BGer 6B_170/2018 | |||
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BGer 6B_170/2018 vom 06.07.2018 |
6B_170/2018 |
Arrêt du 6 juillet 2018 |
Cour de droit pénal | |
Composition
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MM. et Mme les Juges fédéraux Denys, Président,
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Jacquemoud-Rossari et Rüedi.
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Greffière : Mme Paquier-Boinay.
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Participants à la procédure | |
X.________,
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recourant,
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contre
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1. Ministère public de la République et canton du Jura,
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2. A.________,
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représentée par Me Vincent Willemin, avocat,
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intimés.
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Objet
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Contrainte sexuelle, viol; arbitraire, présomption d'innocence,
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recours contre le jugement de la Cour pénale du Tribunal cantonal du canton du Jura du 8 novembre 2017 (CP 7 / 2017).
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Faits : | |
A. Par jugement du 17 novembre 2016, le Tribunal pénal du Tribunal de première instance du canton du Jura a déclaré X.________ coupable de contrainte sexuelle et de viol et l'a condamné à une peine privative de liberté ferme de 3 ans.
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B. Statuant le 8 novembre 2017, la Cour pénale du Tribunal cantonal jurassien a confirmé le jugement de première instance.
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Les faits à l'origine de cette condamnation sont en substance les suivants.
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Le 24 décembre 2013, A.________ s'est rendue, vers 17 h, à la gare de B.________ avec une amie car cette dernière devait prendre le train pour rentrer chez elle, à C.________. Elles y ont trouvé les frères D.D.________ et E.D.________ ainsi que X.________. A.________ ne les avait jamais rencontrés mais son amie les connaissait et ils les ont invitées à boire un verre, proposition qu'elles ont acceptée après que son amie l'eut rassurée en lui disant qu'elles n'avaient rien à craindre. Ils ont bu quelque chose à la gare avant de poursuivre la soirée dans un bar en ville. Les trois hommes ont beaucoup bu; A.________ n'a consommé qu'une bière. Au cours de la soirée, son amie a reçu plusieurs appels de sa mère lui demandant de rentrer. Vers 23h30, alors qu'il n'y avait plus de train, les hommes ont proposé de les ramener chez elles. A.________ a dans un premier temps refusé, disant qu'elle appellerait son père, mais son amie l'a convaincue d'accepter en lui disant qu'elle était déjà rentrée avec eux et qu'ils étaient gentils. En sortant du bar, ils ont fumé un joint et ont forcé A.________ à en prendre quelques bouffées. Ils ont d'abord reconduit son amie puisqu'elle s'était fait réprimander par ses parents. Arrivée chez elle, celle-ci a proposé à A.________ de rester chez elle et d'appeler son père pour qu'il vienne la chercher. Elle a toutefois refusé cette proposition parce que son père, qui était sous médicaments, devait déjà dormir et n'aurait pas pu venir avant un certain temps; elle ne pouvait par ailleurs pas rester dormir chez son amie, dont la mère était fâchée par leur rentrée tardive.
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Sur le trajet du retour, l'attitude des hommes a changé. D.D.________, qui était assis avec elle à l'arrière de la voiture, a commencé à lui toucher la poitrine puis le vagin par dessous ses habits. Lorsqu'elle résistait, il s'énervait et levait la main dans un geste qui signifiait, selon elle, qu'il voulait la frapper. Par peur, elle n'a pas réagi. Après l'avoir touchée pendant 5 minutes environ, il a baissé son pantalon, lui a pris la tête et l'a forcée à lui faire une fellation. Lorsqu'elle résistait, il lui tirait les cheveux; elle a eu peur de se faire frapper ou même tuer. D.D.________ a ensuite retiré son pantalon et a cherché à la pénétrer, mais elle l'a repoussé, réussissant à lui dire qu'elle ne voulait pas. D.D.________ l'a finalement poussée contre la fenêtre de la voiture et a dit aux deux autres de le ramener chez lui, ce qu'ils ont fait. Les deux frères D.________ sont sortis de la voiture et il y a eu une discussion en albanais, à l'issue de laquelle les hommes ont dit en français qu'ils allaient trouver un endroit tranquille.
