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Bearbeitung, zuletzt am 15.03.2020, durch: Sabiha Akagündüz, A. Tschentscher | |||
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28. Extrait de l'arrêt de la IIe Cour de droit public dans la cause Balmelli contre Commission de recours de l'Université de Fribourg ainsi que Tribunal administratif du canton de Fribourg (recours de droit administratif) |
2A.279/2004 du 14 mars 2005 | |
Regeste |
Art. 8 Abs. 3 BV, Art. 4 Abs. 2 aBV, Art. 3 und 5 Abs. 2 GlG; Gleichberechtigung der Geschlechter; Verbot der Diskriminierung beim Einstellen von Arbeitskräften; Frauenquoten betreffend den Zugang zu universitären Lehrämtern; Legalität und Verhältnismässigkeit einer solchen Massnahme. |
Bedeutung des Verhältnismässigkeitsgrundsatzes und der Unterscheidung zwischen starren und flexiblen Quoten bei der Beurteilung der Verfassungsmässigkeit einer Quotenregelung (Zusammenfassung der bisherigen Rechtsprechung; E. 5). Durch den Bund in seinem Förderungsprogramm für den akademischen Nachwuchs vorgesehene starre Frauenquote: es ist fraglich, ob diese Massnahme verhältnismässig ist (E. 6); sie beruht jedenfalls nicht auf einer genügenden gesetzlichen Grundlage (E. 7). | |
Sachverhalt | |
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"Dans le cadre des mesures fédérales en faveur de l'encouragement de la relève universitaire, la Faculté de droit de l'Université met au concours un poste de professeure associée ou de maître-assistante en droit public (droit européen et droit international public).
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(...) En raison des critères fixés par le programme de relève universitaire, seules les candidatures féminines peuvent entrer en ligne de compte pour l'occupation de ce poste."
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Le 1er novembre 2001, Tiziano Balmelli s'est porté candidat pour le poste mis au concours. Son dossier n'a pas été pris en considération par la commission chargée d'évaluer les candidatures, car le poste était réservé à une femme. Sur les trois autres candidatures, toutes féminines, reçues par l'Université, deux n'étaient pas conformes aux exigences requises pour le poste (les postulantes n'étaient pas titulaires d'un doctorat en droit), si bien que la commission d'évaluation n'a finalement présenté qu'un seul dossier de candidature au Conseil de Faculté. A 15 voix pour, 11 voix contre et une ![]() | 4 |
Entre-temps, Tiziano Balmelli s'est inquiété du sort de sa candidature dont il était "officiellement sans nouvelles". Le Doyen de la Faculté lui a fait savoir (lettre du 4 janvier 2002) que son dossier n'avait pas été retenu, car le poste mis au concours était réservé aux candidatures féminines du fait des critères fixés par le programme fédéral d'encouragement de la relève universitaire (ci-après également cité: le programme ou le programme de relève).
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Tiziano Balmelli a porté l'affaire devant la Commission de recours de l'Université de Fribourg (ci-après: la Commission). Il a demandé à cette autorité de constater que les motifs donnés par le Décanat pour écarter sa candidature consacraient une discrimination illicite à raison du sexe et de lui octroyer une indemnité d'un franc symbolique à titre de réparation.
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Par décision du 20 mars 2002, le Président de la Commission a déclaré irrecevable le recours dont il était saisi, au motif, notamment, que la lettre précitée du Doyen du 4 janvier 2002 n'avait pas le caractère d'une décision attaquable.
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Tiziano Balmelli a recouru contre cette décision au Tribunal administratif du canton de Fribourg (ci-après: le Tribunal administratif). Pour l'essentiel, il s'est plaint de déni de justice et a soutenu que la procédure suivie par l'Université pour l'engagement des nouveaux professeurs équivalait à l'instauration d'un système de quotas féminins fixes contraire aux principes constitutionnels de la légalité, de l'égalité et de la proportionnalité, ainsi qu'à la loi fédérale du 24 mars 1995 sur l'égalité entre femmes et hommes (Loi sur l'égalité, LEg; RS 151.1).
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Le Conseil d'Etat a conclu au rejet du recours, après avoir expliqué que l'engagement d'une femme au poste litigieux s'imposait pour maintenir la part des femmes dans les postes de relève attribués à l'Université au-dessus du seuil de 40 % prévu dans le programme; à défaut, la Confédération n'accorderait pas les aides financières correspondantes.
