VerfassungsgeschichteVerfassungsvergleichVerfassungsrechtRechtsphilosophie
UebersichtWho-is-WhoBundesgerichtBundesverfassungsgerichtVolltextsuche...

Informationen zum Dokument  BGer U 119/2006  Materielle Begründung
Druckversion | Cache | Rtf-Version

Bearbeitung, zuletzt am 16.03.2020, durch: DFR-Server (automatisch)  
 
BGer U 119/2006 vom 23.05.2007
 
Tribunale federale
 
{T 7}
 
U 119/06 - svc
 
Arrêt du 23 mai 2007
 
Ire Cour de droit social
 
Composition
 
Mmes et M. les Juges Widmer, Juge présidant, Leuzinger et Frésard.
 
Greffier: M. Métral.
 
Parties
 
Winterthur Assurances, Direction Suisse Romande, chemin de Primerose 11, 1002 Lausanne, recourante, représentée par Me Jean-Claude Schweizer, avocat, avenue de la Gare 1 / Boine 2, 2000 Neuchâtel.
 
contre
 
J.________, intimée, représentée par Me Joël Crettaz, avocat, place Pépinet 4, 1003 Lausanne.
 
Objet
 
Assurance-accidents,
 
recours de droit administratif contre le jugement du Tribunal cantonal des assurances sociales de la République et canton de Genève du 19 janvier 2006.
 
Faits:
 
A.
 
J.________, a subi un accident de la circulation le 23 août 2000. Alors qu'elle roulait à motocyclette sur l'avenue F.________ à E.________, sur la piste de droite, un automobiliste roulant sur la piste de gauche a soudainement bifurqué à droite et l'a renversée en lui coupant la route. Elle a été transportée en ambulance à l'Hôpital Z.________, où les diagnostics de fracture du tiers moyen de la clavicule gauche et de contusion du pied gauche ont été posés. Un traitement conservateur et antalgique a été prescrit. A l'époque, J.________ suivait une formation professionnelle, commencée en octobre 1999, et travaillait parallèlement comme agente de sécurité pour l'entreprise X.________. La Winterthur Assurances (ci-après : la Winterthur), auprès de laquelle elle était assurée contre les accidents, a pris en charge le cas (soins médicaux et indemnités journalières).
 
-:-
 
L'apparition de céphalées fluctuantes, de troubles du sommeil et de la concentration ont motivé un bilan neuro-psychologique par les docteurs A.________ et P.________, le 19 décembre 2000. Ces médecins ont constaté d'importants troubles de l'attention et de la mémoire au travail, de très discrètes difficultés sur le plan des fonctions exécutives et un score élevé dans une échelle d'auto-évaluation de composantes anxio-dépressives. Ce tableau était compatible avec un syndrome post-traumatique modéré; l'étiologie des troubles était partiellement en rapport avec un traumatisme mineur subi par J.________, mais était certainement aggravé par des troubles thymiques et anxieux (possiblement post-traumatiques; rapport du 19 décembre 2000). Le 2 février, 2001, le docteur H.________, médecin traitant de l'assurée, a posé le diagnostic de stress post-traumatique. Le 12 juillet 2001, il a fait état d'un état dépressif majeur, avec troubles de la concentration et céphalées.
 
La Winterthur a confié au docteur R.________, spécialiste en chirurgie, le soin de réaliser une expertise. Dans un rapport du 5 novembre 2001, celui-ci a posé les diagnostics de traumatisme cranio-cérébral, commotion cérébrale, probable syndrome de stress post-traumatique et d'état dépressif réactionnel (à évaluer par expertise psychiatrique), fracture du tiers moyen de la clavicule gauche et pseudarthrose de la clavicule gauche, ainsi que contusion du pied gauche. L'assurée lui a fait part d'une persistance des douleurs dans toute la moitié gauche de la ceinture scapulo-humérale, irradiant jusque dans la colonne cervicale et dorsale. Elle se déclarait changée sur le plan psychique, angoissée, craintive à l'idée de sortir dans la rue, avec des pleurs, des troubles de la concentration et des migraines. Les symptômes s'amendaient grâce à la médication anti-dépressive (Deanxit), mais s'exacerbaient lors de tentatives de sevrage. Le docteur R.________ a notamment constaté une volumineuse tuméfaction au niveau du tiers moyen de la clavicule gauche. Les radiographies à disposition mettaient en évidence une non-consolidation de la fracture de la clavicule et une pseudarthrose, de sorte qu'une intervention chirurgicale avec décortication, greffe et ostéosynthèse était indiquée. Le docteur R.________ proposait également la désignation d'un expert psychiatre. L'assurée était totalement incapable d'exercer sa profession d'agente de sécurité, en raison des atteintes à la santé physique constatées.
 
