BGer 1B_53/2014 | |||
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BGer 1B_53/2014 vom 04.03.2014 | |
{T 0/2}
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1B_53/2014
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Arrêt du 4 mars 2014 |
Ire Cour de droit public | |
Composition
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MM. les Juges fédéraux Merkli, Juge présidant,
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Karlen et Chaix.
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Greffière: Mme Tornay Schaller.
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Participants à la procédure | |
A.________, représenté par Me Nicola Meier, avocat,
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recourant,
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contre
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Ministère public du canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy.
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Objet
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Prolongation de détention provisoire et refus de mise en liberté,
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recours contre l'arrêt de la Cour de justice du canton de Genève, Chambre pénale de recours, du 15 janvier 2014.
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Faits: | |
A. A.________, ressortissant suisse, arrêté le 25 juillet 2013, se trouve en détention provisoire depuis le 28 juillet 2013, sous la prévention d'abus de confiance (art. 138 CP), voire de vol (art. 139 CP). Il est reproché à ce gemmologue de s'être approprié des centaines de pierres précieuses, d'une valeur située entre 50'000 et 100'000 francs, retrouvées à son domicile, au préjudice de la société B.________, son employeur. Selon la plainte pénale que celui-ci a déposée, A.________ aurait en outre été chargé d'un voyage en Allemagne en mai 2013 lors duquel il aurait été attaqué et délesté de pierres précieuses d'une valeur de 2'800'000 francs, remises en vue de présentation et de vente à des clients; rentré en Suisse le 30 mai 2013, il n'aurait pas repris son travail au bénéfice d'un certificat médical et aurait voyagé en Argentine; pendant ce temps, un client aurait soumis pour évaluation un lot de pierres précieuses dont il s'avérerait que certaines provenaient du propre stock de B.________, auquel A.________ aurait eu accès; B.________ aurait découvert au fur et à mesure des investigations l'ampleur du nombre de pierres sorties sans droit de ses locaux.
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Le 13 août 2013, le Ministère public du canton de Genève (ci-après: le Ministère public) a adressé une commission rogatoire aux autorités allemandes, dans laquelle il demande le séquestre des avoirs bancaires du prévenu dans ce pays et de la documentation y relative. Il a aussi sollicité la production de toute information liée à la procédure ouverte en Allemagne à la suite de l'agression dont aurait été victime A.________. Par courriel du 27 novembre 2013, le procureur allemand compétent a expliqué que la demande d'entraide était traitée séparément de sa propre enquête; au sujet de celle-ci, il a indiqué que le butin n'avait pas été retrouvé et que les soupçons à l'encontre du prévenu Papaux se fondaient sur la découverte, dans la voiture utilisée par celui-ci, d'une bêche comportant des particules de verre, ce qui laissait penser que l'intéressé avait lui-même brisé la vitre de la portière par laquelle il affirmait avoir été détroussé par des inconnus. Le procureur allemand a suggéré de déléguer à la Suisse la poursuite et le jugement de cette procédure. Le 3 décembre 2013, le Ministère public a donné son accord de principe.
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B. La détention de l'intéressé a été régulièrement prolongée par le Tribunal des mesures de contrainte du canton de Genève (Tmc), la dernière fois le 23 décembre 2013 pour une durée de deux mois, soit jusqu'au 23 février 2014. Le recours formé par A.________ contre cette décision a été rejeté par arrêt du 15 janvier 2014 de la Chambre pénale de recours de la Cour de justice du canton de Genève (ci-après: la cour cantonale). En substance, la cour cantonale a considéré que les charges étaient suffisantes, que les risques de collusion et de fuite existaient et que le principe de proportionnalité demeurait respecté.
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C. Agissant par la voie du recours en matière pénale, A.________ demande principalement au Tribunal fédéral d'annuler l'arrêt du 15 janvier 2014 et d'ordonner sa mise en liberté provisoire, moyennant deux mesures de substitution, soit le dépôt de ses documents d'identité et le versement d'une caution de 120'000 francs. Il conclut subsidiairement au renvoi de la cause à l'autorité cantonale pour nouvelle décision au sens des considérants. Il requiert aussi l'octroi de l'assistance judiciaire.
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La Cour de justice se réfère aux considérants de son arrêt et renonce à formuler des observations. Le Ministère public conclut au rejet du recours. Il a produit un courrier du Ministère public de Mönchengladbach en Allemagne, reçu le 7 février 2014. Cette nouvelle pièce, qui est postérieure à l'arrêt attaqué, ne peut être prise en compte (art. 99 al. 1 LTF). Le recourant a répliqué par courrier du 26 février 2014.