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Par arrêt du 31 mars 2004, le Tribunal administratif a rejeté le recours dans la mesure où il était recevable. En bref, les juges ont ![]() | 10 |
Tiziano Balmelli interjette recours de droit administratif contre l'arrêt précité du Tribunal administratif dont il requiert implicitement l'annulation, en concluant derechef au versement d'une indemnité d'un franc symbolique pour la discrimination subie.
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Le Tribunal administratif et la Commission renoncent à formuler des observations sur le recours, tandis que le Bureau fédéral de l'égalité entre femmes et hommes (ci-après: le Bureau de l'égalité) conclut à son rejet au terme d'une détermination circonstanciée.
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A la demande du juge délégué, l'Université de Fribourg a fait parvenir au Tribunal fédéral les documents que la Conférence universitaire suisse (ci-après également citée: CUS) lui avait remis dans le cadre du programme de relève universitaire dont, en particulier, une lettre du 20 septembre 2000.
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Extrait des considérants: | |
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La loi sur l'égalité n'est pas seulement une loi-cadre ou une loi limitée aux principes que le législateur cantonal devrait encore concrétiser; elle pose au contraire des règles et des principes directement déductibles en justice. Aussi bien, même lorsqu'elles concernent des rapports de travail soumis au droit public cantonal, les décisions de dernière instance cantonale (cf. art. 13 al. 1 LEg en relation avec l'art. 98 let. g OJ) prises en application de la loi sur ![]() | 16 |
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Par la présente procédure, le recourant cherche essentiellement à faire constater que la décision par laquelle l'Université a écarté sans même l'examiner sa candidature constitue une discrimination à raison du sexe prohibée par la loi sur l'égalité (sur l'admissibilité d'une telle action constatatoire, cf. infra consid. 4). Comme l'Université a justifié sa décision par le système de quotas féminins prévu dans le programme fédéral de relève universitaire, le recours revient, en fin de compte, à remettre en cause, sinon le système de quotas lui-même, du moins la manière dont il a été appliqué au cas particulier. Se disant encore intéressé par la perspective d'entamer une carrière académique, le recourant souligne que, le concernant, l'utilité du recours tient surtout dans la possibilité de pouvoir mettre fin au système qu'il dénonce afin, le cas échéant, d'augmenter ses chances d'être engagé lors d'une éventuelle future postulation pour une place dans l'enseignement universitaire.
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Dans la mesure où le programme de relève a été abandonné quelques mois après le prononcé de l'arrêt attaqué, à fin septembre 2004 (cf. infra consid. 6.2 in fine), on peut certes se demander si le recours n'est pas devenu sans objet, faute d'intérêt pratique actuel pour le recourant à faire constater l'invalidité d'un système qui n'a plus cours. La forte sous-représentation des femmes dans l'enseignement universitaire est toutefois toujours d'actualité, tout comme les moyens d'y remédier qui font l'objet de constantes ![]() | 19 |
Par conséquent, Tiziano Balmelli, qui est directement touché par la décision attaquée, a la qualité pour recourir au sens de l'art. 103 let. a OJ.
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En revanche, lorsque le recours est dirigé, comme en l'occurrence, contre la décision d'une autorité judiciaire, le Tribunal fédéral est lié par les faits constatés dans la décision, sauf s'ils sont manifestement inexacts ou incomplets ou s'ils ont été établis au mépris de règles essentielles de procédure (art. 104 let. b et 105 al. 2 OJ; ![]() | 23 |
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Aux termes de l'art. 5 al. 1 LEg, quiconque subit ou risque de subir une discrimination au sens des art. 3 et 4 LEg peut requérir du tribunal compétent d'interdire la discrimination ou d'y renoncer si elle est imminente (let. a), de la faire cesser si elle persiste (let. b), d'en constater l'existence si le trouble qu'elle a créé subsiste (let. c), ou d'ordonner le paiement du salaire dû (let. d). Lorsque la discrimination porte sur un refus d'embauche, la personne lésée ne peut prétendre qu'au versement d'une indemnité par l'employeur. Celle-ci est fixée compte tenu de toutes les circonstances et calculée sur la base du salaire auquel la personne discriminée aurait vraisemblablement eu droit (art. 5 al. 2 LEg). Elle n'excédera pas le montant correspondant à trois mois de salaire. Lorsque plusieurs personnes prétendent au versement d'une indemnité pour refus d'embauche à un même poste, la somme totale des indemnités versées n'excédera pas non plus ce montant (art. 5 al. 4 LEg). Sont réservés les droits en dommages-intérêts et en réparation du tort moral, de même que les prétentions découlant de dispositions contractuelles plus favorables aux travailleurs (art. 5 al. 5 Leg).
