir consulter les pièces dont la transmission était envisagée. Le 31 août 2001, l'Office fédéral leur a répondu qu'il tenait cette mesure pour superflue, les recourants ayant déjà eu l'occasion de consulter le dossier de la procédure pénale parallèle ouverte à Genève. Les recourants sont revenus à la charge le 5 septembre 2001. Le 26 octobre 2001, des agents de l'Office fédéral se sont rendus à Genève pour procéder au tri des pièces, parmi toutes celles recueillies par le Juge d'instruction. Le 16 novembre 2001, l'Office fédéral a communiqué aux recourants une liste de comptes et des procès-verbaux d'audition, qu'il envisageait de transmettre à l'Etat requérant. Il les a invités à consulter ces documents auprès du Juge d'instruction jusqu'au 30 novembre suivant. Le 28 novembre 2001, les mandataires des recourants ont pris connaissance de ces pièces, dont ils ont demandé des copies supplémentaires. Le 30 novembre 2001 cependant, ils ont indiqué à l'Office fédéral vouloir renoncer à procéder au tri, afin de se conformer à la décision prise le 13 novembre 2001 par la Haute Cour d'Abuja (cf. consid. 3.6.1 ci-dessus).
 
Mohammed Abacha et Bagudu ont eu libre accès aux pièces de la procédure pénale parallèle (cf. art. 142 CPP/GE). L'Office fédéral a néanmoins pris la précaution de leur accorder un délai de quinze jours pour consulter les documents dont il envisageait la transmission. Or, les recourants ont attendu l'antépénultième jour de ce délai pour exercer leur droit, auquel ils ont finalement renoncé sous le prétexte de vouloir se conformer à une décision dont on a déjà vu (consid. 3.6.2 ci-dessus) qu'elle n'avait pas pour effet de paralyser la procédure d'entraide en Suisse. Les recourants ont pris là un risque procédural qu'il leur incombe d'assumer.
 
7.4 Dans un deuxième moyen, les recourants reprochent à l'Office fédéral de n'avoir pas procédé au tri des pièces ou, du moins, de n'y avoir pas procédé correctement, comme le démontrerait le fait que des pièces antérieures à 1993 figureraient parmi celles à transmettre. Le grief n'est recevable que pour ce qui concerne les comptes n°s 22 et 23, puisque les recourants ne sont pas habilités à contester la transmission de la documentation relative aux comptes n°s 25, 26, 27, 28 et 29, faute de qualité pour agir (consid. 2.3.3 ci-dessus).
 
Dans sa réponse du 8 novembre 2002, l'Office fédéral semble admettre avoir ordonné la transmission de pièces antérieures à 1993, allant ainsi au-delà de la demande. L'Office fédéral offre de remédier à ce qu'il qualifie d'"inadvertance", avant la transmission effective, avec la participation des recourants. Il n'est cependant pas possible de corriger une décision après qu'elle soit entrée en force. En l'occurrence, il n'appartient pas au Tribunal fédéral comme autorité de recours de procéder lui-même au tri des pièces à transmettre. Le recours n° 3 doit ainsi être admis et la décision n° 3 annulée pour ce qui concerne le tri de la documentation relative aux comptes n°s 22 et 23. Il appartiendra à l'Office fédéral de réexaminer ce point et de statuer à nouveau.
 
8.
 
Les recourants critiquent l'Office fédéral pour n'avoir pas réglé le sort des pièces n'entrant pas dans le champ des décisions de clôture, mais dont l'Etat requérant a déjà pu avoir connaissance dans le cadre des procédures pénales parallèles. A ce propos, les recourants n°s 1 à 14 invoquent l'art. 65a EIMP.
 
8.1 Dans son arrêt du 5 juin 2001 concernant la même affaire (ATF 127 II 198), le Tribunal fédéral a considéré que, lorsque, comme en l'espèce, la même autorité conduit simultanément et parallèlement une procédure pénale et une procédure d'exécution d'une demande d'entraide étroitement connexe, elle doit éviter, dans toute la mesure du possible, de laisser l'Etat requérant, comme partie civile à la procédure pénale nationale, avoir accès, immédiatement et sans contrôle, à des pièces dont il a requis la remise à l'appui de la demande d'entraide, à peine de priver la procédure d'entraide de son objet. Le Tribunal fédéral a admis les recours, traités comme recours de droit administratif, formés par Abacha et Bagudu et renvoyé la cause au Juge d'instruction pour nouvelle décision. Cet arrêt a été notifié à l'Office fédéral, qui n'était pas partie à la procédure, pour son information.
 
