BGE 98 II 265 | |||
| |||
Bearbeitung, zuletzt am 15.03.2020, durch: DFR-Server (automatisch) | |||
38. Arrêt de la IIe Cour civile du 14 décembre 1972 dans la cause Mokry contre Baruzzo. | |
Regeste |
Art. 314 Abs. 2 ZGB. |
Beweiswert der anthropobiometrischen Expertise. |
Die Anwendung einer Methode des wissenschaftlichen Abstammungsbeweises ist nur zulässig und darf vom Richter nur vorgeschrieben werden, wenn diese Methode von den Spezialisten des in Frage stehenden Faches als zuverlässig anerkannt wird. |
Massgebend ist dabei die allgemeine Auffassung der Fachleute. |
Die anthropobiometrische Expertise erfüllt diese Bedingungen nicht. |
Eine solche Expertise vermag daher die Vermutung des Art. 314 Abs. 1 ZGB nicht zu entkräften. | |
Sachverhalt | |
Mirka Baruzzo et son enfant naturel Serge Daniel, né le 13 juillet 1966, tous deux de nationalité italienne et domiciliés à Lausanne, ont intenté, le 20 septembre 1966, une action en paternité tendant à des prestations pécuniaires à Eric Mokry, de nationalité autrichienne, domicilié à Bussigny. Par jugement du 2 mars 1972, le Tribunal du district de Lausanne a admis l'action. Il a condamné le défendeur à payer d'une part à l'enfant une pension alimentaire mensuelle d'un montant échelonné de 200 à 250 francs, d'autre part à la mère une indemnité de 2000 francs.
| 1 |
Eric Mokry a formé recours contre ce jugement auprès du Tribunal cantonal vaudois. Le recours a été rejeté par arrêt du 31 mai 1972.
| 2 |
Le défendeur a recouru en réforme au Tribunal fédéral contre cet arrêt, concluant au rejet de l'action.
| 3 |
Selon l'arrêt du Tribunal cantonal, il est constant que Mirka Baruzzo et Eric Mokry ont entretenu une liaison pendant toute l'année 1965. Le défendeur ne conteste pas avoir entretenu des relations intimes avec la demanderesse pendant la période critique. Il n'est pas établi que, pendant cette même période, la demanderesse ait entretenu des relations intimes avec un tiers ou qu'elle ait vécu dans l'inconduite.
| 4 |
Les demandeurs bénéficient ainsi de la présomption de l'art. 314 al. 1 CC. Il a été procédé à une expertise des sangs, qui n'a pas exclu la paternité du défendeur. Une expertise anthropobiométrique effectuée par le Prof. Baumann a exclu la paternité du défendeur avec une probabilité confinant à la certitude (99, 776%). Une expertise anthropo-hérédobiologique (AEG), exécutée par le Prof. Sieg, a en revanche conclu à la paternité du défendeur avec une probabilité confinant à la certitude.
| 5 |
Appréciant l'ensemble de ces expertises, le Tribunal cantonal a estimé que le défendeur avait échoué dans la preuve, qui lui incombait, qu'il n'était pas le père de l'enfant.
| 6 |
Dans son recours, le défendeur procède à une étude critique des deux expertises; l'expertise du Prof. Sieg est, à ses yeux, "extrêmement suspecte" et entachée d'un esprit polémique; elle aurait donc dû être écartée. A tout le moins devrait-on, selon le recourant, admettre que l'expertise du Prof. Baumann constitue un doute sérieux au sens de l'art. 314 al. 2 CC, venant renverser la présomption de l'art. 314 al. 1 CC attachée à la cohabitation pendant la période critique.
| 7 |
Les intimés ont conclu au rejet du recours.
| 8 |
Considérant en droit: | |
Cette jurisprudence condamne l'argument du recourant selon lequel l'expertise Baumann créerait un doute sérieux quant à sa paternité. Un tel doute est insuffisant pour renverser la présomption de l'art. 314 al. 1. Pour que cette présomption soit renversée, il faut que soit établi avec une vraisemblance confinant à la certitude que le défendeur n'est pas le père de l'enfant.
| 9 |
L'appréciation in concreto de la valeur probante des expertises produites ressortit au fait. Elle ne peut être revue dans le cadre d'un recours en réforme.
| 10 |
Aucun des moyens invoqués dans l'acte de recours ne peut donc être retenu. Il reste à examiner si la valeur, appréciée in abstracto, des deux expertises anthropologiques contradictoires ne doit pas être revue, la décision attaquée étant essentiellement fondée sur une appréciation abstraite de la valeur des méthodes employées et non sur une discussion de la valeur probante des expertises appréciées concrètement. Ceci résulte implicitement du fait que la conclusion négative à laquelle aboutit le Tribunal cantonal, quant à la preuve de la non-paternité du défendeur, est basée essentiellement sur le caractère contradictoire des deux expertises anthropologiques.
| 11 |
Ainsi, lorsque le juge du fait a admis, en se fondant sur une expertise, que le degré de vraisemblance requis est atteint, la juridiction fédérale de réforme peut et doit examiner si cette appréciation est soutenable au vu des bases sur lesquelles elle repose ou si elle méconnaît la notion de vraisemblance confinant à la certitude (RO 86 II 320 et les précédents cités; 88 II 494). Le Tribunal fédéral a été amené de ce fait à proclamer le droit des parties à requérir l'administration de certaines preuves, en particulier des preuves scientifiques, à déterminer certaines modalités de ce droit, à apprécier le degré de probabilité qui doit en résulter pour qu'elles puissent constituer une preuve complète et à déterminer abstraitement la valeur respective de certaines d'entre elles.