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Erwägung 4 | |
4.1 Après avoir relevé que la Commission de recours aurait dû transmettre l'affaire aux "autorités d'engagement du corps professoral", le Tribunal administratif a néanmoins admis sa compétence pour des motifs d'économie de procédure (il connaissait la position des autorités en question) et afin de tenir compte du "flou juridique" qui régnait à l'époque des faits. Il a cependant déclaré irrecevable le recours dont il était saisi, au motif que, selon la volonté ![]() | 26 |
Le recourant considère que les premiers juges ont appliqué et interprété de manière arbitraire et "excessivement formaliste" la loi sur l'égalité et commis un déni de justice formel au sens des art. 29 Cst. et 6 CEDH.
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4.4 Il ressort des travaux préparatoires et, en particulier, du Message du 24 février 1993 concernant la loi fédérale sur l'égalité entre femmes et hommes (FF 1993 I 1163) que l'indemnité de l'art. 5 al. 2 LEg n'est pas subordonnée à la condition que le candidat à l'emploi discriminé ait subi un dommage ou que l'employeur ait ![]() | 30 |
4.5 Lors des débats aux Chambres fédérales, le principe d'une indemnité en cas de discrimination à l'embauche a été fortement contesté. En première lecture, le Conseil national l'a même carrément refusé, en estimant que la lutte contre les discriminations devait se limiter aux situations dans lesquelles les parties étaient déjà liées par un contrat de travail; il fallait en effet éviter d'imposer aux employeurs, lors du recrutement de nouveaux collaborateurs, des contraintes dont l'efficacité n'était pas démontrée ou, du moins, n'était pas en rapport avec l'importance des possibles désagréments (tracasseries administratives, limitation de la liberté de choix des employeurs, risque de procès onéreux, ...) (cf. BO 1994 CN p. 257 ss, Ducret). En dépit de ces critiques, le Conseil des Etats a néanmoins estimé nécessaire d'interdire les discriminations à l'embauche, sous peine de vider la loi d'une bonne partie de son efficacité. En réponse aux craintes exprimées par le Conseil national, il a notamment souligné que l'interdiction de la discrimination à l'embauche n'enlevait rien à la liberté contractuelle des employeurs, en ce sens qu'un juge ne pouvait en aucun cas ordonner ou imposer l'engagement d'un employé contre la volonté d'un employeur. En revanche, contrairement au projet du Conseil fédéral, le Conseil des Etats a jugé que pareille interdiction ne devait pas s'appliquer aux offres d'emploi et qu'il fallait limiter à six mois de salaire le montant maximal de l'indemnité due par l'employeur en cas de discrimination à l'embauche, y compris lorsque plusieurs personnes faisaient valoir simultanément leurs droits dans le cadre d'une même procédure d'embauche (cf. BO 1994 CE p. 817 ss, 823). En seconde lecture, le Conseil national s'est finalement rallié, non sans hésitation, à cette proposition, après avoir cependant ![]() | 31 |
Par rapport au projet qui leur était soumis, les Chambres fédérales ont donc réduit à double titre l'importance de l'indemnité due en cas de discrimination à l'embauche: d'une part, en plafonnant son montant à trois mois de salaire (contre six mois dans le projet du Conseil fédéral) et, d'autre part, en prévoyant que ce plafond vaut également en cas de pluralité de demandes d'indemnisation. Indépendamment de ses conclusions, une victime peut ainsi, selon les circonstances, n'être indemnisée que d'un montant relativement faible, notamment en cas de pluralité de demandes d'indemnisation et/ou lorsque le poste mis au concours porte sur une activité peu rémunérée (par exemple une place de stage); sur ce point, il est d'ailleurs douteux que le système d'indemnisation voulu par le législateur suisse soit compatible avec la jurisprudence communautaire, comme la doctrine n'a pas manqué de le souligner (cf. FRANZ WERRO/MARJOLAINE VIRET, Egalité entre femmes et hommes: la responsabilité civile de l'employeur, in Egalité entre femmes et hommes en Suisse et dans l'UE, Zurich 2004, p. 89 ss, 113-115; BIGLER-EGGENBERGER, op. cit., n. 31 ad art. 5 LEg et n. 17 ss ad art. 8 LEg; PATRICIA SCHULZ, Die Anstellung, insbesondere Schutz vor Diskriminierung, in Das Bundesgesetz über die Gleichstellung von Frau und Mann, Saint-Gall 1996, p. 45 ss, 52/53; LUZIUS MADER, Das Gleichstellungsgesetz - Entstehung, Ziele und Instrumente, in Das Bundesgesetz über die Gleichstellung von Frau und Mann, Saint-Gall 1996, p. 9 ss, 29).