Le 18 décembre 2001, le docteur W.________ a pratiqué une intervention chirurgicale avec décortication, greffe et ostéosynthèse de la clavicule gauche de l'assurée. Le docteur M.________ a par ailleurs été mandaté par la Winterthur pour la réalisation d'une expertise psychiatrique. Ce médecin a posé le diagnostic de modifications durables de la personnalité, sans précision (F 62.9 selon la Classification statistique internationale des maladies et des problèmes de santé connexes, 10ème éd. 1993 [CIM-10], établie par l'Organisation Mondiale de la Santé [OMS]). Il a attesté une incapacité de travail totale en raison des troubles psychiques de l'assurée (rapport du 4 mars 2002).
 
Du 22 mai 2002 au 17 juillet 2002, J.________ a consulté le docteur B.________, médecin-psychiatre au Centre T.________ de l'Hôpital Z.________, en raison d'un épisode dépressif sévère sans symptômes psychotiques (F 32.2 selon le CIM-10; rapports du 6 janvier 2003). Pour leur part, les docteurs H.________ et W.________ ont considéré, dans des rapports des 30 avril et 17 juin 2002, que sur le plan physique, une reprise du travail pouvait être exigée dès le 1er mai 2002. Le 1er octobre 2002, la Winterthur a rendu une décision par laquelle elle mettait un terme au versement d'indemnités journalières, avec effet dès le 1er juin 2002. Elle considérait que l'assurée ne subissait plus d'incapacité de travail en raison d'atteintes à sa santé physique et que les troubles psychiques dont elle souffrait n'étaient pas en rapport de causalité avec l'accident du 23 août 2000.
 
A la suite d'une opposition de l'assurée, la Winterthur a demandé un complément d'expertise au docteur R.________. Celui-ci a examiné l'assurée le 17 janvier 2003 et attesté une incapacité de travail totale, au moins jusqu'à l'ablation du matériel d'ostéosynthèse (en principe dans le courant de l'année 2004), pour l'exercice de la profession d'agente de sécurité. Cette profession impliquait en effet une pleine possession de ses moyens physiques et comportait trop de risques de nouvelle fracture de la clavicule gauche. En revanche, l'assurée disposait d'une pleine capacité de travail dans une activité adaptée permettant d'éviter des travaux de force, le port de charges et les mouvements répétitifs du membre supérieur gauche (rapport du 21 janvier 2003). A réception de ce rapport, l'assurée et la Winterthur ont signé une convention prévoyant le versement d'indemnités journalières «à 100 %» jusqu'au 31 juillet 2003, puis, à certaines conditions, «à 50 %» jusqu'au 30 septembre 2003. La décision était confirmée pour le surplus, aucun lien de causalité entre les troubles psychiques de l'assurée et l'accident du 23 août 2000 n'étant admis. L'assurée a signé cette convention le 21 mars 2003 tout en précisant, dans une lettre annexe, qu'elle contestait la position de l'assureur-accidents au sujet de ses troubles psychiques.
 
