BGE 118 III 60
 
18. Extrait de l'arrêt de la IIe Cour civile du 18 février 1992 dans la cause G. SA contre Emirat de D. et D.B. Ltd (recours de droit public)
 
Regeste
Art. 89 Abs. 1 OG; Art. 271 ff. SchKG; staatsrechtliche Beschwerde gegen einen Arrestbefehl.
 


BGE 118 III 60 (60):

Extrait des considérants:
La recourante prétend avoir agi avec diligence en s'adressant à l'office des poursuites pour lui demander communication des ordonnances et en formulant sa revendication dès qu'elle a appris l'existence de la mesure. Se référant à l' ATF 109 III 120, elle soutient dès lors que le délai de recours n'a couru que du 4 novembre 1991, jour auquel elle a effectivement reçu communication des ordonnances.
a) L'autorité de séquestre ne remet l'ordonnance qu'à l'office (art. 274 al. 1 LP), qui notifie au créancier et au débiteur une copie du procès-verbal de séquestre dressé au pied de l'ordonnance

BGE 118 III 60 (61):

(art. 276 LP). Le tiers qui se prétend propriétaire des biens séquestrés ne reçoit pas communication de l'ordonnance, du moins autant qu'il ne détient pas ces biens. S'il entend se plaindre que le séquestre porte atteinte à ses droits constitutionnels, le délai pour former un recours de droit public ne peut courir que du moment où il a eu effectivement connaissance de la mesure (ATF ATF 114 III 119, ATF 109 III 123). A cet effet, s'il apprend l'existence du séquestre, il lui appartient de s'adresser sans retard à l'office chargé de l'exécution pour obtenir communication de l'ordonnance (ATF 114 III 119).
Il n'en va toutefois pas de même lorsque le tiers est le détenteur des biens mis sous main de justice ou lorsqu'il est inscrit au registre foncier comme propriétaire desdits biens. L'office doit alors aviser ce tiers du séquestre, soit pour lui permettre d'exercer sa revendication (art. 109 LP), soit, si le bien séquestré est un immeuble, pour appliquer les art. 10 ORI et 9 des Instructions du 7 octobre 1920 concernant la réalisation forcée des immeubles. Le tiers est donc avisé du séquestre par l'office immédiatement et sans requête de sa part. Dans ces conditions, l'on ne saurait l'inviter à demander à l'office la communication de l'ordonnance de séquestre (ATF 114 III 119 /120).
b) En l'espèce, les procès-verbaux de séquestre No 91'903'411 M et No 91'903'412 L dressés par l'office des poursuites indiquent que les tiers, dont la recourante, ont été "avisés par télécopieur" le 25 juin 1991 - à savoir le jour même de la reddition et de l'exécution des ordonnances critiquées - des séquestres exécutés en leurs mains. Dans une correspondance adressée dès le 26, à savoir le lendemain déjà, à l'avocat des intimés, le conseil de la recourante se réfère aux "séquestres Nos 91'903'411 M et 91'903'412 L", pour en dénoncer le caractère abusif. Or, on ne voit pas comment ces numéros pourraient être connus sans la communication des procès-verbaux de séquestre, auxquels sont jointes les ordonnances (art. 276 al. 1 LP: "dressé ... au pied de l'ordonnance"). Bien plus, la lettre montre que son auteur connaît même les requêtes successives des intimés, ainsi que leurs motivations différentes. Deux autres correspondances des 27 et 28 juin suivants - toujours du conseil de la recourante - mentionnent également les séquestres litigieux.
Le 4 juillet 1991, G. SA a en outre déposé plainte devant l'Autorité de surveillance en matière de poursuites de Genève, en concluant à l'annulation des séquestres rendus contre les frères G. dans la mesure où ils visaient des biens qui manifestement n'appartenaient pas aux débiteurs. Dans ce cas également, la recourante ne pouvait porter plainte sans avoir connaissance du séquestre, d'autant que le délai

BGE 118 III 60 (62):

de plainte contre l'exécution du séquestre court dès la notification du procès-verbal de séquestre, joint à l'ordonnance (FAVRE, Droit des poursuites, 3e éd., p. 366 ch. 5).
Se référant toujours aux "séquestres Nos 91'903'411 M et 91'903'412 L", le conseil de la recourante a certes requis le 12 juillet 1991 l'office des poursuites de lui notifier les "ordonnances de séquestre contre MM. Abdul Rahim et Abdul Latif G.", ce qui fut fait le 4 novembre 1991. Cette démarche paraît assurément singulière, dès lors qu'une plainte contre l'exécution des séquestres avait été déposée quelques jours auparavant. Elle s'explique en revanche si la requête a été faite au nom des débiteurs séquestrés, dont le conseil de la recourante est également mandataire.
En conclusion, il apparaît que la recourante connaissait les ordonnances attaquées bien avant le 4 novembre 1991. Son recours est dès lors tardif et, partant, irrecevable.