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E.D.________ et X.________ se sont dirigés vers une cabane située au lieu-dit F.________, sur les hauteurs de B.________. Pétrifiée par la peur, A.________ a eu une attaque de panique. Ils sont alors retournés en ville et lui ont acheté une bouteille d'eau au distributeur d'une station-service. Ils sont ensuite remontés vers la cabane. Alors que A.________ était toujours bloquée à l'arrière de la voiture à trois portes, E.D.________ est venu vers elle; il a commencé à l'embrasser et à lui toucher la poitrine ainsi que le sexe par dessus ses vêtements. X.________, qui était devant, s'est retourné et a essayé de lui enlever son pantalon; alors que celui-ci était à mi-hauteur, il lui touchait le sexe pendant que E.D.________ lui touchait la poitrine. Constatant qu'ils n'avaient pas assez de place, ils l'ont tirée pour la faire sortir de la voiture. Comprenant qu'elle n'était pas en mesure de résister, elle s'est laissée faire. Ils l'ont alors couchée sur un banc et l'ont totalement déshabillée. X.________ l'a pénétrée en premier alors que E.D.________ venait s'asseoir sur elle pour qu'elle lui fasse une fellation; il lui tenait la tête relevée en lui tirant les cheveux. Ils ont ensuite échangé leurs places. Elle a dit qu'elle avait très mal à la nuque et au vagin et qu'elle n'en pouvait plus. E.D.________ s'est alors couché et l'a assise sur lui; X.________ a tenté de la pénétrer dans l'anus. Souffrant d'une maladie des intestins, elle l'a informé que s'il le faisait elle finirait à l'hôpital. Il a renoncé mais est resté derrière en lui touchant les seins. Dès qu'elle résistait, ils s'énervaient méchamment. Ils se sont montrés très brutaux, la mordant dans le cou ainsi que sur la poitrine et la griffant. N'en pouvant plus, elle s'est mise à pleurer et leur a demandé d'arrêter, ce à quoi E.D.________ a répondu " nous on n'a pas fini, on s'est pas encore vidés ". Ils ont continué encore quelques minutes avant d'arrêter en constatant qu'elle pleurait vraiment. Ils l'ont finalement ramenée chez elle vers 2h.
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C. X.________ forme un recours en matière pénale au Tribunal fédéral contre le jugement de la Cour pénale. Il conclut, avec suite de frais, à l'annulation du jugement attaqué et à son acquittement, subsidiairement au renvoi de la cause à la cour cantonale pour qu'elle le libère de toutes les préventions retenues à son encontre. Il sollicite par ailleurs l'assistance judiciaire.
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Considérant en droit : | |
1. Le recourant invoque le principe " in dubio pro reo " ainsi que l'interdiction de l'arbitraire. Il ne nie pas avoir eu un rapport sexuel avec la plaignante mais soutient que celle-ci était consentante.
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1.1. Le Tribunal fédéral n'est pas une autorité d'appel, auprès de laquelle les faits pourraient être rediscutés librement. Il est lié par les constatations de fait de la décision entreprise (art. 105 al. 1 LTF), à moins qu'elles n'aient été établies en violation du droit ou de manière manifestement inexacte au sens des art. 97 al. 1 et 105 al. 2 LTF, à savoir, pour l'essentiel, de façon arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. Une décision n'est pas arbitraire du seul fait qu'elle apparaît discutable ou même critiquable; il faut qu'elle soit manifestement insoutenable et cela non seulement dans sa motivation mais aussi dans son résultat (ATF 143 IV 500 consid. 1.1 p. 503 et l'arrêt cité). En matière d'appréciation des preuves et d'établissement des faits, il n'y a arbitraire que lorsque l'autorité ne prend pas en compte, sans aucune raison sérieuse, un élément de preuve propre à modifier la décision, lorsqu'elle se trompe manifestement sur son sens et sa portée, ou encore lorsque, en se fondant sur les éléments recueillis, elle en tire des conclusions insoutenables (ATF 143 IV 500 consid. 1.1 p. 503 et les références citées).