Par lettre du 23 mai 2003, J.________ a informé la Winterthur qu'elle avait dû se rendre en urgence à la Permanence Y.________ à cause d'importantes céphalées et de douleurs vertébrales, et qu'elle se voyait «contraint(e) d'invalider la Convention de règlement du 21 mars 2003». Elle a par la suite produit un rapport du 23 mai 2003 du docteur K.________, spécialiste en neurologie, faisant état d'un syndrome vertébral cervical assez important, sans déficit neurologique. La Winterthur a considéré qu'elle était saisie d'une demande de révision de la convention du 21 mars 2003. Elle a rejeté cette demande dans la mesure où elle était recevable, par décision du 28 juillet 2003, et a versé des indemnités journalières jusqu'au 31 juillet 2003. Le Tribunal cantonal genevois a rejeté le recours formé contre cette décision, par jugement du 14 septembre 2004.
 
Par arrêt du 25 février 2005, le Tribunal fédéral des assurances a annulé le jugement du tribunal cantonal et la décision du 28 juillet 2003 de l'assurance-accidents, et renvoyé la cause à cette dernière pour qu'elle rende une décision sur opposition. Il a considéré qu'au regard de la lettre de l'assurée contestant une partie des termes de la convention du 21 mars 2003, il n'y a avait pas lieu de considérer qu'une transaction avait été valablement conclue, de sorte que l'opposition à la décision du 1er octobre 2002 était toujours pendante.
 
Le 21 avril 2005, la Winterthur a rendu une décision sur opposition par laquelle elle réformait sa décision du 1er octobre 2002 en ce sens que le droit aux indemnités journalières était reconnu jusqu'au 31 juillet 2003.
 
B.
 
J.________ a déféré la cause au Tribunal des assurances sociales du canton de Genève. A l'appui de son recours, elle a produit un rapport d'expertise établi à la demande de l'Office de l'assurance-invalidité du canton de Genève par le docteur V.________, psychiatre et psychothérapeute, le 8 juillet 2005. Ce médecin posait le diagnostic de syndrome post-commotionnel (F07.2 selon le CIM-10), cervicalgies chroniques hautement invalidantes, lombalgies chroniques, trouble dépressif récurrent, actuellement moyen. Il attestait une incapacité de travail totale, dans toute activité professionnelle, en raison principalement du syndrome post-commotionnel.
 
Par jugement du 19 janvier 2006, le Tribunal des assurances sociales du canton de Genève a admis le recours et annulé les décisions rendues les 1er octobre 2002 et 21 avril 2005 par la Winterthur. En substance, il a considéré que l'assurée souffrait des suites d'un traumatisme cranio-cérébral et présentait une incapacité de travail depuis plus de cinq ans, en relation de causalité avec l'accident du 23 août 2000. Il appartiendrait à l'assurance-accidents de statuer à nouveau sur les prestations dues à l'assurée compte tenu de ces atteintes à la santé et de cette incapacité de travail.
 
C.
 
La Winterthur a interjeté un recours contre ce jugement, en concluant à son annulation, sous suite de frais et dépens. L'intimée a conclu au rejet du recours, alors que l'Office fédéral de la santé publique a renoncé à se déterminer.
 
En cours de procédure, la Winterthur a adressé à la juridiction cantonale une demande de révision du jugement du 19 janvier 2006, en produisant divers nouveaux moyens de preuve (rapport d'observation du 26 août 2004 établi par un détective privé à la demande de O.________, société suisse d'assurances [ci-après : O.________]; lettres des 2 et 22 février 2006 de la Zurich, compagnie d'assurances, à la Winterthur). Le Tribunal des assurances sociales du canton de Genève a transmis ces pièces à l'instance fédérale, ainsi que la demande de révision, par acte du 5 juillet 2006. L'intimée a renoncé à déposer une nouvelle détermination.
 
Considérant en droit:
 
1.
 
La loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110) est entrée en vigueur le 1er janvier 2007 (RO 2006 1205, 1242). L'acte attaqué ayant été rendu avant cette date, la procédure reste régie par l'OJ (art. 132 al. 1 LTF; ATF 132 V 393 consid. 1.2 p. 395).
 
2.
 