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Considérant en droit: | |
1. Le recours en matière pénale (art. 78 al. 1 LTF) est en principe ouvert contre une décision relative au maintien en détention provisoire au sens des art. 212 ss CPP. Dès lors que l'acte de procédure litigieux ne met pas un terme à la procédure pénale (art. 90 s. LTF), il s'agit d'une décision incidente prise séparément au sens de l'art. 93 al. 1 LTF. La décision ordonnant la mise en détention provisoire du prévenu étant susceptible de lui causer un préjudice irréparable au sens de l'art. 93 al. 1 let. a LTF, elle peut faire l'objet d'un recours au Tribunal fédéral. Selon l'art. 81 al. 1 let. a et let. b ch. 1 LTF, l'accusé a qualité pour agir. Pour le surplus, le recours est formé en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) contre une décision rendue en dernière instance cantonale (art. 80 LTF) et les conclusions présentées sont recevables au regard de l'art. 107 al. 2 LTF.
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2. Une mesure de détention préventive n'est compatible avec la liberté personnelle garantie aux art. 10 al. 2 Cst. et 5 CEDH que si elle repose sur une base légale (art. 31 al. 1 et art. 36 al. 1 Cst.), soit en l'espèce l'art. 221 CPP. Elle doit en outre correspondre à un intérêt public et respecter le principe de la proportionnalité (art. 36 al. 2 et 3 Cst.). Pour que tel soit le cas, la privation de liberté doit être justifiée par les besoins de l'instruction, par un risque de fuite ou par un danger de collusion ou de réitération (art. 221 al. 1 let. a, b et c CPP). Préalablement à ces conditions, il doit exister des charges suffisantes, soit de sérieux soupçons de culpabilité, à l'égard de l'intéressé (art. 221 al. 1 CPP; art. 5 par. 1 let. c CEDH), c'est-à-dire des raisons plausibles de le soupçonner d'avoir commis une infraction.
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3. Le recourant reconnaît la "matérialité" des faits qui lui sont reprochés et ne conteste pas l'existence de charges suffisantes à son encontre concernant les faits pour lesquels il a été mis en prévention le 26 juillet 2013. Il reproche cependant à la cour cantonale de s'être référée à d'autres charges émanant de la procédure allemande "lesquelles n'ont pas fait l'objet d'une quelconque mise en prévention", lors de l'examen des conditions de l'art. 221 CPP.
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Ce grief peut être d'emblée rejeté, dans la mesure où le courriel du 27 novembre 2013 du procureur allemand informant de l'état de l'enquête en Allemagne et précisant l'existence de soupçons à l'encontre du recourant peut être pris en compte pour justifier l'existence d'indices sérieux de culpabilité au sens de l'art. 221 al. 1 CPP. Peu importe que l'intéressé n'ait pas été formellement "mis en prévention" pour ces faits. A ce stade de la procédure, il n'y a pas de raison de ne pas tenir compte de cette pièce qui figure au dossier. Cela est d'autant plus vrai que la procédure allemande en question est en voie de délégation aux autorités genevoises.
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4. Le recourant conteste aussi l'existence d'un risque de fuite et de collusion. Si de tels risques devaient toutefois être retenus, il requiert la mise en oeuvre de mesures de substitution au sens de l'art. 237 CPP, telles que le versement d'une caution de 120'000 francs et le dépôt de ses papiers d'identité.
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4.1. Selon la jurisprudence, le risque de fuite au sens de l'art. 221 al. 1 let. a CPP doit s'analyser en fonction d'un ensemble de critères tels que le caractère de l'intéressé, sa moralité, ses ressources, ses liens avec l'Etat qui le poursuit ainsi que ses contacts à l'étranger, qui font apparaître le risque de fuite non seulement possible, mais également probable (ATF 117 Ia 69 consid. 4a p. 70 et la jurisprudence citée). La gravité de l'infraction ne peut pas, à elle seule, justifier la prolongation de la détention, même si elle permet souvent de présumer un danger de fuite en raison de l'importance de la peine dont le prévenu est menacé (ATF 125 I 60 consid. 3a p. 62; 117 Ia 69 consid. 4a p. 70).