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Cela étant, les discussions aux Chambres fédérales ont clairement mis en évidence que le législateur était davantage animé par le volonté de fixer un plafond au montant de l'indemnité en cas de discrimination à l'embauche que par le souci de lui assurer une certaine importance comme gage d'efficacité. Il ressort également de ces débats que c'est principalement en vue d'éviter qu'une victime ne puisse demander d'être engagée par la voie judiciaire et de préserver ainsi intacte la liberté contractuelle de l'employeur que le législateur a limité au versement d'une indemnité les prétentions du lésé en cas de discrimination à l'embauche (cf. aussi le Message concernant la loi fédérale sur l'égalité entre femmes et ![]() | 33 |
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Conformément à l'art. 1er LEg, les droits des travailleurs énumérés à l'art. 5 LEg visent, d'une manière générale, à promouvoir dans les faits l'égalité entre femmes et hommes. L'indemnité prévue à l'art. 5 al. 2 LEg a plus spécifiquement pour but de prévenir les discriminations entre femmes et hommes à l'embauche, aussi bien par l'effet dissuasif qu'elle est censée exercer sur les employeurs qui seraient tentés de se livrer à des pratiques discriminatoires, que par l'effet éducatif qu'elle doit avoir sur ceux qui useraient de telles pratiques, en les dissuadant de recommencer ( fonction punitive et préventive ). Elle tend également à apporter une certaine forme de compensation aux victimes d'une discrimination à l'embauche ( fonction réparatrice ; cf. supra consid. 4.4). Afin de présenter quelque efficacité, l'indemnité doit donc, en principe, pouvoir aller au-delà d'un montant purement symbolique, suivant le voeu - dont on a cependant vu qu'il avait été mis à mal par le Parlement (supra consid. 4.5) - exprimé par le Conseil fédéral en prenant l'exemple du droit communautaire (cf. Message concernant la la loi fédérale sur l'égalité entre femmes et hommes, op. cit., p. 1214). Pour autant, l'octroi d'une indemnité symbolique dans un cas particulier n'est pas forcément incompatible avec la ratio legis de l'art. 5 al. 2 LEg.
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D'une part, l'effet dissuasif de l'indemnité doit s'apprécier ex ante, c'est-à-dire avant que l'employeur ne se rende responsable d'une pratique discriminatoire: ce qui va dicter ou influencer son comportement, c'est en effet le montant maximal (ou abstrait) de l'indemnité qu'il s'expose à payer en cas d'infraction, étant entendu qu'il ne peut pas connaître par avance et qu'il n'a pas de prise sur le montant effectif (ou concret) qu'il pourrait être tenu de payer en cas de condamnation. L'effet dissuasif de la sanction dépend donc ![]() | 36 |
Quant à la fonction réparatrice de l'indemnité, on peut concéder au recourant que la simple constatation d'une discrimination constitue pour lui une forme de réparation appropriée (cf. ATF 129 V 411 consid. 3.4 p. 421). En effet, bien que le système qu'il dénonce, appliqué à l'échelle de l'ensemble des universités suisses jusqu'au 30 septembre 2004 (cf. infra consid. 6.2 in fine), ait depuis lors été abandonné, d'autres mesures positives destinées à augmenter la part des femmes dans l'enseignement universitaire ont été et doivent encore être prises (cf. SCHULZ, Droit de l'égalité en Suisse, op. cit., p. 125/126; pour des exemples de mesures, cf. infra consid. 6.5 in fine); or, de telles mesures requièrent elles aussi un cadre constitutionnel dont la définition représente davantage d'intérêt et d'utilité pratique pour l'intéressé, qui n'exclut pas une carrière académique, que l'éventuelle compensation financière de quelques milliers de francs à laquelle il pourrait prétendre (cf. supra consid. 1.2). Au demeurant, il serait contraire au bon sens voire choquant de refuser à la victime d'une discrimination à l'embauche l'accès à la justice au motif qu'elle ne réclame pas assez d'argent à l'employeur mis en cause.