2.1 Le litige porte sur le droit de l'intimée au paiement d'indemnités journalières pour la période postérieure au 31 juillet 2003, consécutivement à l'accident du 23 août 2000. Le pouvoir d'examen du Tribunal fédéral n'est donc pas limité à la violation du droit fédéral - y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation - mais s'étend également à l'opportunité de la décision attaquée. Le tribunal n'est pas lié par l'état de fait constaté par la juridiction inférieure et peut s'écarter des conclusions des parties, à l'avantage ou au détriment de celles-ci (art. 132 OJ).
 
2.2
 
2.2.1 La production de nouveaux moyens de preuves après l'échéance du délai de recours n'est en principe pas admissible, sauf dans le cadre d'un nouvel échange d'écritures ordonné par le Tribunal fédéral ou si le recourant se prévaut de faits nouveaux importants ou de preuves concluantes qui pourraient justifier la révision de l'arrêt du tribunal (cf. art. 137 let. b OJ, art. 123 al. 2 let. a LTF; ATF 127 V 353 consid. 4a p. 357).
 
2.2.2 A la suite du recours interjeté contre le jugement du Tribunal des assurances sociales du canton de Genève, la recourante ne pouvait plus déposer une demande de révision devant la juridiction cantonale, mais devait produire tous ses moyens de preuves à l'appui de son recours en instance fédérale. Le cas échéant, elle pouvait encore produire des moyens de preuves nouveaux après l'échéance du délai de recours, conformément à la jurisprudence exposée ci-avant (consid. 2.2.1). En l'occurrence, la transmission, par l'instance cantonale, de la demande de révision déposée par la Winterthur aboutit au même résultat. Les nouvelles pièces seront prises en considération, dès lors qu'à défaut, elles pourraient justifier l'entrée en matière sur une demande de révision du présent arrêt.
 
3.
 
3.1 Selon l'art. 6 al. 1 LAA, les prestations d'assurance sont allouées en cas d'accident professionnel, d'accident non professionnel ou de maladie professionnelle. Le droit à des prestations découlant d'un accident assuré suppose d'abord, entre l'événement dommageable de caractère accidentel et l'atteinte à la santé, un lien de causalité naturelle. Cette exigence est remplie lorsqu'il y a lieu d'admettre que, sans cet événement accidentel, le dommage ne se serait pas produit du tout, ou qu'il ne serait pas survenu de la même manière. Savoir si l'événement assuré et l'atteinte à la santé sont liés par un rapport de causalité naturelle est une question de fait que l'administration ou, le cas échéant, le juge examine en se fondant essentiellement sur des renseignements d'ordre médical, et qui doit être tranchée en se conformant à la règle du degré de vraisemblance prépondérante, appliquée généralement à l'appréciation des preuves dans l'assurance sociale (cf. ATF 129 V 177 consid. 3.1 p. 181, 402 consid. 4.3 p. 406).
 
3.2
 
3.2.1 Le droit à des prestations découlant d'un accident assuré suppose, ensuite, un rapport de causalité adéquate. A cet égard, la jurisprudence a posé plusieurs critères en vue de juger du caractère adéquat du lien de causalité entre un accident et les troubles d'ordre psychique développés ensuite par la victime. Elle a tout d'abord classé les accidents en trois catégories, en fonction de leur déroulement : les accidents insignifiants ou de peu de gravité (par. ex. une chute banale); les accidents de gravité moyenne et les accidents graves. Pour procéder à cette classification, il convient non pas de s'attacher à la manière dont l'assuré a ressenti et assumé le choc traumatique, mais bien plutôt de se fonder, d'un point de vue objectif, sur l'événement accidentel lui-même. En présence d'un accident de gravité moyenne, il faut prendre en considération un certain nombre de critères, dont les plus importants sont les suivants :
 
- les circonstances concomitantes particulièrement dramatiques ou le caractère particulièrement impressionnant de l'accident;
 
- la durée anormalement longue du traitement médical;
 
- les douleurs physiques persistantes;
 
- les erreurs dans le traitement médical entraînant une aggravation notable des séquelles de l'accident;
 
- les difficultés apparues au cours de la guérison et des complications importantes;
 
- le degré et la durée de l'incapacité de travail due aux lésions physiques.
 
