BGE 121 V 109
 
18. Extrait de l'arrêt du 22 mai 1995 dans la cause F. contre Assura caisse maladie et accidents et Tribunal des assurances du canton de Vaud
 
Regeste
Art. 6 Ziff. 1 EMRK: Zivilrechtlicher Anspruch. Nach jüngster Rechtsprechung des Europäischen Gerichtshofes für Menschenrechte ist Art. 6 Ziff. 1 EMRK bei Beitragsstreitigkeiten im Sozialversicherungsbereich anwendbar.
 
Sachverhalt
A.- F. est assuré contre la maladie auprès de la Caisse maladie et accident Assura. Celle-ci lui a fait notifier, par l'intermédiaire de l'Office des poursuites de X, des commandements de payer pour des cotisations arriérées, avec intérêts, pour les sommes suivantes (frais non compris):
- 685 fr. 80 (poursuite no 483507)
- 1'352 fr. (poursuite no 483508)
- 685 fr. 80 (poursuite no 483510)
- 1'496 fr. (poursuite no 483509)
Le 31 mai 1994, le débiteur a formé opposition à ces commandements de payer. Par décisions du 24 juin 1994, la caisse a levé les oppositions et déclaré l'assuré débiteur des montants précités.
B.- Par jugement du 11 octobre 1994, le Tribunal des assurances du canton de Vaud a rejeté le recours formé contre ces décisions par F.
C.- F. interjette un recours de droit administratif en concluant à l'annulation du jugement cantonal et au "maintien" de ses oppositions aux commandements de payer notifiés par l'Office des poursuites de X.
La Caisse maladie et accident Assura conclut au rejet du recours.
 
Extrait des considérants:
a) Selon la jurisprudence fédérale actuelle, l'art. 6 par. 1 CEDH est applicable aux litiges concernant tous les régimes fédéraux d'assurances sociales en Suisse, en matière de prestations (ATF 120 V 6 consid. 3a, ATF 119 V 379 consid. 4a/aa). Ces litiges portent en effet sur des droits et obligations de caractère civil selon la notion large qu'adopte la Cour européenne des droits de l'homme (ACEDH Schuler-Zgraggen, du 7 avril 1992, Série A, vol. 263).
Une jurisprudence plus récente de cette même Cour a étendu l'applicabilité de l'art. 6 par. 1 CEDH aux contestations portant sur des cotisations prévues par les régimes de sécurité sociale en général (ACEDH Schouten et Meldrum, du 9 décembre 1994, Série A, vol. 304). La question de l'application de cette disposition conventionnelle aux litiges en matière de cotisations aux assurances sociales fédérales a été jusqu'à présent laissée indécise par le Tribunal fédéral des assurances (ATF 120 V 6 consid. 3a, ATF 119 V 379 consid. 4 a/aa; arrêt M. du 15 mars 1994 publié dans la SZS 1994 p. 370). Sur le vu des derniers développements de la jurisprudence européenne, cette question doit aujourd'hui être résolue par l'affirmative (dans ce sens également: VILLIGER, Probleme der Anwendung von Art. 6 Abs. 1 EMRK auf verwaltungs- und sozialgerichtliche Verfahren, PJA 2/95, p. 165; MEYER-BLASER, Der Einfluss der Europäischen Menschenrechtskonvention [EMRK] auf das schweizerische Sozialversicherungsrecht, RDS 113 [1994] I, p. 405; FRÉSARD, L'applicabilité de l'art. 6 par. 1 CEDH au contentieux de l'assurance sociale et ses conséquences sous l'angle du principe de la publicité des débats, RSA 62 [1994], p. 193). Le grief tiré d'une violation de l'art. 6 par. 1 CEDH - dont la portée, en tant qu'elle garantit l'indépendance et l'impartialité du tribunal, se recouvre avec celle de l'art. 58 Cst. (ATF 119 V 377 consid. 4a, ATF 119 Ia 83 consid. 3, 117 Ia 191 consid. 6b) - peut donc être examiné dans le cadre du présent litige, portant sur des cotisations d'assurance-maladie.
b) Pour autant, il n'y a pas de motif de remettre en cause la jurisprudence exposée ci-dessus, au consid. 2, cela en dépit des critiques que lui adresse une partie de la doctrine et que le recourant fait siennes (REYMOND, Mainlevée et continuation de la poursuite, RSJ 1982, pp. 306 ss, ainsi que la note de GILLIÉRON, in JT 1985 II 95; ADLER, La mainlevée de l'opposition par une caisse-maladie dans une poursuite pour dettes, Droit privé et assurances sociales, Fribourg 1990, p. 241 ss). Les garanties offertes par les art. 58 al. 1 Cst. et 6 par. 1 CEDH ne sauraient être invoquées à l'encontre d'une caisse-maladie. Celle-ci agit en qualité d'institution habilitée par la loi (art. 30 al. 4 LAMA), au même titre qu'un organe administratif, à rendre à l'égard des assurés des décisions susceptibles de passer en force (ATF 117 V 58 consid. 3a et ATF 115 III 95). Elle ne peut donc pas être assimilée à un tribunal (ATF 119 V 377 consid. 4a, ATF 119 Ia 83 consid. 3 et les références).
c) L'art. 6 par. 1 CEDH exige certes que l'accès à un tribunal, au sens de cette disposition, soit garanti en cas de décision sur le fond et de levée simultanée de l'opposition par la caisse-maladie (à propos de cette garantie en général, voir ATF 118 Ia 478 consid. 5a; ACEDH Jacobsson du 28 juin 1990, série A, vol. 180-A). Mais cet accès est sauvegardé, en l'occurrence, par la possibilité pour le débiteur de saisir le tribunal cantonal des assurances compétent (art. 30 LAMA), s'il entend contester la décision de la caisse. Un tel tribunal offre toutes les garanties d'indépendance et d'impartialité requises par les art. 58 al. 1 Cst. et 6 par. 1 CEDH. Il jouit en outre d'un plein pouvoir d'examen, comme l'exige d'ailleurs cette norme conventionnelle à propos du droit d'accès à un tribunal (cf. VILLIGER, Handbuch der Europäischen Menschenrechtskonvention [EMRK], notes 423 ss; ACEDH Belilos, du 29 avril 1988, série A, vol. 132).
Le moyen doit être écarté.