| 12 |
Il a admis successivement l'existence d'une "vraisemblance confinant à la certitude" lorsque la paternité est exclue sur la base des groupes sanguins ABO (RO 61 II 72), des facteurs MN (RO 65 II 127), des facteurs Rhésus (RO 79 II 17, 80 II 13, 87 II 12), du facteur Kell (RO 86 II 129), du facteur S (RO 87 II 281), du facteur Duffya (RO 88 II 494), des gammaglobulines (RO 89 II 357). Il a posé comme règle que lorsque l'expertise des sangs exclut de façon certaine la paternité, le recours à une expertise anthropo-hérédobiologique est exclu (RO 91 II 159). Il a ensuite précisé à quel degré de vraisemblance doit aboutir l'expertise séro-statistique pour que la preuve anthropo-hérédobiologique puisse être refusée (RO 96 II 314; 97 II 193). Enfin, il a posé que l'expertise anthropo-hérédobiologique ne peut être exigée que si les autres preuves et notamment l'examen séro-statistique n'ont conduit à aucun résultat concluant (RO 97 II 297).
| 13 |
Une hiérarchie entre certaines preuves scientifiques, soit l'expertise des sangs et les preuves anthropologiques, est ainsi instaurée d'après la force probatoire qui leur est reconnue in abstracto.
| 14 |
"L'ensemble des expertises", au sens de l'arrêt, ne peut concerner que les deux expertises anthropologiques, l'examen des sangs n'ayant donné aucun résultat. Il est vrai que l'examen statistique des sangs, qui, d'après la jurisprudence (RO 97 II 297), fait partie de l'expertise du sang, fait défaut dans la présente espèce. Il aurait convenu que la cour cantonale y procédât. Toutefois, le recourant ne s'en prévaut pas. Il n'est pas nécessaire de renvoyer d'office l'affaire au Tribunal cantonal pour compléter l'instruction sur ce point, car il est improbable, vu le résultat de l'expertise des sangs, que l'examen statistique exclue la paternité du défendeur. Le Tribunal fédéral serait donc de toute façon amené à apprécier la valeur probante des deux expertises anthropologiques.
| 15 |
Le recours à l'expertise anthropo-hérédobiologique est imposé, sous certaines réserves, d'une façon générale par la jurisprudence du Tribunal fédéral. La méthode anthropobiométrique (Keiter/Baumann), en revanche, si elle est acceptée par certaines cours cantonales romandes, n'a jamais été expressément admise par le Tribunal fédéral, qui n'a pas eu l'occasion de se prononcer jusqu'ici sur sa valeur probante. C'est donc sur la valeur probante de l'expertise anthropobiométrique qu'il convient de se prononcer, dès l'instant où elle se trouve en contradiction avec la méthode anthropo-hérédobiologique, admise par le Tribunal fédéral.
| 16 |
A la connaissance de la Cour, cette méthode n'est appliquée en Suisse que par les Prof. Baumann à Genève et Thélin à Lausanne. Selon HEGNAUER, n. 183 ad art. 314, elle recevrait quelque application en Allemagne. Elle est cependant rejetée par la grande majorité des spécialistes (HEGNAUER, ibid., qui cite BAITSCH, in Ponsold, Lehrbuch, p. 566; SIEG, RSJ 1970, p. 214). SCHADE (Beitzke/Hosemann/Dahr/Schade, Vaterschaftsgutachten für die gerichtliche Praxis, 2e éd., Göttingen 1965, p. 170), se référant à l'autorité de trois spécialistes, rejette le principe même, en l'état actuel de la science, d'une expression mathématique de constatations reposant sur une appréciation. Le Tribunal civil de Bâle-Ville, se fondant sur l'opinion d'un expert, a refusé d'ordonner une telle expertise (BJM 1969, p. 279).
| 17 |
Il ressort également des publications précitées du Prof. Keiter que sa méthode se heurtait à une résistance générale des anthropologues. Keiter la défendait, invoquant principalement la difficulté qu'il y a pour l'expert à se faire une opinion claire sur la base d'un très grand nombre de constatations. Il estimait que seule la traduction en valeurs mathématiques des constatations permet leur exploitation rigoureuse. Sa méthode constituerait en ce sens une amélioration de l'expertise anthropobiologique traditionnelle, évitant en particulier la déperdition de la valeur informative de certaines constations (cf. notamment NJW 1967, p. 1500/1501). Néanmoins, en raison même du scepticisme dont elle était l'objet, Keiter ne l'appliquait pas isolément dans les expertises qu'il faisait pour les tribunaux. Il ajoutait, à une expertise anthropobiologique exécutée selon la méthode traditionnelle, un rapport complémentaire anthropobiométrique. Il estimait ainsi sauvegarder les avantages de l'une et l'autre méthodes, et considérait, semble-t-il, le concours comme justifié en soi.
| 18 |
La méthode en cause ne remplit manifestement pas ces conditions. Généralement contestée par les spécialistes de l'hérédoanthropologie, elle ne présente pas pour les tribunaux des garanties suffisantes. Partant, l'arrêt déféré doit être confirmé, le recourant n'ayant pas établi à satisfaction de droit qu'il ne saurait être le père de l'enfant demandeur.
| 19 |
Par ces motifs, le Tribunal fédéral:
| 20 |
21 | |
© 1994-2020 Das Fallrecht (DFR). |