Tous ces critères ne doivent pas être réunis pour que la causalité adéquate soit admise. Un seul d'entre eux peut être suffisant, notamment si l'on se trouve à la limite de la catégorie des accidents graves. Inversement, en présence d'un accident se situant à la limite des accidents de peu de gravité, les circonstances à prendre en considération doivent se cumuler ou revêtir une intensité particulière pour que le caractère adéquat du lien de causalité soit admis (ATF 115 V 133 consid. 6c/aa p. 140, 403 consid. 5c/aa p. 409).
 
3.2.2 En cas d'atteintes à la santé (sans preuve de déficit organique) consécutives à un traumatisme de type «coup du lapin» à la colonne cervicale, un traumatisme analogue (SVR 1995 UV no 23 p. 67 consid. 2) ou un traumatisme cranio-cérébral, la jurisprudence apprécie le caractère adéquat du rapport de causalité en appliquant, par analogie, les mêmes critères que ceux dégagés à propos des troubles d'ordre psychique, à la différence que l'examen de ces critères est effectué sans faire de distinction entre les composantes physiques ou psychiques : les critères de la gravité ou de la nature particulière des lésions subies, des douleurs persistantes, ainsi que du degré et de la durée de l'incapacité de travail sont déterminants de manière générale, sans référence aux seules lésions ou douleurs physiques (ATF 117 V 359 consid. 6a sv. p. 366 ss; voir également ATF 123 V 98 consid. 2a p. 99; RAMA 2002 no U 470 p. 531 [U 249/01]).
 
Il convient de faire exception à ce principe et d'appliquer la jurisprudence exposée au consid. 3.2.1 ci-avant (ATF 115 V 133 et 403), en distinguant entre atteintes d'origine psychique et atteintes organiques, même en cas de traumatisme de type «coup du lapin», de traumatisme analogue ou de traumatisme cranio-cérébral, lorsque les symptômes appartenant au tableau clinique des séquelles d'un accident de ce type, bien qu'en partie établis, sont relégués au second plan en raison d'un problème important de nature psychique. L'importance de l'atteinte à la santé psychique doit être telle qu'elle a relégué les autres atteintes au second plan, soit immédiatement ou peu après l'accident, soit parce que ces dernières n'ont joué qu'un rôle tout à fait secondaire durant toute la phase de l'évolution, depuis l'accident jusqu'au moment de l'appréciation de la causalité adéquate (ATF 123 V 98 consid. 2a p. 99; RAMA 2002 no U 465 p. 439 consid. 3b [U 273/99]), ou lorsque les troubles psychiques apparus après l'accident n'appartiennent pas au tableau clinique typique d'un traumatisme de type «coup du lapin», d'un traumatisme analogue ou d'un traumatisme cranio-cérébral (y compris un état dépressif), mais constituent plutôt une atteinte à la santé indépendante (RAMA 2001 no U 412 p. 79 consid. 2b [U 96/00]).
 
4.
 
Les premiers juges ont admis une incapacité de travail totale de l'assurée, postérieurement au 31 juillet 2003, en raison de troubles neuropsychologiques attestés notamment par le docteur V.________. Ils ont considéré que ces troubles étaient la conséquence d'un traumatisme cranio-cérébral survenu lors de l'accident du 23 août 2000. La recourante conteste que l'assurée souffre de troubles consécutifs à un traumatisme cranio-cérébral et soutient qu'elle présente plutôt une atteinte à la santé psychique, sans rapport de causalité avec l'accident du 23 août 2000. La recourante conteste par ailleurs la gravité de ces atteintes à la santé et leur influence sur la capacité de travail de l'assurée, compte tenu en particulier des constatations effectuées par le détective privé mandaté par O.________.
 
