BGer 1B_109/2015 | |||
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BGer 1B_109/2015 vom 03.06.2015 | |
{T 0/2}
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1B_109/2015
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Arrêt du 3 juin 2015 |
Ire Cour de droit public | |
Composition
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MM. les Juges fédéraux Fonjallaz, Président,
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Eusebio et Chaix.
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Greffier : M. Kurz.
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Participants à la procédure | |
A.________,
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B.________,
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représentés par Maîtres Robert Assael et Alain Macaluso, avocats,
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recourants,
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contre
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Ministère public de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy.
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Objet
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procédure pénale, refus de perquisitions et de séquestres,
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recours contre l'arrêt de la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre pénale de recours, du 25 février 2015.
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Faits : | |
A. Le 30 août 2013, A.________ et B.________ ont déposé plainte pénale contre C.________, compagne de leur père D.________ décédé le 3 mars 2013. Ils lui reprochaient d'avoir emporté des documents et des objets de valeur appartenant à la succession se trouvant dans la propriété de Vandoeuvres (notamment deux tableaux de maîtres) et en d'autres lieux. Elle aurait tenté de leur extorquer la signature de plusieurs documents et, en qualité d'exécuteur testamentaire, se serait rendue coupable de gestion déloyale. Une instruction pénale a été ouverte à Genève et des perquisitions ont été effectuées, notamment dans la propriété de Vandoeuvres, mais les deux tableaux (dont un Picasso) n'ont pas été retrouvés. Entendue le 1 er novembre 2013, C.________ a déclaré que ceux-ci lui avaient été attribués par le défunt.
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Le 3 avril 2014, les plaignants ont demandé que des perquisitions et des saisies soient effectuées à l'étranger (à Monaco, Menton et Roquebrune-Cap-Martin) au domicile ou dans les locaux de C.________, de sa secrétaire et d'une employée du couple. Cette demande a été réitérée le 8 mai puis le 19 septembre 2014, étant précisé que l'intéressée était titulaire de coffres dans des banques à Monaco et/ou à Nice. Les auditions opérées par la suite ont confirmé que des objets avaient été emportés après le décès de D.________. Par décision du 29 octobre 2014, le Ministère public a refusé de procéder aux perquisitions et saisies requises. Ces mesures n'étaient pas susceptibles de confirmer le droit de propriété revendiqué par les plaignants et, par conséquent, les éléments constitutifs des infractions reprochées.
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B. Par arrêt du 25 février 2015, la Chambre pénale de recours de la Cour de justice du canton de Genève a confirmé cette décision. Les mesures requises étaient de nature essentiellement probatoire et les recourants n'indiquaient pas en quoi leur requête ne pourrait être réitérée devant le juge du fond. Il existait toutefois un risque de disparition de preuves et celles-ci portaient sur des faits pertinents de sorte que le recours était recevable au regard de l'art. 394 let. b CPP. Sur le fond, rien ne permettait de penser que les objets emportés se trouveraient aux endroits désignés par les recourants; les perquisitions requises ne permettraient pas d'élucider la seule question pertinente, soit les droits de propriété sur les objets. Une perquisition avait été ordonnée par voie de commission rogatoire à Menton chez la secrétaire de la prévenue, sur la base d'indices crédibles; il y avait lieu d'attendre le retour de cette commission rogatoire avant d'entreprendre des recherches hasardeuses en d'autres endroits.
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C. Par acte du 30 mars 2015, A.________ et B.________ forment un recours en matière pénale. Ils demandent au Tribunal fédéral d'annuler l'arrêt cantonal et d'enjoindre au Ministère public de faire procéder aux perquisitions et séquestres requis, subsidiairement de renvoyer la cause à la Chambre pénale de recours pour nouvelle décision dans le sens des considérants. A titre de mesures superprovisionnelles, ils demandent que C.________ ne soit pas informée de la procédure de recours et que son droit de consulter le dossier soit limité jusqu'à droit jugé, respectivement jusqu'à ce que les actes requis aient été exécutés. Cette requête a été partiellement admise par ordonnance du 1er avril 2015.