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La présomption d'innocence, garantie par les art. 10 CPP, 32 al. 1 Cst., 14 par. 2 Pacte ONU II et 6 par. 2 CEDH, ainsi que son corollaire, le principe " in dubio pro reo ", concernent tant le fardeau de la preuve que l'appréciation des preuves (ATF 127 I 38 consid. 2a p. 40 s.). Lorsque, comme en l'espèce, l'appréciation des preuves et la constatation des faits sont critiquées en référence au principe " in dubio pro reo ", celui-ci n'a pas de portée plus large que l'interdiction de l'arbitraire (ATF 143 IV 500 consid. 1.1 p. 503 et les références citées).
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Le Tribunal fédéral n'examine la violation de droits fondamentaux que si ce moyen est invoqué et motivé par le recourant (art. 106 al. 2 LTF), c'est-à-dire s'il a été expressément soulevé et exposé de manière claire et détaillée. Les critiques de nature appellatoire sont irrecevables (ATF 142 III 364 consid. 2.4 p. 368).
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1.2. La cour cantonale a exposé de manière précise et convaincante les motifs pour lesquels elle a accordé foi à la version des faits donnée par la victime.
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Elle a notamment indiqué que la jeune fille s'était confiée à plusieurs personnes dans les heures et les jours suivant les faits et qu'elle a immédiatement parlé de viol (jugement attaqué, p. 23 ch. 4.3). La cour a aussi relevé que le temps qu'elle a mis pour se confier à sa mère puis pour porter plainte s'explique aisément par la honte ressentie d'une part et par la crainte que lui inspiraient ses agresseurs d'autre part. Par ailleurs, la victime a fait un récit cohérent, a fourni de nombreux détails et les éléments qui étaient vérifiables ont été confirmés par des témoins. Enfin, la cour cantonale a noté que la jeune fille avait relaté les faits le plus objectivement possible, sans chercher à se victimiser davantage ni à charger excessivement les prévenus, admettant s'être laissée faire et avoir fait semblant d'aimer de peur d'être frappée.
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L'argumentation du recourant consiste pour l'essentiel à chercher à substituer sa propre version des faits à celle retenue par la cour cantonale sans toutefois montrer en quoi celle-ci serait insoutenable. Il se prévaut pour l'essentiel de l'attitude de la victime au cours de la soirée et du fait qu'elle a accepté de rentrer avec les trois prévenus. Selon lui, le fait qu'elle ait à un moment donné été dans les bras de D.D.________ constitue à n'en pas douter un élément permettant de soutenir qu'elle était disposée à entretenir des rapports intimes ce jour-là. Non seulement le recourant se fonde sur l'attitude de la victime envers une autre personne, mais de plus il part de la prémisse que le fait d'avoir passé une partie d'une soirée dans les bras d'un garçon implique l'accord d'entretenir à l'issue de celle-ci des relations sexuelles avec lui et deux de ses amis. Son argumentation est non seulement totalement déplacée et téméraire mais également dénuée de pertinence pour déterminer si la relation entretenue avec lui était librement consentie. Elle est en outre de nature largement appellatoire et, enfin, impropre à remettre en question l'appréciation des preuves à laquelle a procédé la cour cantonale.
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2. Mal fondé, le recours doit être rejeté dans la mesure où il est recevable. Comme les conclusions étaient dépourvues de chances de succès, l'assistance judiciaire ne peut être accordée (art. 64 al. 1 LTF). Le recourant, qui succombe, supportera les frais (art. 66 al. 1 LTF), dont le montant sera toutefois fixé en tenant compte de sa situation financière qui n'apparaît pas favorable.
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Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce : | |
1. Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.
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2. La demande d'assistance judiciaire est rejetée.
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3. Les frais judiciaires, arrêtés à 1'200 fr., sont mis à la charge du recourant.
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4. Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour pénale du Tribunal cantonal jurassien.
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Lausanne, le 6 juillet 2018
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Au nom de la Cour de droit pénal
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du Tribunal fédéral suisse
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Le Président : Denys
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La Greffière : Paquier-Boinay
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