Pendant la procédure cantonale, la discussion a également porté sur le point de savoir si l'assurée souffrait des suites d'un traumatisme cervical de type «coup du lapin». Les premiers juges l'ont nié et les parties ne remettent pas en cause cet aspect du jugement entrepris, à juste titre au regard des rapports médicaux figurant au dossier. Il n'y a pas lieu de revenir sur ce point, ni sur la question de la causalité naturelle entre l'accident et les symptômes présentés par l'intimée. Au regard des rapports des docteurs R.________ et M.________, notamment, on peut en effet tenir pour probable l'existence d'un rapport de causalité naturelle entre l'accident du 23 août 2000 et les troubles décrits par ces médecins, ce que les parties ne contestent pas. Cela étant, il convient d'examiner la question du rapport de causalité adéquate entre ces troubles et l'accident assuré.
 
5.
 
5.1 Les médecins ayant examiné l'assurée immédiatement après l'accident du 23 août 2000 n'ont pas fait état d'un traumatisme cranio-cérébrale, mais uniquement d'une fracture de la clavicule gauche et de contusions au pied gauche. Par la suite, le docteur S.________ a précisé, dans un rapport du 26 septembre 2000, que l'assurée avait été victime d'un accident de la circulation (chute de moto) sans perte de connaissance. Il a uniquement mentionné des atteintes à la clavicule gauche et au pied gauche. Le 21 novembre 2000, toutefois, il a adressé l'assurée au docteur A.________ en précisant qu'elle avait été victime d'un accident avec perte de connaissance, sans autre explication quand à ce revirement, si ce n'est l'apparition de troubles de l'attention et de la mémoire, ainsi que de céphalées.
 
Le 19 décembre 2000, les docteurs A.________ et P.________ ont constaté des troubles de l'attention et de la mémoire au travail, ainsi que de discrètes difficultés sur le plan des fonctions exécutives. Selon ces médecins, ce tableau était compatible avec un syndrome post-traumatique modéré. Cette constatation ne permet pas de tenir pour établie, au degré de la vraisemblance prépondérante, la survenance d'un traumatisme cranio-cérébral. Il est vrai que les docteurs A.________ et P.________ ont ajouté que l'étiologie des troubles présentés par l'assurée était partiellement en rapport avec le traumatisme mineur qu'elle avait subi, non sans préciser que les symptômes étaient certainement aggravés par des troubles thymiques et anxieux. Mais on ne saurait en tirer de conclusion précise quand à la survenance effective d'un traumatisme cranio-cérébral. Sur ce point, les docteurs A.________ et P.________ sont en effet simplement partis du principe que l'assurée avait subi une perte de connaissance, comme le leur avait indiqué le docteur S.________ dans sa lettre du 21 novembre 2000.
 
Les docteurs H.________, R.________ et M.________ font également état d'un traumatisme cranio-cérébral, en se fondant essentiellement sur les données de l'anamnèse, qui indiquaient une amnésie circonstancielle de l'assurée. Cette amnésie laissait penser que l'assurée avait perdu connaissance probablement pendant plusieurs minutes après l'accident. Une telle perte de connaissance ne ressort toutefois pas du rapport de police; en particulier, ni les policiers arrivés sur les lieux de l'accident, ni les témoins, ni les personnes impliquées dans l'accident n'en ont fait état. Par ailleurs, si l'assurée n'a pas été interrogée sur les circonstances qui ont immédiatement suivi l'accident, elle a en revanche fait une description très précise de l'accident lui-même, ce qui exclut, en tout cas, une amnésie pour la période qui a précédé l'accident.
 
Enfin, il ressort de la plupart des rapports médicaux figurant au dossier que l'assurée souffre de troubles psychiques importants. En décembre 2000 déjà, les docteurs A.________ et P.________ ont souligné l'influence des troubles thymiques et anxieux de l'intimée. Le docteur M.________ a pour sa part précisé que cette dernière avait vécu l'événement du 23 août 2000 de manière totalement traumatisante, comme un effondrement de l'image de femme forte qu'elle s'était forgée, et qu'elle n'avait pu assimiler tant son accident que ses suites de manière adéquate, en raison de son parcours de vie antérieure et de son manque de repères. Le fonctionnement prémorbide avait été exacerbé par l'accident. Les docteurs D.________, U.________ et L.________, consultés par l'assurée en octobre 2003, au Centre T.________ de l'Hôpital Z.________, ont également insisté sur l'existence d'un trouble dépressif récurrent et précisé que la problématique psychiatrique devait être mise au premier plan (rapport du 18 décembre 2003).
 