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La cour cantonale n'a pas présenté d'observations. Le Ministère public conclut au rejet du recours. Les recourants ont répliqué, contestant la recevabilité des éléments nouveaux avancés par le Ministère public et persistant dans leurs motifs et conclusions.
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Considérant en droit : | |
1. Le Tribunal fédéral examine d'office sa compétence (art. 29 al. 1 LTF) et contrôle librement les conditions de recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 140 IV 57 consid. 2 p. 59).
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1.1. La décision attaquée a été rendue dans une cause pénale par une juridiction cantonale statuant en dernière instance (art. 80 al. 1 LTF). Le recours en matière pénale au sens de l'art. 78 al. 1 LTF est donc en principe ouvert. Le recours a été formé en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) et les conclusions présentées au fond sont en soi recevables (art. 107 al. 2 LTF).
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1.2. La décision par laquelle le Ministère public rejette une réquisition d'actes d'instruction formulée par les recourants constitue une décision incidente. Il en va de même de l'arrêt attaqué qui en partage la nature (cf. arrêts 1B_189/2012 du 17 août 2012). Le recours en matière pénale n'est donc recevable qu'aux conditions de l'art. 93 al. 1 LTF, soit si la décision attaquée peut causer un préjudice irréparable (art. 93 al. 1 let. a LTF) ou si l'admission du recours peut conduire immédiatement à une décision finale qui permet d'éviter une procédure probatoire longue et coûteuse (art. 93 al. 1 let. b LTF). Cette dernière hypothèse n'entre pas en considération en l'espèce. Quant à l'art. 93 al. 1 let. a LTF, il suppose, en matière pénale, que le recourant soit exposé à un dommage de nature juridique, qui ne puisse pas être réparé ultérieurement par un jugement final ou une autre décision qui lui serait favorable (ATF 137 IV 172 consid. 2.1 p. 173). En vertu de l'art. 42 al. 1 LTF, il incombe aux recourants d'alléguer les faits qu'ils considèrent comme propres à fonder sa qualité pour recourir (ATF 141 IV 1 consid. 1.1; 138 IV 86 consid. 3 p. 88 et les arrêts cités) et ceux permettant de démontrer l'existence d'un préjudice irréparable lorsque celui-ci n'est pas d'emblée évident (ATF 138 III 46 consid. 1.2 p. 47 et les arrêts cités).
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1.3. Les recourants relèvent que les mesures requises doivent être propres à retrouver les documents et objets (notamment un tableau de Picasso) qui auraient été emportés par la prévenue avec l'aide de sa secrétaire et de l'employée du couple. Les documents pourraient permettre de démontrer que le défunt était propriétaire notamment des oeuvres d'art. Il y aurait un risque que la prévenue ne déplace ou détruise les documents susceptibles de servir de moyens de preuve, ce d'autant qu'elle serait inévitablement avertie de la mesure si celle-ci était requise devant le juge du fond.
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Comme le relève la cour cantonale, la question qui doit être résolue préalablement est celle du droit de propriété sur les objets emportés, question qui fait apparemment l'objet d'une procédure civile. Le Ministère public a privilégié, s'agissant des dossiers, une perquisition au domicile de la secrétaire de la prévenue, à Menton, car il disposait d'indices concrets sur ce point. Il est dès lors possible, en fonction du résultat de ces investigations, que de nouvelles perquisitions soient ensuite ordonnées au cours de l'instruction. Il n'est dès lors pas établi que le refus du Ministère public soit définitif, ni que les recourants soient exposés à un préjudice irréparable. La question peut néanmoins demeurer indécise, car le recours doit de toute manière être rejeté sur le fond.
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1.4. Selon l'art. 99 al. 1 LTF, les faits nouveaux ou les preuves nouvelles sont irrecevables. Dès lors, il n'y a pas lieu de tenir compte des pièces produites par le Ministère public, dans la mesure où elles ne figuraient pas au dossier lors du prononcé attaqué.