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Par conséquent, l'interprétation téléologique de la norme en cause incline plutôt à considérer comme admissible la possibilité de limiter les conclusions à une indemnité symbolique, du moins dans des circonstances telles qu'en l'espèce.
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Par conséquent, l'arrêt attaqué se révèle mal fondé dans la mesure où les premiers juges ont déclaré irrecevable le recours dont ils étaient saisis. Comme ils sont néanmoins entrés en matière sur le fond de la cause, il convient d'examiner la pertinence des motifs ayant conduit au rejet du recours.
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Erwägung 5 | |
5.1 Le litige pose le délicat problème de la constitutionnalité des mesures positives qui peuvent être prises en vue d'augmenter la part des femmes dans le domaine de l'enseignement universitaire. ![]() | 42 |
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Ces arrêts confirmaient la distinction établie depuis plusieurs années déjà par la jurisprudence (cf. ATF 116 Ib 270 consid. 7 p. 282 ss) entre, d'une part, l'interdiction de discriminer en raison du sexe ("Diskriminierungsverbot"), conçue comme un droit constitutionnel subjectif à l'égalité juridique et, d'autre part, le mandat donné au législateur de traduire dans les faits le principe d'égalité ("Egalisierungsgebot"), non seulement dans les domaines explicitement énumérés (famille, formation et travail), mais dans tous les domaines de l'existence et à tous les échelons de l'Etat, le cas échéant par des mesures positives en faveur des femmes (ATF 123 I 152 consid. 3 p. 155 ss).
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5.3 Dans l'arrêt uranais, le Tribunal fédéral a précisé que, conformément à l'avis de la doctrine majoritaire, les mesures positives pouvant être prises par le législateur en vertu de l'art. 4 al. 2 2e phrase aCst. (art. 8 al. 3 2e phrase Cst.) ne concernent pas seulement celles qui visent à créer les conditions de base nécessaires à l'égalité des chances entre les sexes ("Gleichheit der Startbedingungen"), mais aussi celles qui tendent à obtenir une égalité de résultat ![]() | 45 |
Dans l'examen de la proportionnalité qu'il a été amené à effectuer dans les affaires soleuroises et uranaises, le Tribunal fédéral a pris soin de distinguer les quotas flexibles ou souples, qui donnent la préférence aux femmes à qualifications égales ou équivalentes à celles des hommes, des quotas fixes ou rigides, qui accordent la préférence aux femmes indépendamment de leurs qualifications, en raison du seul critère du sexe (cf. ATF 123 I 152 consid. 4b p. 160 ss). L'initiative populaire mise en cause dans l'arrêt soleurois visait à assurer une représentation des femmes au sein des pouvoirs législatif, exécutif et judiciaire correspondant à leur proportion dans la population; elle établissait donc des quotas rigides qui ont été jugés contraires au principe de la proportionnalité (au ![]() | 46 |
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Erwägung 6 | |
6.1 Dans le cas d'espèce, l'Université a justifié sa décision de ne pas entrer en matière sur l'offre de services du recourant par le système de quotas mis en place par le programme fédéral ![]() | 48 |
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Sous le titre de la promotion de l'égalité des chances entre les femmes et les hommes, l'art. 7 de l'ordonnance réglant la 3e phase du programme prévoit que chaque université doit, en principe, attribuer au moins 40 % des postes relevant du programme à des femmes (al. 1) et que la Conférence universitaire suisse veille à ce que la proportion soit atteinte en tout cas au niveau national (al. 2).