Dans ces circonstances, la survenance d'un traumatisme cranio-cérébral lors de l'accident du 23 août 2000 n'est pas établie au degré de la vraisemblance prépondérante. Par ailleurs, même si l'on admettait la survenance d'un tel traumatisme, il conviendrait de considérer que les troubles psychiques développés par l'assurée ont rapidement eu une influence importante sur le tableau clinique et l'évolution des symptômes. Dans les deux cas, il s'ensuit que la question de la causalité adéquate doit être tranchée en distinguant entre les composantes physiques et psychiques des atteintes à la santé de l'assurée, conformément à la jurisprudence exposée au consid. 3.2.1 ci-avant.
 
5.2 L'intimée se réfère, certes, au rapport établi par le docteur V.________. Cette expertise ne revêt toutefois qu'une valeur probante limitée. Consulté près de cinq ans après l'accident, le docteur V.________ a constaté d'importants troubles de l'attention et de la mémoire, et a été le témoin d'une importante crise douloureuse lors d'un entretien; il en a conclu à un syndrome post-commotionnel, en excluant d'autres troubles psychiques tels qu'un syndrome de stress post-traumatique, ainsi qu'une simulation ou une hystérie de conversion. Mais alors que le docteur M.________ avait accordé beaucoup d'importance à l'état pré-morbide de l'assurée (carences affectives majeures, avec une mésentente de ses parents, divorce et une agression sexuelle par son père, ainsi qu'un manque de repères lié à des déplacements à l'étranger pendant l'enfance et l'adolescence), le docteur V.________ s'est limité à préciser que l'assurée ne présentait aucune pathologie somatique, aucune maladie psychique ou trouble grave de la personnalité avant la survenance de l'accident du 23 août 2000. Lors de son entretien avec l'assurée, celle-ci avait nié toute agression sexuelle par son père, dont elle avait souligné le caractère aimant sensible et généreux.
 
Le docteur V.________, bien qu'il ait constaté une nette tendance de l'assurée à la rationalisation, avec un contrôle obsessionnel de ses actes et de son discours pour ne pas laisser apparaître angoisses et douleurs, a considéré que rien dans ses dires ne lui permettait de douter de ses déclarations. On doit pourtant constater le contraire, l'assurée ayant également déclaré au docteur B.________, en janvier 2003, qu'elle avait été abusé sexuellement par son père, à l'âge de 11 ans, puis qu'elle s'était enfuie à l'étranger. Ces déclarations pour le moins contradictoires aux différents experts et médecins consultés tendent à confirmer l'existence de troubles psychiques importants, contrairement aux constatations du docteur V.________; à tout le moins, elles mettent sérieusement en doute la valeur probante de ces constatations. Si l'on ne peut pas totalement exclure que les symptômes constatés résultent d'un traumatisme cranio-cérébral et de ses suites, au regard de l'expertise établie par ce médecin, force est de constater qu'il ne s'agit là que d'une hypothèse possible, qui n'est pas établie au degré de vraisemblance requis.
 
6.
 