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En l'occurrence, le recourant ne conteste pas avoir organisé sa vie dans le canton de Genève de telle façon que cela laisse à penser qu'il dissimule sa présence physique (il n'habitait pas à l'adresse à laquelle il s'était annoncé à l'Office cantonal de la population; il était hébergé par un ami sans que son propre nom figure sur la boîte à lettre de celui-ci; cet ami avait mis à sa disposition un compte bancaire pour le versement du salaire payé par B.________, alors que l'enquête a montré qu'il disposait de comptes dans des établissements bancaires suisses). La cour cantonale a aussi retenu que son incapacité de travail en août 2013 n'avait pas empêché l'intéressé de séjourner en Argentine où réside son amie, ressortissante de ce pays; il s'était d'ailleurs soustrait à la reconstitution de l'agression qu'il aurait subie en Allemagne de façon quasi concomitante à son voyage en Argentine; c'était également de façon quasi concomitante que le recourant avait retiré 16'000 francs en liquide à fin mai 2013, montant sur lequel il n'a pas voulu s'expliquer, étant observé que son voyage en Argentine a été payé par le débit de la carte de crédit de son logeur. En outre, le prévenu a laissé entendre qu'il pourrait s'établir auprès de son amie en Argentine. Enfin, le renouvellement anticipé de son passeport en juillet 2013 paraît aussi s'inscrire dans les prémisses d'un éloignement de longue durée à l'étranger, ce d'autant plus que son relevé de poursuite pour dettes à Genève dépasse 160'000 francs.
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L'ensemble de ces éléments, que le recourant ne dément d'ailleurs pas, apparaît suffisant pour retenir un risque concret de fuite. L'arrêt attaqué ne prête pas le flanc à la critique sur ce point. Le prévenu se contente d'affirmer que dès sa sortie de prison il serait logé à Genève, disposerait d'un travail dans un garage, serait entouré en particulier de son frère et que la simple délivrance d'un mandat d'arrêt international stopperait rapidement une cavale, ce qui est insuffisant à faire admettre l'invraisemblance du risque de fuite. Le grief doit donc être rejeté.
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4.2. L'affirmation d'un risque de fuite dispense d'examiner s'il existe aussi un danger de collusion, au sens de l'art. 221 al. 1 let. b CPP.
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4.3. Conformément au principe de la proportionnalité (art. 36 al. 3 Cst.), il convient d'examiner les possibilités de mettre en oeuvre d'autres solutions moins dommageables que la détention (règle de la nécessité). Cette exigence est concrétisée par l'art. 237 al. 1 CPP, qui prévoit que le tribunal compétent ordonne une ou plusieurs mesures moins sévères en lieu et place de la détention si ces mesures permettent d'atteindre le même but que la détention. Selon l'art. 237 al. 2 CPP, font notamment partie des mesures de substitution la fourniture de sûreté (let. a) et la saisie des documents d'identité (let. b).
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En l'espèce, les mesures de substitution proposées par le recourant apparaissent, en l'état, insuffisantes au regard de l'intensité du risque de fuite. En effet, le seul dépôt du passeport suisse n'est pas de nature à garantir la présence du recourant aux actes ultérieurs de la procédure. Quant à la caution de 120'000 francs mise à disposition de façon prépondérante par un ami - dont la titularité sur les avoirs offerts et l'identité ne sont pas établies par pièces -, elle ne permet pas, à ce stade de la procédure, d'admettre que la perspective de perdre cette somme d'argent agira comme un frein suffisamment puissant pour écarter toute velléité de fuite, si on la met en balance avec la valeur présumée des pierres précieuses disparues en Allemagne. En l'état, la cour cantonale pouvait prendre en compte ce dernier élément ressortissant de la procédure allemande, même si le recourant n'a pas été formellement mis en prévention pour ce fait, dans la mesure où la délégation de procédure est en cours.
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4.4. Enfin, en détention provisoire depuis moins de six mois au moment de l'arrêt attaqué, le recourant ne se plaint pas - à bon droit - d'une violation du principe de la proportionnalité (art. 212 al. 3 CPP).
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5. Il s'ensuit que le recours doit être rejeté.
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Le recourant a demandé l'assistance judiciaire et les conditions en paraissent réunies (art. 64 al. 1 LTF). Il y a lieu de désigner Me Nicola Meier en qualité d'avocat d'office et de fixer ses honoraires, qui seront supportés par la caisse du Tribunal fédéral (art. 64 al. 2 LTF). Le recourant est en outre dispensé des frais judiciaires (art. 64 al. 1 LTF).
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Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: | |
1. Le recours est rejeté.
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2. La demande d'assistance judiciaire est admise. Me Nicola Meier est désigné comme avocat d'office du recourant et ses honoraires, supportés par la caisse du Tribunal fédéral, sont fixés à 1'500 francs.
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3. Il n'est pas perçu de frais judiciaires.
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4. Le présent arrêt est communiqué au mandataire du recourant, au Ministère public et à la Cour de justice du canton de Genève, Chambre pénale de recours.
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Lausanne, le 4 mars 2014
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Au nom de la Ire Cour de droit public
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du Tribunal fédéral suisse
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Le Juge présidant: Merkli
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La Greffière: Tornay Schaller
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