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2. Les recourants se plaignent d'une violation des dispositions du droit fédéral relatives aux perquisitions et au séquestre (art. 197, 244 et 263 CPP, art. 70 et 73 CP), ainsi que d'une constatation et une appréciation arbitraires des faits. Les séquestres requis n'étaient pas seulement probatoires, mais aussi conservatoires puisqu'ils devraient permettre une éventuelle restitution aux lésés. Les témoignages recueillis lors de l'instruction mettraient en évidence que des objets ont été emportés par la prévenue et l'employée du couple et pourraient donc être conservés par celles-ci. Les perquisitions devraient être ordonnées sans attendre que soit tranchée la question du droit de propriété et simultanément aux autres actes d'instruction, dès lors que le risque de disparition de preuves augmenterait avec le temps.
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2.1. Une mesure de perquisition et de séquestre, qui restreint notamment le droit de propriété, n'est compatible avec la Constitution que si elle repose sur une base légale, est justifiée par un intérêt public suffisant et respecte le principe de la proportionnalité (art. 26 al. 1 Cst. en relation avec l'art. 36 al. 1 à 3 Cst.; cf. ATF 126 I 219 consid. 2a p. 221, 2c p. 221/222). Le principe de la proportionnalité exige qu'une mesure restrictive soit apte à produire les résultats escomptés et que ceux-ci ne puissent être atteints par une mesure moins incisive; en outre, il interdit toute limitation allant au-delà du but visé et il exige un rapport raisonnable entre celui-ci et les intérêts publics ou privés compromis (ATF 124 I 40 consid. 3e p. 44/45; 118 Ia 394 consid. 2b p. 397 et les arrêts cités).
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Le séquestre pénal est une mesure conservatoire provisoire destinée à préserver les objets ou valeurs qui peuvent servir de moyens de preuve, que le juge du fond pourrait être amené à confisquer ou à restituer au lésé, ou qui pourraient servir à l'exécution d'une créance compensatrice (art. 263 al. 1 CPP). Elle est proportionnée lorsqu'elle porte sur des avoirs dont on peut admettre en particulier qu'ils pourront être vraisemblablement confisqués ou restitués en application du droit pénal. Tant que l'instruction n'est pas achevée, une simple probabilité suffit car, à l'instar de toute mesure provisionnelle, la saisie se rapporte à des prétentions encore incertaines.
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2.2. Comme le relève la cour cantonale, les soupçons, jugés suffisants pour justifier une perquisition dans les locaux de la secrétaire de la prévenue, le sont a priori également pour agir en d'autres lieux. Toutefois alors que des témoignages viennent accréditer la thèse de la présence d'objets dans les locaux de la première citée, rien ne permet de supposer que les objets emportés par la prévenue se trouvent dans ses propres locaux ou ceux de l'employée du couple. Comme le relève l'arrêt cantonal, la propriété des objets emportés - dont on ne possède pas de liste précise - est actuellement indécise. Elle a été soumise aux juridictions civiles qui n'ont pas encore statué, la prévenue ayant notamment produit des attestations censées démontrer son droit de propriété. Devant ces incertitudes de fait et de droit, on ne saurait reprocher au Ministère public d'avoir renoncé en l'état à des perquisitions à l'étranger dont le résultat apparaît à tout le moins hasardeux. Les recourants ne contestent pas que la question déterminante du droit de propriété sur les biens peut être résolue sans recours aux perquisitions requises. Le refus d'y procéder ne viole dès lors pas le droit fédéral.
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3. Sur le vu de ce qui précède, le recours doit être rejeté, dans la mesure où il est recevable. conformément à l'art. 66 al. 1 LTF, les frais judiciaires sont mis à la charge des recourants. Il n'est pas alloué de dépens.
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Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce : | |
1. Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.
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2. Les frais judiciaires, arrêtés à 3'000 fr., sont mis à la charge des recourants.
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3. Le présent arrêt est communiqué aux mandataires des recourants, au Ministère public et à la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre pénale de recours.
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Lausanne, le 3 juin 2015
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Au nom de la Ire Cour de droit public
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du Tribunal fédéral suisse
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Le Président : Fonjallaz
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Le Greffier : Kurz
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