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D'abord initié en 1992 avec l'objectif d'attribuer au moins 33 % des postes de relève à des femmes (RO 1992 p. 1182, 1184), puis reconduit en 1995 avec le même objectif (RO 1995 p. 2610, 4316), le programme a été reconduit une seconde fois en 2000 avec l'objectif d'attribuer 40 % des postes de relève à des femmes (RO 2000 p. 2097); il devait être poursuivi en 2004 avec ce même objectif jusqu'en 2007 (cf. Message relatif à l'encouragement de la formation, de la recherche et de la technologie pendant les années 2004 à 2007, du 29 novembre 2002, in FF 2003 p. 2067, 2205; ![]() | 51 |
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La manière dont les quotas ont été appliqués par la Conférence universitaire suisse et par l'Université équivaut à l'instauration d'un ![]() | 54 |
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Il apparaît également qu'entre 1993 et 2000, environ 20 % des bénéficiaires du programme - ou plutôt des personnes interrogées - ont été nommés à une chaire de professeur en Suisse ou à l'étranger. Les autres bénéficiaires se répartissaient comme suit: un tiers des personnes conservaient des chances de nomination intactes, un autre tiers avaient abandonné la carrière académique, tandis que le dernier tiers continuaient à occuper des postes "de corps intermédiaire à durée déterminée avec des perspectives de carrière peu claires" (rapport précité, p. 37).
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Par ailleurs, les auteurs du rapport d'évaluation ont souligné que le programme "Egalité des chances" leur apparaissait plus "prometteur" que le programme de relève pour augmenter la part des femmes dans l'enseignement universitaire. Or, il ne fait pas de doute que les mesures mises en place dans le cadre de cet autre programme sont beaucoup moins incisives que le système de quotas litigieux, puisqu'elles ne portent qu'une atteinte limitée au principe d'égalité formelle: les structures d'encadrement pour les enfants bénéficient en effet indistinctement aux femmes et aux hommes (module 3), tandis que les actions de mentoring (module 2), bien que réservées aux femmes, ne les avantagent que très indirectement dans la perspective d'accéder à une chaire de professeur; quant aux primes d'incitation (module 1), à supposer que leur efficacité soit démontrée, elles sont en toute hypothèse moins discriminatoires à l'égard des hommes qu'un système de quotas fixes, dans la mesure où, en particulier, elles n'ont pas pour effet de les exclure d'emblée d'un poste mis au concours, sans tenir compte de leurs qualifications et de leurs compétences. La nécessité de la mesure attaquée prête donc à discussion.
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Erwägung 7 | |
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7.2 Le Bureau de l'égalité conteste cette interprétation, en renvoyant à l'opinion de CHRISTA TOBLER (notamment exposée à l' ATF 125 I 21 consid. 3d/bb p. 30/31). Selon cet auteur, un traitement juridique différencié des femmes et des hommes peut également tirer sa justification de la première phrase de l'art. 4 al. 2 aCst. (art. 8 al. 3 première phrase Cst.), non seulement pour les motifs, admis par le Tribunal fédéral, tirés des différences biologiques ou fonctionnelles entre les sexes, mais encore en présence d'autres disparités - par exemple d'ordre structurel - qui ont notamment pour effet de discriminer les femmes dans la vie professionnelle, ![]() | 63 |
Dans l'affaire précitée uranaise, le Tribunal fédéral a déjà précisé que cette argumentation achoppait à la volonté du constituant, selon laquelle le principe d'égalité formelle, ancré à l'art. 4 al. 2 première phrase aCst., ne souffrait pas d'autres exceptions que celles tirées des causes biologiques ou fonctionnelles (cf. ATF 125 I 21 consid. 3d/bb p. 30/31 et les renvois aux travaux préparatoires relatifs à l'art. 4 al. 2 aCst. ainsi qu'à l' ATF 108 Ia 22 consid. 5a p. 29). Or, la nouvelle Constitution fédérale ne remet pas en cause cette conception, comme la jurisprudence a déjà - du moins implicitement - eu l'occasion de le préciser (cf. ATF 126 II 217 consid. 4a p. 219). L'art. 8 al. 3 Cst. reprend en effet pratiquement mot pour mot le texte de l'art. 4 al. 2 aCst., si ce n'est qu'il précise que la loi pourvoit à l'égalité "de droit et de fait". Cette précision apparaît toutefois comme une simple formalisation de la conception dominante qui prévalait déjà au sujet de l'art. 4 al. 2 aCst. dans la jurisprudence et la doctrine (cf. Message du 20 novembre 1996 relatif à une nouvelle Constitution fédérale, tiré à part, p. 144/145; BEATRICE WEBER-DÜRLER, in Droit constitutionnel suisse, Zurich 2001, éd. par Thürer/Aubert/Müller, n. 31 ad § 41; JULIANNE KOKOTT/PATRICIA EGLI, Rechtsfragen zu positiven Massnahmen in Staat und Unternehmen, in PJA 2000 p. 1485 ss, 1487; ETIENNE GRISEL, Egalité, les garanties de la Constitution fédérale du 18 avril 1999, Berne 2000, n. 237), même si elle a donné lieu à des débats nourris et passionnés aux Chambres fédérales (cf. PASCAL ![]() | 64 |
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Le recourant reproche au Tribunal administratif d'avoir méconnu la portée de l'art. 3 al. 3 LEg, en ce sens que le législateur a exclu la possibilité de fonder des mesures positives sur cette disposition.