L'accident du 23 août 2000 revêt un degré de gravité moyen. L'assurée a certainement été très effrayée par cet événement, sans toutefois que l'on puisse le qualifier de particulièrement impressionnant ou dramatique. Les blessures constatées par les médecins des urgences de l'Hôpital Z.________ se limitaient par ailleurs à une fracture de la clavicule gauche et à une contusion du pied gauche. L'évolution a par la suite été défavorable, en raison d'une pseudarthrose et d'une mauvaise consolidation osseuse, au point que le docteur W.________ a dû pratiquer une intervention chirurgicale le 18 décembre 2001. La suite fut sans particularité, si ce n'est la persistance, jusqu'à l'ablation du matériel d'ostéosynthèse, d'une gêne au niveau de l'épaule gauche et de douleurs de contact, ainsi que de difficultés lors de l'utilisation répétée du membre supérieur gauche; les plaintes au niveau de l'épaule n'étaient toutefois que partiellement explicables par une atteinte organique. L'assurée a subi une longue incapacité de travail dans sa profession d'agente de sécurité, en raison des complications médicales et d'une fragilisation de la clavicule. Il convient toutefois de relativiser l'importance de cette incapacité de travail, car l'assurée ne travaillait que le soir et le week-end, parallèlement à ses études. Elle a pu poursuivre ses études quasiment sans interruption, de sorte que celles-ci n'ont été achevées qu'avec quelques mois de retard, sans d'ailleurs que les lésions de la clavicule gauche de l'assurée soient en cause dans ce retard. Eu égard à l'ensemble de ces circonstances, les critères posés par la jurisprudence sont en partie réunis, sans toutefois revêtir une intensité suffisante pour établir une relation de causalité adéquate entre l'accident assuré et les troubles psychiques constatés.
 
7.
 
7.1 La recourante a nié toute responsabilité pour une éventuelle incapacité de travail due à des troubles psychiques ou neuropsychologiques, sans rapport de causalité avec l'accident assuré. Sur ce point, la décision sur opposition du 21 avril 2005 est bien fondée, compte tenu de ce qui précède.
 
7.2 La recourante a mis fin aux paiement des indemnités journalières dès le 1er août 2003, alors même que le docteur R.________ avait attesté une incapacité de travail dans la profession d'agente de sécurité, en raison des séquelles physiques laissées par l'accident, au moins jusqu'à l'ablation du matériel d'ostéosynthèse (prévue pour 2004), voire de manière définitive. Les conclusions de l'expert sur ce point sont probantes et les pièces produites par la Winterthur à l'appui de sa demande de révision devant l'instance cantonale ne contiennent aucune constatation permettant de les mettre en doute. Avant de nier le droit aux prestations pour la période postérieure au 31 juillet 2003, la recourante devait par conséquent examiner dans quelle mesure et à partir de quand il était raisonnablement exigible de l'assurée qu'elle mette à profit sa capacité de travail résiduelle dans une activité professionnelle adaptée, telle que décrite par le docteur R.________, ainsi que le revenu qu'elle pouvait en retirer. La cause lui sera donc retournée à cet effet, dès lors qu'il n'appartient pas au Tribunal fédéral de se prononcer sur cette question, pour la première fois en instance fédérale.
 
8.
 
En tant qu'institution chargée de tâches de droit public, la recourante ne peut pas prétendre de dépens en sa faveur. Par ailleurs, ses conclusions ne sont admises que partiellement, de sorte qu'elle doit une indemnité de dépens réduite à l'intimée (art. 159 al. 1 et 2 OJ). La procédure porte sur l'octroi ou le refus de prestations d'assurance, de sorte qu'elle est gratuite (art. 134 OJ).
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
 
1.
 
Le recours est partiellement admis, en ce sens que le jugement du Tribunal des assurances sociales du canton de Genève du 19 janvier 2006 et la décision sur opposition de la Winterthur Assurances du 21 avril 2005 sont annulés. La cause est renvoyée à la Winterthur Assurances pour qu'elle statue à nouveau sur le droit aux prestations en procédant conformément aux considérants.
 
2.
 
Il n'est pas perçu de frais de justice.
 
3.
 
La recourante versera à l'intimée la somme de 500 fr. (y compris la taxe à la valeur ajoutée) à titre de dépens pour l'instance fédérale.
 
4.
 
Le Tribunal cantonal des assurances sociales de la République et canton de Genève statuera sur les dépens pour la procédure de première instance, au regard de l'issue du procès de dernière instance.
 
5.
 
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tribunal cantonal des assurances sociales de la République et canton de Genève et à l'Office fédéral de la santé publique.
 
Lucerne, le 23 mai 2007
 
Au nom de la Ire Cour de droit social
 
du Tribunal fédéral suisses
 
La Juge présidant: Le Greffier:
 
© 1994-2020 Das Fallrecht (DFR).