Dans un arrêt subséquent du 9 décembre 2001, le Tribunal fédéral a admis partiellement le recours de droit administratif formé par Abacha et Bagudu contre une décision de la Chambre d'accusation du canton de Genève, précisant la portée de la restriction des droits de la République fédérale comme partie civile à la procédure pénale cantonale. Il a réformé la décision attaquée en précisant qu'il était "interdit à la République fédérale d'utiliser, directement ou indirectement, les pièces obtenues dans les cadres des procédures pénales cantonales ouvertes à la suite de la plainte du 24 novembre 1999, pour les besoins de toute procédure pénale, civile ou administrative au Nigéria, ainsi que les besoins de la procédure pénale à l'origine de la demande d'entraide du 20 décembre 1999, et ceci jusqu'à l'entrée en force de la décision de clôture relative à cette demande" (causes 1A.157/2001 et 1A.158/2001).
 
8.2 L'objet de la demande d'entraide est circonscrit aux mesures de contrainte requises pour la bonne exécution de celle-ci. En l'espèce, la demande du 20 décembre 1999 désigne quinze personnes physiques formant le groupe Abacha, ainsi que vingt-cinq sociétés détenues ou contrôlées par les membres de ce groupe. Elle indique, en particulier, un certain nombre de comptes et d'établissements bancaires impliqués dans l'affaire. L'Etat requérant a demandé l'identification et la saisie de ces comptes, la remise de la documentation y relative pour la période postérieure au 31 décembre 1992, l'identification des titulaires, ayants droit et gérants de ces comptes, ainsi que l'interrogatoire des responsables concernés des établissements en question. C'est cet objet précis que les arrêts des 5 juin et 9 décembre 2001 tendent à protéger, en empêchant la divulgation intempestive à l'Etat requérant des renseignements et documents visés par la demande, jusqu'à la fin de la procédure d'entraide. Les décisions de clôture attaquées mettent un terme à la procédure, du moins pour les documents qu'elles concernent. Même si l'Office fédéral ne le dit pas, l'exécution de la demande n'est pas terminée et d'autres décisions devraient suivre celles présentement attaquées. Cela signifie que l'interdiction fixée par les arrêts des 5 juin et 9 décembre 2001 persiste, jusqu'à épuisement complet de la demande.
 
Le grief devant être écarté, il n'y a pas lieu de donner droit aux conclusions préalables des recourants n°s 15 à 20.
 
9.
 
Les recours n°s 1 (1A.49/2002), 2 (1A.50/2002), 5 (1A.53/2002) et 6 (1A.54/2002) sont rejetés dans la mesure où ils sont recevables. Le recours n° 4 (1A.52/2002) est irrecevable. Le recours n° 3 (1A.51/2002) est admis partiellement au sens du considérant 7.4 et, en tant qu'il est formé par Maryam, Mohammed et Abba Abacha, au sens du considérant 6.4.3. La décision n° 3 est annulée sur ces points et la cause renvoyée à l'Office fédéral pour nouvelle décision au sens des considérants 6.4.3 et 7.4. Le recours est rejeté pour le surplus.
 
Les frais sont mis à la charge des recourants pour ce qui concerne les recours n°s 1, 2, 4, 5 et 6 (art. 156 OJ). Des frais réduits sont mis à la charge des recourants pour ce qui concerne le recours n° 3. Il n'y a pas lieu d'allouer des dépens (art. 159 OJ).
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
 
1.
 
Les causes 1A.49/2002, 1A.50/2002, 1A.51/2002, 1A.52/2002, 1A.53/2002 et 1A.54/2002 sont jointes.
 
2.
 
2.1 Les recours dans les causes 1A.49/2002, 1A.50/2002, 1A.53/2002 et 1A.54/2002 sont rejetés dans la mesure où ils sont recevables.
 
2.2 Un émolument judiciaire de 5000 fr. est mis à la charge des recourants pour chacun de ces recours.
 
3.
 
3.1 Le recours dans la cause 1A.51/2002 est admis partiellement au sens du considérant 7.4 et, en tant qu'il est formé par Maryam, Mohammed et Abba Abacha, au sens du considérant 6.4.3. La décision y relative est annulée sur ces points et la cause renvoyée à l'Office fédéral pour nouvelle décision au sens des considérants 6.4.3 et 7.4. Le recours est rejeté pour le surplus.
 
3.2 Un émolument judiciaire de 3000 fr. est mis à la charge des recourants.
 
4.
 
4.1 Le recours dans la cause 1A.52/2002 est irrecevable.
 
4.2 Un émolument judiciaire de 5000 fr. est mis à la charge des recourants.
 
5.
 
Il n'est pas alloué de dépens.
 
6.
 
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des recourants et à l'Office fédéral de la justice (B 114 025/26).
 
Lausanne, le 23 avril 2003
 
Au nom de la Ire Cour de droit public
 
du Tribunal fédéral suisse
 
Le président: Le greffier:
 
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