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Pour sa part, le Bureau de l'égalité soutient qu'en adoptant la loi sur l'aide aux universités, l'Assemblée fédérale a donné son aval au système de quotas litigieux, car le message relatif à cette loi y fait référence de manière explicite. Au demeurant, cet office estime qu'il ne faut pas poser "des exigences démesurées" concernant la base légale pour de telles mesures, limitées dans le temps, qui sont destinées à réaliser l'égalité matérielle entre femmes et hommes.
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7.4 La doctrine s'accorde à reconnaître que les mesures positives nécessitent une base légale formelle lorsqu'elles revêtent une certaine intensité et qu'elles se traduisent par l'octroi d'avantages à un certain groupe de personnes, éventuellement au détriment d'un autre groupe (cf. MARTENET, op. cit., n. 702 et les références citées). D'une manière générale, cette exigence est d'autant plus élevée que les mesures sont contraignantes, qu'elles sont susceptibles d'affecter de manière importante les droits fondamentaux de tiers (cf. KATHARINA SIMONE ARIOLI, Frauenförderungsmassnahmen im Erwerbsleben, thèse Zurich 2002, p. 240/241; YVO HANGARTNER, Geschlechtergleichheit und Frauenquoten in der öffentlichen Verwaltung, in PJA 1992 p. 835 ss, 838; JACQUELINE ZWICKER, ![]() | 68 |
Etant certainement, parmi les différentes mesures positives envisageables, le moyen le plus direct et le plus radical pour établir une égalité de résultat entre les sexes, les quotas, surtout lorsqu'ils sont fixes, suscitent des débats de société souvent passionnés; ils n'ont jusqu'ici pas trouvé grâce en Suisse, les différents textes et initiatives proposant leur introduction dans des domaines aussi variés que la politique, la formation ou l'emploi, ayant tous été rejetés de manière assez nette par les urnes, que ce soit à l'occasion de scrutins fédéraux ou cantonaux (cf. AUER, op. cit., p. 17; REGULA MADER, Die Verfassungsmässigkeit von Quoten in der Politik anhand konkreter Modelle, in Frauenförderung durch Quoten, éd. par Kathrin Arioli, Bâle 1997, p. 279 ss, 290 ss). Certes, en matière d'accès à l'emploi dans le secteur public, des quotas souples ou flexibles peuvent être mis en place par une simple voie réglementaire ou administrative; ils mettent en effet en premier lieu l'accent sur les compétences des candidats et n'écartent pas d'entrée de jeu et de manière automatique les candidatures masculines (dans ce sens, cf. SIMONE ARIOLI et ZWICKER, loc. cit.; ARIOLI/FURRER ISELI, op. cit., n. 134; CLAUDIA KAUFMANN, Das Anreizsystem im Bundesprogramm Chancengleichheit, in Kopfprämien für Professorinnen?, op. cit., p. 31 ss, 39). C'est d'ailleurs cette voie qu'a notamment choisie le Conseil fédéral pour réaliser dans les faits l'égalité des chances et l'égalité de traitement entre les femmes et les hommes au sein du personnel de l'administration fédérale (cf. art. 6 de l'ordonnance du 3 juillet 2001 sur le personnel de la Confédération [OPers; RS 172.220.111.3]; voir aussi les instructions du Conseil fédéral du 22 janvier 2003 pour la réalisation de l'égalité des chances entre femmes et hommes dans l'administration fédérale [FF 2003 p. 1332]). Mais il en va tout autrement lorsque des procédures d'engagement du personnel sont soumises, dans le secteur public, à des quotas fixes ou rigides; vu l'importance de l'atteinte que de telles mesures sont susceptibles de causer aux candidats à ![]() | 69 |
7.5 Comme on l'a vu (supra consid. 3), l'art. 3 al. 3 LEg prévoit que les mesures appropriées visant à promouvoir dans les faits l'égalité entre les femmes et les hommes ne constituent pas une discrimination. Selon le Message concernant la loi fédérale sur l'égalité entre femmes et hommes (op. cit.), cette disposition doit se comprendre comme une réserve; elle ne préjuge pas de la constitutionnalité d'éventuelles mesures adoptées par voie législative, ni ne constitue une base légale permettant d'adopter de telles mesures; elle tend surtout à éviter que les mesures prises par un employeur en vue d'améliorer la représentation des femmes dans son entreprise ne soient qualifiées de discriminatoires (message précité, p. 1212). Lors des débats aux Chambres fédérales, des députés se sont inquiétés de la portée de l'art. 3 al. 3 LEg; ils craignaient en effet que cette disposition ne soit la porte ouverte à une politique des quotas (cf. BO 1994 CN p. 258, Eggli; BO 1994 CE p. 819, Danioth). Le conseiller fédéral en charge du dossier a répondu à cette préoccupation en indiquant que la disposition en cause ne s'appliquait pas aux rapports de travail soumis au droit public, mais visait uniquement à rendre licites des mesures de promotion des femmes décidées par des employeurs privés (BO 1994 CN p. 261, Koller; BO 1994 CE p. 821, Koller). Au vu du champ d'application de la loi sur l'égalité (cf. art. 2 LEg), il est douteux que cette réponse soit exacte (cf. KOKOTT/EGLI, op. cit., p. 1488; KAUFMANN, Das Anreizsystem im Bundesprogramm Chancengleichheit, op. cit., n. 19, p. 37). Peu importe cependant. Les députés ont en effet clairement manifesté que l'art. 3 al. 3 LEg ne devait en aucun cas constituer une base légale pour la mise en oeuvre de mesures positives, telles des règles de quotas fixes (cf. BO 1994 CN p. 259 s., Bär, Nabholz, Comby, Stamm; BO 1994 CE p. 818, Meier). Il s'ensuit que, conformément à la volonté du législateur, de telles mesures requièrent une base légale spécifique (cf. BESSON, op. cit., n. 1702; ZWICKER, op. cit., p. 310; LUZIUS MADER, op. cit., p. 26; FREIVOGEL, op. cit., n. 154 ad art. 3 LEg; KATHRIN ARIOLI, ![]() | 70 |
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Certes, la loi sur l'aide aux universités indique, au titre des objectifs particuliers de la Confédération, que celle-ci encourage des mesures propres à réaliser l'égalité entre femmes et hommes à tous les échelons universitaires (art. 2 al. 1 let. b LAU); un objectif aussi vague ne saurait toutefois constituer une base légale suffisante pour déléguer à l'exécutif ou à une autorité administrative la compétence d'instaurer des quotas fixes. Pour comparaison, le quota de 33 % de femmes appliqué dans le cadre du programme de relève jusqu'en 2000 découlait d'un texte approuvé par l'Assemblée fédérale (cf. art. 3 de l'arrêté fédéral instituant des mesures spéciales visant à encourager la relève universitaire durant les années 1992 à 1995; RO 1992 p. 1182) que certains auteurs ont considéré comme pouvant constituer une base légale suffisante pour des quotas, sans toutefois que l'on sache s'ils étaient pleinement conscients du fait qu'il s'agissait de quotas fixes (cf. ZWICKER, op. cit., p. 312; YVO HANGARTNER, Gleicher Zugang von Männern und Frauen zu öffentlichen Ämtern: Bemerkungen zum Urteil des Gerichtshofs der Europäischen Gemeinschaften im Fall Kalanke, PJA 1995 p. 1554 ss, 1558).
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Quant aux indications concernant le programme de relève contenues dans le Message du Conseil fédéral accompagnant la révision totale de la loi sur l'aide aux université (FF 1999 p. 271, 303), elles ne sauraient non plus pallier l'absence de base légale formelle: d'une part, c'est d'abord le texte de la loi qui fait foi quand il s'agit ![]() | 73 |
7.7 Dans ces conditions, force est d'admettre que, telle que comprise et appliquée, la règle de quotas prévue dans le programme de relève ne repose pas sur une base légale suffisante; elle ne saurait dès lors être admise au titre d'une "mesure appropriée" visant à promouvoir dans les faits l'égalité entre femmes et hommes au sens de l'art. 3 al. 3 LEg. La décision de l'Université de ne pas entrer en matière sur la candidature du recourant doit donc être considérée comme contraire à l'interdiction de discriminer prévue à l'art. 3 al. 1 et 2 LEg.
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